Édition Gallimard (Du Monde Entier)

Traduit de l’allemand par Bernard Lortholary

 

Après « Le liseur » que j’ai beaucoup apprécié (mais pas chroniqué), j’ai bien aimé ce roman. Cet auteur allemand, Bernhard Schlink, sait raconter la vie de gens simples. On sent aussi chez lui, un grand intérêt pour les femmes et une confiance dans leur bon sens venant sans doute de l’amour maternel. Olga a eu le malheur de ne pas connaître cet amour, trop tôt orpheline, elle sera élevée par une grand mère qui ne l’aimait pas. Intelligente, elle deviendra institutrice. Très vite, elle rencontrera Herbert fils du notable de son village. Voilà le premier (et le seul en tant que femme) amour de sa vie, elle aimera Herbert de toute la force dont elle est capable, sans vouloir pour autant l’empêcher de vivre sa vie d’aventurier pour le garder près d’elle. Elle souffrira de tous ses départs, et ne partagera pas ses certitudes. Ses combats contre les Heréos lui semblent peu glorieux mais son amour est plus fort que tout. Quand Herbert, en 1913, part en Artique, elle a peur et commence à l’attendre. Elle lui écrit et par un tour de passe passe romanesque l’auteur retrouve ses lettres. On a ainsi plusieurs voix et plusieurs moments de la vie d’Olga qui se rejoignent dans ce roman que l’on peut qualifier de roman choral. Pour Olga tout le mal de l’Allemagne vient de Bismarck qui a appris à son peuple à se voir et se croire trop grand.

Ce personnage historique aura une très grande importance dans la vie et la mort d’Olga.
Cela a fait remonter en moi, un souvenir personnel : en 1960, mes parents m’avaient envoyée en Allemagne, j’étais très jeune et la famille chez qui j’étais m’avait fait rencontrer une femme très âgée qui parlait bien le français et comme Olga, elle m’avait dit que toutes ces guerres c’était la faute faute de Bismarck, plus tard quand j’ai étudié l’histoire je me suis rendu compte qu’elle ne disait pas n’importe quoi. Cette femme aurait peut-être pu prononcer les mêmes paroles qu’Olga :

Elle estimait que c’était avec Bismarck que le funeste malheur avait commencé. Depuis qu’il avait assis l’Allemagne sur un cheval trop grand pour qu’elle pût le chevauchée, les Allemands avaient tout voulu trop grand.

Ce roman est une façon de revisiter le passé de l’Allemagne et de comprendre ses habitants pendant ce si douloureux vingtième siècle sans, pour une fois, le faire de façon trop tragique. Dans ce jour du 11 novembre cela fait du bien de se replonger dans toutes les méandres des erreurs de ce grand pays et de tout faire pour être définitivement à l’abri des guerres fratricides en Europe et coloniales hors de nos frontières. Et une bonne façon de participer au challenge d’Eva.

 

Citations

L’amour de deux êtres séparés, hier et aujourd’hui.

Nous étions plus patients que vous autres. Beaucoup de couples, à l’époque, étaient séparés pendant des mois et des années, et se trouvaient réunis pour peu de temps seulement. Nous étions forcés d’apprendre à attendre. Aujourd’hui, vous téléphonez, vous prenez le train, la voiture, l’avion, et vous pensez que l’autre est à votre disposition. En amour, l’autre n’est jamais à disposition.

Le manque d’amour

J’ai senti l’aversion que grand-mère avait pour moi, comme je l’avais toujours sentie. Parfois elle me frappait, et souvent elle me criait dessus. Mais même quand elle n’en faisait rien, l’élevait même pas la voix, son aversion était dans l’air comme une odeur. 

Tel père tel fils (le père disparu en Artique en 1913 et le fils nazi en 1936)

Je me suis souvent demandé, ces dernières années, quelle position tu aurais prise, par rapport à tout ça. Je n’ai pas l’impression que les nazis rêvent de colonies ou de l’Arctique, et peut-être que ça te sauverait d’eux. Mais tout est trop grandiose, avec eux, et quand on est dans le grandiose, les rêves chimériques ne sont pas loin. Peut-être que tu voudrais leur apprendre à rêver de colonie et d’Arctique.
Je suis plein d’amertume, contre Erik et contre toi. C’est la chair de ta chair et le sang de ton sang. Il est aussi bête que toi et aussi lâche que toi. Il également capable d’être aussi gentil que toi. Mais la gentillesse ne saurait compenser la bêtise et la lâcheté.

23 Thoughts on “Olga – Bernhard SCHLINK

  1. Je partage ton enthousiasme et l’ai chroniqué très favorablement aussi.

  2. keisha on 11 novembre 2019 at 09:03 said:

    Après Le liseur, je ne suis plus revenue à cet auteur (trop par ailleurs?)

  3. Le liseur reste, alors que c’est une lecture très ancienne, un livre marquant pour moi. Il m’a ouvert les yeux sur un autre point de vue, moins simpliste que celui que j’avais alors, sur l’histoire de la Shoah. Je note ce titre, il me semble aussi passionnant.

  4. je l’ai lu cet été, je n’ai pas encore fait de billet mais il va comme le tien est très positif, j’ai beaucoup aimé, je l’ai fait lire et l’avis est le même

  5. Moi aussi j’ai bien aimé ce roman… C’est le troisième de l’auteur que je lisais. Ce ne sont jamais des coups de coeur, mais des bons moments de lecture.

  6. C’est drôle, je tourne autour de ce bouquin depuis des semaines, sans parvenir à me décider…

  7. Je n’ai pas relu l’auteur depuis « le liseur ». Le thème de celui-ci me tente beaucoup, je pense le trouver à la bibliothèque.

  8. Je ne lis jamais d’auteurs allemands c’est une littérature qui ne m’attire pas du tout. A tort, vu ce que tu dis de ce roman et de cet auteur.

    • Le mois de novembre va bien à cette littérature ….selon Eva. Moi aussi, je suis réticente à lire des auteurs Allemands mais comme tu peux le supposer, les généralités sont faites pour être contredites.

  9. Il est sur ma PAL, trouvé à la déchetterie de Dinard ! Il faut que je le ressorte

  10. Ah, je voulais lire Olga pour ce mois-ci mais finalement j’ai opté pour autre chose et je l’ai rendu à la bibliothèque. Je vais l’emprunter à nouveau car ton billet est très intéressant. Merci pour le partage ! Il y a encore un autre billet pour B. Schlink : https://lajumentverte.wordpress.com/2019/11/04/le-week-end-bernhard-schlink/

  11. J’avoue que je n’aime pas trop les excuses du type « c’est de la faute de l’autre ».

  12. Pingback: Les feuilles allemandes 2019 – le bilan – Et si on bouquinait un peu ?

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