Édition folio mai 2023, 355 pages, paru en 1947

 

Le soleil de la peste éteignait toutes les couleurs et faisait fuir toute joie

Les livres se suivent sur Luocine et le moins que l’on puisse dire c’est qu’ils sont de valeurs inégales !

L’épidémie du Covid et ma volonté de faire découvrir ce roman à mon petit fils qui est en seconde et n’aura aucun cours de français pendant un trimestre m’a conduit à relire ce roman classique. (Professeure malade non remplacée ! )

Je trouve que ce livre a encore sa place dans la formation intellectuelle des jeunes lycéens. Camus posent des questions qui sont encore d’actualité et la tension romanesque me semble bien menée. Enfin, pour savoir si ce roman plaît encore à la jeunesse actuelle, je laisserai Rémi en juger.

Tout le monde sur la blogosphère a, je suppose, lu ce roman : Camus imagine que la peste s’abat sur la ville d’Oran, et il décrit les réactions des différents personnages qui sont représentatifs d’une population « ordinaire » d’une grande ville. Le chroniqueur de cette Peste, on le saura à la fin c’est le docteur Rieux, impliqué dès le début dans la lutte contre ce qui, au départ, est une épidémie, puis sera appelée « la peste ».au chapitre 4.

Le livre est divisé en cinq parties, un peu comme une pièce de théâtre avec une montée de l’angoisse au fil des statistiques du nombre de morts. Et souvent les chapitres sont consacrés à tel ou tel personnage et à ses réactions face à l’épidémie.

Camus a, lui-même, déclaré que ce roman lui avait été inspiré par la deuxième guerre mondiale qu’il venait de vivre en s’engageant fortement dans la résistance. On peut donc lire ce livre en analysant les réactions de chacun face à un évènement traumatisant qui touche l’ensemble de la population. Et justement nous venons de vivre une épidémie qui nous a valu un confinement de l’ensemble de la population. Et la menace Russe est à nos portes avec la guerre qui touche un pays européen.

De la même façon que les autorités d’Oran mettront beaucoup de temps à voir les signes avant coureurs de la peste, rappelez vous des messages de la haute autorité médicale à propos du Covid  : simple gripette, les masques sont pour les professionnels de santé, et surtout la certitude que si les Chinois sont très atteints c’est qu’ils sont tellement moins en avance que nous pour les soins médicaux, vous vous souvenez de tout cela bien sûr, alors vous ne serez pas étonnés des tergiversations de l’administration d’Oran pour reconnaître le danger de l’épidémie.

Et, puisque Camus fait un parallèle avec la guerre et la montée du nazisme en Europe, qui a vu clairement dans la volonté de Poutine d’annexer l’Ukraine ce qui semble si évident aujourd’hui, la volonté de recréer l’empire soviétique.

Camus reprend dans ce roman des thèmes qui lui sont chers et auxquels les jeunes peuvent être sensibles : avec Tarrou la lutte contre la peine de mort, avec les prêches du prêtre Pandelou qui révoltent tant Rieux (et rappelle la colère de Meursault dans « L’Étranger ») car expliquer la peste comme un juste châtiment des fautes humaines est inacceptable pour le médecin qui voit des hommes bons ou mauvais souffrir de la même façon, la difficulté de communiquer et de s’exprimer sans quiproquo possible à travers le personnage de Grand, les bonheurs simples des hommes lors du bain de mer…

Je n’avais pas remarqué la première fois que j’ai lu ce roman à quel point « L’étranger » et « la peste » reprennent les mêmes thèmes et les mêmes personnages. Le docteur Rieux est un double de Meursault si on lui adjoint Tarrou, Cottard ressemble à Raymond Sintes, le vieil homme qui crache sur les chats est aussi perdu que Salamano à la mort de son chien lorsque les chats ont disparu. et on retrouve aussi le moment heureux du bain de mer.

La grande différence avec l’étranger, c’est que la proximité de la mort unit les hommes dans une lutte qui ressemble fort à celle que Camus a été amené à conduire dans son groupe de résistance. C’est la raison pour laquelle je trouve « La Peste » moins désespéré que le son précédent roman. Il se dégage un véritable humanisme et une confiance dans les capacités des hommes ordinaires (bien loin de l’idée que l’on se fait d’habitude de l’héroïsme) pour lutter contre un danger mortel ce qui fait du bien en périodes difficiles.

Pourquoi est ce que je ne mets pas cinq coquillages à ce grand classique ? Parce que je le trouve trop démonstratif à mon goût d’aujourd’hui , en revanche j’ai encore beaucoup apprécié la tension romanesque provoquée par la montée en puissance de l’épidémie. Et enfin une dernière remarque, Camus décrit une ville algérienne avec des quartiers pauvres mais sans arabes, étrange, non ?

 

Avis de Rémi (élève de seconde)

J’ai apprécie « la Peste » d’Albert Camus, car on voit l’évolution de cette maladie et cela me fait énormément penser à la pandémie du Covid 19. Les réactions des personnages sont, sur certains points, semblables aux réactions des français (officiels ou ordinaires) pendant la pandémie .

 

Extraits

Début.

Les curieux évènements qui font le sujet de cette chronique se sont produits en 194. , à Oran. De l’avis général, ils n’y étaient pas à leur place, sortant un peu de l’ordinaire. À première vue, Oran est, en effet, une ville ordinaire et rien de plus qu’une préfecture française de la côte algérienne.

 l’opinion publique.

« L’opinion publique, c’est sacré : pas d’affolement, surtout pas d’affolement »

 

La peste, la guerre.

Quand une guerre éclate, les gens disent :  » ça ne durera pas c’est trop bête, mais cela ne l’empêche pas de durer.  » 

Difficulté de convaincre l’administration.

– Sincèrement, dites moi votre pensée, avez vous la certitude qu’il s’agit de la peste ?,
– Vous posez mal le problème. Ce n’est pas une question de vocabulaire, c’est une question de temps.
– Votre pensée, dit le préfet , serait que, même s’il ne s’agit pas de la peste, les mesures prophylactiques indiquées en temps de de peste devraient cependant être appliquées ?
– S’il faut absolument que j’aie une pensée , c’est en effet, celle-ci.

