Traduit de l’anglais par : Josée Kamoun.
Lu dans le cadre du club de lecture de ma médiathèque.

3
Autour de l’exposition de Bruxelles, Jonathan Coe tisse ses habituelles réflexions sur les rapports humains. Tout se passe en distance et sans heurts, là où il pourrait y avoir un roman d’espionnage palpitant , une histoire d’amour torride, une naissance illégitime, on a une agréable partie de campagne , des grandes vacances d’un intellectuel anglais pas très amoureux de sa femme et attiré par des jeunes femmes en particulier un jolie hôtesse belge.

Le roman se lit facilement et ne manque pas d’humour, mais on n’est jamais passionné. On se dit aussi que Jonathan Coe n ‘aurait vraiment rien à faire d’un lectorat passionné. C’est agréable à lire aussi , pour la nostalgie d’une époque où l’on avait toute confiance dans le progrès scientifique : heureux temps où l’on croyait que l’atome allait résoudre tous les problèmes de la vie sur terre.

Mais c’est aussi la guerre froide, et la tentation d’une autre vie possible en URRS, et petit détail qui m’a étonné, la Belgique avait invité des Congolais pour montrer leur artisanat local, ils ne sont pas restés longtemps car ils se sont sentis comme des animaux de Zoo, on les comprend !

Un bon moment de lecture mais un peu fade à mon goût.

Citations

Humour, idée pour la participation britannique à l’exposition de 1958 , idée qui n’a pas été retenue , on se demande pourquoi !

Nous faisons tous la petite et la grosse commission, Sir John, même vous ! Nous pouvons bien répugner à en parler, répugner à y penser même, mais il y a de longues années, quelqu’un y a pensé, il a poussé-poussé, si j’ose dire… la réflexion, et le résultat, c’est que nous pouvons depuis faire notre grosse commission en toute hygiène et sans honte, et que le pays entier, que dis-je, et le monde entier, ne s’en porte que mieux. Alors pourquoi ne pas rendre hommage à cette réussite ? Pourquoi ne pas célébrer le fait que, outre qu’ils ont conquis la moitié du globe, les Britanniques ont livré une bataille historique contre leur grosse commission et qu’ils l’ont remportée.

Genre de préjugé que revèle cette exposition dite universelle

Le fait est que ces Belges sont plus andouilles que nature, ils connaissent rien à la bière, et, d’ailleurs rien à rien.

On en parle

Clara et d’autre avis sur Babelio

traduit de l’anglais par Isabelle Chapman
Lu dans le cadre du club de lecture de ma médiathèque

3
Un livre très intéressant sur un sujet qui ne m’intéresse absolument pas : la presse à scandale anglaise. Mais après certaines révélations de la presse française est-on si loin des tabloïds britanniques. C’est un roman à deux voix , une jeune pigiste intéressée seulement par les scandales que l’on peut lire à longueur de journées dans la presse. Elle vit dans une galère absolue et court après tous les articles pour finir ses fins de mois. Elle a la surprise de se voir confier par une rédactrice d’un journal plus prestigieux,un article sur une journaliste très très âgée qui méprise complètement la presse d’aujourd’hui.

Le roman permet de décrire tous les rouages de la presse et raconte très bien les difficultés des jeunes à s’imposer dans ce monde sans pitié. Et à l’opposé la voix de la vieille femme qui a parcouru tous le siècle avec les horreurs qu’on connaît mais avec une culture qui est si loin des préoccupations de la jeune Tamara venue l’interviewer. le choc de ces deux mondes donne lieu à des moments d’humour assez drôle.

L’intrigue est assez bien menée. Je pense que c’est important de lire un tel livre, mais je crois que les gens qui croient à la presse à scandale ne liront pas ce genre de roman , dommage ! Quant aux autres, les gens comme moi, on sait qu’on peut inventer n’importe quoi dans ces journaux et qu’à part le sexe et l’argent rien d’intéressant n’y est vraiment traité .

Intéressant mais très triste sur l’état de notre société.

