Une plongée dans l’horreur et aucune pitié pour les lecteurs trop sensibles (dont je fais partie). Je ne sais pas si cela a un sens de mettre des petits coquillages pour un tel livre, il en mérite 10 si vous voulez vous renseigner sur la guerre civile algérienne et beaucoup moins si vous préférez vivre loin de ces horreurs Malgré les récits plus horribles les uns que les autres je n’ai pas lâché ce roman « noir » (très noir) avant la dernière page qui n’apporte, d’ailleurs, aucun réconfort. Ce livre m’a rappelé un reportage diffusé par « France 2 » sur la lutte contre le terrorisme en France. Et comme en janvier le thème du club de lecture c’est : l’Algérie, j’ai pris ce livre à la médiathèque . Cette guerre a fait environ 100 000 morts, des milliers de disparus, un million de personnes déplacées, des dizaines de milliers d’exilés et plus de vingt milliards de dollars de dégâts et a duré une dizaine d’années. Elle commence en 1991 quand un parti islamiste le FIS est en passe de remporter les élections. Le gouvernement avec l’appui de l’armée annule les élections et l’armée prend le pouvoir. Ce livre raconte les manipulations de l’armée algérienne pour plonger dans l’horreur l’Algérie d’abord, puis, la France pour que celle-ci soutienne sans aucun remord la répression contre les partis islamistes. Quand les islamistes ne sont pas assez violents, l’armée les pousse à l’être davantage. La France a mis beaucoup de temps à réagir, mais j’ai entendu dans l’émission que peu à peu les services secrets de la France ont pris conscience que les terroristes du GIA se sentaient soutenus par le gouvernement algérien. Au milieu de personnages réels, le récit suit l’enquête du personnage principal Tedj Benlazar, un homme mi-breton mi-algérien, agent de la DGSE et qui comprendra plus vite que d’autres tous les dessous d’une très, très sale guerre. Si aujourd’hui ce pays est plus calme, il n’empêche que le gouvernement n’a toujours pas osé faire un retour vers la démocratie et que si l’étau militaire se desserrait, on peut se demander combien de scorpions sortiront de cette fournaise. Or, on sait aussi aujourd’hui que la méditerranée ne suffit pas à protéger la France du fanatisme qui s’exporte tellement mieux que les valeurs humanistes.

 

Citations

L’armée algérienne et ses liens avec les islamistes.

Le lien contre nature entre militaire et islamiste engendrera inévitablement le grand bordel. Le grand bordel, comprendre l’importation des problèmes algériens en France.

 

Un soldat algérien pris dans la tourmente

Lorsqu’il s’est engagé dans l’armée, il voulait rester honnête, droit, propre, se souvient-il. Sauf que la guerre ne rend pas les hommes meilleure, elle les transforme en bête féroce

Les luttes dans l’armée algérienne

Car derrière l’unité de façade de l’armée face à la barbarie des islamistes, les guerres fratricides font rage entre les officiers de haut rang. Il n’y a pas de fraternité militaire qui tiennent longtemps face à la convoitise. Et la convoitise anime tout ce qui approche de près ou de loin le pouvoir, civils comme militaires.
L’Algérie est riche. Nonobstant la terrible crise économique qui sévit et la quasi-tutelle du FMI, l’Algérie est très, très riche. Dans le Sahara se trouve les troisièmes réserves de pétrole d’Afrique et le tiers de son gaz. L’Algérie et un coffre-fort ouvert dans lequel puisent les généraux et les ministres depuis longtemps.

 

Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard. 

 

 

Un livre qui m’a davantage étonnée que plu. Il y a deux livres en un, d’abord le récit de formation de Pol Pot du temps où il s’appelait Saloth Sâr . C’est dans toutes les faiblesses de cet enfant, puis du jeune homme que Nancy Houston traque tout ce qui a pu faire de cet homme qui a tant raté, ses études, ses amours, un tyran parmi les plus sanguinaires. Il ne réussit pas à obtenir ses diplômes, il fera tuer tous les intellectuels. Il puisera dans les discours révolutionnaires français, de 1789 à 1968, le goût des têtes qui doivent tomber ! Les chiffres parlent d’eux mêmes, Pol Pot est responsable de 1,7 million de morts, soit plus de 20 % de la population de l’époque. L’article de Wikipédia, en apprend presque autant que ce livre, mais l’émotion de l’écrivaine rend plus palpable l’horreur de ce moment de l’histoire du Cambodge.

Et puis nous voyons la très jeune narratrice, qui doit avoir plus d’un point commun avec l’auteure, passer une enfance et adolescence très marquée par le mouvement hippie pendant son enfance et mai 68 à Paris pendant sa jeunesse. Le but de ces deux histoires, est de montrer les points communs entre cet horrible Pol Pot et la narratrice. Je pense qu’il n’y a qu’elle qui voit les ressemblances. En revanche, le passage par Paris et la description des intellectuels , Jean-Paul Sartre en tête qui soutiennent les Khmers Rouges est terrible pour l’intelligentsia française. La seule excuse à cet aveuglement volontaire, c’est de ne pas vouloir prendre partie pour les américains qui ont envoyé sur le Cambodge plus de bombes que pendant la deuxième guerre mondiale sur toute l’Europe. Et voilà toujours le même dilemme  : comment dénoncer les bombardements américains sans soutenir le communiste sanguinaire, Pol Pot.

 

 

Citations

l’écriture

De toute façon, elle a appris depuis l’enfance à neutraliser par l’écriture tout ce qui la blesse. Les mots réparent tout, cachent tout, tissent un habit à l’événement cru et nu . Dorit ne vit pas les choses en direct mais en différé : d’abord en réfléchissant à la manière dont elle pourra les écrire, ensuite en les écrivant. Protégée quelle est par la maille des mots, une vraie armure, les agressions ne l’atteignent pas vraiment.