La peine de mort

Vous n’avez jamais vu fusiller un homme ? Non, bien sûr, cela se fait généralement sur invitation et le public est choisi d’avance. Le résultat est que vous en êtes resté aux estampes et aux livres. Un bandeau, un poteau, et au loin quelques soldats. Eh bien, non ! Savez-vous que le peloton des fusilleurs se place au contraire à un mètre cinquante du condamné ? Savez-vous que si le condamné faisait deux pas en avant, il heurterait les fusils avec sa poitrine ? Savez-vous qu’à cette courte distance, les fusilleurs concentrent leur tir sur la région du coeur et qu’à eux tous, avec leurs grosses balles, ils y font un trou où l’on pourrait mettre le poing ? Non, vous ne le savez pas parce que ce sont là des détails dont on ne parle pas. Le sommeil des hommes est plus sacré que la vie pour les pestiférés. On ne doit pas empêcher les braves gens de dormir. Il y faudrait du mauvais goût, et le goût consiste à ne pas insister, tout le monde sait ça. Mais moi je n’ai pas bien dormi depuis ce temps là. Le mauvais goût m’est resté dans la bouche et je n’ai pas cessé d’insister, c’est-à-dire d’y penser.

L’adaptation humaine.

Nos concitoyens s’étaient mis au pas, ils s’étaient adaptés, comme on dit, parce qu’il n’y avait pas moyen de faire autrement. Ils avaient encore, naturellement, l’attitude du malheur et de la souffrance mais ils n’en ressentaient plus la pointe .

Héroïsme .

Eh bien, moi, j’en ai assez des gens qui meurent pour une idée. Je ne crois pas à l’héroïsme, je sais que c’est facile et j’ai appris que c’était meurtrier. Ce qui m’intéresse, c’est qu’on vive et qu’on meure de ce qu’on aime 

la fin.

Écoutant, en effet, les cris d’allégresse qui montaient de la ville, Rieux se souvenait que cette allégresse était toujours menacée. Car il savait ce que cette foule en joie ignorait, et qu’on peut lire dans les livres, que le bacille de la peste ne meurt ni ne disparaît jamais, qu’il peut rester pendant des dizaines d’années endormi dans les meubles et le linge, qu’il attend patiemment dans les chambres, les caves, les malles, les mouchoirs et les paperasses et que, peut-être, le jour viendrait où pour le malheur et l’enseignement des hommes, la peste réveillerait ses rats et les enverrait mourir dans une cité heureuse.


Édition Robert Laffont, 204 pages, février 2024

Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard

 

Cela fait longtemps que je n’ai pas lu un roman aussi facile à lire et aussi décevant. Les deux à la fois, aucune aspérité dans le récit qui se déroule sur fond du deuil de la meilleure amie de la narratrice et des mariages que celle-ci doit organiser. J’ai souri quand même aux organisations des mariages et c’est ce qui rend ce roman digne des pires « roman à l’eau de rose », un peu supportable. Et puis, bien sûr, il faut satisfaire à l’air du temps, donc nous avons une femme transgenre rejetée par sa famille qui n’a pas accepté la transformation en femme de ce garçon malheureux dans sa peau masculine, nous avons un mariage homosexuel, un renouvellement des vœux de mariage d’un couple qui a caché sa séparation à leurs enfant, je pense que décrire un mariage de gens qui s’aiment ne ferait pas assez romanesque.

La narratrice a aimé avec passion sa meilleure amie qui, mariée, a eu une petite fille dont elle est la marraine, le père part en Sicile pour être proche de sa famille, la narratrice raconte son amitié à travers des mails destinés à l’enfant quand elle sera plus grande et cela permet de raconter le passé.

Tout est lisse dans ce roman , une succession de clichés, mais je le reconnais assez bien racontés. Les traditions siciliennes, la cuisine italienne, la jalouisie d’une grande soeur, les couples qui vont mal … Si vous êtes épuisé par le monde contemporain et ses violences, gardez une heure ou deux pour vous plongez dans le monde tout en sourire de Serena Guliano. je vous donne les mots de la fin mais ne les lisez pas si vous avez envie de lire ce roman car vous risquez de fuir  :

Fin à moins que …

et page suivante

les adresses mails de Valentina et Bianca existent.

Alors, si vous souhaitez leur écrire pour échanger avec elles, et pour que l’histoire continue, vous savez où les trouver

Extraits

Début.

 Cela fait un mois que ma vie a basculé. Un mois que je vis avec une douleur constante sur la poitrine, et un trou béant dans le cœur.

Le plaisir de son métier .

 C’est exactement pour cette effervescence des heures qui précèdent la cérémonie que je fais ce métier et que je vibre. C’est ce moment précis où les mois de travail, de réflexion, de prise de tête, de négociations, d’angoisse et de petites victoires prennent tout leur sens. Ce moment où mes projets deviennent enfin réels et se concrétisent. J’ai l’impression que, chaque fois, je réalise mon rêve de petite fille.

 

 

 


Édition 10/18, 402 pages, septembre 2013 

traduit de l’anglais (États-Unis) par Héloïse Esquié

Je sais que j’ai acheté ce roman après avoir lu un billet sur un de vos blogs , j’espère que vous me direz dans les commentaires si vous l’avez lu. Le roman raconte l’histoire tragique d’une famille qui vit la disparition d’une petite fille de cinq ans. Son grand frère et sa grand soeur, l’ont laissé se baigner dans une carrière remplie d’eau pendant qu’ils allaient chercher des baies dans la forêt. Les deux aînés se sentent responsables de la disparition de leur petite soeur.
Leur père a disparu en même temps, mais il l’a fait souvent, seulement cette fois il ne revient pas. La mère des enfants est incapable de réagir la famille s’enfonce dans le désespoir. L’auteure raconte cette tragédie en mêlant plusieurs temporalité, la plus ancienne, le temps où les esclaves ont creusé cette carrière au prix de tant de souffrance et de leur vie pour construire des belles maisons aux propriétaires blancs . Elle est maudite cette carrière, car elle connaît un drame qui a marqué la jeunesse du père de Willet et de Roberta les aînés qui ont laissé seule leur petite soeur. Le lien de toute ces vies meurtries c’est celle qui pense être leur grand-mère Clémentine qui aide les femmes à accoucher ou à avorter. Les enfants partiront dans le sud de la Floride où enfin ils trouveront des réponses.

