Éditions Picquier Traduit de l’anglais par Santiago Artozqui

Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard 

 

Ce roman a obtenu un coup de coeur à notre réunion du mois de décembre, je me suis empressée de l’emprunter et si j’avais réussi à le lire avant notre réunion je l’aurais défendu malgré mes quelques réserves.

Il a tout pour plaire ce roman : sous-tendu par le drame personnel de trois femmes iraniennes réfugiées en Irlande dans le comté de Mayo, le roman dévoilera peu à peu les horreurs qu’elles ont vécues sous la répression aveugle du shah d’Iran et la montée de l’intolérance islamiste. Dans ce petit village de Ballinacroagh, elles ouvrent un restaurant aux saveurs de leurs pays, et sont à la fois bien accueillies par une partie de la population et en butte à ceux qui voient d’un mauvais œil ces femmes venues d’ailleurs. Le style de Marsha Mehran est emprunt de poésie à l’image des contes perses et contribue au charme un peu envoutant de ce récit. Et puis, ce roman est un hymne à la cuisine iranienne, on savoure ces plats (que je me garderai bien d’essayer de reproduire malgré les recettes qui sont généreusement expliquées) tant elles demandent des épices que je ne saurai trouver sur mon marché de Dinard et tant elles me semblent complexes à réaliser. Ce qui est très bien raconté ici, c’est le poids de la cuisine dans l’exil : refaire les plats aux saveurs de son pays, c’est un peu vaincre la nostalgie de la douceur de la vie familiale qui a été détruite par des violences telles que la seule solution ne pouvait être que la fuite.

La description des habitants du village irlandais manque de nuances, il faut l’accepter pour rentrer dans le récit. Le succès du restaurant tient de l’envoutement pour des parfums d’épices venues d’ailleurs. L’amour de la plus jeune des sœurs pour le fils du personnage odieux qui veut racheter leur boutique relève du conte de fée . Cela ne m’a pas empêchée de passer plusieurs soirée en compagnie de ces personnages dans ce petit village arrosé d’une pluie continue ou presque. J’ai aimé le courage de ses trois femmes et de leur volonté de vivre quel que soient les drames qu’elles ont traversés. Évidemment, on pense à tous ceux qui ont essayé de fuir des pays où des répressions sans pitié écrasent toute tentative de vie libre.

La mort tragique de cette jeune auteure d’origine iranienne est un poids supplémentaire à la tristesse qui se dégage de cette lecture qui se veut pourtant résolument optimiste. Le roman se situe en effet à une période où les réfugiés iraniens trouvaient leur place dans un monde qui était plus ouvert aux drames des pays soumis à des violences inimaginables. Ce monde là, appartient au passé car nos civilisations occidentales sont surprises par l’ampleur des drames des pays à nos frontières et se sentent démunies face à l’accueil de pauvres gens chassés de chez eux et prêts à risquer leur vie pour un peu de confort dans un monde plus apaisé. Ce n’est pas le sujet de ce roman mais on y pense en se laissant bercer par le charme des saveurs des plats venus d’orient dans ce village où la viande bouillie arrosée de bière semble être le summum de la gastronomie.

Citations

La voisine malfaisante et médisante

Dervla Quigley avait été frappée d’incontinence, un problèmes de vessie très gênant qui l’avait cloué chez sa sœur -laquelle était dotée d’une patience à toute épreuve- et laissée l’essai totalement dépendante de celle-ci. Incapable de maîtriser son propre corps, Dervla avait bientôt été obsédée par l’idée de manipuler celui de tous les autres. Les ragots n’étaient pas seulement ses amis et son réconfort, mais aussi la source d’un grand pouvoir.

Vision originale de l’acupuncture

Elle était même allée consulter un acupuncteur chinois qui, au plus fort des seventies et de l’amour libre, s’étaient établis dans Henry Street à Dublin. La force de l’âme de ce chinois l’avait impressionnée -Li Fung Tao pratiquait son tai-chi matinal en toute sérénité pendant que les vendeurs ambulants de fruits et de légumes appâtaient les chalands en beuglant tout autour de lui-, mais ses aiguilles n’avaient eu pour effet que de lui donner l’impression d’être un morceau d’anchois plongé dans une marinade d' »alici » à base d’origan et de poudre de piment. 

Les épices

 Dans le livre de recettes qu’elle avait stocké dans sa tête, Marjan avait veillé à réserver une place de choix aux épices qu’elle mettait dans la soupe. Le cumin ajoutait au mélange le parfum d’un après-midi passé à faire l’amour, mais c’en était une autre qui produisait l’effet tantrique le plus spectaculaire sur l’innocent consommateurs de ce velouté : le « siah daneh » – l’amour en action- ou les graines de nigelle. Cette modeste petite gousse, quand on l’écrase dans un mortier avec un pilon, ou lorsqu’on la glisse dans des plats comme cette soupe de lentilles, dégage une énergie poivrée qui hibernent dans la rate des hommes. Libérée, elle brûle à jamais dans un désir sans limite et non partager pour un amant. la nigelle est une épice à la chaleur si puissante qu’elle ne doit pas être consommée par une femme enceinte, de peur qu’il ne déclenche un accouchement précoce.

