Édition JC Lattès Collection Le Masque, Avril 2022, 524 pages.

Traduit de l’allemand par Georges Sturm

 

Un roman polar sur Luocine et 5 coquillages, je ne l’imaginais pas possible. Mais ce roman, que j’avais trouvé chez Eva, lors du mois des feuilles allemande 2023, est vraiment remarquable et aussi désespéré, j’ai été passionnée par l’arrière plan historique. Dans un Berlin bombardé tous les jours par les avions alliés à quelques jours de l’arrivée des troupes de l’armée rouge, deux hommes vont suivre sans le savoir le même ennemi. Le premier Rupert Haas est un ancien commerçant de Berlin, qui a été dénoncé et condamné, il arrive à s’évader de Buchenwald et veut absolument se venger de ceux qui l’ont dénoncé. On suit aussi un officier SS Hans Kalterer qui est convoqué par son supérieur qui lui demande d’enquêter sur des meurtres, les victimes sont toutes d’ancien habitants dé l’immeuble ou habitait Rupert Haas. Je vous laisse découvrir l’enquête qui est remarquablement construite. Mais ce qui est passionnant ce sont tous les strates de la société berlinoise en décomposition. Il y a bien sûr les jeune fanatisés qui jusqu’au bout vont claquer des talons et crier « Heil Hitler », ce sont eux aussi qui jusqu’au dernier moment vont traquer les pauvres vieux soldats qui avaient réussi à se cacher, et les fusiller sans procès. Mais il y a aussi les gens qui commencent à douter et pas qu’un peu des choix de leur Führer, et les langues se délient même si la gestapo rôde toujours. Enfin, il y a les cadres du régime qui ont bien réussi à cacher leurs différentes turpitudes et qui savent tourner leur veste et se mettre à l’abri. Un des ressort de l’enquête est une énorme histoire de corruption. Quel malheur pour le peuple allemand, juste bon à croire les pires slogans des nazis, et qui est devenu de la chair à canon, pendant que les dirigeants se mettent à l’abri et savent faire de l’argent de façon les plus malhonnêtes, le peuple meurt sous les bombes et personne ne va les pleurer car s’ils sont tous hantés par les crimes de leur pays, ils y ont participé comme Hans Kalterner, ou laissé faire comme Rupert Haas qui a n’a pas été le dernier à humilier les juifs propriétaires de l’immeuble. Il n’ y a qu’un seul personnage positif : une femme qui aura le courage de cacher des juifs et aussi l’évadé de Buchenwald. Mais ce qui est certain, c’est que le peuple sous les bombes comprend qu’il s’est fait avoir, mais il en faudra des tonnes de bombes et des milliers de morts pour leur ouvrir les yeux .

J’aurais aimé que la fin soit différente, mais cela ne respecterait pas la vérité historique, peu de dirigeants nazis paieront pour les crimes qu’ils ont commis dans la réalité pas plus que dans ce roman.

 

Extraits

Début .

 Les kapos s’étaient éloignés. Il entendait leurs rires, les voyait fumer au bord de la carrière. Ils jetèrent un coup d’œil au fond, firent des remarques méprisantes, reprirent enfin leur ronde. Plus personne ne lui prêtait attention. Épuisé, il s’adossa au wagonnet. 

Une armée de la défaite .

Ils avaient sans doute besoin de tout le monde pour l’ultime bataille. Peut-être allait-il devoir montrer à des Jeunesses hitlériennes comment on éventre un tank T34 russe avec un poignard de boy-scout. Ou peut-être avait-on besoin de ses talents pour entraîner à des combats singuliers acharnés des vétérans de la Première Guerre Mondiale, pour qu’ils forment ensuite dans leurs sous-marins individuels au fond du Rhin, de la Vistule, de l’Oder et de la Neisse, ce grand verrou inébranlable c’est un miracle censée stopper la progression des Alliés. Il soupira.

Citation de Goering est- elle exacte ?

« C’est ici que nous allons modeler l’homme nouveau même s’il nous faut commencer par lui briser tous les os., »

Description d’un bombardement.