Tous les personnages vivent en marge de la légalité, leur père fabrique des faux billets, et Willet gagnera de l’argent trop facilement dans des trafics de drogue. La grand-mère Clémentine soigne par les plantes des gens qui ne veulent pas ou ne peuvent pas aller voir des médecins officiels, et fait des avortements pour aider des femmes ou aide les femmes à confier leur bébé à des familles d’adoption. Ce roman décrit bien l’ ambiance si particulière du sud des USA, et bien sûr ce qui sous tend ce roman c’est le racisme contre les noirs et des gens qui ont du sang noir, ils ont si peur que les traits physiques des noirs réapparaissent chez leur enfants, car ils connaissent le rejet dont ils seront alors victime.

J’ai eu du mal à me plonger dans ce roman mais peu à peu j’ai été prise par le rythme du récit, un de mes freins pour aimer complètement ce roman, c’est le personnage de Roberta qui semble toujours être à côté de la plaque, deux exemples : elle ne dit pas ce qu’elle a vu le jour de la disparition de la petite soeur, elle veut absolument annoncer la découverte que son père est vivant alors que son frère veut lui annoncer son mariage. Elle semble une éternelle enfant ou adolescente ! En revanche, la description de la nature rend ce roman très beau même quand celle-ci est inhospitalière .

 

Extraits :

Début.

White Forest, Mississipi 
1976
 On était en août et il faisait plus chaud, bizarrement, qu’en juillet ; une chaleur lourde, étouffante qui nous laissait poisseux et nous empêchait de dormir même au plus noir de la nuit. Il pleuvait presque tous les après-midi dans le delta du Mississipi, de violents orages dans des ciels gris tendre. La pluie aurait dû nous soulager, mais dès que les nuages se dispersaient, laissant poindre le soleil, une vapeur s’élevait de l’herbe desséchée, du bitume craquelé et des champs bruns et il faisait encore plus lourd.

Portrait du père.

 Il apparaissait et disparaissait sans prévenir. Nous étions censés être content de le voir, et en général nous l’étions. Papa était charmant, comme les hommes malhonnêtes sont obligés de l’être, et trop beau pour son propre bien. Il ressemblait à si méprendre à Paul Newman. Il le disait lui-même.

Après l’appel à la télévision .

 Tous les jours des gens appelaient chez nous pour dire qu’ils avaient vu Pansy dans une supérette à Shreveport ou un centre commercial en Alabama. Un homme a appelé pour dire qu’il détenait Pansy et qu’elle allait bien, il ne fallait pas s’inquiéter. Une gamine, jouant une farce cruelle, a voulu se faire passer pour notre sœur elle criait dans le téléphone : « Maman viens me chercher ! je suis toute seule ici ! » Willet a arraché le combiné des mains de maman et à jurer à son adresse jusqu’à ce que l’enfant à l’autre bout du fil éclate en sanglots et raccroche.
 Une femme se prétendant médium a affirmé que Pansy se trouvait entre les mains d’un méchant homme. Elle disait qu’elle pouvait la trouver et la libérer de son emprise si maman lui envoyait trous cent trois-trois dollars dans les trente-trois heures le chiffre 3 avait une importance particulière mais je n’ai pas retenu les explications. Maman a voulu s’exécuter, mais Willet l’en a dissuadée. Les policiers l’ont félicité.
 » C’est une arnaque, à expliquer le maigrichon. Ça loupe pas chaque fois qu’une personne disparaît. »

Un des drames du roman.

 Lui et Fern avaient huit ans quand leur père les abandonna sur le bord de la route. On l’appelait Junior à l’époque, le premier des nombreux surnoms qui lui colleraient à la peau toute sa vie.  » Prend soin de ta sœur », lui avait recommandé son père avant de monter dans un train en direction du nord. Ils ne se désolèrent pas de son départ. Ils en étaient encore à se faire à la perte de leur mère.

Le caractère de leur mère .

 Et la vérité n’avait jamais intéressé maman. Elle couvrait la part sombre de notre père d’un joli glaçage comme elle l’aurair fait avec un gâteau au ccaramel. Elle ne pouvait pas supporter de regarder tout ce qui était laid ou douloureux.

Les paysages de Floride.

 Les palétuviers poussaient de travers malgré leurs hauteurs et, dans les zones où l’eau était moins profonde, je voyais que les racines formaient une masse enchevêtrée comme des lianes. Nous avons flotté pendant un moment dans une mare stagnante bordée d’herbe. Il faisait chaud pour une mi-janvier. Les moustiques sifflaient constamment. Un poisson a fait un bon en l’air. Un oiseau a lancé un appel dans les arbres. Une araignée tissait sa toile dorée sur une souche. Partout où je regardais, l’atmosphère était dense lourde et grouillante de vie. Nous avons traversé une nuée de moucherons et j’ai manqué laisser échapper ma pagaie en tentant de les écarter. Les feuilles, les branches et les fragments de mousse qui pendouillaient semblaient s’avancer pour nous caresser au passage. Les troncs d’arbres étaient recouverts de plaques de mousse vert fluorescent.

 

 

Édition Noir sur Blanc, 229 pages, janvier 2024

Traduit du russe (Biélorusse) par Marina Skalova 

 

Que de dire de ce livre entre le roman et la biographie ? Qu’il est absolument insoutenable. Je pense que c’est la meilleure réponse que je puisse faire. L’écrivain Bliélorusse raconte la vi, plus ou moins fictionnelle, d’un personnage qui a existé (ou aurait pu exister) Piotr Nesterenko, qui est directeur du crématorium de Moscou. Il est arrêté en 1941 et accusé d’espionnage

À travers six interrogatoires, l’enquêteur de la Tcheka, le KGB de l’époque, essaie d’étayer la thèse du complot et veut faire de cet homme un espion. C’est alors l’occasion pour l’écrivain de mêler le passé aventureux de ce personnage avec tout ce que lui a appris son travail au crématorium. Pour être rapide disons qu’il sait que tout le monde, absolument tout le monde peut finir avec une balle dans la tête , il les a tous vous défiler dans son crématorium, les acteurs célèbres, les poètes, les généraux, les bourreaux d’hier assassinés par de nouveaux bourreaux qui ne sont à l’abri de rien !