 

 

Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard 

Je vais, comme d’habitude mettre des citations ou plutôt des extraits à la fin de mon billet. L’une prise au début et l’autre à la fin. Mais entre ces deux extraits, il ne se passe vraiment pas grand chose sinon une ambiance à laquelle j’ai été un peu sensible. Nous sommes en 1912, en février, un homme va s’élancer de la tour Eiffel pour tester sur lui-même son parachute destiné à sauver les aviateurs dont les aéronefs avaient la mauvaise habitude de se crasher en tuant leur pilote. La presse était conviée, c’est le début du cinéma et c’est pour cela que l’on a un petit film où l’on voit cet homme mourir sous les yeux du public. Comme l’écrivain, j’éprouve une sensation très forte devant l’hésitation de Franz Reichelt avant de se lancer tête baissée vers sa mort mais cela ne suffit pas à créer un roman.

L’auteur a recherché qui était Franz Reichelt, cet immigré venu de Bohème, tailleur de son métier. Mais on ne sait rien de lui, alors Étienne Kern raconte la vie des immigrés venant des pays de l’est Pologne ou Bohème et l’engouement pour l’aviation mais aussi les dangers mortels que cela représentait pour ces « fous volants ».

L’ambiance à Paris est assez bien rendue, mais j’ai trouvé ce roman très vide et je me suis demandé pourquoi il avait été écrit. En tout cas, je suis complètement passée à côté de son intérêt. Lors de la discussion du club, plusieurs lectrices avaient trouvé du charme à la vie du personnage et ont bien défendu ce roman. En revanche, un participant – oui un homme participe à nos discussions ! – n’a pas du tout aimé ce livre reprochant surtout le style de l’écrivain.

 

Citations

 

Le début

 4 février 1912, au petit matin. Une trentaine de personnes s’étaient rassemblées là, devant la tour Eiffel. Des policiers, des journalistes, des curieux. Tous levaient les yeux vers la plate-forme du première étage. De là-haut, le pied posé sur la rambarde, un homme les regardait. Un inventeur.
Il avait trente-trois ans. Il n’était pas ingénieur, ni savant. Il n’avait aucune compétence scientifique et se souciait peu d’en avoir.
 Il était tailleur pour dames. 
Il s’appelait Franz Reichelt. 

la fin

 Pour la dernière fois, je lance la vidéo. Tu es là, face à nous, immobile.
 Tu décroises les bras et, lente, silencieuse comme la mort qui vient, la cérémonie reprend : je retrouve tes gestes, le mouvement des pieds, ton corps qui tourne sur lui-même, ton sourire quand tu portes la main à ta casquette. Chaque seconde, désormais, est compté. Te voici déjà sur la chaise, un pied sur la rambarde.
 Les deux autres hommes sont sortis du champ. Tu es seul. Seul face au vide. Le sacrifice humain se prépare ; tu es le prêtre et la victime.
Ta mort est devant toi. Elle se dit au futur. Tu es mort mais tu vas mourir encore.
 Tu te penches, recules, te courbes vers l’avant puis recules à nouveau. Ce léger repli du tissu, dans ton dos, c’est l’instant, nous y sommes. 

Éditions Points . Traduit de l’anglais par Jean Esch

Après « la trilogie berlinoise » voici l’offrande grecque. Je retrouve avec plaisir cet auteur écossais qui cherche avec obstination pourquoi la réparation des horreurs commises par les nazis a épargné tant d’assassins allemands. Bernie Ghunter, le personnage principal, vit maintenant sous une autre identité à Munich pour faire oublier son passé de policier berlinois sous le régime nazi, il va se retrouver en Grèce où l’attend une enquête très compliquée et pleine de rebondissements sanglants et effrayants impliquant Aloïs Brunner, responsable de tant de crimes et entre autre de l’extermination des juifs de Salonique. (Aloïs Brunner a terminé sa vie en Syrie, il devient conseiller d’Haez el Assad qu’il aide à former les services de renseignement, et à organiser la répression et la torture dans les prisons. lisez l’article de Wikipédia qui lui est consacré).

Ce qui m’a intéressée dans ce roman, c’est l’analyse de cet auteur face aux réactions -si peu nombreuses- suscitées par les crimes nazis en Grèce. Qui sait que 43 000 mille juifs furent déportés sous les ordres d’Aloïs Brunner ?. Pour l’auteur la façon dont l’Allemagne domine à l’heure actuelle l’Europe est une belle revanche pour les nostalgiques de la grandeur de l’Allemagne. L’enquête passionnera plus que moi les amateurs du genre .

