Traduit de l’anglais par Astrid Von Busekist
Lu dans le cadre des feuilles allemandes
Si ce livre, n’est pas écrit par un auteur allemand, le sujet concerne bien l’Allemagne, il trouve donc, selon moi, parfaitement sa place dans le mois de littérature allemande. Cette enquête est passionnante, Philippe Sand cherche à comprendre la personnalité de Otto von Wächter et de sa femme Charlotte, deux nazis de la première heure. Otto est responsable de la mort d’au moins 300 000 juifs et de milliers de Polonais. Son fils Horst, en 2013, est persuadé que son père ne peut pas avoir commis ces crimes abominables, ce fils veut absolument que la lumière soit faite sur le passé de son père. Il a été en grande partie élevé par sa mère (puisque son père meurt en 1949) qui elle, n’a pas voulu pas savoir la vérité mais elle la connaissait très bien et qui a construit une fable positive sur un des pires criminels nazis. Un des grands intérêts de cet essai, tient la personnalité du fils . Il est touchant d’être aussi partagé entre l’amour de son père et la réalité qu’il ne veut pas voir.
L’autre partie de l’enquête concerne la fuite de ce nazi et des protections catholiques dont il a bénéficié. L’auteur va chercher dans toutes les archives le moindre détail ce qui s’est passé pour Otto de 1945 à 1949. Il est d’abord resté en Autriche dans la montagne avant de passer en Italie pour finir dans un couvent à Rome. Il mourra de façon brutale et son fils sera persuadé qu’il a été empoisonné par les Soviétiques ou les Américains et cette idée lui fait du bien car cela laverait un peu l’honneur de son père. Quelles que soient les preuves que Philippe Sand met sous les yeux du fils celui-ci restera convaincu que son père ne pouvait pas être un criminel de masse. Toute la famille von Wächter, une grande famille noble autrichienne, en voudra beaucoup à Horst d’avoir collaboré à cette enquête. C’est très intéressant de voir à quel point l’Autriche a été le berceau du nazisme alors qu’après la guerre ce pays a rendu l’Allemagne responsable de cette idéologie meurtrière. D’ailleurs aujourd’hui encore la famille a des réactions antisémites, une des tantes se scandalisera qu’un des descendants de la famille travaille sous les ordres d’un juif !
Seule une des petite fille finira par déclarer :
Mon grand-père était un meurtrier de masse
Cette phrase clos le livre.
La personnalité de Charlotte et ses actions sont au moins aussi intéressantes que la vie de son mari , elle n’a jamais été inquiétée alors qu’elle est au moins une voleuse et elle a, entre autre, pillé le musée de Cracovie. C’est d’ailleurs en revendant des œuvres volées qu’elle a réussi à envoyer de l’argent à son cher mari en fuite. Et après la guerre, elle soutiendra toujours le nazisme . Ni son mari ni elle n’ont eu le moindre remord pour l’extermination des juifs dont ils ne veulent pas être responsables alors que l’idéologie qu’ils ont soutenue jusqu’à leur dernier souffle est bien la seule responsable de cette horreur.
J’ai admiré sans aucune réserve la qualité des recherches de cet écrivain, comme il a dû se confronter à la personnalité attachante du fils, il a été amené à vérifier le moindre détail et s’il n’a pas convaincu Horst vin Wärchter, il ne laisse aucune place au doute à son lecteur.
- Oui, Otto von Wächter est bien un criminel de masse qui aurait mérité la pendaison.
- Oui, l’église catholique a bien créé des filières d’évasion pour les nazis
- Oui, la CIA le savait mais comme il a fallu très vite organiser une défense contre la montée en puissance des Russes et que la guerre froide s’organisait, les américains ont repéré mais peu inquiété à partir de 1947 les cadres Nazis.
Citation
L’antisémitisme autrichien à l’origine du nazisme.
À l’école de droit, Otto épouse la cause nationaliste et le combat des Sudètes germanophones. Il suit ainsi les traces de son père, lui-même membre du Deutsche Klub, une association germaniste exclusivement masculine qui s’oppose à l’arrivée des Juifs et des autres réfugiés des anciennes provinces de l’empire. « Achetez aryen ! » clame le bulletin de l’association. En mars 1921, peu de temps après que son père a été nommé ministre de la défense, Otto participe à une marche de protestation antijuive dans le centre de Vienne. À l’appel de l' »Antisemitenbund », créé deux ans plus tôt, quarante mille participants réclament l’abolition des droits fondamentaux de citoyenneté et de propriété des Juifs, ainsi que l’expulsion de tous les juifs arrivés après 1914. Les commerces juifs et les usagers juifs des transports publics viennois sont attaqués. Otto est arrêté condamné et jugé par la cour du district de Vienne ; il passe quatorze jours en prison et écope d’une peine d’un an avec sursis. La presse le qualifie de « monarchiste » il n’a pas encore vingt ans et il vient pour la première fois de franchir la ligne de la criminalité.