SONY DSCTraduit de L’anglais (États-Unis) par Sylvette GLEIZE.

Voici la pensée de Marc Aurèle avec laquelle s’ouvre le livre et qui lui donne son titre  :

Nous sommes tous créatures d’un jour.
Et celui qui se souvient, et l’objet du souvenir.
Tout est éphémère.
Et le fait de se souvenir, et ce dont on se souvient.
Aie toujours à l’esprit que bientôt tu ne seras plus rien, ni nulle part.

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J’ai découvert cet auteur il y a deux ans maintenant et il y a entre ses livres et moi une résonance particulière. Cela ne s’explique pas complètement, la seule phrase qui me vient à l’esprit est celle-ci : j’aime passer du temps avec cet auteur. Pour ses romans déjà chroniqués (« le problème de Spinoza » , « Et Nietzsche a pleuré » et le premier « Mensonges sur un divan« ), je peux sans aucun problème mettre cinq coquillages pour convaincre tous ceux qui lisent ce blog de les lire, autant pour ce livre, ces quatre coquillages, reflètent davantage mon plaisir de sentir une telle adéquation entre cet auteur et ma sensibilité actuelle.

Oui, c’est compliqué parfois de vieillir, et la mort qui rôde autour de nous tous est de plus en plus présente supprimant de notre quotidien des amis qui partageaient notre vie. La lecture de Montaigne à travers le livre de Sarah Bakewell, m’avait rappelé que la peur de la mort empêchait souvent les êtres humains de vivre. Irvin Yalom, nous raconte dans son dernier ouvrage, dix personnalités qui sont venus le consulter en tant que thérapeute et se dévoilent alors, bien des facettes du comportement humain. Irvin Yalom est un thérapeute particulier qui intervient dans le dialogue entre lui et son patient quand il pense que cela peut aider la personne à prendre conscience des problèmes qui l’empêchent de mieux vivre. Il me fait penser à Paul Weston dans In Treatment  : jamais de recettes miracles et jamais de « déclic » qui vont totalement changer le comportement d’autrui.

Les phrases qui aident sont imprévisibles, comme celle prononcée par une infirmière à une patiente qui vivait la destruction de son foie « faire bonne figure pour ses enfants et petits enfants », elle réussira alors à surmonter son angoisse de mort. Irvin Yalom aura un jour cette infirmière comme patiente, et découvrira, à sa grande surprise et à la nôtre, les véritables raisons qui ont poussé cette femme à prononcer ces mots qui ont tant aidé sa patiente. Rien de spectaculaire dans ses dix patients , juste de l’humain et Irvin Yalom qui nous aide à faire un peu de tri dans nos soucis du quotidien, cet homme au sourire malicieux a quatre vingt un an, il semble si heureux qu’avec lui, on veut bien continuer notre chemin pour VIVRE le moins mal possible.

Citations

Vieillir

J’ai quatre vingt un ans, c’est vieux. Terriblement vieux. Cela m’horrifie quand j’y pense. Je ne me sens pas vieux et je me demande sans cesse comment c’est arrivé. J’ai toujours été le plus jeune partout – en classe, dans l’équipe de baseball du camp de vacances, au tennis – et voilà tout à coup que je suis le plus âgé, où que j’aille – au restaurant, dans les conférences professionnelles – je n’arrive pas à m’habituer.

Une maladie mortelle

Et à la lumière (ou à l’ombre) de cette idée, apprendre à vivre . À vivre maintenant. Voilà ce que m’a enseigné le cancer – qui vous montre la maladie incurable, avant de vous recracher, de vous renvoyer au monde, à votre vie, avec tous ses plaisirs et toutes ses douceurs que vous ressentez alors encore plus fort. Et vous savez que quelque chose a été donné et quelque chose a été repris.

Émettre des diagnostiques pour remplir des cases

Dans ma pratique de la psychothérapie depuis quarante ans auprès de patients moins gravement atteints, j’estime le diagnostique le plus souvent inapproprié, et j’en suis venu à la conclusion que les contorsions auxquelles nous, psychothérapeutes, devons nous livrer pour répondre aux exigences des compagnies d’assurances qui veulent des diagnostics précis, se font au détriment à la fois du thérapeute et du patient. Le processus de diagnostic n’est pas applicable à la personne dans sa complexité. Les catégories diagnostiques ont éte forgées de toutes pièces et sont arbitraires. Elles sont le produit d’un vote collectif et subissent invariablement, et dans des proportions considérables, des révisions tous les dix ans.

Une maison de retraite

Fairlawn Oaks est un endroit formidable . Une sacrée organisation. Si je devais le gérer, je ne changerai pas grand chose, je crois. Le problème vient de moi, je le reconnais. Fairlawn Oaks a tout pour plaire. Les repas sont de qualité, on peut y faire des tonnes d’activités fabuleuses. Le parcours de golf est un peu sage, mais pour mon âge il est parfait. Le problème chez moi , c’est ce sentiment d’ambivalence qui me paralyse à longueur de journée. Chaque fois que je commence une activité, mes pensées s’orientent vers une autre . Je ne fais aucun plan maintenant – du moins pas comme les autres le font – ça ne me correspond pas . Pourquoi faudrait il que j’aille à l’aquagym tous les après midi à quatre heures ? Ou au briefing sur l’actualité à dix heures tous les matins ? Pourquoi faudrait-il que je mette chaque fois la clef dans la poche qui est accrochée à ma porte ? Pourquoi faudrait il que je prenne mes repas à la même heure tous les jours ? Ce n’est pas moi le vrai moi, le vrai Rick Evans , aime ce qui est spontané.