Citations

Réflexions sur les atrocités nazies

Juste avant la guerre, j’étais un jeune avocat au ministère de la justice, ambitieux, obsédé par ma carrière. à cette époque, la SS et le parti nazi étaient le moyen le plus rapide de réussir. Au lieu de cela, je suis resté au ministère, Dieu merci. si vous ne m’aviez pas fait changer d’avis, Bernie, j’aurais certainement fini au SD, à la tête d’un groupe d’action de la SS dans les pays baltes, chargé d’éliminer des femmes et des enfants juifs, comme un tas d’autres avocats que j’ai connus, et aujourd’hui, je serais un homme recherché, comme vous, ou pire. J’aurais pu connaître le même sort que ces hommes qui ont fini en prison, ou pendus à Landsberg. Il secoua la tête, sourcils froncés. Très souvent, je me demande comment j’aurais géré ce dilemme… les massacres…. Qu’aurais-je fait ? Aurais-je été capable de faire. ça ? Je préfère croire que j’aurais refusé d’exécuter ces ordres, mais si je suis vraiment honnête avec moi-même, je n’en sais rien. Je pense que mon désir de rester en vie m’aurait persuadé d’obéir, comme tous mes collègues. Car il y a dans ma profession quelque chose qui m’horrifie parfois. J’ai l’impression qu’aux yeux des avocats tout peut se justifier, ou presque, du moment que c’est légal. Mais vous pouvez légaliser tout ce que vous voulez quand vous collez une arme sur la tempe du Parlement. Même les massacres.

Les fraudes( ?) à l’assurance : humour noir.

Sur la note du restaurant apparaissait deux bouteilles de champagne et une bouteille d’excellent bourgogne. Peut-être était-il ivre, en effet, je n’en savais rien, mais si l’assurance payait, Ursula Dorpmüller toucherait vingt mille marks, de quoi faire d’elle une authentique veuve joyeuse. Avec une telle somme, vous pouviez vous offrir des tonnes de mouchoirs et un océan de condoléances les plus sincères .

Descriptions qui me réjouissent .

 Je fus accueilli dans le hall par un gros type qui brandissait une pancarte MUNICH RE . Il arborait une moustache tombante et un nœud papillon qui aurait pu paraître élégant s’il n’avait été vert et, pire encore, assortie à son costume en tweed (et vaguement à ses dents aussi). L’impression générale -outre que le costume avait été confectionné- par un apprenti taxidermiste, était celle d’un Irlandais jovial dans un film sentimental de John Ford.

Je peux lire des romans polars quand l’écrivain possède cet humour :

 Située à une vingtaine de minutes en voiture d’Athènes, la ville ne possédait plus aucun monument ancien important, grâce aux Spartiates qui avaient détruit les fortifications d’origine et les Romains qui avaient détruit quasiment tout le reste. Voilà ce qui est réconfortant dans l’histoire : vous découvrez que les coupables ne sont pas toujours les Allemands.

 

 

 

Édition Albin Michel. Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard.

 

Il fallait mon club de lecture pour que j’aille vers ce livre et que je le finisse même si à la fin, je le parcourais plus que je ne le lisais. Je dois dire qu’à la façon dont notre bibliothécaire nous avait présenté ce roman, je me doutais qu’il ne me plairait pas : « C’est un écrivain de la région, et il a situé son roman dans une station balnéaire qui pourrait être la nôtre. »

Ce roman se passe dans la région vannetaise et parle d’amour, celui que l’on fait et celui qu’on n’éprouve pas pour un fiancé choisi par son père pour sauver les affaires familiales, bien mal en point.

Tout n’est que lieux communs dans ce roman, quand on quitte un moment convenu, c’est pour aller vers un autre : la fiancée qui ne décide rien de sa vie, le patron qui se croit supérieur et méprise tout le monde, le noble du coin revenu de tout, L’amour pour les chiens et les chats, la gouvernante au grand coeur fidèle à la famille, la chasse où il ne faut pas tuer les animaux, le Yacht-club où le petit monde de notables de province se pavane…

Bref, je ne conseille ce livre qu’aux Parisiens qui veulent se persuader que la vie en province n’a pas changé depuis le XIX° siècle (mais vraiment Flaubert ou Maupassant vous en apprendra plus). Ou aux provinciaux qui veulent comprendre pourquoi on cherche à les caricaturer de cette façon. Mais surtout, je ne le conseille ni à ceux et celles qui aiment qu’un roman les accroche par le style, l’humour, ou la réalité sociale vue sous un angle original.

L’avez-vous deviné ? Je n’ai pas du tout aimé cette lecture.

Et lors de notre discussion au club de lecture, toutes les lectrices étaient de mon avis.

 

 

Citations

Cliché !

 En douce, Louise se glisse dans le hangar où s’agglutinent avec gravité des bonshommes un peu rougeauds, en pantalon blanc, blazer à boutons dorés, cravates aux rayures lichen et rose Mountbatten. Ce sont les dignitaires du yacht club du Guénic-sur-Vilaine. On dirait une chorale de pépères. Flanqués de leurs dames en robe à fleurs et de leurs enfants que Louise côtoie sans les aimer à la faculté de droit de Vanne, ils semblent intimidés, presque apeurés.