 La cave toute entière vibrait comme lors d’un tremblement de terre, les murs vacillaient, se transmettaient les secousses. Un voile grisâtre de chaux et de ciment tomba en pluie du plafond, les recouvrit d’une épaisse couche de poussière, lui et les autres, tous accroupis dans un même désespoir. Le souffle de violentes déflagrations s’engouffrait dans les caves, levant des tourbillons de saleté et de poussière. Il se couvrit la bouche d’un mouchoir, eut de plus en plus de mal à respirer et n’arrêta plus de tousser.
Il lui sembla soudain qu’un coup à lui crever les tympans tonnait directement au-dessus de l’immeuble. Du verre explosa en éclats minuscules, une poussière de charbon microscopique surgit des fentes et les interstices des portes des caves et lui balaya douloureusement la peau du visage et des mains. Des tuyaux de plomb et des conduites d’eau se détachèrent brusquement de leur fixation et de l’eau gicle de partout. Les petites trappe d’accès en terre cuite destinées au ramonage est situées au pied des cheminées furent arrachées et projetées au loin par l’immense souffle qui s’engouffrait dans les conduits depuis les toits. Elles éclatèrent en mille morceaux contre les murs, suivies d’épais nuages de suie qui jaillissaient des ouvertures comme de la bouche de gigantesques tuyères. 

28 Thoughts on “Deux dans Berlin – BIRKEFELD et HACHMEISTER

  1. Bonjour,
    Tu me tentes vraiment, je note.
    Merci
    Anne

  2. keisha on 11 novembre 2024 at 07:31 said:

    Un bel enthousiasme! Contente que tu sois bien tombée cette fois!

  3. Eva m’avait déjà tentée, tu achèves de me convaincre ! La citation de Goering est plus que glacante… Je ne sais pas non plus si elle est avérée, mais elle lui ressemble assez!

  4. Athalie on 11 novembre 2024 at 09:43 said:

    Effectivement, c’est une bonne surprise que de te voir emballée par un polar ! Il semble passionnant et je suis convaincue !

  5. Le titre fait référence au roman de Hans Fallada, « Seul dans Berlin ? »
    Je retiens mais pour plus tard, ayant lu récemment la trilogie berlinoise de Philip Kerr, où l’on retrouve le même contexte et le genre polar…

    • oui cela fait penser à la trilogie berlinoise et je n’ai pas lu le roman de Hans Fallada mais sur babelio j’ai pu lire qu’un lecteur avait été déçu par ce polar car il pensait retrouver l’ambiance du roman de Fallada .

  6. J’ai lu et aimé ce roman. Je me demande d’ailleurs si ce n’est pas le premier tome d’une série…

  7. Te voilà bien enthousiaste, ça fait plaisir qu’un polar trouve grâce à tes yeux ! ;-)

    • complètement, j’ai vraiment beaucoup aimé et l’enquête est vraiment passionnante, mais c’est surtout la toile de fond historique qui m’a plu.

  8. J’avoue avoir été un peu inquiète quand j’ai vu le polar chez toi, mais en voyant les cinq coquillages, je me suis aussitôt détendue ! :) Je suis très contente que tu aies apprécié le livre autant que moi et sa lecture me revient avec ta chronique. C’est un roman très noir et pessimiste en ce qui concerne l’âme humaine, mais j’étais happée par l’image de la ville et l’ambiance que les deux auteurs ont réussi à brosser. En vérifiant leurs professions (historien spécialisé dans l’histoire culturelle et sociale pour Hachmeister; historien et politologue pour Birkefeld), je vois très bien toutes leurs connaissances qui ont permis à donner à cette histoire toute son authenticité.
    Merci beaucoup pour cette participation !

  9. 5 étoiles à un polar chez toi, on ne se pose pas de question et on note ! D’autant que le contexte est très intéressant.

  10. Un polar à l’arrière-plan historique intéressant. Je note ce titre.

  11. Très tentant mais en cette période de déprime automnale, je sens qu’il faudra s’accrocher…

  12. Je me demande si le titre est une référence à « Seul dans Berlin » de Hans Fallada. Tu as quand même mis 5 coquillage alors que tu n’es pas une grande amatrice de polar ! Donc, je note ce titre.

    • je n’ai pas lu Hans Fallada donc je ne peux pas répondre, mais oui c’est rare que j’aime un polar et pas seulement pour l’arrière plan l’enquête m’a beaucoup plu aussi

  13. C’est tentant.

  14. Tu me donnes une idée de cadeau à quelqu’un qui aime les romans historiques / polars

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