Édition Harper Collins

C’était déjà une édition Masse critique qui m’avait découvrir Sophie Pointurier, à propos d’un roman sur le monde de l’art contemporain et le destin d’une femme peintre originaire de RDA. J’avais beaucoup aimé le roman « la femme périphérique » et beaucoup moins celui-ci. La construction, cependant, est intéressante car on sait dès le départ que le personnage principal, Claude, a fait quelque chose de suffisamment grave pour se retrouver en garde à vue et être soupçonnée de meurtre. Cela n’empêche pas le récit de monter régulièrement en tension. Évidemment, l’interrogatoire est coupé par des retours en arrière qui explique pourquoi cette femme en est arrivée là. Puisque le policier lui demande de revenir au début, elle se remémore le début de son projet : construire avec Élie un lieu pour des femmes inspirée qu’elle était par le béguinage. Élie et elle avaient été choquées à Paris par la mort d’une vieille femme désespérée. L’annonce d’un petit village à vendre dans le Tarn va lancer leur projet. Avec Harriet une américaine et Anna elles vont acheter puis retaper ce village. Le danger vient du voisin, Michel, producteur de lait, qui veut récupérer une partie des terres.

Pourquoi ces femmes portent-elles un fusil ? Pour aider d’autres femmes à ne pas se faire tuer par leur conjoint. Parce que finalement c’est là le coeur du livre, l’autrice a dû être frappée, comme beaucoup d’entre nous, par le nombre de femmes qui meurent sous les coups de leur conjoint. Elles veulent aider ces femmes avant qu’il ne soit trop tard mais ça ne se passe pas comme prévu.

D’où viennent mes réserves ? Je trouve que cette cause est si importante que je supporte difficilement de la voir traiter de cette façon. Non, il n’existe pas des femmes qui ont pris des fusils pour arracher des victimes aux mains de leurs maris-bourreaux. Cette fiction me gêne et dessert la cause qu’elle veut défendre. L’engagement politique est une vraie caricature : aller taguer les murs du journal « valeurs Actuelles » ne me semble pas de première nécessité. La violence faite aux femmes n’a pas hélas de couleur politique ! Je ne pense pas que Marie Trintignant ait été tuée par un homme lisant « Valeur Actuelle » ! Ni qu’Adrien Quatennens soit un homme politique de droite !

Bref une déception sur un sujet tellement important !

 

Citations

Le béguinage .

 Pendant des siècles, les béguines ont su se frayer un chemin entre vie laïque, travail rétribué et vie mystique, où leur engagement était révocable. Ce statut, créé sur mesure par elle-même et pour elles-mêmes, leur avait permis de contourner l’obéissance pendant des siècles. Ni mariées, ni religieuses, ni soumises. Juste : tranquilles.

Cela ne m’étonne pas.

 Je savais que les vieux souffraient de dépression, j’en donnais les statistiques dans mes cours, mais c’était un des sujets que je m’étais toujours refusé d’investir émotionnellement. Pourtant, j’avais décliné mille fois les chiffres de l’ARS : les personnes âgées de plus de 65 ans représentent la tranche de la population est plus à risque de décès par suicide, chez les femmes le taux est deux fois supérieure à la moyenne nationale 

La presque fin du roman.

 Qu’est-ce qui a fait que je me suis retrouvé par trois fois à appuyer sur la détente ? Je voulais une maison loin de tout, pour moi, pour mon fils, et je me suis retrouvé au milieux de la violence millénaire. J’ai accepté d’être le soldat que Harriet avait vu en moi et je savais que j’avais raison de le faire. C’est pour ça que je me suis exécuté froidement. Je m’en suis chargé à ma manière.

 

 

 

14 Thoughts on “Femme portant un fusil – Sophie POINTURIER

  1. keisha on 21 août 2023 at 18:17 said:

    Je te sens plus qu’agacée, dis donc!

  2. En effet, le sujet semble avoir été traité de manière singulière.

  3. Il ne faut pas se rater sur un sujet pareil en effet. Ou alors il fallait aller plus loin ; j’ai lu un roman où les femmes battues se vengaient et c’était assez jubilatoire mais c’était une fiction déjantée et assumée comme telle.

    • C’est exactement ce que je pense, ce sujet est si important que je n’ai pas compris pourquoi l’écrivaine a choisi cette fiction qui ne permet en rien de faire avancer la cause qu’elle veut défendre.

  4. Je te comprends, ce doit être décevant de voir ce sujet traité un peu à la légère… on va dire que tu t’attendais à autre chose ! ;-)

    • Je ne dirai pas à la légère je dirai de façon caricaturale. Pour l’autrice,les femmes sont battues ont même tuées par une idéologie de droite, or je pense hélas que ce n’est pas vrai , la souffrance dans le couple est beaucoup plus subtile que cela.

  5. Ta déception me convainc.. de passer ! Je sens que ce titre m’énerverait sans doute autant que toi.

    • Ce que je trouve totalement stupide et qui nuit à ce que veut démontrer cette autrice militante c’est que les violences conjugales sont politiquement de droite. La domination des hommes dans le couple n’a rien à voir avec une idéologie politique c’est beaucoup plus subtile et plus insidieux.

  6. Aie, dommage de rater un roman sur un sujet si sensible.

    • Je ne dis pas qu’il est raté, je dis qu’il est de parti pris idéologique, c’est trop facile de dire que les violences faites aux femmes viennent de l’idéologie de droite.

  7. Caroline CHIAPPINI on 26 août 2023 at 12:11 said:

    J’apprécie le recul politique dont vous faites preuve. Depuis plusieurs années, le camp du bien est à gauche, le camp mauvais est à droite. Quelle caricature et quelle ignorance ! Je pense que cet auteur s’appuie sur les thèses de Eva Illouz selon laquelle le capitalisme s’insinue dans les rapports amoureux et instrumentalise les relations. Vos exemples du meurtre de Marie Trintignant et de l’affaire Quatennens sont bien vus.

    • Je ne sais pas si cette autrice s’appuie sur les thèses de quelqu’un d’autre, ce que je sais pour avoir vécu assez longtemps c’est que les violences conjugales ne sont ni à droite ni à gauche . Il arrive, hélas, qu’elles soient tolérées sinon encouragées par des croyances religieuses arriérées que nous devrions tous condamner d’une même voix. Mais c’est un autre sujet et pas du tout celui de ce roman.

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