Éditions Seuil
Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard
Un livre de 85 pages qui se lit comme un grand article de magazine sur la mort du père d’Édouard Louis que j’avais connu grâce à « En finir avec Eddy Bellegueule » . On retrouve dans ce roman la description sans concession de la misère qui a vaincu son père. J’aime beaucoup l’écriture de cet écrivain et il permet de cerner de près le pourquoi de la déchéance physique de cet homme dont il a eu tant peur avant de penser qu’il l’a sans doute aimé. Son fils remonte dans le temps et essaie de retrouver celui dont le principal crédo était de ne pas être une femmelette et le pire de l’injure était d’être un pédé. Tout le long de ce petit texte Édouard Louis se souvient d’un spectacle qu’il avait monté avec ses cousins où lui même jouait le rôle de la chanteuse. De façon obstinée, il cherche à savoir pourquoi son père n’a pas été fier de lui : est ce parce qu’il était déguisé en fille ? Sans doute, mais son père ne lui a rien dit. Cet auteur se souvient aussi du jour ou un de ses frères a essayé de tuer ce père, tout cela parce que lui a dénoncé le fait que sa mère donnait de l’argent à un délinquant qui ne cherche qu’à boire et à se droguer. L’auto-analyse de la mauvaise conscience est bien à l’image de ce que j’ai déjà lu de cet auteur. Dans sa recherche de la cause de la mort de son père les 10 dernières pages (sur 85, je le rappelle !) sont consacrées à tous les responsables politiques qui ont pris des décisions qui ont appauvri son père donc qui lui a rendu la vie plus difficile. J’avoue que ce ne sont pas mes passages préférés. Je trouve que dénoncer des hommes politiques en distribuant les mauvais points comme un maître d’école à l’ancienne, sans dénoncer Ricard, alors que son père est capable d’en boire une bouteille entière certains soirs, ce n’est pas très juste dans la distribution de ceux qui ont tué son père.
Citations
Noël .
Toute la famille est autour de la table. Je mange beaucoup trop, tu as acheté trop de nourriture pour le réveillon. Tu avais toujours cette peur d’être différent des autres à cause du manque d’argent, tu le répétais, Je ne vois pas pourquoi on serait différent des autres à cause du manque d’argent, et pour cette raison, pour ça tu voulais avoir sur la table tout ce que tu imaginais que les autres avaient et mangeaient pour Noël, du foie gras, des huîtres, des bûches, ce qui fait que paradoxalement plus nous étions pauvres elt plus on dépensait d’argent à Noël, par angoisse de ne pas être comme les autres.
École et masculinité .
Pour toi, construire un corps masculin, cela voulait dire résister au système scolaire, ne pas te soumettre aux ordres, à l’Ordre, et même affronter l’école et l’autorité qu’elle incarnait. Au collège, un de mes cousins avait giflé un professeur devant toute sa classe. On parlait toujours de lui comme d’un héros. La masculinité, -« ne pas se comporter comme une fille, ne pas être un pédé »-, ce que ça voulait dire, c’était sortir de l’école le plus vite possible pour prouver sa force aux autres, le plus tôt possible pour montrer son insoumission, et donc, c’est ce que j’en déduis, construire sa masculinité, c’est se priver d’une autre vie, dans un autre futur, dans un autre destin social que les études auraient pu permettre. La masculinité t’a condamné à la pauvreté, à l’absence d’argent.
Jamais lu l’auteur, peut être celui sur sa mère est-il plus intéressant?
Moi je défends « pour en finir avec Eddy Belgueule » car il explique bien les conséquences de la misère.
J’ai adoré « En finir avec Eddy Bellegueule », mais jeté l’éponge après trente pages de « Histoire de la violence », dont j’ai trouvé le style trop caricatural.
Son titre sur sa mère m’attire davantage que celui-là.
Et j’aime bien ta conclusion !
Je lui reconnais de m’avoir fait découvrir une misère intellectuelle que je n’imaginais pas.
J’ai essayé de lire le premier, j’ai détesté, l’écriture, le contenu, je l’ai abandonné très vite… Je n’y reviendrai pas.
Je ne connaissais pas ce milieu et ce fut pour moi une découverte qui m’a marquée
Comme j’ai l’habitude d’attendre avant de lire les livres dont tout le monde parle, j’avais lu En finir avec Eddy Bellegueule après avoir lu Retour à Reims de Didier Eribon, présenté par Édouard Louis comme son ami et son maître. Bilan: j’ai trouvé le récit d’Eribon bien plus convaincant, plus profond. Depuis j’ai lu Combats et métamorphoses d’une femme et Changer: méthode avec les deux fois une sorte de malaise et l’impression de quelqu’un qui, comme on dit, «crache dans la soupe »
Je lirai volontiers les livres dont tu parles , moi je trouve qu’il a su parler de l’homosexualité en milieu défavorisé.
J’avais très envie de le lire ayant beaucoup aimé « en finir avec Eddy Bellegueule », mais ce que tu en dis me refroidi un peu.
Il se lit très vite et mérite d’être lu même si la fin m’a moins plu.
Je ne sais pas si je peux dire que j’ai aimé « Eddy Bellegueule » parce que ce n’est pas un livre aimable, mais je l’ai trouvé très fort et il parle d’un vécu incontestable. C’est une réalité dérangeante mais elle existe. Je n’ai rien lu depuis, pourtant je suis allée à toutes les rencontres organisées avec lui et j’aime beaucoup l’entendre. Il est plus nuancé que dans ses écrits et on ne peut pas douter de sa sincérité en le voyant.
Je suis d’accord avec toi et je serais volontiers aller l’écouter.
J’ai tellement détesté le premier que je ne risque pas de lire celui-ci !
comme je le dis souvent , cet auteur m’a permis de comprendre un monde que je ne connaissais pas.
J’avais plutôt bien aimé « En finir… » mais l’avalanche d’interviews de cette époque m’a laissé une une image peu sympathique de l’auteur qui me freine d’aller plus loin.
Quant à Retour à Reims d’Eribon, je rejoins Brigitte : c’est d’une tout autre pointure.
Alors je vais lire retour à Reims merci
J’avais été très (trop peut-être) remuée par Eddy bellegueule… Et j’ai encore un autre titre de l’auteur dans ma PAL audio.
Alors ce petit livre, aussi court soit il, je ne pense pas le lire !
Je partage ton ressenti sur le premier livre de cet auteur.