 

Mai 68

Un jour Gérard vient l’écouter jouer du piano dans l’appartement de la rue L’homond. Au bout d’une sonate et demie de Scarlatti, il pousse un soupir d’ennui : » C’est bien joli, tout ça dit-il, mais je n’y entends pas la lutte des classes. »

 

Les Khmers rouges

 

Le 9 janvier 1979, les troupes nord-vietnamienne se déploient à Phnom Penh, révélant au monde la réalité du Kampuchéa démocratique, la capitale désertée, dévastée… Les champs stériles… Les monceaux de squelettes et de crânes… De façon directe ou indirecte, au cours de ces quarante cinq mois au pouvoir, le régime de Pol Pot aura entraîné la mort de plus d’un million de personnes, soit environ un cinquième de la population du pays. Le Cambodge gît inerte, tel un corps vidé de tout son sang .

 

Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard

Voici mon deuxième auteur de ma famille affective. C’est encore d’un deuil dont il s’agit, celui de son frère. Ils sont quatre garçons, dans la famille, Daniel a partagé pendant onze ans sa chambre avec son frère de quatre ans son aîné. C’était le préféré de la famille, et comme il le lui avouera plus tard ce n’est pas toujours facile de porter ce titre sur ses épaules. Lui, Daniel, c’est celui qui rate l’école dans une famille ou être reçu à une grande école , si possible polytechnique était la règle, ce n’était pas facile non plus. Mais Daniel avait Bernard qui d’une simple phrase savait le rassurer. Quand l’enfant rentre très triste avec de très mauvaises notes, et qu’il hurle de colère le plus fort qu’il le peut : « je suis con, je suis con » d’une voix douce son frère lui répond

– Mais non, si tu étais con, je le saurais !

Citations

Manger ou dîner ?

L’heure tournant, je me lavais :
– Bon, ce n’est pas tout ça mais il faut qu’on y aille, on va manger chez les R.
Ma tante me regarda comme si elle avait avalé son dictionnaire. 
-Mais non, voyons, vous allez « dîner », chez les R.
Mon frère tempera doucement. 
-Oui, et tu connais Daniel, il en profitera certainement pour manger quelque chose. Toute notre vie je me suis alimenté à son humour.

Vocation ?

Il était ingénieur en aéronautique, spécialiste des vibrations. Il aurait préféré les eaux et forêts, les arbres, les animaux. Il aurait fait un bon éthologue. Des concours d’entrée en décidèrent autrement. Ainsi va la vie dans certaines familles qui ont accès aux grandes écoles, recalé à ce concours ci, reçu à celui-là, tu aurais aimé t’occuper d’oiseau, tu t’occupes d’avion. La préférence ? Qu’est-ce que ce caprice, au regard du rang à tenir ?

Humour

La probabilité jouait un grand rôle dans sa vie, le pire étant sûr -question de probabilités-, il n’y avait aucune raison de dramatiser. Nous échangions beaucoup de blagues autour de la probabilité. La veille de mon permis de conduire il me conseilla de convaincre l’inspecteur qu’il valait beaucoup mieux traverser les carrefour à cent quatre-vingt à l’heure qu’à vingt
 – Neuf fois moins de chances de percuter un autre véhicule, Monsieur l’Inspecteur.

Le couple

C’est donc l’histoire d’un couple, me disais-je, où le mari ne m’aura jamais dit de mal de sa femme qui ne m’en n’aura jamais dit du bien.

Ce jour je vais publier deux romans de deux auteurs pour lesquels j’éprouve de l’affection. Cela ne se dit pas, sauf sur un blog. Tous les deux font partie de ma famille de lectures, et tous les deux racontent le deuil.

Je lis tous les livres de cet auteur qui me tombent sous la main, celui-là c’est la souris jaune qui me l’a conseillé, qu’elle en soit remerciée. C’est un très beau livre, qui explique bien des failles et des difficultés d’être à fond dans la vie qui sont évoquées dans tous les livres de Jean-Philippe Blondel. Lorsqu’il avait 18 ans un accident de voiture a tué sa mère et son frère, c’est son père qui conduisait et celui-ci meurt quatre ans plus tard. Plombé par ces deux tragédies, le narrateur très proche de l’auteur, sans aucun doute, a bien du mal à trouver l’envie de « rester vivant » . Avec beaucoup d’humour et en restant très pudique, il arrive à nous faire comprendre et partager sa souffrance. Ce que j’apprécie chez lui, c’est que jamais il ne s’apitoie sur lui, jamais il ne fait pleurer sur son sort. Sa vision de l’Amérique est original et tout en suivant une chanson de Lloyd Cole Rich qui l’amènera à Morro Bay. 

Mais aussi à Las Vegas où il a bien failli se perdre lui et et aussi Laura et Samuel. Ce sont ses amis et leur trio est compliqué, Laura c’st son ex qui est maintenant la petite amie de Samuel qui est son ami pour toujours. Ce road movie lui permet de faire des rencontres intéressantes et même la loueuse de voiture qui semble d’un banal achevé se révélera plus riche qu’il ne s’y attendait. Bien curieuse famille où lui était l’enfant raté à côté du frère parfait qu’il entendait pourtant pleurer très souvent la nuit dans son lit.

la chanson qu’ils ont chanté pendant leur voyage à propos de laquelle il dit

Je devrais écrire un mail à Lloyd Cole.

Je commencerai par « Tu vois, Lloyd, un jour, j’y suis allé, à Morro Bay ».

Un jour, j’en suis revenu aussi. Et après, la vie a repris ses droits.

 

Citations

Style

Nous restons un moment comme ça, inutiles, sur le trottoir. Il n’y a presque personne dans les rues de la ville. On est un vendredi 2 mai. Le nuage de Tchernobyl s’est arrêté au frontière française. Il fait bon. Je sens des picotements dans mes mains et dans mes pieds. Je remarque une tache de peinture rouge sur le mur d’en face. Samuel se dandine d’une jambe sur l’autre. Il demande ce qu’on fait maintenant. Je veux voir du monde. Sentir la sueur et l’alcool. Nous optons pour le seul café qui reste ouvert jusqu’à trois heures du matin. En marchant, j’oublie que je sors de l’hôpital, j’oublie que je devais me faire opérer le lendemain, j’oublie que mon père est mort sur une route de campagne. La seule chose dont je me souviens, c’est que j’ai vingt deux ans ans.

