Éditions Les Avrils, 210 pages, janvier 2024

Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard.

Un très bon moment de lecture pour ce récit qui décrit un milieu que je connais mal, celui de la chanson. Il y a deux temporalités dans le récit, celui du groupe d’étudiants qui était bien parti pour connaître le succès, composé du narrateur, Félix, chanteur et guitariste, le deuxième guitariste et chanteur Louis, une musicienne à la basse Alex, et un batteur Rémi. Et le Félix d’aujourd’hui père d’Élie un bébé qu’il a eu avec Anna une femme infirmière, et qu’il aime beaucoup.

Le groupe de musique n’existe plus, on apprendra au fil des chapitres pourquoi, mais on comprend très vite que Louis, le plus déjanté d’eux quatre en est la cause. Aujourd’hui Félix essaie de vivre de sa musique mais seul, il a beaucoup de mal à s’imposer. Son « agent » Marc lui promet la réussite mais qui ne vient pas. Félix essaie de gagner de l’argent, de bien s’occuper de son fils, et de ne pas décevoir Anna. Heureusement, il est apprécié par des personnages sympathiques comme Kacem, celui qui tient un bar en dessous de chez lui et qui est toujours prêt à l’aider. Il y a aussi Anna, qui l’aime mais qui voudrait qu’il essaie de mieux gagner sa vie car c’est elle qui doit assumer financièrement, et c’est trop lourd pour elle, et puis il y a Alex, la musicienne, qui viendra le voir à un moment important pour lui. Comme Anna, on est bien obligé de constater que dans sa vie actuelle ce n’est pas à travers les concerts ratés dans des salles où personne ne l’écoute qu’il est vraiment heureux.

Le charme du récit c’est la simplicité avec laquelle il est écrit, on suit très bien toutes les difficultés de Félix et avec lui je regrette que le genre de chanson qu’il compose n’ait pas plus de succès. Encore que, la chanson qui a tant de succès en ce moment « la symphonie des éclairs » de Zao de Sagazan me donne de l’espoir pour les chansons françaises.

Je l’ai déjà dit, je n’aime pas que dans les romans on présente la drogue comme un produit banal, il y a beaucoup de drogues dans les concerts et cela détruira un des membres du groupe, je le sais bien et cela m’attriste à cause de la violence que ce trafic impose à des quartiers et à des pays.
Mais ce n’est pas du tout l’essentiel du roman qui est plein de sentiments positifs, dans un monde parfois brutal qui utilise les artistes sans les respecter.

 

Extraits

Début.

Il n’y a pas d’applaudissements. Les conversations reprennent, je bois une gorgée de bière avant de me réaccorder. J’égraine doucement les cordes. De haut en bas, des graves jusqu’au aiguës. Les notes s’élèvent et flottent au dessus de la salle. À mes pieds, la diode de l’accordeur clignote. Je tourne à peine les mécaniques. Un quart de ton, pas plus. Des réglages fins pour parfaire l’équilibre 

 

La gentillesse du voisin.

 Elle range son vélo dans la cour derrière le scooter de Kacem. Elle ne l’entretient pas et répète qu’il est increvable, qu’à l’époque on faisait des objets robustes. J’acquiesce sans commentaire, mais je sais bien que Kacem y est pour quelque chose. Chaque fois qu’il passe devant, il ne peut s’empêcher de s’agenouiller près de la bicyclette. Il gonfle les pneus, surveille les freins ou règle le guidon. Je l’ai même surpris en train de graisser le dérailleur. 

Le producteur et le titre du roman.

– Il ne faut pas m’en vouloir, il poursuit d’un air désolé. Je te promets, c’est bien ce que tu fais. Il y a une âme, on sent que tu mets tout ce que tu as. Le problème c’est qu’il n’y a plus de public pour ça. J’ai déjà essayé, ça ne marche pas. On peut trouver que c’est triste, mais c’est la vérité. C’est une question de tempo. 
– De tempo ?
Il secoue la tête 
– de timing, quoi. De moment, de mode, d’époque, appelle ça comme tu veux. Ce que je veux dire, c’est que ta musique, ce n’est pas ce que les gens veulent l’entendre aujourd’hui. Demain peut-être. Qui sait ? Tout est possible après tout. Mais là non, vraiment je ne peux rien pour toi.

20 Thoughts on “Tempo – Martin Dumont

  1. Je ne suis pas très attirée non plus par le monde de la chanson, mais ce que tu dis de ce roman est plutôt sympathique.

    • C’est un bon regard sur notre société vu du côté de gens qui essaient de vivre de la musique, la majorité connaîtra le même destin que le personnage principal, pour une Zaho de Sagazan, je la cite car elle me donne espoir dans un renouveau de la chanson française.

  2. Je n’avais pas été conquise par « Tant qu’il reste des îles », que j’avais trouvé sympa, mais un peu convenu. Je ne me risquerai donc pas dans une histoire de groupe de musique, ce n’est pas pour moi, je le sens.

  3. Ces extraits sont touchants et je me plongerai volontiers dans le monde de la musique avec des gens qui n’arrivent pas à percer et qui sont évidemment une écrasante majorité.

  4. Ah toujours ce choix cornélien entre nécessité financière et envie de vivre sa passion ! Beaucoup pensent que la drogue et l’alcool favorisent l’inspiration. C’est peut-être vrai, dans un premier temps, car ces produits désinhibent mais, au bout d’un moment les consommateurs ne sont plus capables de rien. Sinon, j’aime bien Zao de Sagazan aussi.

    • l’alcool et la drogue finissent toujours par tuer , hélas trop lentement pour les adolescents qui aiment franchir les interdits

  5. keisha on 16 mai 2024 at 11:21 said:

    Tiens, tu as l’air finalement conquise par ce roman, je ne connaissais pas du tout (ce milieu non plus d’ailleurs)

  6. Malgré ton bémol, je le note.

  7. Bonjour,
    Je n’irai pas spontanément vers ce genre de livre mais ce que tu en dis ne laisse pas indifférent.
    Anne

    • J’ai bien aimé cette lecture, je ne connais pas beaucoup le monde du spectacle de la chanson et l’envers du décor de la réussite m’a intéressée.

  8. Un sujet original qui pourrait bien plaire :)

    • Un monde compliqué qui ne fait pas le bonheur de tous, qui laissent beaucoup de gens sur le côté du chemin pour la réussite d’un tout petit nombre.

  9. Il me semble que j’avais repéré ce titre à la dernière rentrée de septembre, car Antigone l’avait chroniqué.

  10. Je garde l’idée des sentiments positifs

    • C’est surtout une très bonne analyse de la difficulté de réussir dans le milieu de la chanson, et pourtant tant de jeunes rêvent d’y faire carrière.

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