Je n’ai pas de mots assez forts pour te dire merci Dominique.
J’ai adoré ce livre, c’est drôle, insolent, rempli de trouvailles qui m’ont enchantée. J’avais lu dans les commentaires d’une de tes lectrices que Michel Volkovitch était beaucoup plus intéressant. Encore une fois, la comparaison m’exaspère : ce sont deux auteurs totalement différents réunis par l’amour des langues, je comprends qu’on les associe, mais pas qu’on cherche à les évaluer l’un par rapport à l’autre. Cependant, je n’en veux pas trop à l’auteure de ce commentaire puisqu’elle m’a permis de découvrir Michel Volkovitch.
Il est rare qu’un livre me fasse éclater de rire mais j’ai pouffé plusieurs fois. J’espère que comme moi, vous serez sensible aux charmes et au dangers de la langue Najavo :
En navajo qui n’a jamais chipé un seul verbe à aucune langue étrangère, le refus de principe de l’emprunt aboutit à des résultats certes décoratifs, mais discutables du point de vue de l’efficacité communicationnelle : ainsi « tank » se dit chidinaa’na’ibee’eldoohtsohbikàà’dahnaazniligii, littéralement « voiture qui glisse sur le sol avec de gros fusils dessus. Il est probable que dans la pratique, les Navajos recourent à l’anglais pour le genre de conversations où l’on a à mentionner un tank – c’est une bête question de sélection naturelle : le temps de s’écrier « gare le tank arrive » , l’obstiné navajophone est déjà réduit à l’état de crêpe Suzette, dans l’indifférence de ses compagnons d’armes plongés dans leur dictionnaire.
J’ai retrouvé en le lisant l’ambiance iconoclaste des séminaires de linguistique générale de mon université. Enfin, quelqu’un qui explique le plaisir de la langue, bien loin des stériles discussions sur ce qu’il faut dire ou ne pas dire, qui font tellement plaisir au tout petit monde des gens « comme il faut », qui pensent qu’être bon en grammaire française c’est savoir dire « déjeuner » ou « dîner » et non pas le si vulgaire « manger ». Tout à coup le monde entier est là dans toutes sa diversité, on ne peut plus se hausser du col avec notre si belle langue française, si difficile à apprendre que le monde entier nous envie. D’ailleurs, allez-y, essayez donc de gagner la chaussette mise en jeu au concours de la langue la plus difficile à prononcer :
Voici comment on dit « J’ai vu un animal de ce type » en kalam, une langue papoue de Nouvelle-Guinée orientale : Knm nb ngnk. Toute personne capable de prononcer cette phrase gagnera une chaussette d’archiduchesse séchée sur une souche sèche.
Il existe donc, des langues tellement plus redoutables à apprendre que le français, à commencer par le basque si proche et si loin de nous, l’esprit humain est également réparti dans le monde entier, divers et si riche que j’en suis restée baba.
De l’esprit, Jean-Pierre Minaudier n’en manque pas mais je ne crois pas que cela me conduise à lire toutes les belles grammaires dont il nous a parlé. Et il est vrai que pour ceux qui ne se posent aucune question sur la langue, ce livre aura quelques passages difficiles, au milieu de moments vraiment joyeux accessibles pour tout le monde grammairien ou non.
Citations
Règlement de compte du linguiste amoureux des langues existantes
Je trouve l’espéranto hideux et grotesque avec son look de patois latin dégénéré, une langue prétendument mondiale moins parlée que le lituanien ou le danois après plus d’un siècle d’existence me semble avoir complètement er sans doute définitivement manqué son objectif.
Les Français du XVIIe ont simplifié certains noms indiens, on peut les comprendre !
Chief Joseph était tout simplement Hinmahtooyahlatkekht en nez -percé.
Les genres, réflexion d’un Estonien qui n’a pas de genre dans sa langue
Pourquoi diable « un laideron » est-il toujours une femme, et une sentinelle presque toujours un homme.
Difficulté du travail de l’ethno-linguiste
Frauke Sachse partie étudier le xinka, une langue moribonde du Guatemala, s’est heurtée à une mauvaise volonté générale doublée d’un mercantilisme déchaîné : l’un de ses informateurs potentiels prétendait lui soutirer 10 $ par mot ! Parmi la poignée de derniers locuteurs, certains ont refusé de travailler ensemble, c’est à dire de se parler, suite à des conflits : la zone sortait d’une guerre civile
Enfin, grâce à ce livre, j’ai trouvé ma langue idéale (il faut dire que je suis un peu fâchée avec la droite et la gauche !)