Son passé est celui d’un noble russe pris dans la tourmente de la révolution. On découvre que l’armée blanche ne valait guère mieux que l’armée rouge. Les populations qui ont subi les deux ont vu défiler des assassins et ont perdu confiance dans les valeurs de l’humanité. Et ce qui restait d’illusions au personnage principal est parti en fumée dans son crématorium ?

Cette lecture est éprouvante, on passe d’une horreur à l’autre avec un ton faussement dégagé qui m’a été souvent insupportable, si je ne m’était pas engagée à lire ce livre pour en parler à la bibliothécaire de Dinard, j’aurais abandonné cette lecture. Cela ne veut pas dire que ce roman ne soit pas intéressant, mais il est très difficile à lire car nous devons passer à travers les cerveaux tortueux de l’enquêteur et de Piotr Nestrenko qui connaît son sort mais joue avec les nerfs de son tortionnaire et hélas les miens aussi. Comment la Russie peut devenir autre chose qu’une usine à horreurs ? Il ont vraiment tout imaginé et hélas Poutine n’est qu’un avatar des dirigeants de ce pays d’où rien de bon ne semble possible de venir !

Extraits

Début.

 La perquisition et l’arrestation ont lieu le 23 juin 1941. En six heures l’affaire est pliée. Un travail de routine, mais tout le monde est sur les nerfs. La guerre a été déclarée depuis à peine vingt-quatre heures. Tandis que la forte terrestre de Brest résiste à la déferlante inouïe de la machinerie nazie la capitale de l’Union Soviétique est touchée par une vague de disparitions secrètes.

Exemple de purges.

 Le sort de la plupart ayant été réglé dès 1937, où le seul soupçon de travailler pour la Pologne a condamné plus de cent mille personnes à être fusillées (très exactement cent onze mille quatre quatre-vingt-onze citoyens).

Réussite en URSS en 1941.

 À l’heure où ses pairs partent mourir en rangs serrés dans les boucheries à venir, cette souris grise tamponne assidûment une condamnation à mort après l’autre. L’enquêteur Perepelitsa vient d’être récompensé par un appartement à Moscou rue Gorki. Il ne s’est pas battu pour rien.

Des horreurs présentées comme banales.

 Certains rapportent qu’après les exécutions il organise des beuveries (ce qui est vrai), d’autres qu’il s’approprie quelquefois les vêtements des condamnés (ce qui l’ est aussi). Quoi qu’il en soit, je ne vois rien de répréhensible ni dans le premier ni dans le deuxième cas de figure. Même en Union Soviétique, chaque produit a un coût. Tout travail mérite salaire. Il faut bien comprendre que, d’une part, Vassili Mikhaïlovitch fait un travail pénible (parfois il doit fusiller plusieurs centaines de personnes en une nuit) et d’autre part …est-ce vraiment si grave qu’un imperméable ou, disons, un joli gilet vivent leur meilleure vie sur ses épaules ou celle de sa femme ? « Pourquoi faire toute une histoire pour les affaires des autres ? ».me dis-je parfois.
S’il faut se soucier de quelque chose, c’est plutôt de la pénurie qui règne dans notre pays. Si Blokhine pouvait acheter ses jolis vêtements dans les magasins, les soustrairait-il aux cadavres pour les offrir à sa femme ?

 


Édition Stock, Janvier 2017, 322 pages

Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard

 

Le thème du mois de Mai de mon club était : « l’aristocratie ». Ce livre y avait donc toute sa place. Le début du roman m’a réjoui car l’auteur sait manier l’autodérision avec beaucoup de brio. Mais au bout d’un moment je me suis beaucoup ennuyée, dommage !

L’histoire raconte la destinée de François de Rupignac rejeton d’une famille de la vieille noblesse française. On se dit que Louis-Henri de La Rochefoucault n’a pas eu à chercher trop loin ses modèles pour raconter une famille « de la haute » . Le début est vraiment drôle, la grand-mère indigne tellement décalée, bien avant qu’Alzheimer fasse son effet, est un personnage qu’on imagine très bien. L’auteur s’amuse de tous les codes de l’aristocratie qui écrasent quelque peu ce jeune homme bien-né. Il décide avec son ami de lycée de créer « le club des vieux garçons » qui se réunira au Jockey club . (Je croyais que cette institution avait disparu mais non, la noblesse peut donc s’y retrouver, sans les femmes ! .

Je crois que c’est à ce moment là que j’ai commencé à m’ennuyer, c’est terrible car c’est le sujet même du roman. Mais je n’ai absolument pas compris ce que ce club apportait au roman, la galerie de portraits de sa famille m’aurait suffit.

J’avais oublié que j’avais tant aimé « Châteaux de sable » du même auteur, son humour m’avait alors ravie.

Extraits

Humour.

Une étudiante oubliée du siècle passé, Simone de Beauvoir, avait commis en 1958 une dissertation intitulée « Mémoires du jeune fille rangée ». Le niveau en était piètre. Au risque de lui défriser le chignon, j’ose affirmer, moi, François de Rupignac, qu’il est plusieurs urgent de lire mes « Mémoires d’un vieux garçon pas si rangé que ça ».

 

J’ai ri.

 Tous les mercredis j’allais goûter chez mes grands-parents dans leur belle appartement sis dans le VII arrondissement, ce quartier silencieux qu’on dirait que ces habitants mettent des patins pour sortir dans la rue.

La grand mère scrogneugneu .

 Elle avait l’art du caquetage scogneugneu et des réponses lapidaires, comme ce jour où, alors que je l’interrogeais sur le dîner auquel elle s’était rendue cette semaine là, elle m’avait lâché dans une grimace « Pouah ! Tout était froid sauf le champagne. »

La grand mère, toujours elle.