Le deuil

Nous avons pris la voiture tous les quatre, au grand dam de mon oncle – qui ne voyait pas ce que Samuel avait à voir avec tout ça. Laure, encore, à la limite. Mais Samuel, non. J’ai simplement dit : » Il vient aussi. » Et tout le monde a obéi. Être le roi du malheur, ça a quand même des avantages. Les sujets se plient de mauvaise grâce à vos désirs, mais ils n’ont pas assez de cran pour vous contredire.

Une vision originale de Las Vegas

Je me sens instinctivement bien à Las Vegas.

C’est le centre du monde de l’oubli.

 

Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard

 

J’aurais tant voulu aimer ce roman, ! Tout le long de la lecture cette phrase tournait en boucle : « Les meilleures intentions ne suffisent pas à faire un bon livre. » J’ai aimé les idées de départ, cette jeune femme introvertie, Alice, qui trouve sa vie ratée car elle ne trouve pas de poste pour enseigner dans une université après une thèse en sociologie. Elle se réfugie dans la maison de sa grand-mère dans un petit village de la Meuse. Et là, trouve par hasard de quoi s’occuper en animant des ateliers d’écriture dans deux maisons de retraite et avec des enfants de l’école. Ensuite, l’auteure imagine une cascade de coïncidences que j’ai eu bien du mal à accepter. Lucien a bien connu la grand-mère d’Alice la narratrice , Marguerite qu’il confond avec elle, Georges dans un texte émouvant fait revivre le souvenir de Manon la résistante qu’il n’a vu qu’une fois mais dont il est tombé éperdument amoureux. Élisabeth, dans la maison de retraite éloignée de quelques kilomètres, racontera la même histoire ; Et ? oui, oui, vous avez deviné : ils se marièrent à 90 ans. Chloé la pétulante ergothérapeute ne voit pas que Julien, l’animateur est fou amoureux d’elle, et ? oui, oui, ils finiront dans les bras l’un de l’autre . Et notre Alice retrouvera-t-elle son Antoine ? Je vous laisse la découverte (si vous n’avez pas deviné la fin, vous n’êtes pas doué !) et aussi l’enquête des vieilles dames qui de Vérone à Boston en passant par Paris remuent ciel et terre pour redonner à Alice sa joie de vivre.

Ce roman n’était vraiment pas pour moi et pourtant je l’ai commencé avec les meilleures intentions du monde. Je connais bien les personnes qui vieillissent en maison de retraite, j’apprécie beaucoup les ateliers d’écriture et enfin ce livre était au programme de mon club de lecture. Trois bonnes raisons qui n’ont pas suffit à faire de cette lecture un bon moment. Je pense qu’il pourra faire l’objet d’une adaptation au cinéma pour une comédie « à la française » , j’imagine très bien la bande annonce et la pauvreté du film qui décevra un public alléché par les bonnes idées de départ.

 

Citations

L’internet

Il était loin, le temps où elle dissertait avec ses copines de fac sur le grand méchant commerce en ligne qui allait manger tout cru les petits commerces de proximité. Alice en avait fini avec les grandes envolées indignées. Quand on vivait au fin fond de la Lorraine, on était bien content de recourir au site marchand qui peuplent le Web. « Internet comme outil de compensation culturelle de la désertification rurale ».

 

 

 

 

Lu dans le cadre du Club de Lecture de la médiathèque de Dinard

Citation de Sénèque qui illustre parfaitement le sens de ce roman :

Tirons notre courage de notre désespoir même 

Ce roman concourt à notre prix final du mois de Juin 2019, c’est dire si l’enthousiasme des lectrices a été convainquant. J’avoue que je me suis amusée à cette lecture. J’ai retrouvé une partie de mon enfance quand je chipais des livres à mes frères et qu’en secret, je partais dans des romans plus aventureux que mes goûts habituels en matière de lecture. Je pense aussi que cette auteure s’est bien amusée à rédiger des belles scènes de navigation et de batailles entre les bateaux du roi et ceux des pirates. Virginie Caillé-Bastide s’est appliquée à être la plus exacte possible aussi bien en matière de navigation que sur le plan historique. Elle a choisi de garder des tournures de la langue du XVIIe siècle, mais cela n’empêche nullement la compréhension. Pour étoffer son roman elle a choisi de confronter un pirate à l’âme noire, Ombre, à un pasteur Jésuite à l’intelligence et à l’humanité remarquables. C’est sans doute ce qu’on peut lui reprocher, les personnes positives le sont à la lumière du XXI° siècle et de valeurs humanistes qui ne sont venues que très tardivement dans les conscience des humains. Mais ce reproche ne doit arrêter aucun lecteur ou lectrice. Si vous voulez connaître, l’histoire de Ombre, anciennement petit noble breton, qui a vu toute sa famille et ses proches mourir de faim, qui reniera Dieu et ses œuvres pour partir dans les Caraïbes et devenir un des pirates les plus craints des mers lointaines, embarquez-vous sur le Sans-Dieu, l’aventure sera au rendez vous, et l’amour aussi, un peu, peut être trop, si vous êtes uniquement attaché à la réalité historique.

 

Citations

 

La famine sous Louis XIV, propos sarcastiques

Certes, notre pauvre dame a déjà perdu six enfants et le petit Jehan était le seul que le Seigneur notre Dieu avait omis de lui reprendre.

Combat de pirates

Après la détonation, chacun entendit le sifflement reconnaissable entre tous de cette arme redoutable. Tournoyant dans les airs, les deux boulets reliés par une chaîne entamèrent d’importance un gréement déchirèrent une voile, et rencontrèrent deux matelots qui avait eu l’infortune de se trouver sur leur course. Au même instant, le brick tira à bout portant belle salve dans les flancs du galion, l’atteignant au cœur de ses œuvres vives, où se situaient canon et réserve de poudre. Aussitôt, un début d’incendie se déclara ajoutant à la confusion de l’assaut. Le bricks s’était encore approché ne se trouvait plus qu’à quelques brasses de l’espagnol. Perchés dans les enfléchures des haubans, les gabiers du « Sang Dieu » lancèrent des dizaines de grenades sur le pont du galion, causant grand dommage à l’ennemi. Puis à l’aide de grappins et de crochets, ils agrippèrent les vergues et les drisses, de façon à permettre au restant de l’équipage de sauter à bord du vaisseau. Pendant l’abordage, bien des pirates tombèrent sous les balles des mousquets espagnol, mais la majorité d’entre parvint à gagner le pont principal et se précipita avec force cris sur les soldats ébahis. Hache en main et sabre au clair, l’Ombre fut l’un des premiers à se jeter sur un officier qui n’avait pas eu le temps de recharger son mousquet, et dont l’épée délicatement ciselée , vola au premier coup de hache…..