Citations

La vieillesse

Il avait eu un mouvement de recul incapable de dissimuler son dégoût Craignait-il que la vieillesse ne soit contagieuse ? Elle pouvait le lui confirmer:elle l’était. La mort prématurée était la seule issue si on voulait l’éviter.

La culture de Tamara

Pour les amuse gueules, ça ira, rectifia Tamara en son for intérieur. Hitler n’était pas Sinatra, mais c’était quand même une célébrité, d’une certaine manière. Au moins tout le monde avait entendu parler de lui.

 Le directeur de rédaction

Il tenait de l’esquimau :il avait à sa disposition cinquante mots pour dire non.

 Lu dans le cadre du club de lecture de ma médiathèque.

4
Livre très sympathique qui remonte le moral. Cela n’empêche pas l’auteur de décrire notre société de façon assez triste. Il se sert pour cela de la personnalité d’un vieil homme de plus de soixante dix ans qui refuse l’ensemble du modernisme. Son intérêt pour la société dans laquelle il vit s’est arrêté aux années 60. Depuis plus rien ne trouve grâce à ses yeux, ni les noms des voitures qui, d’appellations qui font rêver comme Caravelle, Dauphine, Ariane, sont passée à des mots qui ne veulent rien dire comme Scénic, ni les beauté féminines, son idéal féminin restera à jamais Grace Kelly, ni bien sûr les façons modernes de communiquer.

Lui restera pour toujours relié au monde avec un téléphone en bakélite noir avec un cadran que l’on tourne avec un doigt… Son fils va devenir père, et le roman raconte très bien les peurs du futur père et sa joie absolue devant le bébé fragile mais dont le regard est si présent. L’année des 6 ans du petit, le grand père le gardera un mois dans sa maison au coeur des landes. Le bonheur de ces deux être, aux deux bouts du temps de l’espace humain est touchant : ce petit fils saura séduire ce vieux grincheux , et le petit garçon aimera de toutes ses forces ce grand-père hors norme. Toutes les peurs dans lesquelles sont élevées les enfants d’aujourd’hui sont évoquées et si on comprend les parents, on est également du côté du « grand-paria » (nom qu’il s’est choisi et qui lui va bien), l’hyper protection dans laquelle sont élevées les enfants d’aujourd’hui, leur permettra-t-elle de grandir ?

Les personnages ne sont pas idéalisés, ils sont dans leur vérité. J’ai bien aimé que la maman de l’enfant, Leila, ne succombe pas au charme du grand-père : la conversation téléphonique où le grand-père explique que l’enfant a dormi dans le même lit que lui pour ne pas avoir de cauchemars est bouleversante. Elle a peur de l’inceste, et le grand-père est totalement choqué qu’elle ait pu penser à cela.

Le premier chapitre démarre par une scène dans le métro absolument inoubliable, elle fera sourire les parisiens et les provinciaux qui sont si heureux de ne jamais utiliser les transports en « commun » parce qu’ils sont communs justement ! (Ce n’est pas de moi, c’est une réflexion du grand père).

Citations

La télévision aujourd’hui

Encore ignore-t-il l’existence du rap et des émissions de téléréalité. Ne m’a-t-il pas déclaré tout récemment : « un jour, tu vas voir, ils vont foutre des caméras dans une maison et filmer des crétins à ne rien faire » ? S’il savait. Je n’ose rien dire. Je n’ai jamais osé.

La jeunesse d’aujourd’hui vue par le grincheux

– On montre son cul, on a des anneaux dans le nez, on mange avec les doigts, on s’exprime par borborygmes, on se tape dessus au moindre désaccord, on se trémousse sur des rythmes binaires…ça ne t’évoque rien ?

– Euh…

– Moi si : l’âge des cavernes. des siècles de civilisation pour en arriver là ! Ce n’est pas triste c’est effroyable.

 L’opinion du grincheux sur les médecins

– Tu as vu un ophtalmo ?

– Un type qui te regarde dans les yeux pour te prendre ton fric ? Même les femmes n’osent plus faire ça.

 Le masculin

Que tu dises non, non et non ! A force de ne plus être machos, vous êtes devenus manchots, ma parole, toi et les hommes de ta génération !

