Édition Albin Michel . Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard 

Traduit du suédois par Anne Karila

 

Un roman qui décrit des relations très lourdes entre des parents et leurs trois garçons, toujours à la limite de l’explosion. On comprend très vite qu’un drame a eu lieu mais on n’aura toutes les clés qu’à la fin du roman, donc promis je ne vous révèlerai rien. Nous sommes avec Benjamin le cadet de l’aîné Niels, et Pierre le plus jeune, ils ont passé leur enfance à se battre, du moins c’est comme ça que nous le raconte Benjamin. Les parents sont le plus souvent sous l’influence de l’alcool et le père éclate de colères imprévisibles et violentes et la mère totalement dépassée semble absente. Je me demande si cette façon de vivre « à la sauvage » chez des gens cultivés représente quelque chose en Suède, ce qui ferait que les Suédois ont une autre lecture de ce roman que nous pour la représentation de cette famille.
Le roman commence à la mort de la mère, le père est décédé depuis quelques années, elle n’exprime qu’un seul souhait que ses trois fils dispersent ses cendres autour du petit lac près duquel ils passaient toutes leurs vacances et où ils ne sont plus retournés depuis le fameux jour, qui a totalement détruit la famille.

Le roman est entièrement sous-tendu par cette révélation, et c’est pour moi un bémol, vraiment je n’aime pas le suspens mais ici il n’est pas gratuit, car effectivement Benjamin doit repartir dans les souvenirs embrouillés de tout ce qui a constitué son enfance pour avoir une chance de pouvoir se reconcilier avec lui-même.

J’ai été un peu gênée par le mélange des temps du récit, c’est très compliqué de savoir à partir de quand la famille a dysfonctionné et pourquoi exactement et j’ai aussi été étonnée par la violence des bagarres entre les frères. On est bien loin de l’image de calme et de self contrôle attachée à la Suède. C’est un roman étouffant qui manque de lumière à mon goût mais qui raconte très bien l’enfance dans une famille détruite.

PS je suis gênée pour rédiger mon billet sans parler de la fin, lisez le vite pour que je puisse discuter avec vous sans cette contrainte. Par exemple que pensez vous du silence de Niels et Pierre adulte lorsque Benjamin évoque la scène où son père a percuté un jeune faon ? (Et réfléchissez au titre vous saurez une intuition sur le drame qui sous-tend ce roman.)

 

Citations

La fatigue dans l’eau froide.

 La fatigue arriva sans crier gare. L’excès d’acide lactique lui engourdit les bras. Sous le choc il en oublia les mouvements des jambes, il ne savait plus comment on faisait. Une sensation de froid partie de la nuque irradia l’arrière de son crâne. Il entendait sa propre respiration, son souffle plus cours et pressé, un pressentiment glaçant lui serra la poitrine : il n’aurait pas la force de retourner jusqu’au rivage. 

Bagarre de frères adultes.

 Pierre lui envoie un coup de pied dans les jambes, Niels s’affaisse sur les cailloux. Alors Pierre se jette sur lui, ils roulent, se bourrent de coups de poing, se frappent au visage, sur le thorax, les épaules. Sans cesser de se parler. Benjamin croit assister à une scène irréelle, quasiment sortie de son imagination : ils se parlent tout en essayant de se tuer.

Les disputes en voiture.

 Ils montèrent dans la voiture. À l’intérieur du véhicule, Benjamin était toujours sur ses gardes, car c’était toujours là, semblait-il, que se déroulait les scènes les plus terribles, lorsque la famille était enfermée dans un si petit espace. C’est là qu’avait lieu les plus violentes disputes entre papa et maman, quand papa faisait tanguer la voiture en essayant de régler la radio, ou quand maman ratait une bifurcation sur l’autoroute et que papa poussé des cris désespérés en voyant s’éloigner la sortie derrière eux.

La perception du laissé aller de sa maison .

 Peu à peu, il réunissait les indices, apprenait à se connaître lui-même en regardant autour de lui. La saleté à la maison, les taches d’urine par terre autour de la cuvette des WC, ça crissait sous les pantoufles de papa, les moutons sous les lits, qui tournoyaient doucement dans le courant d’air quand les fenêtres étaient ouvertes. Les draps qui jaunissaient dans les lits des enfants avant d’être changés. Les pile de vaisselle sale dans l’évier et les petites mouches qui sortaient affolées de leurs cachettes entre les assiettes, quand on ouvrait le robinet. Les cernes de crasse sur l’émail de la baignoire, telles des lignes de marée dans un port, les sacs d’ordures qui s’emploient à côté de l’étagère à chaussures dans l’entrée. Benjamin s’était rendu compte qu’il n’y avait pas que la maison qui était sales ses habitants l’étaient aussi.

 

16 Thoughts on “Les survivants -Alex SCHULMAN

  1. C’est un roman qui me plairait je pense…
    Et dis donc, tu donnes quelques indices de lecture…

    • Pourtant j’ai essayé de ne rien dire mais c’est compliqué de parler d’un livre qui est entièrement construit sur une révélation dont il ne faut pas vous parler. Ce que trouve amusant c’est que les lectrices du club qui détestent qu’on leur révèle la fin des livres ont expliqué qu’elles avaient lu deux fois le roman pour bien en profiter … comme quoi savoir la fin rajoute du plaisir !

  2. keisha on 12 mai 2022 at 07:37 said:

    Je n’ai pas trop cherché d’indices, en fait je n’aime pas trop ces suspenses. Mais tu as l’air d’avoir apprécié;

  3. Je pense que ce roman me plairait, et je ne lis que de bons avis… reste à le trouver en médiathèque !

  4. Il est arrivé à la bibliothèque, je vais le réserver. A suivre …

  5. Même si j’ai mis un petit moment à « choper » le rythme, j’ai aimé la construction narrative du récit qui aurait sans doute été plus fade s’il avait été conté d’un point de vue purement chronologique.
    J’ai également beaucoup aimé la bascule d’une ambiance de vacances familiales lumineuses à une atmosphère plus oppressante, anxiogène et poisseuse. La fameuse « révélation » finale explique bien des choses, notamment le comportement versatile de la mère.

  6. Je note je vais voir si je le trouve
    Je crois qui si on se fie aux films genre Festen et autre joyeusetés les conflits familiaux durs ne sont pas rares en Suède !!
    Les secrets ou les événements traumatisants sont plus que funestes dans une famille

    • c’est vrai que ce film « festen » est terrible ! et là c’est un drame terrible, qui sous-tend tout le récit et pour moi ce n’est pas un plus .

  7. Désolée, ce n’est pas avec moi que tu pourras discuter de ce roman car il ne me tente pas… Entre le mélange des temps, + le côté sombre et l’attente suspense.. J’aime le suspense mais plutôt quand on a la cause et que viennent les conséquences ensuite mais pas trop dans l’autre sens !

  8. Voilà qui m’intrigue beaucoup … Je le note pour ne pas louper la sortie en poche. Ce n’est donc pas avec moi que tu pourras discuter de la fin ^-^-

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