Discussion de pirates

« Oh là Gant-de-fer, sauras-tu encore te servir de ton boute-joie afin d’en régaler les drôlesses et émouvoir leur tréfonds ? » L’intéressé répondait aussitôt 
« Et toi, Foutriquet, si ton appendice est proportionnel à ta taille, je gage que tu ne leur feras point grand effet et qu’elle s’en viendront me trouver afin que je les satisfasse à ta place ! »

Le style

À peine l’amour rencontré, la mort s’était-elle invitée ? Les misérables qui exploitait le corps de cette malheureuse avait-il occis le naïf jeune damoiseau afin de lui faire payer le prix de son impudence ?

 

J’avais repéré ce roman chez Keisha, Jérôme, Kathel, AifelleKrol (qui ne tient pas à jour son Index des auteurs).J’ai fait plusieurs tentatives pour le finir car ce livre est une vraie claque mais le genre de claque qui rend triste et plombe le moral. Il faut un certain courage pour affronter cette réalité : oui, les hommes se conduisent mal sur la seule planète qu’ils seront sans doute capables d’habiter. Ils dominent tout, saccagent tout, pour pouvoir vivre confortablement leur vie de « Maîtres et possesseurs » comme nous l’avait enjoint Descartes∗. Alors, à la manière d’un Montesquieu avec ses Persans et d’un Swift avec Gulliver, Vincent Message veut nous faire réfléchir sur ce que nous faisons sur notre planète, il imagine qu’à notre tour, à une époque différente, nous sommes « Dominée et Possédés ». Son roman est très fort car il n’a pas cherché à fabriquer des extra terrestres un peu ridicules, nous ne savons rien de ces « Dominateurs » sauf que ces êtres nous ont étudiés et qu’ils ont parfaitement compris comment nous avons fait pour êtres des « Maîtres » et à leur tour, il sont devenus « Nous » mais en nous remplaçant. Les hommes sont maintenant traités comme nous le faisons avec les animaux aujourd’hui.

  • Les animaux de compagnie qui ont le droit de vivre confortablement auprès de leur maître.
  • Des esclaves qui triment jusqu’aux limites de leur forces puis sont abattus.
  • Et enfin la pire des conditions, des hommes d’élevages qui seront abattus et consommés sous forme de viande.

Comme ces êtres ont d’abord cherché à nous comprendre, cela permet à l’auteur d’écrire quelques pages terribles sur nos absurdes comportements destructeurs, par exemple dans la mer. Les pages sur la pêche industrielle sont insupportables mais tellement vraies. Le roman alterne des périodes d’actions intenses car le héros Malo est un être supérieur et un haut cadre de la nouvelle société, il est l’instigateur d’un projet de loi qui demande que l’on autorise les hommes à vivre dix ans de plus : jusqu’à 70 ans, car dans cette fiction, il sont systématiquement abattus à 60 ans pour éviter les problèmes liés à la vieillesse des humains. Malo s’est épris d’une jeune femme humaine, Iris qui était une femme d’élevage. Il veut la sauver à tout prix, alors qu’elle a été victime d’un accident de voiture. Le système implacable que les maîtres ont mis en place se referme peu à peu sur lui. En dehors de cette action intense, l’auteur nous offre des périodes de réflexions sur le traitement de la nature. Ces êtres supérieurs ont, en effet, seulement cherché à dominer et à faire mieux que nous, en conséquence de quoi la planète est aussi malmenée que lors de la domination humaine. Une petite lueur d’espoir dans ce roman si sombre, les hommes ont une caractéristique que ceux qui nous ont dominé n’ont pas, ces « maîtres » ne sont pas des créateurs. Alors l’art saurait-il nous sauver ? Et puis, à la fin du roman on parle d’un lieu sur terre où les choses se passent différemment et finalement pouvons nous réjouir de cette certitude les dominateurs connaîtront un jour, eux-aussi leur fin ?

 

 

Citations

 

∗Extrait du discours de la méthode de Descartes

« Car [ces connaissances] m’ont fait voir qu’il est possible de parvenir à des connaissances qui soient fort utiles à la vie, et qu’au lieu de cette philosophie spéculative, qu’on enseigne dans les écoles, on peut en trouver une pratique, par laquelle connaissant la force et les actions du feu, de l’eau, de l’air, des astres, des cieux et de tous les autres corps qui nous environnent, aussi distinctement que nous connaissons les divers métiers de nos artisans, nous les pourrions employer en même façon à tous les usages auxquels ils sont propres et ainsi nous rendre comme maîtres et possesseurs de la nature. Ce qui n’est pas seulement à désirer pour l’invention d’une infinité d’artifices, qui feraient qu’on jouirait, sans aucune peine, des fruits de la terre et de toutes les commodités qui s’y trouvent, mais principalement aussi pour la conservation de la santé, laquelle est sans doute le premier bien et le fondement de tous les autres biens de cette vie.”