Petite leçon d’économie

Pourquoi acheter, toujours acheter, quand on peut faire durer les choses ? Pourquoi jeter, toujours jeter, grossir les décharges, quand on peut réparer ? Tu as remarqué que les verbes « jeter » et « acheter » étaient très proches ? Cette machine, je la jette, cette machine, je l’achète, ça sonne pareil … Et voilà comment la fuite en avant continue, et vas-y que j’achète , et vas-y que je jette , et tant pis pour la planète ! En plus ça rime ! Tu vois je suis un grand poète. Un grand poète paria.

On en parle

Livre-esse, Cathulu

Synopsis

Dans la Pologne des années 60, avant de prononcer ses voeux, Anna, jeune orpheline élevée au couvent, part à la rencontre de sa tante, seul membre de sa famille encore en vie. Elle découvre alors un sombre secret de famille datant de l’occupation nazie.
5
Cela fait un certain temps que je ne parle pas de cinéma sur mon blog, pourtant je vois de bons films (et des moins bons) mais je trouve que parler d’un film demande une réaction rapide , car souvent les bons ne restent pas longtemps à l’affiche. 
Mais Ida est un pur chef d’oeuvre complètement intemporel , et je pense qu’il passera souvent dans les petites salles à la recherche d’une progammation de qualité. L’émotion est rendue à la perfection parce que les images des protagonistes sont très belles et que l’évocation de la pologne rurale des années 60 est terrible. La misère et la rudesse des campagne , l’antisémitisme à fleur de peau et avec cela la peur que les juifs reviennent réclamer leurs maisons tout cela ne rend pas la Pologne très attirante.
On pense au progrom de Kielce durant lequel l’église catholique polonaise a joué un rôle peu glorieux. Mais dans ce film , il n’y a pas de point de vue moralisateur , seulement la tragédie de deux femmes . Je ne peux en dire plus sans dévoiler l’histoire du film ce qui serait dommage. La musique est remarquable , le mélange musique classique et des musiques modernes est très harmonieux.
Un très beau film que je n’oublierai jamais.

4
J’avoue avoir lu ce roman un peu à reculons , malgré les louanges que j’avais lues à son propos. La première raison c’est que je n’avais pas été charmée par le précédent roman de Maylis de Kérangal « Naissance d’un pont ». La deuxième, c’est la nature même de son sujet, le don et la greffe d’organe.

Je suis le plus souvent choquée par les campagnes incitant les citoyens à manifester leur volonté de donner leurs organes s’ils se retrouvaient en état de mort cérébrale. On insiste toujours sur le fait qu’ainsi ils peuvent sauver des vies et il y a toujours un discours culpabilisant vis à vis de eux qui ne souhaitent pas donner leurs organes. Et bien ce roman prend la peine d’évoquer sans jamais juger ni donner la moindre leçon de morale , l’état de souffrance absolue des parents qui apprennent la mort cérébrale de leur fils et doivent en même temps accepter, ou non, de donner ses organes.

Toutes les questions sont bien posées et on vit au plus près l’état de sidération dans lequel sont plongés les parents de Simon. La façon dont leur cerveau se fige à l’annonce qu’ils ne peuvent imaginer et leur plongée dans le plus noir des cauchemars. Ce qui rend ce roman exceptionnel, c’est le talent de Maylis de Kérangal, qui à partir de là, décrit tous les acteurs qui vont se mettre en mouvement , jusqu’à la « ré » implantation du cœur de Simon dans le corps de Claire. Tout cela se passe en moins de vingt quatre heures. Mais qui dit urgence et rapidité, n’empêche pas de sentir l’intensité du déroulement des vies celle du donneur, de ses parents, du receveur…

Cela permet à l’auteur de nous décrire plusieurs « types » de notre société . Face à la mort de ce jeune surfeur de dix neuf ans, elle rassemble, les différentes personnalités du corps médical : du prestigieux chef de service , héritier d’une dynastie de médecins parisiens, à l’infirmière du Havre aux amours compliquées. Un petit exemple bien vu de notre époque, l’infirmière qui attend désespérément un appel d’un amoureux et qui répond au médecin chef de service en sentant les vibrations de son portable, complètement partagée entre l’envie de regarder qui l’appelle et se concentrer sur ce qu’on est en train de lui reprocher. Notre époque vous dis-je !