L’amour

 L’un et l’autre sont comme deux enfants perdus qui se repèrent et sentent , sans se l’être encore dit , qu’ils seront moins malheureux ensemble.

Je n’invente rien ! (Hélas !)

– Qu’attends-tu d’une épouse ? Lui avait, demandé le prêtre qui le prépare au mariage.
– Qu’elle soit sûre, avait-il répondu. Qu’elle me fasse de l’usage. 
On avait ri. Le prêtre avait voulu ne voir dans cette réponse qu’une ode à la fidélité. Pour laquelle on avait prié.

 

 

 

 

Édition Phébus. Traduit de l’anglais (États-Unis) par Nathalie Bru

Ce roman m’a été offert car j’avais bien aimé « Dans la Forêt » de la même auteure. J’ai plus de réserves sur celui-ci qui connaît cependant un beau succès sur la blogosphère . J’ai eu un plaisir certain à découvrir les destins croisés de Cerise et Anna. Ces deux femmes ont, au même âge, avorté pour Anna, eu un bébé pour Cerise. Nous retrouvons ces deux femmes à d’autres moments clés de leur vie. Cerise éprouvera pour sa fille Mélody un amour si fort qu’elle pensait que rien ne pourrait briser leur entente fusionnelle. Anna se réalisera comme photographe auprès d’un homme attentif avec qui elle aura deux enfants. Elle cachera à tous son avortement et pense mener sa vie sans que cela prenne trop de place.

Pour Cerise la vie est faite de toutes les difficultés d’une mère célibataire pour qui la survie est toujours remise en cause par le moindre problème, et elle va les accumuler, les problèmes ( un peu trop à mon goût). Cela nous vaut l’habituel plongée dans le monde des exclus de la prospérité américaine.
Avec Anna nous partageons la vie d’une femme qui se demande si sa vocation d’artiste vaut la peine de bousculer sa famille en particulier ses deux petites filles.

A travers des rebondissements tragiques pour Cerise, plan galère pour Anna, ses deux femmes se retrouveront et permettront à l’une comme à l’autre un nouveau départ dans leur vie.

J’ai retrouvé les longueurs habituelles pour ce genre de roman américain, plus de six cent pages ! Je peux parfois avoir plaisir à rester longtemps avec des personnages et des lieux mais dans ce roman je me suis trouvée avec des personnalités figées dans des attitudes et des situations qui me semblaient plus proches de la démonstration ou du cliché que de personnes réelles. La révolte de Mélody à l’adolescence tellement traitée dans tous les romans, séries et films américains est un grand classique. Ainsi que la misère de ceux qui en sont réduits à vivre dans un mobile-home comme Cerise avant d’être réduite à dormir dans la rue après le tragique incendie dans lequel son bébé trouvera la mort.
De l’autre côté la difficulté à être une bonne mère quand on veut se réaliser à travers son travail artistique et permettre à son mari de trouver un job à la hauteur de ses ambitions intellectuelles est un sujet intéressant mais déjà traité dans bien des romans.Voilà ma réserve principale, je n’ai pas réussi à croire aux deux personnages de femmes. Je ne voudrais pas que mon opinion l’emporte sur votre envie de lire ce roman qui reçoit des éloges en grande partie mérités .

 

Citations

L’œil de la photographe

Bien avant d’avoir tenu un appareil photo entre les mains, elle s’était aperçue que, juste en regardant un objet ordinaire, elle pouvait le transformer en quelque chose de rare et d’étrange. Cette sensation que les autres enfants obtenaient en tournant sur eux-mêmes ou en se laissant rouler dans la pente des collines, elle l’éprouvait en scrutant de toutes ses forces le robinet en laiton du mur latéral, ou le moineau qui sautillait sur la terre polie en dessous des balançoires, au point bientôt de ne plus voir que le lustre de l’usure sur le bec du robinet ou l’étincelle dans l’œil du moineau.

Remarque de la mère des dessins de Cerise à propos de son père.

Je ne sais pas du tout d’où tu tiens ça, pas de moi, en tout cas, ça c’est sûr, ni de ton père, disaient-elles avant d’enchaîner, pleine d’amertume : Ton père n’était même pas fichu de se dessiner un avenir.

Dieu

 Parfois, elle essayait de prier, comme Sylvia et Jon le lui avaient conseillé. Mais des réponses qui lui venaient quand elle tentait d’adresser ses réflexions à Dieu pour qu’il lui serve de guide ne ressemblaient jamais à ce qui aurait plu à Sylvia et à Jon, si bien que Cerise se disait qu’elle s’y prenait mal, que ses prières passaient sans doute à côté de Dieu sans l’atteindre, comme quand elle composait un faux numéro et se retrouvait avec un inconnu au bout du fil.

Tellement vrai

 Personne n’a le choix, ajouta doucement sa grand-mère. on se dit toujours, « je ne pourrais pas le supporter », mais quand ça arrive, on voit que c’est la seule option possible : supporter.

