Traduit de l’anglais par Karine Reignier.
Owen Matthews, journaliste correspondant de guerre part à la recherche du passé de ses parents. Sa mère, fille de dignitaire soviétique exécuté lors des purges de 1937 a été élevée en orphelinat. Son père épris de culture Russe, tombera amoureux de sa mère en 1963, lors d’un séjour dans un pays qui le fascine. Ils se marieront finalement en 1969 après un combat qu’ils ont cru l’un et l’autre souvent perdu tant les obstacles étaient importants. Plusieurs récits se mêlent donc :
- celui du fils, narrateur, qui vit dans la Russie contemporaine, il connaîtra l’horreur de la guerre en Tchétchénie et tous les excès de ce pays aujourd’hui
- Celui de sa mère qui a connu les tragédies de la guerre , les orphelinats russes, la famine…
- Celle de son père, cet intellectuel typiquement britannique qui a dû lutter contre le KGB pour épouser celle qu’il aimait au péril de sa carrière universitaire.
Sans être passionnée par ce livre, je l’ai trouvé intéressant et sûrement proche des personnages réels, parfois les situations sont tellement incroyables que j’aurais aimé un souffle plus romanesque. Je trouve que Makine, et bien sûr, Soljenitsyne savent mieux raconter la Russie soviétique. Au milieu des horreurs que les enfants ont connues, j’ai bien aimé que sa mère lui dise « Il faudra que tu parles des gens bien » comme ce directeur d’orphelinat qui a accepté qu’on ne sépare pas les deux sœurs. Et j’ai alors pensé au livre de Makine : La vie d’un homme inconnu.
Citations
La sentence a été exécutée dès le lendemain, soit le 14 octobre 1937. Le bourreau y a apposé un vague gribouillis. Les bureaucrates méticuleux qui se sont chargés de l’instruction ayant négligé d’indiquer l’endroit où Boris Bibikov fut enterré, ce tas de papier lui tient lieu de sépulture.
Pourtant, lorsqu’ils se sont enfin retrouvés, mes parents ont constaté que leur amour s’était presque tari. Mué en encre, il s’était figé sur les milliers de feuilles qui s’empilent maintenant au fond d’une malle, dans le grenier d’un petit pavillon londonien.
Ma mère a passé une grande partie de sa vie à attendre des jours meilleurs. Ses parents ont été arrêtés lorsqu’elle avait trois ans. Dès cet instant, le régime soviétique s’est chargé de son éducation, modelant ses pensées, sinon son âme. L’avenir radieux était à portée de main, expliquait-on à sa génération, mais, tel un dieu aztèque, il ne saurait être atteint sans sacrifices : il faudrait faire couler le sang et subordonner la volonté de chacun au bien de tous.