Je comprends les louanges à propos de « Réparer les vivants » et je trouve qu’au delà du sujet choc , c’est un grand roman que je conseille à chacun et chacune de lire si ce n’est déjà fait.

 Citation

Un passage où on voit son talent à décrire des personnages ancrés dans notre société, mais aussi un bon exemple de son style, je raccourcirais volontiers certaines de ses phrases (mais pas celle -là) :

La plupart comédiens sur le carreau, débutants pleins de promesses ou éternels seconds couteaux de productions télévisuelles, arpenteurs de spots publicitaires, doublures, figurants, silhouettes, courant les castings pour amasser des heures, gagner de quoi payer un loyer – le plus souvent une colocation dans un arrondissement du nord-est parisien ou de la proche banlieue-, ou reconvertis coach pour des journées de formation aux techniques de vente – à domicile ou autres-, et finissant parfois par intégrer des panels de cobayes où ils louaient leurs corps, goûteurs de yaourt, testeurs de crème hydratante ou de shampoing antipoux, expérimentateur de pilules diurétiques.

On en parle

Clara et Cathulu et Kroll et bien d’autres avis intéressants sur Babelio

kinderzimmer-1393211-616x0Auteure repérée sur les blogs.

2
J’ai un peu oublié les blogs qui m’ont conduite à acheter ce livre. Je suis très difficile sur ce sujet : les camps d’extermination nazis. Toute œuvre historique me mobilise immédiatement et parfois aussi des romans sur le nazisme , comme le roman de Rafaël Jerusalmy (Sauver Mozart). Valentin Goby a décidé de traiter un sujet particulièrement délicat : quelques enfants nés dans les camps de concentration ont survécu aux terribles conditions de leur naissance.

Nous suivons la mémoire douloureuse d’une vieille femme, Mila. Jeune, elle a été déportée à Ravensbrück , elle accepte de parler devant des élèves français. Bien sûr, nous sommes dans l’horreur absolue et on sent que l’auteur met toute ses qualités de sensibilité pour bâtir une histoire qu’elle puisse nous raconter. J’ai lu ce roman depuis au moins quatre semaines et je n’arrive pas à écrire mon billet. Étant donné l’horreur du sujet , est-ce que j’ai le droit d’écrire que je n’ai pas été touchée ? Je suis contente de voir que ce livre trouve son public, car le monde ne doit jamais oublier vers quoi mène le totalitarisme et à quel point l’humanité a en souffert. Je cherche à comprendre mes propres réactions, je pense avoir un respect absolu pour tout effort de mémoire donc pour les témoignages , mais s’il s’agit de créer une œuvre romanesque je trouve que si l’auteur joue uniquement sur notre sensibilité je trouve cela trop facile.

Désolée pour cet auteur et ce roman.

3
Je me souviens de mon plaisir à lire « les séparés » , un plaisir fait de sensations retrouvées de ma jeunesse. Entre ces quatre murs, je retrouve une partie de ce plaisir, il s’agit, ici, des sentiments qui soudent et séparent les familles. Le propos du roman est très ténu, le frère aîné d’une fratrie de cinq enfants réunit sa mère veuve, et son frère et ses deux sœurs dans sa maison de Grèce. Lors de son attente, il se remémore son enfance et lors des trajets de chacun des membres de la fratrie, les secrets des uns et des autres vont être peu à peu dévoilés au lecteur .

Toute une réflexion sur la famille s’installe : la force de l’amour certes, mais aussi, le poids des liens qui parfois étouffent et empêchent de mener sa vie d’être libre. J’avoue avoir trouvé le propos un peu léger alors que de très lourds secrets étouffent cette famille. On comprend que la fratrie ait explosé et on s’étonne un peu à la fin de la légèreté de certains propos. Le style, au début, est insupportable , c’est voulu, je crois, cela permet d’être dans la peau de Saul(le frère aîné), et puis, on s’habitue et ça s’arrange un peu.