Des femmes dans le malheur

 Parfois les femmes pleuraient, et les larmes qui coulaient sur leurs joues fatiguées jusqu’à leur de menton tremblant paraissaient minuscules comparées à leur ocean de souffrances. Cerise trouvait une sorte de réconfort dans leur histoire et dans ces larmes -pas par ce qu’elle aimait voir toujours plus de souffrances, mais parce que la souffrance était la vrai conditions des humains. C’était logique que les gens souffrent, logique que rien n’aille bien très longtemps. En regardant les autres femmes se rassembler autour de celles qui pleuraient, pour lui tapoter le dos et essuyer ses larmes, Cerise se sentait presque de la famille, presque de la famille des femmes qui la réconfortait.

 

Édition Actes Sud . Traduit de l’anglais (États-Unis) par Céline Leroy.

Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard.

 

 

Il pourrait être un de vos cadeaux de Noël, ce roman. En tout cas, j’espère que ceux et celles qui aiment les romans qui se passent dans la nature encore sauvage vont le noter, même si cette superbe nature est en train de se faire dévorer par un incendie comme ceux qui tous les ans détruisent les somptueuses forêts américaines ou canadiennes.
Ce récit décrit l’aventure de deux jeunes amis , Wynn, et Jack qui ont décidé de descendre le fleuve Maskwa jusqu’à son embouchure dans la baie d’Hudson. Ils ont très bien préparé ces quelques semaines d’aventures dangereuses mais à leur portée car ils connaissent bien tous les deux la vie dans la nature peu ou pas domestiquée par l’homme. Ce sont deux pêcheurs émérites et cela nous vaut de très belles scène dans des cours d’eau sauvages aux rapides imprévisibles.
Et puis, deux événements vont transformer ce voyage de rêve en un vrai cauchemar. D’abord, ils repèrent un incendie d’une force incroyable, ils n’ont donc qu’une solution aller de plus en plus vite pour rejoindre leur point d’arrivée, mais on sent qu’ils en sont capables d’autant que Jack connaît très bien les dangers du feu de forêt. Mais un deuxième danger va donner à cette course contre la montre un aspect de thriller absolument haletant. Will et Jack doivent sauver une femme laissée pour morte par son mari sur une plage et Jack comprend tout de suite cet homme est prêt à les tuer eux aussi.
Face au danger, les deux personnalités des deux amis vont diverger. Wynn, le gentil, ne peut croire à la méchanceté humaine et sans le vouloir, il met en danger la réussite de leur expédition car son premier réflexe est toujours de croire à la bonté. Jack le sait et prend le leadership de leur expédition. La tension entre les deux amis donne une profondeur au récit que j’ai beaucoup appréciée. Et puis la nature toujours présente amicale ou hostile ponctue ce texte de moments inoubliables.

Un grand roman dans lequel a forêt, la rivière, le feu sont des personnages au même titre que les protagonistes de de ce drame.

 

Citations

Le feu

 « Ouais, mais si on est au milieu de la rivière.. »
Jack haussa les épaules.  » Peut-être. L’air devient brûlant. C’est ça qui crée un incendie dévastateur. En fait, les rouleaux de fumée sont chargés de gaz et si le vent est favorable, à la moindre étincelle, tu peux te faire carboniser à quatre cents mètres. »

Les rapides

 Ce devait être des chutes de classe VI, une série de saillies rocheuses englouties sous un volume d’eau gigantesques. On aurait dit un orage en mer du Nord dévalant un escalier. Vingt et un mètres entre le sommet et le fond avec une pente qui s’étendait sur deux cents mètres. Au milieu, un îlot rocheux de la taille d’une barque portait un épicéa tordu et rabougri. Voir cet arbre trembler dans tout ce chaos ne rendait la cataracte que plus terrifiante.
 Le soleil perça un récif de nuages et éclaira les chutes, d’argent ses rayons sur les eaux-vives et neigeuses, mettant étonnamment les sonorités encore plus en relief, et Wynn se dit que ça aussi, c’était magnifique. Que la roche brute des saillies ou les avalanches étaient magnifiques.

Le feu

 Une grosse partie de la région avait été couverte de lichens et de mousses parfois sur plusieurs dizaines de centimètres d’épaisseur et tout ça avait brûlé dans la nuit, avec les sous-bois, les épilobes et les saules, ne restaient que la terre calcinée et la roche, les pieux noirs et sépulcraux des arbres, et sans la forêt, on voyait beaucoup plus loin, le sol qui s’élevait légèrement et retombait tout autour des eskers quasiment débarrassés de leur arbres, des plis où les ruisseaux avaient coulé, secs comme s’ils s’étaient évaporés.

 

 

 

Édition de l’Olivier

 

Une lecture que je n’oublierai pas, un roman facile à lire et très bien construit écrit dans une langue simple et efficace. Une jeune femme Bess renoue ses lacets, elle doit pour cela lâcher la main de l’enfant qui était avec elle. Geste normal et simple, sauf que l’écrivaine entraîne son lecteur en Alaska en plein blizzard. L’enfant en quelques secondes a disparu. Le roman commence sous forme de monologues intérieurs, tous les habitants de ce coin perdu d’Alaska vont partir à la recherche de Bess et de l’enfant qui vont mourir de froid si on ne les retrouve pas immédiatement. Les quatre personnages que nous allons entendre ont tous les quatre un poids énorme d’une souffrance de leur passé que cette recherche dans le froid extrême et le blizzard va mettre à jour.