La mort et la vie

Lorsque la passion décline avec le temps, alors on découvre le merveilleux ciel étoilé que le soleil a obscurci, ou caché. La disparition des passions parfois tyranniques de la jeunesse m’a personnellement permis d’apprécier davantage encore le ciel étoilé et le prodige que constitue le fait d’être en vie. J’ai plus de quatre vingts ans , et je vais vous dire une chose incroyable : je ne me suis jamais senti aussi bien ni plus en paix avec moi même. Oui , je sais que ma vie approche de sa fin, mais la fin est là depuis le début. Et la différence aujourd’hui est que je goûte les plaisirs que me procure ce savoir.

20 Thoughts on “Créatures d’un jour – Irvin YALOM

  1. Curieux comme j’avais adoré Et Nietzsche a pleuré et très peu aimé Mensonges sur le divan. Mais celui-ci m’intéresse.

  2. C’est un livre qui m’a touchée. Il a pour sujet la souffrance humaine et la vieillesse. Malgré cela il n’est pas triste , cet auteur-thérapeute aime la vie.

  3. Il m’intéresse, cela n’a pas l’air d’être un roman.
    Tu connais Marie de Hennezel? J’ai La mort intime dans ma PAL…

    • Réponses,1 ce n’est pas un roman, c’est un témoignage de dix personnes qui ont eu besoin de lui pour mieux vivre . Mais au delà de ces cas , c’est de lui cet homme de 81 ans et de son plaisir de vivre dont il est question à travers ces récits
      2 Et non je ne connais pas cette Marie de Hennezel , mais ne crois surtout pas que la mort m’intéresse , je ne veux pas vivre dans la peur , c’est différent!

  4. J’ai lu plusieurs de ses livres et j’ai « Et Nietzsche a pleuré » dans ma PAL. J’aime beaucoup sa plume et ce qu’il dit de la condition humaine.

  5. GERARD on 14 septembre 2015 at 17:19 said:

    Avez-vous lu de lui  » Le Jardin d’ Epicure  » ? c’ est une splendeur … extrêmement touchant et profond , où l’ on voit quela méthode de Yalom s’ inspire particulierement du philosophe  » infrequentable  » …
    Je vois que vous avez aimé , vous aussi ,  » In Treatment  » … Celà fait bien des points communs . Dans le même sens ( mais un tout autre genre ! ) je vous conseille la serie TV  » Hannibal  » , qui loin d’ être une  » N  » ième serie horrifique est une excellente variation sur la schyzophrenie , l’ hedonisme , la psychanalyse , à travers la vision d’ un psychopathe . Mais qui ne connait pas Hannibal Lecter ? …
    A mon avis , nettement superieur aux films ! interpretation magistrale ( à voir en VO à tout prix ) , dialogues du niveau d’  » in treatment  » , des scènes mémorables … A vous de voir .

    • merci du conseil, j’avale le séries depuis que je suis sur Netflix et donc…. il me reste des livres d’Irvin Yalom » à lire , je le ferai certainement , j’aime beaucoup cet auteur .

  6. Je découvre, je ne connais pas, mais cela m’attire bien, je note, je note. Et cerise sur le gâteau, je suis sûre que ça plairait beaucoup à un ami ! Je surnote ! Et à la suite du commentaire précédent : la série Hannibal m’a déjà été chaudement recommandée par mon fils… et je crois bien qu’elle est sur netflix…

    • et oui… je viens de la trouver !
      Irvin Yalom est un auteur indispensable , je crois que mon préféré est « Et Nietzsche a pleuré » (ouf que j’ai un correcteur d’orthographe qui connaît le nom Nietzsche ..)

  7. Un ami avec lequel je ne parle que très rarement lecture (nous faisons du sport ensemble) m’a déjà parlé plusieurs fois de Yalom. C’est d’ailleurs quasi le seul auteur dont il m’a parlé. Il a lu tous ses livres. Et le jour de la rentrée, il m’a d’emblée abordée en me parlant du dernier Yalom : très très déçu. Il a lu une vingtaine de pages avant d’arrêter. Un livre entier sur la mort, ça n’était a priori pas ce qu’il attendait.
    Pour ma part, je n’ai lu qu’un roman de cet auteur, Et Nietzsche a pleuré, que j’ai bien apprécié.

    • C’est bien pour cela que je n’ai mis que 4 coquillages et pas 5. Je comprends qu’on ait des réserves, il correspondait exactement à mon humeur du moment. Je préfère ses romans mais je suis heureuse d’avoir découvert cet aspect de sa personnalité.

  8. C’est toujours formidable ces auteurs avec lesquels on aime passer du temps comme tu le dis si joliment.

  9. Voilà une valeur sûre, je n’ai pas encore lu celui là mais ça ne saurait tarder

  10. Le problème Spinoza est un roman qui m’avait fasciné. Je note celui-là pour Marc-Aurèle, pour la première citation que tu as mise, pour Yalom aussi !!!! J’ai d’ailleurs Nitzsche a pleuré dans ma PAL, il faudrait que je le ressorte….

    • Mon préféré c’est « Nietzsche a pleuré » il m’a permis de comprendre ce philosophe. C’est un auteur qui rend ses lectrices et lecteurs intelligents , au moins le temps de la lecture. Ce n’est pas si mal…..

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