Édition Hervé Chopin (H.C) . Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard.

 

Je dis souvent (par exemple dans mes commentaires sur vos blogs) que je lis peu de romans policiers, et bien en voilà un que je vous recommande. L’enquête policière est moins passionnante que la toile de fond de ce roman, qui analyse en détails ce qu’on connaît bien maintenant « le choc post-traumatique ». Est-ce que le nom de Vukovar vous dit quelque chose ?

Ce roman décrit avec un réalisme à peine soutenable le terrible siège de cette ville par les Serbes, il est décrit par le petit Duso un enfant de huit ans qui a vu l’innommable. On comprend que Duso est, vingt plus tard, Nikola Stankovik accusé du meurtre de la jeune et jolie Ivanka, croate elle aussi réfugiée en Belgique à Bruxelles. Le lecteur en sait donc plus que les enquêteurs, l’avocat, et la psychiatre chargée de faire un diagnostique sur l’état mental de Nikola. Celui-ci est un dessinateur de talent et graffeur de génie. À travers ses dessins, il en dit plus que par les mots qui sont définitivement bloqués dans son inconscient. Le long processus pour remonter au traumatisme d’une violence absolue est bien décrit et sans doute très proche des efforts que doivent faire les thérapeutes pour libérer la parole de leurs patients. Ensuite ceux-ci doivent se reconstruire mais est-ce toujours possible ? Au moment où je rédige ce billet, l’actualité raconte le procès des assassins du Bataclan, et certains rescapés racontent des traumatismes qui les ont marqués à tout jamais, mais on mesure aussi l’importance de dire en public ce qu’ils ont vécu, ce que ne peuvent pas faire des enfants trop jeunes qui enfouissent leurs souvenirs traumatisants au plus profond de leur mémoire.

Je n’ai mis que quatre coquillages à ce roman car j’ai trouvé que le genre « policier » exigeait des simplifications dans les personnages qui m’ont un peu gênée. La psychiatre qui lutte contre un collègue arriviste qui ne soigne qu’à coups de calmants, est un grand classique du genre et c’est trop manichéen pour moi. Mais ce n’est qu’un détail et je retiendrai surtout la description du siège de Vukovar que j’avais déjà bien oublié, et les dégâts dans une personnalité d’un enfant qui a vu sans pouvoir en reparler des horreurs de la guerre civile : oui, quand la violence des hommes se déchaîne, les enfants sont des proies trop faciles, trop fragiles et même s’ils survivent on ne sait pas grand chose des répercussions sur leur personnalité.

Citation

L’image des Français en Belgique

 L’homme était d’origine française.
 Les français savent tout sur tout et tiennent à ce que ça se sache. Il avait d’emblée revendiquer sa nationalité, en précisant la région et la ville de naissance, comme ils le font généralement entre eux pour évaluer les forces en présence.
 Les chiens se reniflent le derrière, au moins, c’est silencieux.

14 Thoughts on “Toute la Violence des Hommes – Paul COLIZE

  1. keisha on 12 novembre 2021 at 07:48 said:

    Oui, Vukovar me disait quelque chose…

  2. Histoire et polar font souvent bon ménage, quand on a affaire à un écrivain qui maîtrise son art.. j’avais beaucoup aimé « Back-up » de cet auteur, original et complexe sans être compliqué (et là aussi, l’Histoire s’invite dans l’intrigue policière).

  3. Hélas, il me semble que l’inconscient collectif a mis aux oublis cette horrible guerre, préoccupé qu’il est par le présent avec la Syrie etc…
    Sujet bien intéressant que le Stress Post Traumatique dont je fus victime après mon AVC. En suis-je seulement sortie, je n’en sais rien pour être honnête. Je note ce titre en tout cas.

  4. je vais te suivre sur ce coup là parce que Vukovar est un nom qu’on ne peut oublier, je me souviens des reportages de l’époque !!!
    polar ou pas c’est bon d’écrire sur ces faits, ces moments qui furent la dernière guerre en Europe ! Merci à toi de me convaincre ainsi

    • Et merci à toi de me lire et de me faire confiance . C’est vrai que les atrocités serbes semblent derrière nous et presqu’oubliées . Mais elles ne le seront jamais pour ceux qui les ont vécues.

  5. Un très bon polar à fond social et historique… Je n’ai (presque) jamais été déçue par Paul Colize !

  6. Je l’ai lu et j’ai beaucoup aimé, même si mon préféré de l’auteur reste « back-up ».

  7. Je lis aussi très peu de roman policier, mais pourquoi pas ?

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