Noukette qui participe au » prix des meilleurs romans des lecteurs de points » a placé celui-ci en très bonne place pour remporter le prix, il n’en fallait pas plus pour éveiller ma curiosité. Comme elle, je trouve beaucoup de qualités à ce roman. Comme je n’ai pas lu les autres, je ne peux pas lui attribuer une place, en revanche, je lui attribue volontiers 4 coquillages. Pourquoi pas 5 ? Car il manque un peu de tensions dans les intrigues et sans m’ennuyer, je laissais parfois mon esprit vagabonder entre les poutrelles de Manhattan. Ce roman raconte la construction et la destruction des tours jumelles et prend pour personnage principal un Indien Mohawk qui fait partie des célèbres Ironworkers, c’est à dire de ceux qui ont construit les buildings de New-York et Chicago
Plusieurs histoires s’entremêlent et permettent de vivre avec ces hommes très courageux de 1886 à 2012 …. Il permet de tordre aussi le cou à une légende tenace : oui les indiens Mohawks sont sujets au vertige comme tout le monde. Ceux pour qui ce malaise était trop fort n’ont pas fait ce travail là , voilà tout. La raison pour laquelle beaucoup d’entre eux l’ont fait, au péril de de leur vie parfois, c’est que dans l’Amérique de cette époque là peu de métiers aussi bien payés s’offraient aux Indiens. En plus, sur un chantier, quand quelqu’un fait bien son travail et est reconnu pour ses qualités, le racisme disparaît pour un temps, surtout si le métier est particulièrement difficile. Le roman débute en septembre 2001, avec la recherche forcenée des rares survivants qui pouvaient être encore sauvés des ruines fumantes des tours jumelles. Peu à peu on comprendra pourquoi il était presque impossible de survivre à cette catastrophe qui coûtera la vie à plus de 2000 personnes. Mais avant cela, pour bien comprendre les relations entre les personnages il faudra remonter dans le temps et comprendre ce qui s’est passé à Quebec en avril 1907. Ce jour là une autre catastrophe , un pont qui s’effondre et tue 76 personnes dont 36 Mohawks, là c’est l’entêtement de l’ingénieur qui n’était pas venu sur place, malgré les craintes des ouvriers qui sera responsable de cette tragédie.
Les Ironworkers sont fiers de leur savoir faire, ils ont participé à tous les grands chantiers de l’Amérique, là où il fallait des ouvriers n’ayant pas peur d’escalader les constructions métalliques quelle que soit leur hauteur. La destruction de ces tours a été ressentie comme une injure faite au travail de leurs ancêtres.
Ce roman est intéressant par sa partie technique et son côté extrêmement bien documenté, mais il est vrai qu’aujourd’hui tous ces documents sont accessibles sur Internet , encore faut-il avoir le talent de les rassembler et de leur donner vie autour de personnages attachants. Pendant quelques jours, j’étais sur les poutrelles des buildings Manhattan ou dans les décombres des tours. J’ai appris à quel point les sauveteurs ont pris des risques pour leur vie et ont respirer des vapeurs très toxiques comme d’ailleurs tous ceux qui étaient près des tours quand elles se sont effondrées. J’aime bien ce sentiment que me procure parfois la lecture de n’être pas complètement avec les gens qui m’entourent mais dans un monde fait de passions, de peurs, de découvertes techniques et de civilisations différentes.
PS lire le très bon billet de Delphine-Olympe ne serait-ce que pour les photos
Citations
Pour mettre fin à une idée reçue
Il n’a ni peur ni vertige, ou du moins le vertige il l’a comme les autre, mais il parvient à le surmonter, à faire semblant d’être à l’aise pour impressionner les copains. C’est ce que ses oncles disaient : respecter sa peur, dialoguer avec elle, peu à peu l’amadouer, apprendre à la connaître pour l’apprivoiser. Serrer les fesses, faire comme s’il était normal de poser un pied devant l’autre sur trente centimètres de métal au dessus du vide. Tous n’y parvenaient pas, loin de là, mais ceux qui le peuvent semblent avoir un don unique.
Un des plaisirs de ce métier
Tu vois fiston, c’est un autre avantage d’être connecteur : sur un chantier, tu es au- dessus des autres, au-dessus du monde, dans les nuages, avec les dieux et les oiseaux.
L’ honneur d’être mort le 11 septembre
Si c’est un morceau d’un corps de civil, on évacue ça dans un sac plastique, comme à la poubelle ! trois minutes et ça repart. Je veux parler à l’enfoiré qui a demandé dans la radio si c’était un sac ou un drapeau. Les civils ont droit au même respect que tout le monde ici . Tous ces gens sont morts en héros, uniformes ou pas.