 Les vacances d’été n’ont pas été de tout repos : ma grand’mère a dû être hospitalisée et opérée d’urgence. Jusque-là elle se croyait immunisée par son sang bleu, qui faisait office selon elle de vaccin absolu et d’élixir de longue vie. 
 « Les toubibs ne respectent plus rien. Et là de quoi ai-je l’air, sur ce siège à roulettes ? Quand je pense que nous allions en carrosse doré, autrefois. Une chaise à porteurs passe encore. Un rocking-chair de repos, oui. Mais cette espèce de chariot, non, ça fait très manant, on dirait que tu rentres du supermarché avec un sac de patates… »

 


Édition stock, août 1995, 266 pages

Je suis allée vers ce roman car je suis très rétive à la Science Fiction mais que j’aime bien aussi changer d’avis sur mes a priori. le billet de Karine était tellement enthousiaste que j’ai immédiatement pensé voilà une bonne occasion de sortir de mes idées toutes faites.

Je reconnais, à Jacqueline Harpman, un vrai talent d’écrivaine, car on part sans aucune difficulté dans son histoire . Elle a une imagination féconde et le sens du détail. Dans la première partie du roman nous sommes avec la narratrice la plus jeune des quarante femmes enfermées dans une cave surveillée sans cesse, jour et nuit, par des gardiens. Les règles sont strictes, elles ne doivent jamais se toucher, ni s’isoler, elles doivent être vues par leurs gardiens à tout moment. La narratrice sait moins de choses que les femmes plus âgées mais elle comprend vite que tout manquement aux règles leur vaut des coups de fouet terribles. Elles ne peuvent pas non plus se suicider et sont donc « condamner » à attendre, attendre quoi ? rien si ce n’est de mourir. Elles sont nourries et survivent donc jour après jour. La narratrice se rapproche de Théa une de ces femmes qui lui explique le monde dans lequel elle vit. Et puis un jour … la porte de la cage est ouverte et les gardiens sont partis. Commence alors la deuxième partie du livre l’enfermement dans un monde extérieur qui n’existe plus. Les femmes organisent leur survie à l’air libre, c’est d’autant plus facile que la terre est couverte de petites guérites qui mènent à des caves et où elles trouvent nourriture et vêtements. Et aussi … à des cadavres de quarante femmes ou quarante hommes. Les survivantes vieilliront puis mourront les une après les autres sans jamais avoir la moindre explication de ce qu’il s’est passé. Bien sûr l’intérêt du roman ne vient pas du réalisme de l’histoire : c’est de la science fiction ! Il y a eu une catastrophe sur la terre et des gens très méchants ont pris le contrôle des humains. Une seule poignée de survivantes arrivent à se sauver des cages dans les caves et maintenant. ? Quel est le sens de ce livre ? « l’accès à la condition humaine » comme l’annonce la quatrième de couverture ? Pour moi non, la condition humaine n’a de sens que dans l’interaction entre les hommes alors que la narratrice réduit son personnage à la solitude totale.

Je l’ai dit en commençant ce billet, je reconnais à cette écrivaine une force narrative intéressante, j’ai suivi avec intérêt la façon dont cette femme se frotte à un monde dont elle ne connaît pas les codes puisqu’elle a grandi dans la cave et essaie de comprendre les bribes du monde d’avant qui lui parviennent. Quand je suis devant ce genre de lectures, je me demande toujours pourquoi les écrivains ont besoin d’imaginer de telles catastrophes pour nous faire réfléchir. Pour moi la science-fiction a du sens quand elle nous permet d’analyser notre monde. Le chef d’oeuvre dans le genre c’est Orwell et « 1984 » et aussi « la ferme des animaux ». Mais ici c’est gratuit et sans aucune explication ni sur la catastrophe initiale, ni sur la force dominatrice, alors je trouve cela gratuit. L’autre remarque que je me suis faite : pour tout le clan des antidivulgâcheuses (dont je ne fais pas partie) comment avez vous vécu que ce livre vous mette en attente d’une explication qui ne viendra jamais ?

 

Extraits

Début.

 Depuis que je ne sors presque plus je passe beaucoup de temps dans un des fauteuils, à relire les livres. Je ne me suis intéressée que récemment aux préfaces. Les auteurs y parlent volontiers d’eux-mêmes, ils expliquent pour quelles raisons ils ont rédigé l’ouvrage qu’ils proposent. J’en suis surprise : n’était-il donc pas plus évident dans ce monde là que dans celui où j’ai vécu de transmettre le savoir qu’on a pu acquérir ?

La mémoire.

 Y a-t-il dans le travail de la mémoire une satisfaction qui se nourrit d’elle-même et ce dont on se souvient compte-t-il moins que l’activité de se souvenir

La dignité humaine.

 Moi, je trouvais tout naturel, quand j’allais uriner de m’asseoir sur le siège des toilettes en continuant la conversation où j’étais engagée, les rares fois où je conversais. Les vieilles maugréaient furieusement, elles parlaient d’indignité et d’être ravalées au rang de la bête. Si si tout ce qui nous différencie des bêtes est de se cacher pour déféquer, la condition humaine me paraît tenir à peu de chose, pensais-je.

Le cœur du récit.

 Au début -enfin pas vraiment au début, car il y a une période dont personne n’a un souvenir clair, mais après, à partir du moment où les choses s’organisent dans nos mémoires, nous savons que nous réfléchissions tout le temps. Ils auraient pu te tuer, mais ils ne tuent pas ou te retirer, t’envoyer ailleurs, s’il y a d’autres prisons semblables à celle-ci, mais là ton arrivée aurait constitué une information, et la seule chose dont nous soyons sûres est qu’ils veulent qu’on ne sache rien. Nous avons fini par supposer qu’ils t’ont laissé ici parce que toute décision peut être examinée, et que leur absence de décision marquait la seule chose qu’ils veulent qu’on sache, et qui est que nous ne devons rien savoir.