 

La vision des nouveaux maîtres de la planète sur les hommes

L’ironie c’est qu’ils avaient cru être supérieurs, eux aussi, en leur temps, mais c’était dans leur cas au prix d’un aveuglement qui prenait avec la distance un aspect un peu pathétique. Ce qui les mettait à part, c’était, disaient-ils, leur intelligence redoutable, leur maniement fin du langage, leur créativité. Ne pas être capable de réguler pour de bon sa démographie, déterrer et brûler le carbone jusqu’à rendre l’air irrespirable, c’était pour eux le signe d’une intelligence redoutable. Réduire de force plusieurs milliards de leurs propres congénères à une vie de quasi esclave pour qu’une minorité concentre les richesses, c’était l’indice certains de leur inventivité exceptionnelle. Ils ne se demandaient presque jamais si le fondement de l’intelligence ne consiste pas à se donner des moyens de survivre sur le long terme, si la capacité à une auto-conservation durable n’est pas le premier signe de la raison. Ils méprisaient comme des aberrations de la nature des rebuts de la création toute une série d’espèces qui les avaient précédés sur terre et qui leur auraient survécu de quelques millions d’années s’ils n’avaient pas eu la chance que nous reprenions les choses en main. Nous les avons trouvés pullulant à certains endroits et ne se reproduisant pas assez à d’autres. Tout aussi incapables de répartir le travail que la population. Et cette inconséquence, d’une constance tout à fait remarquable, elle tenait pour beaucoup à leur emprisonnement dans le chaos des intérêts particuliers. Pour rien au monde ils n’auraient accepté quelque chose qui favorise plus le pays voisins que le leur, ou consenti à des efforts substantiels pour des gens qui n’étaient même pas encore nés. C’était là des traits qui, si on en faisait la somme justifiait assez la rapidité de leur effondrement et la légitimité de notre domination.

Les Hommes comme nourriture

Naturellement, des esprits critiques, des polémiqueurs -j’ai dit déjà que nos rangs en comptent plus que de raison- affirment qu’il y a une sorte de schizophrénie à élever certains hommes pour les aimer et partager notre quotidien avec eux, et d’autres hommes pour les tuer les manger. On peut juger cela étrange, mais tout comme le réel nous ne sommes pas à une étrangeté prêt. C’est la moindre des schizophrénies dont nous nous avérons capables. Jamais, il faut l’avouer, il ne nous viendrait à l’idée de manger ceux qui nous servent d’animaux de compagnie, nous aurions le sentiment, en mordant dans leur chair, de reconnaître implicitement que nous sommes nous-mêmes comestible, et que tout être vivant, entre les murs que nous habitons, pourrait parfaitement, à son tour, se retrouver équarri , mis au four, découpé sur une planche, réparti par tranches fines dans des assiettes que l’on tend à la ronde en disant commencez, commencez, n’attendez pas que ça refroidisse.

 

Citation de Charles de Gaulle

 » Les possédants sont possédés par ce qu’ils possèdent « 

Je trouve que ce livre complète bien la lecture du précédent car il permet de découvrir le principal dirigeant qui a vu grandir ma génération et celle de Jean-Pierre Le Goff. On sent la très grande admiration de Gérad Badry pour « le » Général. Derrière l’homme de la résistance, celui qui a sorti la France des erreurs de la quatrième République et qui a permis la décolonisation, il y a donc un homme chrétien et respectueux des femmes. Il n’a rien d’un féministe et pourtant … il voulait depuis longtemps donner le droit de vote aux femmes, il a permis la contraception et a voulu que les femmes puissent travailler et élever leurs enfants. Sa vision de la femme est marquée par le rôle de mère qui lui semble sacré. C’est à ce titre, qu’il a systématiquement exercé son droit de grâce pour les femmes à la libération. Mais plus que ses idées politiques, ce qui m’a intéressée c’est son entière probité, son respect des femmes et ce qui m’a le plus touchée sa grande affection pour sa petite Anne enfant trisomique qu’il a tant aimée. C’est un homme étonnant, d’une autre époque et d’une autre culture, il vient à la fois de la chrétienté et de l’amour de la patrie et son caractère a été forgé par l’armée française. Je ne savais pas qu’il avait fait entrer au gouvernement une femme musulmane d’origine algérienne Nafissa Sid Cara qui a un parcours très intéressant. Le portrait de Geneviève de Gaulle-Anthonioz est passionnant et mériterait à lui seul un livre entier. C’est une plongée dans un autre monde, celui justement qui a vu naître et grandir Jean-Pierre Le Goff mais un monde ne pouvait pas comprendre que les adolescents de mai 1968 n’étaient pas uniquement porteurs de « chienlit ».

 

Citations

Entrée en bourse des femmes

C’est aussi sous de Gaulle, en 1967, que les femmes seront autorisées à entrer à la Bourse de Paris pour y spéculer. Leur arrivée à la corbeille ou s’affairaient depuis toujours un aéropage exclusif de messieurs, en cravate et costumes sombres, fait d’abord sensation, avant que d’élégantes jeunes diplômées en finance n’occupent des poste de commis. Dans les milieux boursier, un authentique bastion masculin, la résistance avait été très forte pour refuser de partager les codes, les secrets et les moeurs avec la gente féminine. La seule femme ayant pu s’introduire à la corbeille l’avait fait, en 1925, habillée en homme et portant une barbe postiche. Condamnée à 3 ans de prison pour escroquerie et abus de confiance pour avoir vendu des titres appuyés sur des société fictives, Marthe Hanau avait fini par se donner la mort en prison, en 1935, renforçant l’opposition des hommes à l’entrée de toute femme dans l’univers de la Bourse. L’histoire romanesque de Marthe Hanau devait, en 1980, inspirer le film « la Banquière » de Francis Girod avec Romy Schneider.

Trente-deux ans plus tard, les portes du palais Brongniart s’ouvraient enfin aux femmes.

la loi Neuwirth

En Conseil des ministres, le général se montre résigné. Il déclare : « Les mœurs se modifient. C’est évolution est en cours depuis longtemps, nous n’y pouvons à peu près rien. En revanche, il faut accentuer notre politique nataliste. Puis il ajoute.

 : » Il ne faut pas faire payer les pilules par la sécurité sociale. Ce ne sont pas des remèdes. Les Français veulent une plus grande liberté des mœurs mais nous n’allons tout de même pas leur rembourser la bagatelle. »

Probité

Leur première tâche a été de remettre de l’ordre dans le fonctionnement de la présidence pour y introduire plus de rigueur. Il a été souvent raconté que, le jour même de leur arrivée, les de Gaulle avait exigé qu’un compteur individuel soit posé pour payer de leur poche l’électricité de leurs appartements. C’est exact. Mais on s’est moins qu’Yvonne a mis immédiatement fin à l’utilisation de la vaisselle d’État, en porcelaine de Sèvres, pour leurs repas quotidiens en tête à tête. Au volant de sa voiture, au premier jour de leur installation, elle s’est rendue au Bon Marché, son magasin préféré, pour y acheter -avec leur argent- un service de table ordinaire qui fut utilisé jusqu’à la démission du général en 1969. De même, Yvonne demandera à l’intendant de l’Élysée de lui présenter chaque fin de mois la note correspondant au repas pris par les membres de la famille venus déjeuner avec eux le dimanche.