Bess tout d’abord qui s’en veut d’avoir lâcher la main de cet enfant, et nous comprendrons que peu à peu son rôle dans cette histoire et pourquoi elle est arrivée auprès de Bénédict et son « fils » dont elle s’occupe.

Bénédict le père de l’enfant qui fou de douleur part à leur recherche. C’est un homme des bois adapté à cette région et il sait que ces deux personnes sont en grave danger. Il racontera l’histoire de sa famille et la fuite de son frère Thomas qu’il n’a jamais acceptée, c’est en le recherchant que sa route croisera celle de l’enfant qu’il a reconnu comme le sien.

Cole le personnage négatif mais vous découvrirez pourquoi et son acolytes Clifford.

Freeman le policier Noir vétéran du Vietnam qui donne à cette histoire un côté suspens qui est bien fait.

J’ai aimé découvrir les quatre personnalités qui vont peu à peu construire l’histoire, le blizzard la difficulté de la vie dans cette partie du monde fait tout le charme de ce livre. Un bémol à mon enthousiasme, mais très léger les personnages sont sans doute un peu simples, certains diront un peu faciles. Mais j’ai apprécié que les hommes si proches de la nature ne soient pas meilleurs que les New – Yorkais, ma fréquentation du monde rural m’a prouvé qu’il y a des gens biens partout et des crapules aussi. La différence c’est que, en ville, on peut parfois les éviter à la campagne beaucoup moins !

Citations

 

L’angoisse

 Rétrospectivement, je crois que j’ai senti que quelque chose ne tournait pas rond. C’est un peu comme lorsque vous avez la sensation qu’un insecte vous chatouille l’oreille. Vous faites un geste pour vous en débarrasser, mais en réalité c’est une alarme, votre alarme interne, réglée au strict minimum. Pas assez forte pour vous faire bondir, mais juste assez pour vous empêcher de dormir tranquillement. Je dormais justement et je me suis réveillé en sursaut.

L’Alaska en hiver

 La poudreuse m’arrive à mi-cuisse. Chaque pas est un effort. chaque pas est une brûlure. Pourtant, j’ai déjà connu ça. il nous est arrivé quelques fois, quand nous étions mômes, de nous retrouver coincés avec papa, alors que nous étions partis relever des pièges ou chasser, à cause d’une chute de neige un peu plus importante que ce qu’il avait prévu, même s’il avait un sixième sens pour prévoir le temps qu’il allait faire. Il arrivait toujours à nous ramener sains et saufs si nous n’étions pas trop loin de la maison pour que maman ne s’inquiète pas, ou alors il nous trouvait un abri de fortune.

 

Le personnage négatif (Cole)

 J’ai jamais eu envie de m’encombrer d’une bonne femme et, comme il en faut une pour faire des gosses, j’en ai pas eu. Les bonnes femmes, c’est que des ennuis. Elles sont jamais contentes. À croire que le bon Dieu les a créés imparfaites pour nous faire tourner en bourrique. Maintenant, en plus elles veulent tout comme les hommes, le travail, les salaires, les mêmes droits, comme si elles voyaient pas la différence. pourtant, ça saute aux yeux qu’elles sont pas faites comme nous. Elles sont faibles et géniales, elles savent pas ce que c’est la vraie camaraderie des hommes entre eux.

Retour de la guerre d’Irak

La guerre nous avait pris notre fils et elle nous avait restitué que le négatif de la photo, juste une ombre blanche sur un fond désespérément sombre.

Éditions Gallmeister. Traduit de l’américain par Françoise Happe

Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard 

 

Le club de lectures me conduit à lire des livres que je ne choisirai jamais, et souvent ce sont de bonnes surprises. Ici il s’agit d’un roman policier, on ne peut plus classique, et, ce fut un vrai pensum pour moi. Le seul intérêt réside dans le suspens ce qui entrave toujours ma lecture. J’ai essayé de jouer le jeu et de ne pas commencer le roman par la fin mais pas de chance les ficelles sont si grosses que j’ai immédiatement compris de quoi il s’agissait. Comme l’enquêteur est un personnage récurent on sait qu’il ne va pas mourir puisqu’il doit être disponible pour les autres enquêtes.

Calhoun est un homme amnésique qui a été un agent très performant d’une agence secrété américaine. Même s’il ne se souvient de rien ses réflexes d’enquêteurs sont parfaits et donc la même agence l’utilise pour résoudre une affaire étrange dans laquelle un de leurs hommes a trouvé la mort. Ce qui est bizarre c’est qu’on l’a retrouvé avec une balle en plein coeur alors qu’il était déjà mort de botulisme à côté d’une jeune femme morte dans les mêmes conditions.