 


Édition Seuil, 334 pages, paru en mai 2024

lu dans le cadre de Masse Critique de Babelio

Je dois déjà à Babelio la lecture de « Les oiseaux chanteurs » , qui m’avait ensuite conduite à lire « l’agriculteur d’Alep » qui est certainement mon roman préféré de cette écrivaine.

Dans ce récit à plusieurs temporalités, l’auteure nous raconte la terrible tragédie d’un incendie meurtrier en Grèce en 2017 ou 2021. Elle choisit pour cela une famille, un peu à son image, à la fois grecque et anglaise. La mère est d’origine grecque, ses parents avaient été chassés de Turquie en 1920. Le père, lui, est grec et toute la famille vit dans une région montagneuse tout proche de la mer. Le grand-père vit de la récolte de la résine des pins et prédit depuis plusieurs années une catastrophe à cause de la sécheresse de l’été qu’il sent de plus en plus extrême, chaque année.

Le roman repose aussi sur un sentiment de culpabilité. Qui est vraiment responsable ?

Pour la population, c’est celui-ci qui a allumé le feu.

C’est simple ! D’autant plus que, celui qui a fait cela, est un homme peu aimé dans le village, il avait décidé de construire un grand hôtel au sommet de la colline, la mairie le lui a refusé car il y avait de très beaux arbres sur ce terrain, il a donc décidé de les brûler .

Oui, mais, il faut dire qu’en Grèce tout le monde fait cela ! Mais alors pourquoi ce feu a-t-il pris un tour aussi tragique ?

  • Le vent !
  • Les pompiers qui n’ont pas réagi à temps !
  • La police qui n’a su ni aider ni protéger la population !
  • Les habitants qui n’entretiennent plus correctement les sous-bois !
  • Mais surtout, la forêt était devenue aussi inflammable que de l’amadou avec ces étés de plus en plus secs.

L’incendiaire est retrouvé par la femme qui a réussi à survivre et à sauver sa fille qui a le dos brûlé, et dont le mari peintre a les mains brûlées et ne se remet pas de ne pas avoir pu sauver son père. Elle se rend compte que l’homme est vivant mais avec une corde autour du cou et une branche d’arbre cassée à côté de lui. Elle repart en le laissant puis reviendra, mais trop tard, elle se sent très, très, coupable.

Une des temporalité, c’est justement le sentiment de culpabilité de la mère qui n’a pas tout fait pour sauver cet homme qui a détruit son bonheur.
L’autre temporalité c’est la façon dont cette mère a réussi à sauver sa vie et celle de sa fille, en particulier en la maintenant en vie dans l’eau après avoir réussi à atteindre la mer, malgré les grillages des propriétés qui bordent la mer.

Christy Lefteri raconte aussi la rencontre qui unira Irini, professeur de musique à Tasso peintre, et leur amour pour cette région qui leur donne une énergie que rien ne semble pouvoir atteindre. Rien ? Sauf cet incendie qui ravage toute forme de vie sur son passage et risque d’éteindre l’espoir, mais l’humain est ainsi fait que la vie et le sourire reviendra à la fin du roman.

C’est très bien raconté, et le suspens au moment de la fuite devant le feu est insoutenable. Pourtant, j’ai une petite réserve un peu difficile à expliquer, on sent trop la volonté de l’auteure de montrer tous les aspects du problème posé par les incendies incontrôlables. Par exemple, le personnage qui a allumé le feu est détesté par tout le village, mais Irini recevra sa fille et l’ex-femme de cet homme et l’amour de cette petite pour son père (qui en plus est sourde et muette), met mal à l’aise Irini, cet homme n’était donc pas seulement un monstre ? Les vraies responsabilités sont donc peut-être ailleurs, et personne n’est vraiment innocent en ne faisant pas tout ce qu’il faut pour bien protéger notre planète.

 

Extraits

 

Début.

 Ce matin j’ai vu l’homme qui a allumé le feu. 
 Il a fait quelque chose d’horrible, mais au bout du compte moi aussi.
Je suis partie.
Je suis partie, et à présent il est peut-être mort. Je me le représente parfaitement, tel qu’il était quand je l’ai trouvé sous le vieil arbre. Ses yeux aussi bleus qu’un ciel d’été.

La mythologie grecque.

 La mythologie grecque raconte que Zeus confia à Hermès deux dons destinés à l’humanité : la honte et le sens de la justice. Lorsque Hermès lui demanda s’il devait accorder ces qualités à certains plus à d’autres, Zeus répondit que non : tous les hommes devaient les posséder pour apprendre à vivre ensemble. Déjà en ces temps reculés on comprenait l’importance de la communauté. Les récits et les légendes permettaient de transmettre ses valeurs. Zeus ajouta même que celui qui n’éprouvait ni honte ni conscience d’avoir mal mal agi devait être mis à mort par la collectivité.
Mais c’était il y a des siècles, et depuis nous avons fait des progrès n’est-ce pas ?

La mer pour fuir le feu.

 D’abord la fraîcheur. C’est ce que ressentit la femme lorsque son corps toucha l’eau. La fraîcheur bleue sur sa peau qui la submergeait, l’enveloppait, chassait la chaleur. Elle ouvrit les yeux et vit les bulles de son souffle remonter vers la surface. Puis elle sentit la main de sa fille dans la sienne. Jamais elle ne l’abandonnerait et surtout pas dans un moment pareil.
 Lorsqu’elle émergea pour respirer, elle se tourna immédiatement vers le visage luisant de l’enfant. Sur sa peau, sur ses joues et dans sa bouche haletante, sur ses paupières fermées, partout rougeoyait le feu, comme si elle était faite de flammes. Cette image la hanterait toute sa vie : sa fille en flammes, l’eau et le feu qui scintillait sur son visage.

Responsabilités.

 Et aussi : où est le début, où est la fin ?
 Les gens d’ici ont construit tout le long de la côte des villas bloquant l’accès à la mer. Les gens d’ici n’ont pas ramassé le bois mort dans la forêt, ils ne l’ont pas entretenue, non pas veillé sur elle, n’ont pas pris soin d’elle. Et pourtant nous nous posons en justiciers, face à l’homme qui a allumé le feu, face à la police et aux pompiers.
 La terre était desséchée, plus assoiffée qu’elle ne l’avait jamais été . Qui est responsable de cette situation ?