Un plaisir en mi-teinte pour moi.

 Citations

Exemple du style du début

Parler de Dimitri aussi. Il serait temps.
Lire, c’était trahir. S’extraire. S’échapper. Un monde nouveau, en faire partie à tout prix.

 Cette phrase me touche

Les êtres proches, vivants ou morts , sont à la fois absents et omniprésents , on ne se défait jamais tout à fait de leur absence.

 Interrogation qui est la mienne

Je m’interroge devant les grandes familles unies, les frères et sœurs que rien ne semble avoir séparés , sont-ils meilleurs que nous ? Plus aimants ?

Rôle de la mère avec des enfants adultes

« Maman, tu n’es pas responsable de nos déboires, de nos désillusions, tu n’es pas toute-puissante, tu ne peux pas contrôler nos relations, tu ne peux pas savoir ce que ressentent réellement tes enfants adultes. »

 C’est tellement vrai

Parfois dire est inutile et nocif.

On en parle

Sur la route de Jostein ,Paroles et musiques et d’autres sur Babelio

 

Traduit de l’islandais par Éric Boury

 2
Je me suis laissé tenter par un polar qui a bien plu aux blogueuses que je lis régulièrement et dont , souvent, je partage les goûts. J’en conclus que, vraiment, ce n’est pas ma tasse de thé, les romans polars , je ne trouve rien de plus énervant que de lire un roman tendu par une tension policière. Qui a tué ce malheureux jeune homme qui avait la sale manie d’enregistrer les films sur son magnétophone ? Vous pensez, bien avant les enquêteurs, qu’il a enregistré des propos qu’il n’aurait pas dû entendre. Et comme dans une histoire magique, une découverte d’un élément entraîne la mise en place d’un puzzle, sans beaucoup de surprise.

Le personnage principal est hanté par un passé douloureux marqué par le fait que son père n’a jamais voulu reconnaître cet enfant adultérin atteint , de plus, de tuberculose. Le roman permet de revivre le duel Fischer Spassky , c’est ce que j’ai préféré , je me suis précipitée sur Wikipédia pour relire ce que l’on sait aujourd’hui de ces événements.

Enfin, petit détail qui m’a énervée pendant tout le roman, il y a aucun moyen pour savoir si Marion-Briem est une femme ou un homme,et je pense (en plus) que l’ambiguïté est cultivée intentionnellement , je ne comprends vraiment pas pourquoi. (cherchez bien, à aucun moment on ne dit « elle » et aucun accord ne permet de le savoir). Déjà que ce n’est pas facile de savoir si les prénoms sont féminins ou masculin, par exemple Gudny fille ou garçon ? Il faut parfois lire quelques lignes pour se rendre compte que Gudny est mariée avec Albert. J’ai lu et relu sans jamais savoir si Marion est, en Islandais en 1972 ,un prénom féminin ou masculin.

Bref, je n’ai pas été passionnée.

 On en parle

à Sauts et à Gambades, et chez Clara

5
Quel plaisir de retrouver mon blog avec ce roman. 
J ai beaucoup lu pendant ces semaines bien occupées,tout n’est pas d’égale valeur. J’avais eu le temps de noter ce roman d’abord chez Dominique,puis chez beaucoup d’entre vous. Je vais me joindre au chœur de celles et ceux qui se sont senties bien dans cette épopée du 20° siècle.

Épopée de la vie et de la mort

Épopée de ceux qui ont survécu aux terribles incendies qui ont ravagé les forêts canadiennes dans les années 1910.
L écrivaine a su rendre compte de la force destructrice du feu et de la terreur qui est, à jamais, entrée dans le regard des survivants.

Épopée des êtres si vieux qu’on voudrait les mettre à mourir tous ensemble, et qui décident de vivre leur fin de vie comme ils le veulent, libres et indépendants bien cachés au fond des bois.
Épopée d’une femme enfermée à 16 ans dans un asile psychiatrique et qui n’en ressortira qu’à 80 pour enfin vivre une vraie vie.