J’espérais qu’en dehors de cette enquête sans le moindre intérêt, j’allais me plaire dans des paysages somptueux du nord américain. Mais à part une partie de pêche rien n’est venu égayer cette lecture. Je vais sans aucun doute choquer touts les amateurs du genre et de cette prestigieuse maison d’édition, mais je le redis les polars dont l’intérêt ne réside que dans le suspens, ce n’est vraiment pas pour moi.

 

 

Citations

Humour, choix des mouches et psychologie des poissons

 Il y a des jours, dit Calhoun en hochant la tête, ils restent là sans bouger et ils se disent, je mordrais à rien, sauf si c’est une Matuka jaune avec trois bandes de Flashabou de chaque côté, fixée à un hameçon Limerick 4XL avec du fil blanc. D’autrefois, ils vont attendre une Black Ghost Carrie Steven toute la journée, et s’ils s’aperçoivent que ce n’est pas une authentique, ils disent : Bn, je laisse tomber, ils préfèrent rester sur leur faim. 
Fallows fronça les sourcils comme s’il se disait qu’on était peut-être en train de se payer sa tête, mais il n’en était pas sûr.
– Stoner a raison, dit Kate. On emporte jamais trop de mouches parce que, comme vous l’avez dit, on ne sait jamais ce que les poissons pourraient penser.

,

Édition Acte Sud

C’est peu dire que j’aime cet auteur, je veux bien partir avec lui dans toutes « ses traversées » à l’origine de la famille Desrosiers sans jamais m’ennuyer. Après, « Victoire » et surtout « La traversée du Continent » qui avait vu la petite Rhéauna, arriver chez sa mère Maria qui l’a fait venir pour s’occuper de son petit frère né d’un autre père, nous voilà avec elle, sa mère et son petit frère en 1914 à Montréal. Rhéauna, a fini par accepter et aimer son sort car son petit frère est adorable et sa mère fait tout pour qu’elle aille à l’école et satisfasse son envie de lecture. Elle ne s’occupe du petit que lorsque sa mère travaille dans le bar le soir. Mais cette enfant écoute les conversations des grands et évidemment, en 1914, on parle de la guerre, comme c’est une enfant courageuse, elle décide de sauver sa mère et son petit frère et d’acheter des billets de train pour rejoindre ses grands-parents et ses deux sœurs à la campagne dans le Saskatchewan. On suit donc le trajet de cette enfant à travers la grande ville de Montréal et tous les dangers qu’elle est capable d’affronter seule. Mais le roman n’est pas construit de façon linéaire, parfois nous sommes en 1912 quand Maria arrive chez son frère Ernest et ses deux sœurs Tititte et Tina et qu’elle explique pourquoi elle est venue les rejoindre : elle est enceinte d’un homme qui n’est pas de son mari et qui a disparu .

Dans « la traversée des sentiments » les enfants sont un peu plus grands et les sœurs ont décidé de revenir à Duhamel. Là où la famille a des attaches racontées dans le roman « Victoire ». Ce roman est l’occasion de plonger dans la vie des trois sœurs dans ce qu’elle a de plus intime. Michel Tremblay est un analyste de l’âme féminine d’une finesse et d’une délicatesse incroyable. Les huit jours de vacances à Duhamel le petit village de campagne vont donner le courage à Maria pour aller chercher ses filles chez ses propres parents dans le Saskatchewan.

Tout le charme de ces romans vient du style de l’auteur et du temps qu’il prend avec chaque personnage pour nous faire comprendre leurs choix de vie. Et puis il y a le charme du québécois qui chante à mes oreilles. C’est un auteur qui me fait du bien alors qu’il ne raconte pas des vies faciles, je préfère largement cette approche par la littérature de la vie très dure aux romans où l’auteur se plaît dans le glauque.

 

Citations

Maria

 Maria marchait vite, s’intéressait peu aux vitrines pourtant magnifiques devant lesquelles elles passaient et n’arrêtait pas de lui dire de se dépêcher alors qu’elle n’étaient pas du tout pressées. Sa mère ne se promènent pas, elle se « rend » quelque part.

Théorie médicale

 Leur mère avait terrorisé ses enfants pendant des années en guettant chez eux le moindre petit symptômes de rhume pendant les vacances estivales. « Un rhume en hiver, c’est normal, il fait frette, on attrape froid au pieds, pis c’est plein de microbes. Un rhume en été, c’est parce que le corps va pas ben, que le sang est pourri, pis on peut attraper des numonies sans même s’en apercevoir ! C’est hypocrite, les numérisés d’été. Ça tue le temps de le dire. »

J’aime cette façon de raconter :

 C’est un drôle de mot succomber. C’est un mot qui fait honte après, qu’on trouve laid après, mais qui est tellement différent pendant que ça se passe. Succomber quand t’es pas marié, ça fait peur avant, t’as honte après, mais si t’es en amour, c’est tellement magnifique pendant.

