Un livre que ma sœur m’a prêté en me disant : « Ce roman raconte parfaitement, ce qui se passe quand une famille nombreuse a la chance d’avoir une grande maison de vacances. ». Dans ma ville, je connais bien ce genre de maisons et de familles qui s’y retrouvent l’été et que je croisent tous les étés sur ma plage. Le roman se passe dans les régions des abers, une Bretagne plus sauvage que la côte d’émeraude dinardaise. Mais les comportements sont les mêmes. Réunis ces familles forment des clans et se sentent intouchables. Ils ont leurs rituels, se savent observés sans que cela ne les dérange. Dans ce récit l’auteur raconte très bien le poids et le charme de la maison, on sent aussi que celle-ci devient un peu lourde financièrement pour chacun, elle ne restera peut-être pas dans la famille dans une autre génération. Il décrit aussi le bonheur des enfants, ce sont eux qui vivent le mieux ce genre de vacances. La plage et les jeux d’enfants dans le grand jardin ont marqué l’écrivain et il pense qu’il en sera de même pour les enfants de la nouvelle génération. Un enfant le touche particulièrement, un petit Jean qui lui fait penser à lui, enfant ? C’est grâce à lui qu’il comprendra que c’est à son tour maintenant de passer du côté des adultes et de transmettre aux enfants les savoirs importants : faire du vélo, la pêche aux crabes … pour les jeux, les enfants n’ont besoin de personne.
Le hasard de mes lectures, font que je rapproche l’histoire de deux maisons de famille, qui se ressemblent dans ce qu’elles disent des joies et des souvenirs d’enfance heureuse. Mais ce roman est plus léger, sauf bien sûr la tragédie qui touchera le petit Jean. J’en ai aimé la lecture, et l’évocation d’une Bretagne que je connais bien. La volonté de l’auteur de ne pas nous faire connaître davantage la vie du narrateur rend le récit un peu vide. On ne sait pas pourquoi il a détesté cette famille ni pourquoi il est revenu. Il veut que ce mois d’août soit celui de son retour vers une maison et des rituels familiaux dont un m’a semblé bien cruel : chaque enfant, l’été de ses six ans, doit jeter son doudou dans la mer … Quand on sait ce qui arrive au petit Jean quinze jours plus tard, on peut imaginer que sa mère aura trouvé cette violence bien inutile !

En réalité on ne connaît très bien personne de cette famille, on reste à la surface des gens, nous avons le décor et un film qui nous permet de voir ces gens de loin sans qu’ils ne nous deviennent familiers. Comme le dit l’auteur, cette famille sait appartenir à une forme d’aristocratie qui reste sur son quant à soi. Les personnages du peuple ont eux plus de consistance , comme l’ostréiculteur qui vend ses huîtres en Italie, mais ils n’appartiennent pas au clan .

Un roman qui décrit bien les vacances d’été pour les enfants, dans un cadre dont l’auteur sait nous décrire tout le charme. Mais un roman qui m’a aussi agacée par son côté « grande famille comme il faut » qui regarde un peu de haut le brave peuple dont je fais partie.

 

Citations

Ceux qui ont eu la chance d’avoir une grande maison de vacances se reconnaîtront dans ce passage.

Quand on croisait un nouveau parent ou des amis de passage, la discussion s’engageait toujours de la même façon : Quand es-tu arrivé ? Quand repars-tu  ? Les grandes vacances signifiaient la succession des arrivées et des départs des uns et des autres. On ne retenait jamais. Mais quand un visage disparaissait, on devinait qu’il était parti pour de bon. On ne le reverrai plus avant l’année prochaine. Et on acceptait de ne pas le revoir pendant si longtemps seulement parce qu’il était aussi la promesse du prochain été. Il y a comme ça des gens qu’on ne peut voir à aucune autre époque. Ils sont d’août. 

Ceux qui viennent d’une famille nombreuse se reconnaîtront .

 Je subissais un paradoxe familial, balançant entre la joie des retrouvailles et le soulagement du départ prochain. Nous formions un monde à part autosuffisant, suffisant, envié par d’autres sûrement. Mais le cercle familial excluait autant qu’il rapprochait.

Le déclin religieux .