 On trouve un autre exemple de cette honnêteté sans faille des de Gaulle dans leur décision de faire installer un oratoire à l’Élysée pour y assister à la messe dominicale à l’abri des regards. Créé dans l’ancien bureau des chauffeurs encore envahi par les odeurs de pastis, cette petite chapelle – une table servant d’autel, quatre chaises prie-Dieu et quelques ornements- a été totalement payé avec l’argent personnel du couple.

Portrait de la secrétaire de de Gaulle Elisabeth de Miribel

Les Miribel, comme les Mac-Mahon, ont le culte de l’honneur et de la discipline. Ils affichent leur dédain pour l’argent et pour la politique.  » Élevée dans ce milieu conservateur et catholique, je n’ai jamais entendu mes parents discuter de politique à la maison. Autant il leur paraît normal de mourir pour la patrie, si possible en gants blancs, autant il faut éviter de se salir les mains en se mêlant de politique » expliquera-t-elle dans son autobiographie.

Le patriotisme, le don de soi pour la France, la foi chrétienne, le dédain pour l’argent et pour la politique, c’est tout ce qu’elle retrouvera et qu’elle aimera chez de Gaulle.

 

Ce livre reçu en cadeau m’a beaucoup intéressée, il faut dire que nous sommes contemporains. Jean Pierre Le Goff est issu de la tradition catholique alors que j’ai fréquenté les écoles laïques. Mais nous avons été pris dans le même maelstrom en mai 1968. Le sous-titre de son essai est important et résume la thèse de son livre

Récit d’un monde adolescent, des années 1950 à Mai 1968

 

Le début est passionnant, il décrit le creuset à la fois catholique et rural de la pointe de la Hague dans lequel l’enfant a été élevé, dans le souvenir très présent de la guerre qui venait de s’achever. Souvenirs matériels avec les nombreux blockhaus, souvenirs du mur de l’Atlantique mais aussi, certainement psychologiques à travers l’éducation de ceux qui avaient subi ou fait cette guerre. Cette génération du « baby-boom » que le père de l’auteur appelle « la génération des enfants gâtés », il la décrit très bien, élevée dans un confort qui arrive dans les maisons et qui profite de la « société de consommation et des loisirs » , elle s’inscrira à jamais dans la révolte adolescente. Elle »jouera » à la révolution, Jean-Pierre Le Goff s’amuse à comparer les chiffres des morts des événements de Mai de 68 et du Weekend de pentecôte où les pompes à essence avaient été remplies. Évidemment les 6 ou 8 morts des événements semblent ridicules au regard de la centaine de gens qui se tuaient sur les routes tous les Weekend à l’époque. (en 1968 plus 16 000 morts sur les routes et plus de 300 000 blessés).

Dans son essai, le sociologue Jean-Pierre Le Goff sait très bien faire revivre tout ce qui définit une époque aussi bien sur un plan général comme celui de la nation que pour les individus qui la composent. Alors, les années 60, verront soutenues par ce nouveau média, la télévision, les chansons yéyé pour les jeunes et la politique de la France, menée par le Général de Gaulle. Tous les changements qui conduisent à l’affirmation de cette génération adolescente de Mai 68, l’auteur les décrit avec minutie et ses contemporains s’y retrouvent avec bonheur mais aussi réalise – s’ils ne l’avaient pas déjà fait- l’aspect quelque peu dérisoire de leurs engagements divers et variés..

Citations

Différence ouvriers et pêcheurs

Les ouvriers de l’Arsenal avait un surnom : les  » cocus du port ». Cette expression ironique renvoyait sans doute à la chance d’avoir un métier protégé et sûr, de mener une activité à heures fixes. Ce n’était pas le cas de la majorité de la population locale et tout particulièrement les marins-pêcheurs qui travaillaient durement.

 

Les préjugés et les dictons

Les noirs de peau – peu nombreux dans La région- étaient considérés comme des êtres étranges et primitifs, suscitant quelques réflexions grossières du genre : « Ils se ressemblent tous et avec une couleur pareille , je me demande comment ils font pour se distinguer les uns des autres  » …
Ces préjugés et ces superstitions se mêlaient à un sens commun issu de l’observation des comportements :  » grand diseu, p’tit faiseu. « 

La grande liberté des enfants des années 50

À cette époque, il était normal et « sain » que les enfants s’amusent à leur façon, du moment qu’ils ne faisaient pas de trop grosses bêtises. Les enfants avaient leur propre monde dans lequel les adultes ne s’immisçaient pas trop. Ces derniers travaillaient beaucoup ou avaient bien d’autres préoccupations en tête que celles de surveiller leurs jeunes enfants. Nos jeux se déroulaient dans des espaces, ceux de la rue et de la maison, qui nous étaient proches et familiers.

Après une brutalité d’un enfant de la bande adverse
On attrapa vite le coupable et on l’amena devant moi en le forçant à se mettre à genoux et à me demander pardon. Je n’aimais pas ce garçon qui était plus grand et plus fort que moi, mais je n’appréciais pas pour autant qu’on l’humilie de cette façon. J’avais l’habitude que les conflits se règlent entre jeunes, en dehors des adultes et d’une tout autre façon. Les plaies et les bosses étaient le prix à payer pour jouer librement.

La confession

Tous ces péchés n’étaient pas des péchés mortels mais leur accumulation permettait peut-être de s’en rapprocher. En fin de compte, l’abbé finissait toujours par poser la question. : « As-tu eu de mauvaises pensées ? As-tu regardé avec plaisir de vilaines choses ? »
En d’autres termes, « le vilain péché » était lié à la sexualité naissance et à la masturbation. Certains curés avaient les mains baladeuses, c’est du moins ce qui se disait parmi les élèves, mais, bien que m’étant confessé à l’un d’eux de, je n’ai jamais eu affaire à ce genre d’attouchement. L’abbé se contentait de me prendre la main ou de mettre la sienne sur ma joue de temps à autre comme un signe d’affection. Cela me gênait un peu, d’autant plus que je trouvais qu’il « puait la Gauloise », marque de cigarette brune très connue à l’époque, et que sa soutane ne sentait pas bon.