L’étude des grammaires nous apprend encore que les concepts de droite et gauche, qui sont relatifs (on est toujours à droite ou à gauche de quelque chose et n’ont rien d’universel : certaines langues possèdent des systèmes d’orientation absolus , comme le taba, langue austronésienne parlée au large d’Almahera, en Indonésie, où l’on distingue « le côté mer » et le « côté de la terre » (les locuteurs du taba habitent les côtes d’une île , laquelle est ronde -il ne s’agit donc pas de points cardinaux). On ne dit pas « Les cigarettes sont à gauche (ou à droite) de la chaise » mais Tabako adia kurusi ni lewe lema, « les cigarettes sont du côté de la terre par rapport à chaise ; ou Tabako adiia kurusi ni laema pope, « les cigarettes sont du côté de la mer par rapport à la chaise : chacune de ces deux phrases veut dire « à droite » ou » à gauche » selon la position du locuteur.
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Très très tentant, dis donc !
Oui , j’avais été tentée, j’espère bien tenter à mon tour.
Les extraits sont savoureux et amusants, je me souviens du billet de Dominique, je surligne donc.
Tant mieux, c’est le but vous tenter toutes, et tous autant que je l’ai été
Tu as rejoint la confrérie des amoureux de ce livre, quand je l’ai acheté en librairie deux des libraires ont largement papoté avec moi se réjouissant de mon achat, je vois ce cela fait des émules et c’est tant mieux
Pas toujours d’un accès facile c’est vrai mais c’est comme en randonnée l’effort vaut la peine
Un très bon moment que je te dois, cela fait plaisir de partager nos bons moments
Tiens, je l’avais loupé chez Dominique …. les citations que tu donnes sont vraiment drôles ! J’adore surtout la dernière ! Je me dis qu’heureusement, je ne dois pas parler Taba, parce que vu que je suis toujours obligée de faire le geste d’écrire pour reconnaître ma droite de ma gauche, si je devais indiquer la place d’un objet en cette langue, mon pauvre interlocuteur en aurait pour des heures avant que je finisse ma phrase … le fait que ce concept ne soit pas universel est passionnant, en fait, comme toutes ces différences que les langues révèlent. Cela bouscule ce que l’on a l’habitude de croire aller de soit. Un livre que je retiens.
Je suis contente de t’avoir fait sourire, lis ce livre , tu souriras souvent.
Luocine
Dans ma pal depuis le billet de Dominique, du temps, du temps ! :)
c’est ce que je me dis à chaque fois que je lis ton blog! du temps!
Je l’ai noté depuis longtemps, tu confirmes. Yapluka !
et oui ! yaka; yaka!
Acheté suite au billet de Dominique!!! Mais pas encore lu. Heureusement tu adores aussi!
Je n’ai aucune réserve, même si mes connaissances en linguistique m’ont un peu aidée , davantage pour une forme d’esprit qu’un réel savoir.
quel enthousiasme ! J’ai donc hâte de le lire!
Et j ai hâte de lire ton commentaire
Jean-Pierre Minaudier trouve le moyen de baver sur l’espéranto.
Si ce qu’il écrit à propos des autres langues est du même niveau, il y a lieu de douter de son honnêteté et de son savoir réel puisqu’il y a deux fautes dans l’exemple qu’il donne de l’espéranto.
S’il en est de même à propos de langues qui sont tout aussi inconnues d’un très large public que de l’espéranto, il peut faire croire n’importe quoi. J’ai écrit une suite de commentaires à ce sujet dans un article intitulé :
Groteskeco / Grotesquitude — Heinz Wismann… Barbara Cassin… Jean-Pierre Minaudier…
Le point commun de certains personnages qui ont accès aux médias est de tomber dans le grotesque dès qu’il s’agit de donner un avis sur l’espéranto.
Ces auteurs pensent-ils s’illustrer par le colportage de préjugés ?
http://www.ipernity.com/blog/32119/4734616
Vous croyez que l’espéranto a un avenir ? je l’ai espéré quand j’étais enfant mais je n’y crois plus quand je vois la façon dont l’anglais se sépare de l’américain de l’australien … Je lirai votre article mais je ne trouve pas qu’il y a sujet à polémique , les opinions peuvent être différentes sur ce sujet sans être agressives. Mais je reconnais qu’il s’est exprimé sans nuance sur le sujet avec un esprit caustique qui le caractérise. et que j’ai beaucoup apprécié.