Édition Gallimard novembre 2023
Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard
Décidemment dans la sélection des nouveautés du club de lecture , il y a beaucoup de livres qui parlent de la Shoah en France. Est-ce un hasard, ou le fait que les souvenirs se réveillent libérés du poids des interdits du venant de ceux qui avaient vécu ou participé à ces terrible évènements ? Violaine Huisman est près de son père quand il décède, elle veut trouver qui était Denis Huisman, que les gens de ma génération connaissent bien pour avoir travailler sur les manuel de philo « Huisman-Vergez » .
Sa quête de mémoire est douloureuse car ce père fantasque a été un mari volage et n’a pas su aider les deux filles qu’il a eues avec un femme bipolaire. Elle se sent la fille de la « folle », elle aime son père mais a peu d’illusions sur ses qualités morales. (Sa mère est l’objet d’un roman que je n’ai pas lu). Le portrait de ce père haut en couleur est bien mené et très agréable à lire, très vite l’autrice se heurte à la difficulté de démêler ce qui est réel de la mythologie familiale dans laquelle les personnages tiennent des positions qui font de beaux récits mais qui ne respectent pas toujours la vérité historique. Une grande partie de sa recherche concerne Georges Huisman, l’ancêtre si glorieux de la famille et auquel la société d’après guerre n’a pas rendu les honneurs ni la place qui aurait dû lui revenir. On revit sa fuite lors de l’invasion nazie et sa peur d’être déporté comme juif. L’autrice nous fait revivre l’épisode du « Massilia » bateau dans lequel se sont embarqués des députés et des membres du gouvernement : Mendes-France, Jean Say entre autre, respectant en cela les ordres de Pétain. Mais tous ceux qui sont juifs seront arrêtés et jugés pour haute trahison. Tout cela est intéressant et a certainement marqué le jeune garçon (le père de la narratrice) qui a dû se cacher et craindre pour sa vie. Mais dans la mémoire familiale et il y a aussi Choute une jolie femme très riche dont George Huisman aurait été très amoureux. Violaine Huisman s’empare de cette histoire et on ne sait absolument pas ce qui relève du roman ou de la réalité.
J’ai aimé lire cette biographie (même adoré la première partie) et la façon que l’auteur a de démêler tous les fils du passé qui arrivent vers elle comme une pelote souvent agressive qui brouillent tellement bien les cartes de la réalité et de la narration familiale. Mais j’ai trouvé en ce qui concerne son grand-père que le mélange historique et fiction littéraire était gênante.
Extraits
Début.
Te voir avachi. devant la télé en plein après-midi me sidère est me brise le cœur. Je coupe le son. Merci, silence. Le reflet des images diapre les murs comme les vitraux d’une chapelle. Par la fenêtre, à gauche un rayon de soleil dessine autour de ta chevelure un halo d’or. En arrière-plan, des étagères de livres reliés en cuir châtain forme un paysage vallonné, des collines où se dressent en lettres scintillantes tes auteurs-phares.
J’aime cette façon de raconter.
Tu as la voix qui porte et le ton professoral ; où que tu sois tu donnes un coup magistral, y compris en tête à tête avec ton agonie. Tu peux de but en blanc déclamer un poème de Hugo ou une tirade de Corneille, en philosophie tu es incollable intarissable tu sembles avoir tout lu tout retenu(…)
Un grand talent d’écriture.
Cette rosette rouge sur le revers de ton veston intrigué énormément les enfants, toutes générations confondues. À quoi ça sert ? Te demandait-on à tour de rôle. À rien mon pauvre amour ! Strictement à rien, sinon à flatter la vanité des vieux croulants comme moi. Ou plutôt si, ça sert à une chose à partir du grade de grand officier, un vulgaire gendarme ne peut pas vous convoquer au poste, c’est le commissaire de police en personne qui doit se rendre à votre domicile pour vous arrêter. Je ne voyais pas en quoi ce privilège t’aurait été utile.
Le rituel de la nouvelle cuisine.
Le rituel protocolaire des établissements étoilés t’emmerdait au plus haut point, mais tu en raffolais. Tu trouvais la nouvelle cuisine chichiteuse et ces portions mesquines. Quand un serveur entamait le récitatif des produits préparés dans ton assiette, tu accueillais sa sérénade en bâfrant avec une telle voracité que tu avais régulièrement fini avant qu’il ait conclu son cérémonial en nous souhaitant une bonne dégustation.
Son héritage à Paris.
Paris était le foyer ancestral où j’étais la fille de : la fille de ma mère-la-folle, la fille de mon père, la petite fille d’un grand-père illustre, fût-il injustement oublié. Je m’étais construite ailleurs car à Paris, j’avais l’impression à chaque carrefour de trébucher sur un pavé.
Son père et les femmes.
Dans ces récits une femme était avant tout incarnée, et son potentiel de séduction primait sur toute autre qualité. Une femme était soit vieille et moche, soit jeune et fraîche. Décidément, mon père n’était pas un féministe tout à fait hors pair !
Vision de Haussman par Georges Huisman.
Là on l’entend marmonner son courroux sous son inlassable moustache en pénétrant dans ces monuments du second Empire : ces « vandales » qui ont défiguré Paris ! Haussmann -le pire ce qu’on a appelé les « embellissements » de Paris n’est qu’un système générale d’armement contre l’émeute. l’Attila de la ligne droite !
C’est bien ce qui me détourne de ce genre de livres, fiction/réalité… Je vais en présenter un un de ces jours, mais…
c’est vrai que parfois c’est gênant.
Je trouve qu’il y a beaucoup trop, vraiment, de ces auteurs qui passent par le roman pour débrouiller leur histoire familiale… J’avoue que j’ai rarement de l’intérêt pour ce genre, il faut vraiment qu’il y ait un autre thème fort, original ou universel pour que je m’y risque.
Mais je reconnais à ces auteurs de faire revivre des personnalités parfois injustement oubliées
Comme Kathel, je le lasse de ces récits historico-familiaux que je trouve souvent inégaux, peut-être par manque de distance de l’auteur/autrices vis à vis de certains aspects ou de certains membres de leur famille.
oui je comprends, mais j’ai beaucoup aimé la première partie de ce roman
Je rejoins Kathel et Sacha. Je ne savais pas comment verbaliser cela jusqu’ici mais elles l’expliquent très bien.
ok mais la première partie est vraiment intéressante.
Comme toi je suis souvent gênée par le mélange fiction-réalité dans certaines histoires. Je comprends la démarche mais je le dis toujours, je préfère un récit dans ces cas-là. Certains sont vraiment passionnants et bien écrits sans passer par la fiction.
pour ce récit là c’est ce qui m’a gênée : l’histoire d’amour de son père avec sa maîtresse ne rajoute pas grand chose au récit.
Je découvre cette autrice avec ta chronique. Il y a le livre sur sa mère à ma bibliothèque.
je lirai bien aussi son livre sur sa mère car je pense qu’elle a dû avoir une enfance compliquée