L’éducation

Malgré nos apparences d’enfant et d’élève obéissant, nous gardions un rapport à nous-mêmes qu’ils ne pouvaient maîtriser. Cette liberté intérieure était un secret bien gardé qui était partagé seulement avec quelques amis qui nous ressemblaient comme des frères. Quelles que soient les contraintes, la sévérité de la discipline et des punitions, nous n’étions pas, malgré les apparences, des enfants soumis et serviles.Les interminables grand-messe où, comme le disait Bernanos, on « ne saurait rien partager avec Dieu que l’ennui », permettait de rêver et de voyager dans un autre monde plus joyeux et plus coloré, tout en donnant le change de l’apparence de la docilité et de la piété par des paroles et des gestes convenus. Le silence et l’ennui stimulaient l’imagination.

L’arrivée de la télé

Je n’ai pas de récepteur chez moi, déclare en 1962 un directeur d’école dans la presse locale, mais je connais chaque jour parfaitement le programme de la veille, lorsqu’il y a du catch, j’ai 150 catcheur dans la cour de l’école à la récréation. Après un western, c’est 300 cowboy qui se battent, affublés de revolver, de lassos… Dans l’ensemble, les enfants en profitent et sont beaucoup plus documentés qu’autre fois sur les questions géographiques ou scientifiques par exemple. Malheureusement, beaucoup de parents n’ont pas l’autorité suffisante pour les renvoyer se coucher à 8h30 ou à 9h. Les enfants en sortant de l’école, s’installent devant le poste et n’en bougent plus avant la fin du programme.

L’église évolue …

Un de mes premiers souvenirs du changement dans l »‘enseignement religieux » fut celui d’un cours ou le jeune prêtre vint avec sa guitare nous chanter quelques chansons de sa composition. Il s’inspirait, avec plus ou moins de bonheur, de religieux de l’époque qui avaient connu un succès certain en enregistrant des disques. Il en allait ainsi du Père Duval, jésuite, compositeur et chanteur, qui, dans les années 1950, rassemblait les foules (avant tout catholiques), dans les nombreux concerts en France et dans les autres pays. Surnommé, le « Bécaud » de la foi, où « le Brassens » en soutane, il semblait venir d’un autre âge à l’heure des yéyés et de la pop anglaise. La jeune sœur Sourire, Dominicaine et chanteuse, avait connu le succès avec une célèbre chanson enjouée dont on retenait facilement l’air et les premières paroles du refrain : » Dominique, nique, nique, s’en allait tout simplement…  » Je n’étais pas le seul parmi les élèves à considérer cette chanson mièvre comme l’un des sommets d’expression des « culs-bénis ».

Le nerf de son explication

Ces interprétations « révolutionnaires » de mai 68 demeurent aveugles sur une nouvelle donne historique qui n’entre pas dans le cadre de l’action militante : la venue sur la scène sociale et politique d’un nouvel acteur social, le « peuple adolescent » élevé et éduqué dans la nouvelle société de consommation et des loisirs. La « Commune étudiante » de mai 68 en porte la marque.

Rôle des médias

Les médias ont accompagné le mouvement et accentué ses aspects violents et spectaculaires lui donnant une portée une signification révolutionnaire qui confortaient les interprétations et les actions gauchistes. En mai 68, s’est développé un nouveau rapport à l’information qui annihile le recul et la distance au profit du règne de l’émotion. L’information dans sa forme même (le direct) et dans sa façon de rendre compte de la réalité ( le ton émotionnel et dramatique) est partie intégrante de la mise en scène de la Commune étudiante pour qui l’intensité du présent, l’expression débridée et la dramatisation sont les signes évidents d’une révolution en acte. Ces caractéristiques de la Commune étudiants de mai 68 vont constituer un moule premier dans lequel viendront se couler des luttes étudiante et lycéenne, et ce qu’on appellera les « mouvements sociaux ».

Incroyable coquille ou erreur ?

J‘admirais,comme beaucoup d’autres,les pages de Montaigne après la mort de son ami Du Bellay ….
et si vous voulez l’entendre je dois vous dire que son livre est beaucoup plus clair que son entretien car il a ce défaut de ne pas toujours finir ses phrases à l’oral

Je sais que je dois cette lecture à la blogosphère en particulier à Jérôme mais à d’autres aussi. J’ai d’abord dégusté et beaucoup souri à la lecture de ce petit livre et puis je me suis sentie si triste devant tant de destructions, à la fois humaines et écologiques. Le regard de cet auteur est implacable, il sait nous faire partager ses révoltes. Comme lui, j’ai été indignée par le comportement de Philippe Boulet qui refuse de donner un simple coup de fil pour sauver de pauvres Malgaches partis en pirogues. Un de ses adjoint finira par l’y contraindre , mais trop tard si bien que seuls 2 sur 8 de ces malheureux ont été sauvés et vous savez quoi ?

 

En tant que chef de mission, Philippe Boulet a été décoré d’une belle médaille par le gouvernement malgache pour son rôle émérite dans le sauvetage des pêcheurs. un article de presse en atteste. Il sourit sur la photo.

 

La vision de la Chine est particulièrement gratinée, entre les ambiances de façades et la réalité il y a comme un hiatus. Comme souvent dans les pays à fort contrastes « le gringo » ou le »blanc » est considéré comme un porte monnaie ambulant. L’auteur se moque autant de ses propres comportements que ceux des touristes qui veulent absolument voir de « l’authentique ». Mais souvent la charge est lourde et quelque peu caricaturale. C’est peut être mon âme bretonne qui m’a fait être agacée aux portraits de bretons alcooliques. Ceci dit, pour voyager comme il le fait, il vaut mieux résister à l’alcool car on est souvent obligé de partager le verre de l’amitié qui est rarement un verre de jus de fruit quand on veut absolument vivre avec et comme les autochtones.