Épopée, enfin, de la narratrice, femme photographe qui réussira à monter l’exposition qui lui tenait à cœur pour rendre compte de cette période où « il pleuvait des oiseaux » au-dessus des forêts calcinées du nord canadien.

Si j’ai utilisé le mot « épopée », ce n’est pas pour trahir la simplicité du style ni la banalité des vies ordinaires qui font la richesse du roman, c’est que, je le pense, il y a une grandeur à savoir rendre compte du quotidien des êtres quand ils sont libres et vivent dans leur propre système de valeur.

Un roman superbe, envoûtant et profondément vrai dont j’ai littéralement savouré chaque phrase.

Citations

Comme moi, je pense que tous ceux et celles qui aiment les histoires se retrouveront dans ce passage

J’aime les histoires, j’aime qu’on me raconte une vie depuis ses débuts, toutes les circonvolutions et tous les soubresauts dans les profondeurs du temps qui font qu’une personne se retrouve soixante ans, quatre-vingts ans plus tard avec ce regard, ces mains, cette façon de vous dire que la vie a été bonne ou mauvaise.

 Échapper au sort commun de la vieillesse

– En deux minutes, j’avais fait mon baluchon et en route pour la Liberté !
Et de s’éclater encore d’une grande salve de rires, accompagné de Charlie qui avait abandonné toute retenue et juillet d’un bon rire gras et sonore. Les deux vieillards s’amusaient comme des enfants à l’idée de ce coup asséné à toutes les travailleuses sociales de ce monde qui veulent enfermer les vieux dans des mouroirs .

 l’euthanasie sans les lois

Il y avait un pacte de mort entre mes p’tits vieux. Je ne dis pas suicide, ils n’aimaient pas le mot, trop lourd, trop pathétique, pour une chose qui, en fin de compte, ne les impressionne pas tellement. Ce qui leur importait, c’était d’être libres, autant dans la vie qu’à la mort, et ils avaient conclu une entente.

 Description d’un incendie de forêt

Le feu a des caprices qu’on ne s’explique pas. Il va sur les plus hauts sommets, arrache le bleu du ciel, se répand en rougeoiement, en gonflement, en sifflement, dieu tout-puissant, il s’élance sur tout ce qui est vivant, saute d’une rive à l’autre, s’enfonce dans les ravins gorgés d’eau, dévore les tourbières, mais laisse une vache brouter son herbe dans son rond de verdure. Que peut-on comprendre ? Le feu, quand il atteint cette puissance, n’obéit qu’à lui-même.

 L’esprit de village

Qui Ange Polson était-elle venue embêter ?
Tout le monde et personne en particulier, la réflexion de sa mère ou de la mercière , venait de ce fond inépuisable de méchanceté que les petites villes entretiennent jour après jour.

La dernière phrase qui sonne si juste et pas seulement pour ce roman.

Et la mort ?
Eh bien, elle rôde encore. Il ne faut pas s’en faire avec la mort, elle rôde dans toutes les histoires.

On en parle

à sauts et à Gambades , Sylire , Aifelle, Clara…..

J’avoue ne connaître par coeur que la première strophe ! Depuis ma seconde au lycée, cela m’a toujours fait plaisir qu’une femme sache décrire le plaisir féminin. Je laisse la parole à Louise Labé , même si, parce qu’elle est une femme et qu’elle a vécu au XVIe siècle, l’on doute de son existence, ou qu’elle soit l’auteur de ces vers.

 Je vis, je meurs ; je me brûle et me noie

 Je vis, je meurs ; je me brûle et me noie ;

J’ai chaud extrême en endurant froidure :
La vie m’est et trop molle et trop dure.
J’ai grands ennuis entremêlés de joie.

Tout à un coup je ris et je larmoie,
Et en plaisir maint grief tourment j’endure ;
Mon bien s’en va, et à jamais il dure ;
Tout en un coup je sèche et je verdoie.

Ainsi Amour inconstamment me mène ;
Et, quand je pense avoir plus de douleur,
Sans y penser je me trouve hors de peine.

Puis, quand je crois ma joie être certaine,
Et être au haut de mon désiré heur,
Il me remet en mon premier malheur.