Avant et Après l’incendie .

 Il y avait très, très longtemps, la forêt était vivante. Il fallait la voir !.Du sol poussaient des fleurs sauvages et des herbes aromatiques. Elle était belle et généreuse. Les oiseaux survolaient les bois, des animaux se glissaient à l’ombre des arbres vénérables et l’eau ruisselait du sommet de la montagne jusqu’à la mer. Mais depuis le feu, la forêt avait perdu ses contours. 
Avant il y avait des pins, des sapins, des peupliers, des platanes et des chênes. Ici vivaient des bellettes et des visons, des chats sauvages et des blaireaux, des lapins et des lièvres et des hérissons et des taupes et des rats et des lézards et des scarabées. Un beau cerf élaphe parcourait les plaines.
Il ne restait que le néant.
 À la place des couleurs de la forêt, les ténèbres avaient recouvert la terre.


Édition Calmann Levy, août 2021, 343 pages

Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard.

 

Le thème de notre club était l’aristocratie, donc, ce roman avait toute sa place : le baron de Testacceca , descendant d’une famille haute en couleur des Corbières, est propriétaire d’un château fort. Mais rien ne va bien dans cette famille de ce baron colérique qui fait facilement le coup de poing avec des gens du village qui se vengeront. Diane, la mère fait tout ce qu’elle peut pour maîtriser son diable de mari, et tenir à flots le peu de finances de cette famille, ensemble ils ont deux enfants Clémence une bricoleuse de génie et Pierre qui adore sa soeur et qui est un peu étrange .

L’auteur évoque cette région avec ses légendes et ses merveilleux paysages, on sent qu’il connaît et aime les Corbières. Léon essaie de faire du vin pour gagner de quoi réparer son château, mais la famille va être expropriée car leur château est classé et ils sont incapables de l’entretenir. Le maire est un malhonnête et leur vole une parcelle pour en faire un lotissement alors que celle-ci était classée inconstructible, mais par une entourloupe, il arrive en quelques jours à acheter le terrain et à le classer en zone à urbaniser. C’est peu crédible mais peu importe, cela permet à l’auteur d’imaginer une guerre entre les gens du château et les malhonnêtes du village.

Je pensais au début que cette histoire allait me plaire, mais je m’y suis beaucoup ennuyée, je ne me suis intéressée à aucun des personnages , sans être antipathiques ils ne m’ont pas semblé incarné . Je pense que ce récit manque d’humour ou de réalisme. On est entre deux eaux, le personnage du père, Léon , qui adore les bagarres aurait gagné à être drôle. L’histoire tourne au drame et à la tragédie sans que je ressente la moindre tristesse . Bref je suis passée à côte de ce roman dont j’ai aimé cependant les descriptions d’une nature si belle : les Corbières.

Voici l billet de Sylire , avis qui rejoint un peu le mien

J’avais oublié que j’avais lui un livre qui m’avait bouleversée « Avant la longue flamme rouge »

Extraits

Début.

 Pierre passe sous l’aine, et enfonce le couteau au renflement du croupion dont il tient écartés les bords caoutchouteux. Il y a encore quelques heures, ce perdreau volait dans la campagne à la recherche d’une femelle avec qui partager son nid de paille et de boue beurrée. La chair cède. Les vaisseaux s’entortillent autour de la lame. Les entrailles apparaissent : le foie couleur guimauve, le cœur dans un liquide délié, la graisse cireuse, l’intestin, la vessie aux reflets grenadine. Pierre extirpe ensuite les poumons qui ont l’air chacun d’être le cœur d’un animal plus grand et, surtout moins mort.

Le vin des Corbières .

Non pas un de ces reglingards qu’on vous sert sur du pain noir avec un pot de mayonnaise, ni une de ces piquette tellement chargée en levure qu’elles ont moins un goût de raisin que de banana split aux champignons ; pas plus qu’une de ces imitations prétentieuse de médoc, à la sapidité d’écharde, fabriquée en trouillard des copeaux de chêne et du sucre pommade.

J’aime bien cette baronne.

La baronne Mahault, qui entreprit de mener une attaque pour détruire le Panthéon, en 1788, sous prétexte qu’elle le trouvait trop laid (« un téton de truies sur un coffre en or »)

Remarque exacte.

 Depuis dix ans, d’un bout à l’autre du département, les centres-villes se vident, tandis que leurs alentours se remplissent de maisons identiques, de rond-points bizarroïdes et de lampadaires.


Édition les Arènes, décembre 2023, 185 pages.

Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard.

 

Voici un roman que je vous recommande sans aucune réserve , il m’a complètement séduite. Encore plus que « les loups » du même auteur qui était, pourtant, déjà passionnant. Ce court récit se passe au moment de la disparition de l’URSS, dans l’enclave de Kaliningrad. Un jeune délinquant sort de prison et veut retrouver sa mère. Ce trajet ressemble à un conte initiatique et de formation pour cette petite frappe. Au début, il ne comprend pas ce mot de « changement » que tout le monde prononce autour de lui. Le premier groupe qu’il rencontre ce sont des jeunes hippies qui vivent sur la plage et qui se permettent de tenir des propos d’une liberté qui le surprend, ils l’accueillent très bien sans lui demander d’où il vient, une jeune femme accepte facilement de faire l’amour avec lui, mais cela ne l’empêchera pas de leur voler tout leur alcool. Il repart et un paysan kolkhozien l’héberge, il y rencontrera le directeur qui est communiste et qui lui explique que les dirigeants communistes sauront très bien s’en sortir que tout est prêt pour l’après. Le Gris (c’est ainsi qu’il s’appelle lui-même) s’en ira en volant d’abord les économies du pauvre paysan kolkhozien qui l’avait aidé.