Enfin, le pire c’est le traitement de la nature par l’homme, c’est vraiment angoissant de voir les destructions s’accumuler sous le regard des gens qui se baladent de lieux en lieux sans réaliser que, par leur simple présence, (dont celle de l’auteur !) ils contribuent à détruire ce qu’ils trouvent, si « jolis », si « authentiques », si « typiques »….

 

Citations

 

Humour

J’ai passé des journées à marcher dans les rues, fouiner chez les disquaires de Soho, contempler l’agitation de Notting Hill ou des puces de Camden. Tout cela était très intéressant, je rencontrais d’autres possibles, mais ça ne m’aidait pas réellement à savoir qui j’étais. Le déclic eut lieu une nuit que j’étais à me morfondre dans quelque pub anglais au cœur de Londres. Accoudé sur un comptoir, je noircissais des page de cahier à spirale, dans une navrantes tentative postadolescente de devenir Arthur Morrison. Je zonais depuis une semaine, le groupe du pub reprenait Walk Of Life et j’en étais à écrire des sonnets sous Kronenbourg quand quelqu’un a renversé son verre de Guinness sur mes vers de détresse. Une vision, féminine, chevelure fatal et hormones au vent. Note pour les jeunes poètes maudits : écrire la nuit dans les bars, pour pathétique que ce soit, peut attirer la gourgandine. C’était une vieille, elle avait au moins 25 ans. Elle portait une robe noire sophistiquée et des talons arrogants ; elle travaillait dans la mode. Ses yeux brillaient d’une assurance alcoolisée. Volubile et pleins d’histoires.

Très drôle

Il existe, à l’est de Leeds, localité dont peu de gens soupçonne l’existence. Un port où le soleil n’est qu’un concept lointain, une cité prolétaire ou Margaret Thatcher est Satan et Tony Blair, Judas. Une riante bourgade ravagée par la crise postindustrielle, où l’on repère les étrangers à leur absence de tatouages et de cirrhose. Liverpool sans groupe de rock mythique, Manchester sans le foot. Hull est un sujet de moquerie pour le reste de l’Angleterre. Sa page Wikipédia se résume à 5 lignes, c’est que pour une ville de 250000 habitants.
PS  : Vérification Hull a plus que 5 lignes sur Wikipedia

Cette envie de recopier le livre !

Toutes ses économies dilapidées dans un voyage à pile ou face, des mafias engraissées, le cache cache avec la police de deux continents, la peur et le froid. Tout cela pour devenir esclave à Hull, qui concourt au titre de la ville la plus pourrie d’Europe. Khalid n’exprimait aucun regret : « Il vaut mieux être ouvrier à Hul que mort à Kaboul. » Une évidence contre laquelle aucune loi ne peut lutter.
… Dix kilomètres jusqu’à la maison. Des cités décaties où descendaient les rouquins à capuche, un immense supermarché Tesco, qui était une des raisons pour lesquelles Azad, Mohamed et Khalid, victimes de la géographie politique avez tenté la vie en Europe. Je travaille à l’usine pour pouvoir voyager. Ils avaient beaucoup, beaucoup voyagé pour venir travailler à l’usine.

Bombay

J’ai entendu quelques histoires de jeunes Anglais venus faire de l’humanitaire en Inde en sortant de chez leurs parents, et repartant au bout de trois jours, traumatisés par la réalité de la misères. Impossible de faire abstraction, dans cette ville où il faut prendre garde à ne pas marcher sur les nouveaux nés qui dorment sur le goudron.

Portrait de surfeurs

Tous ces garçons vivent entre eux dans une colonie de vacances perpétuelle, voyageant d’un spot à l’autre autour du monde, mangeant des corn flakes et des sandwichs à la mayonnaise dans des maisons de location, torse nu, pendant que le coach les dorlote. Le soir, ils boivent des bières autour d’un barbecue. Chaque année, à date fixe, il retrouve Hawaï, la Gold Coast australienne, le Brésil, l’Afrique du Sud ou Lacanau, sans avoir le temps de connaître les endroits qu’ils traversent. Ils ne se préoccupent pas de descendre sous la surface, leur fonction est de rester à flot. Ils gagnent très bien leur vie, ce sont des stars. Leurs performances sportives leur permettent de postuler au Statut de surhomme. Musclés et bronzés, ça va sans dire. Pas très grands, pour des histoires de centre de gravité. Leurs copines sont des splendeurs, rayonnantes de santé et de jeunesse, tout cela est très logique. On pourrait moquer la spiritualité de pacotille qui entoure le monde du surf, bric-à-brac de panthéisme cool où l’homme fusionne avec la nature dans l’action, mais ce n’est pas nécessaire. Ces types consacrent leur vie à la beauté du geste, dans un dépassement de soi photogénique. Ils tracent des sillons parfaits, en équilibre constant entre la perfection et la mort. Ce n’est pas rien.

La Chine

À Chongqing, je je trouve ce que j’aime dans lex tiers-monde. Le chaos organisé, la vie dans la rue, les gens qui vendent n’importe quoi à même le sol, les cireurs de chaussures,( l’un deux a voulu s’occuper de mes tongs), les vieux porteurs voûtés qui charrient le double de leur poids, les bars qui appartiennent à la mafia et les chiens qui n’appartiennent à personne.

À Pékin, on a posé une Chine en plastique sur la Chine. Et ça fonctionne très bien. Ils ont réussi à cacher les pauvres et les crasseux. À Chongqing, il n’y a pas de jeux olympiques. Les pauvres et les crasseux côtoient les costards cravates. Des ouvriers cassent les vieux immeubles à la masse, torse et pieds nus, à 15 mètres du sol. Les normes de sécurité ne sont pas optimales. Mais un centre commercial doit ouvrir dans 20 minutes à cet emplacement , alors il faut faire le boulot.

Portrait féroce et réducteur de l’autre….

Elle est prof. De maths. Allemande. Un sacré boute-en-train. Elle passe son temps à détailler de A à Z, tous les points de désaccord avec la culture chinoise. Je ne comprendrai jamais les gens qui, sortant de chez eux, ne supportent pas qu’on ne se comporte pas comme chez eux. De son côté, elle ne comprend pas que les Françaises s’épilent les jambes régulièrement. C’est pour l’instant, le plus gros choc culturel de mon séjour.