Le plaisir et le bonheur des femmes

 Les autres femmes n’osent pas intervenir. Elles ne se regardent même pas. Titille à connu un mariage blanc catastrophique avec un Anglais frigide, Tina a aimé avec passion un homme qui l’ a laissé tomber quand il a appris qu’elle attendait un enfant de lui, Maria a quitté deux ans plus tôt un vieux monsieur bien gentil et fort généreux mais qui était loin de combler ses attentes après avoir été marié à un marin toujours absent et qui ne revenait que pour lui faire des enfants. Et voilà que leur cousine disparue de la Saskatchewan des années avant elles, celle qu’on tant conspué dans les soirées de famille, dont elle disait qu’elle était allée s’enterrer dans le fond des Laurentides, dans l’Est Du pays, pour cacher sa vie de misère avec un batteur de femmes, celle qu’on donnait en exemple pour faire peur aux jeunes filles qui voulaient quitter le village à la recherche du grand amour, Rose Desrosiers, qui portait presque un nom de sorcières, se révélait être la seule comblée d’entre elles, sans doute la plus heureuse, en tout cas la plus satisfaite de son sort.

 

Éditions Robert Laffont

Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard 

Cela fait très longtemps que je n’ai pas autant souri à la lecture d’un livre. J’espère que vous savourerez les extraits que j’ai choisis ; j’ai failli recopier des pages entières, tellement j’appréciais l’esprit si caractéristique du XVIII° siècle de cet auteur. Louis-Henry de La Rochefoucauld est drôle, ne se prend jamais au sérieux et manie l’ironie aussi bien que Voltaire (que pourtant il déteste !). Mieux que l’ironie, je parlerai plutôt d’humour car l’auteur n’a aucune pitié pour lui ni pour les descendants de sa si noble famille.

En deux mots voici l’histoire, l’auteur rencontre dans un café Louis XVI et sa pauvre épouse Marie-Antoinette et, en panne d’inspiration, il décide d’écrire un livre pour réhabiliter la mémoire de ce roi. Au passage, il égratigne l’idéal révolutionnaire, mais on peut l’excuser sa famille a payé un lourd tribut à la chasse aux aristocrates – quatorze personnes auront la tête tranchée ou seront noyées ou fusillées car elles étaient apparentées à sa famille.

Le livre parcourt notre époque avec un regard décalé qui lui donne le droit de tout dire même ce qui peut sembler inconvenant . Je dois dire que le dernier quart du livre est moins pertinent et la défense des gilets jaunes comme bastion de l’esprit français ne m’a guère convaincue. Je passe au delà de cette réserve tant j’étais bien avec son interprétation de la révolution et de ses difficultés dans la vie actuelle.

 

 

Citations

J’adore l’humour de cet écrivain( il faut rapprocher ces deux passages) :

Son ancêtre à la cour du roi Louis XVI

 Chaque matin, à son réveil, il (Liancourt) tirait la chemise de nuit royal par la manche droite le premier valet s’occupait de la manche gauche.

lui

En 2018, j’occupais la charge de grand-maître de la garde-robe de ma fille. Quand j’habillais Isaure le matin, je ne réglais pas que la question épineuse de la manche droite : les caisses de mon ménage étant ce qu’elles étaient, je n’avais pas les moyens d’engager un premier valet pour la manche gauche.

C’est simple mais j’aime bien que ce soit dit comme ça :

 Je passais là-bas trois semaines chaque été avec mes soeurs, mon frère Jean, mes cousins Alexandre et Charles-Henri et les nombreuses vaches du coin, élégantes montbéliardes qui venaient brouter jusqu’aux abords de la maison. Elles étaient tolérées, les touristes, non. 

Les repas

Nous, les enfants, étions soignés par les plats du terroir de Mme Bichet, robuste cuisinière qui eut la chance de mourir avant d’avoir entendu parler de recettes au quinoa et d’allergies au gluten.

J’ai éclaté de rire et c’est si rare !

– Vous êtes quoi, vous, La Rochefoucauld ? Duc ?
– Bien que je porte le prénom des princes de Condé, je ne suis rien, Votre Majesté. Un modeste comte sans la moindre terre.
– Un comte hors-sol. mais enfin, c’est fâcheux ! il faut y remédier. 

– Aucun homme politique n’en a encore fait sa priorité.

Interview d Arielle Dombasle :

 Souriant jusqu’aux oreilles, elle m’a sorti ces mots typiquement thalasso qui m’ont secoué plus qu’un jet tonifiant : 
 « Moi, Louis Henri, je veux bien mourir pour le peuple, mais sûrement pas vivre avec le peuple ! »

Propos d ‘aristo

Je ne sais plus qui parlait de la perpétuelle déception du peuple par la bourgeoisie, du perpétuel massacre du peuple et par la bourgeoisie… Les démocrates-républicains prétendent représenter le peuple, mais, dès que les gens du peuple pointent le bout de leur nez, ils sortent les blindés de la gendarmerie, leur tirent dessus et prennent la poudre d’escampette. On me diras que je caricature, je ne caricature pas : c’est comme ça que les Thiers traitent le tiers état.