J’arrête de vous raconter l’histoire et des différentes rencontres de son trajet, je vous laisse découvrir, mais vous avez, je l’espère compris le principe, le jeune délinquant qui s’était formé dans les prisons soviétiques va au gré de ses rencontres se transformer peu à peu, sans jamais devenir un homme bon, la fin m’a surprise et désespérée. Il semble , un moment, aller vers la rédemption en sauvant un jeune garçon orphelin des griffes d’une bande de malfrats, il écoutera la sagesse d’un philosophe sur la liberté et la fameuse âme russe. Cela permet à l’auteur d’évoquer les différents aspects de la Russie actuelle. Le roman a été écrit en 2023, donc on ne peut pas parler parler d’un roman prémonitoire, mais d’une analyse exacte du régime poutinien.

Un livre efficace, prenant et qui fait beaucoup réfléchir.

(PS. Je pense que la couverture de ce roman aurait plu à notre regretté Goran)

 

 

Extraits

Début.

 Le Gris fait ses adieux en silence. Il se faufile entre les couchettes, tend la main à chacun des détenus, sans effusion. On entend tout juste quelques mots, le claquement des paumes qui se rencontrent. Les saluts sont virils, l’émotion absente. Le Gris ne sourit pas – dangereux, pas dans les mœurs. Pour les hyènes , les petites frappes qui forment le gros des troupes, sourire c’est déjà se faire baiser un peu. Si tu ouvres la bouche pour montrer tes dents c’est bien que quelqu’un a le droit d’y fourrer sa queue … Le Gris s’est adapté. Il a toujours su faire, il est malin. Pas assez pour éviter le trou – suffisamment pour deviner quel visage on attend de lui à chaque instant. 

Le changement .

 Il comprend le paysan : l’autre ne nie pas que des changements puissent advenir, il sait seulement qu’en pareil cas le mieux est de rentrer la tête dans les épaules et d’attendre de voir. Comme par mimétisme le Gris se tasse sur son siège. Il a appris la leçon depuis longtemps : lorsque les coups pleuvent, il n’y a rien d’autre à faire que de protéger sa tête. Seuls ces cons de hippies s’imaginent assez malin pour changer ça.

Les communistes et le changement .

– Le communisme n’est plus vraiment à la fête… Mais qui a dit que c’était un problème pour les communistes ? Tu crois qu’on n’a rien vu venir qu’on se retrouve à poil ? L’avenir comme tu dis, appartient à ceux qui ont des idées claires et un peu de capitale …
– Du capital, vous ?
– L’autre rigole encore
– Eh quoi ! Tu crois qu’on passe nos soirées à étudier Engels ? Ça fait des années qu’elle marche bizarrement, notre Union soviétique. Gorbatchev a lancé ses réformes depuis un moment. C’est permis, maintenant, de s’enrichir, d’épargner, d’investir … Et encore, le capital, ce n’est rien ! Qu’est-ce que nous possédons, nous, les communistes ? Des connexions, des réseaux. Qui tient les banques ? Qui sont les directeurs d’usine, les juges, les responsables des achats dans les municipalités. Nous ne sommes pas le passé, fils détrompe-toi ! 

Le philosophe et la liberté.

 Notre pays reçoit la liberté, mais existe-t-il des gens libres pour la recevoir ? Nos compatriotes savent-ils seulement ce qu’est la liberté ? Savent-ils la protéger, la faire vivre ? La soumission est beaucoup plus simple et confortable… Être libre à de quoi désemparer les âmes les plus faibles et les moins préparées. Il est bien plus aisé de s’en remettre à un chef, à une idéologie, à des illusions, à des habitudes, aux limites bien connues de son petit potager. Tout plutôt que l’inconnu. Imagine ce qu’on demande à nos concitoyens, en ce moment : ils doivent accepter que toutes leurs vieilles croyances soient mises au rebut et accueillir avec autant de conviction les nouveaux dogmes du moment -et dans le même temps apprendre à gérer les mille exigences que requiert la liberté. Il y a de quoi devenir fou ..

 


Édition Calmann Lévy, avril 2021, 390 pages

 

Je ne connaissais pas la catégorie « cosy morder » voilà c’est fait ! Il y a donc une enquête peu crédible, un coupable qui n’aurait jamais dû échapper à la justice, un peu d’amour et un village plein de ragots du côté des méchants et de courage et d’entre aide du côté des écolos gentils. On annonce aussi une suite car le le personnage de Cathie n’a pas tout dit de ses secrets , mais ce sera sans moi. Ce que je peux dire de positif sur ce roman, c’est qu’il ne m’a occupée qu’une après midi et que ce jour là il pleuvait, oui, j’habite en Bretagne. Ce qui m’énerve au plus haut point c’est les rajouts pour faire couleur locale, le biniou, le chouchen, le whisky Eddu (la distillerie du menhir !) la pluie et le dicton « en Bretagne il fait beau trois fois par jour ». Enfin, ce qui ne m’a pas plu du tout, c’est l’absence de toile de fond au récit, sans doute les villages bretons ne sont que rarement le théâtre de crimes, et très certainement aussi ils ont perdu leur couleur authenticité culturelle. Mais je pense qu’un bon écrivain pourrait quand même en faire un point de départ pour un roman.

Bref un essai mais pas un succès !

Extraits

lu dans le prologue :

« Cela finissait invariablement par s’apaiser un jour ou l’autre devant quelques pichets de cidre et de galettes »

Ça m’énerve que l’auteur ne vérifie pas, il cite son action dans le Finistère et on y mange des crêpes pas des galettes, les galettes on en mange en Ille et Vilaine…

 Début.

 Gros plan sur les fenêtres de l’hôtel de ville, éclairé comme un phare dans la tempête. La grande salle de la mairie est pleine. Exceptionnellement, il ne manque pas un élu à la session du conseil municipal. Le mauvais temps a vidé la mer et les champs pour remplir la maison du peuple. Un coup d’œil discret  : la discussion est animée.
Mais qu’est-ce qui perturbe ainsi la vie du village de Locmaria ?

Et pour la couleur locale …

 S’ils ont froid ou qu’ils veulent cacher leur cheveux, ils prendront du Amor-lux.ou du Saint-James de la vraie qualité de chez nous ! et dans ma boutique on vendra toujours des bottes Aigles pas des babouches.