Des messes, il y en avait dans chacune des trêves de la paroisse et tous les dimanches. Désormais, il n’y avait plus qu’un seul office dominical pour le canton., deux peut-être, en plus de la messe anticipée du samedi soir il fallait lire la feuille paroissiale pour se tenir au courant. Ce pays de prêtres en était devenu orphelin. Ce pays de fidèles les voyait disparaître ; ils s’étaient pourtant tassés en foule, les femmes d’un côté, les hommes de l’autre, sur les bancs en bois aujourd’hui clairsemés. 

Genre de comparaison pas terrible, si ?

 La maison était comme le corps d’une femme aimée dans la nuit totale ; sans en distinguer l’épiderme j ‘en savais tous les contours

Je suis d’accord avec cette remarque.

 J’avais de la sympathie pour lui mais je savais qu’il était de ceux qu’il vaut mieux ne pas trop connaître pour continuer à les aimer. 

26 Thoughts on “Que reviennent ceux qui sont loin. – Pierre ADRIAN

  1. Pour moi qui ne partais pas en vacances, enfant, et qui participais à peu de réunions familiales, ça serait plutôt exotique… je ne suis pas plus tentée que ça, ceci dit.

  2. keisha on 2 octobre 2023 at 11:49 said:

    Pas trop mes souvenirs… Mais j’imagine bien…

  3. Ces grandes familles sur ta plage : ça m’a fait sourire.

  4. Je suis allée du coté Abers, il y a 3-4 ans maintenant mais je n’y possède pas de maison de famille. Je comprends que ce roman puisse à la fois charmer et agacer.

  5. J’ai beaucoup aimé l’ambiance et j’ai trouvé l’histoire touchante. Je trouve que l’auteur a une très belle plume pour son jeune âge.
    Je comprends ce que tu dis sur « la maison de famille » des riches (j’ai pu observer ce que tu décris) mais je n’ai pas pensé à cela en lisant le roman.

  6. « qui regarde un peu de haut le brave peuple » c’est exactement ce que j’avais ressenti à la lecture de son premier livre qui se passait dans les Pyrénées. Je n’ai pas envie de refaire une tentative.

  7. J’ai beaucoup aimé l’ambiance de ce livre. Les grandes familles de bord de mer avec des maisons ouvertes uniquement l’été : pour ma part je ne vois pas le côté « on est entre nous » que j’imagine pourtant. J’y vois plus les bêtises et jeux avec les cousins, cousines. Cela m’a rappelle la maison de mes grands-parents, une maison moche en ville et pas loin de la mer. Avec mes cousines on se rappelle maintenant nos jeux, nos expériences…que de bons souvenirs qui restent.

    • mon ressenti est peut-être déformé par les habitants des grandes villas qui donnent sur ma plage. Et c’est vrai qu’il raconte bien et de façon sensible ses souvenirs d’enfance

  8. Coucou,

    Rien à voir avec ton article…. est-ce bien pour toi que j’avais enregistré une adresse mail (avec douin) pour l’abonnement aux articles du blog ? Je ne sais pas si ça marchait, d’ailleurs, mais je viens de la supprimer par inadvertance. Du coup je t’ai renvoyé une invit pour t’abonner à l’adresse « luocine »…

    • Je sais qu’on ne peut plus s’abonner à mon blog et mon fils qui a bien d’autre chose à faire n’a pas le temps de régler ce problème, j’espère que je t’ai répondu. À bientôt

  9. Je faisais partie de cette grande famille comme il faut…parisien, grande maison sur la mer … et ce n’est que en grandissant que je me suis rendu compte de notre inconsideration des autres

    • Quand on appartient à un groupe social on n’en voit rarement les limites. Une plage est ouverte au public, est un lieu d’observation intéressant de ces groupes qui se côtoient en se mélangeant rarement, parfois les enfants jouent ensemble.

  10. Ca pourrait me plaire… moi qui regarde tout de même ses familles sur la plage… Et puis si c’est relativement léger, pourquoi pas.

  11. J’ai rencontré l’auteur l’année dernière, fort sympathique et pas du tout  » grande famille » … J’ai offert son livre à une amie qui a une maison de famille à Saint Jacut ( tu connais forcément, Luocine) et elle a eu la même impression que toi !

    • mais je dis aussi que son roman est écrit avec une grande sensibilité . Je crois que cette impression vient du fait que les personnalités de la famille en question ne sont pas très fouillés comme si appartenir à cette famille suffisait à les définir.

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