Édition Stock août 2023. Traduit de l’anglais par Carine Chichereau

Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard

 

Ce livre qui raconte l’exode des Vietnamiens après la fin de la guerre et l’installation du régime communiste, m’a beaucoup marquée .Ma génération n’a sans doute pas oublié les « boat-people » et les différents drames qu’ils ont connus. Les camps, les attaques des pirates Thaïlandais, le peu d’empressement des pays occidentaux à les accueillir. Mais la mémoire est ainsi faite, un drame en chasse l’autre et même si on se souvient, on est moins dans l’émotion.

Le livre de Cécile Pin qui se fonde sur l’histoire de sa propre famille, incarne cette immense tragédie et nous ramène dans ces temps horribles où si peu de gens leur venaient en aide. En France, la victoire des communistes semblait une cause juste et il a fallu du temps pour ouvrir les yeux sur la répression qui s’abattait sur une population déjà meurtrie par la guerre.

C’est un récit à plusieurs voix : une voix narrative qui suit le parcours de Anh et de ses deux plus jeunes frères Minh et Thanh . Les parents les ont envoyés vers Hong Kong quelques jours avant leur propre départ. La voix de l’écrivaine Cécile Pin quand elle décrit différents faits historiques qui ont marqué son pays d’origine, et enfin la voix du petit Bao qui tel un fantôme hante cette histoire.

Anh a seize ans quand elle quitte son village et sa famille, hélas ! le bateau qui devait conduire ses parents à Hong-Kong a coulé. Ses parents, le bébé et le jeune Dao sont morts noyés. On retrouvera leur corps sur une plage, alors, à 16 ans, elle devient chef de famille et nous fait découvrir au plus près de la réalité le destin des Vietnamiens, on les suit dans différents camps de réfugiés à Hong Kong puis au camp qui les attendait à Londres et enfin dans le petit logement social qui leur a été attribué à Londres. Son malheur , c’est qu’elle ne sait jamais si elle en fait assez pour ses deux frères : Minh ne réussira pas l’école et Thanh ne sera pas pris à l’université. Elle même reprendra ses études et se mariera avec Tom un homme originaire de Chine. Elle va fonder une famille solide, unie, bien insérée socialement, mais pour autant le poids des morts pèsera beaucoup sur ses épaules.

Dans sa recherche historique, l’auteur rappelle des faits horribles qui se sont peut-être éloignés dans notre mémoire. Mais pourtant, c’est si important de se souvenir ! Dans ces textes nous trouverons l’origine du titre, lors de la guerre du Vietnam les américains n’ont pas manqué d’imagination morbide. Ils ont par exemple fait peur aux habitants en amplifiant des sons des mourants et en les envoyant dans la jungle. Mais aussi ce qui s’est passé avec les pêcheur Thaïs qui ont assassiné et violé des gens sans aucune défense .
Enfin la voix de Dao ce petit frère qui erre effectivement comme une âme qui ne trouve pas le repos.

Ainsi ce livre est un tout qui mélange le narratif et le récit historique et fait comprendre au plus près de la réalité ce que les Vietnamiens ont subi, le dernier épisode des 25 personnes mortes étouffées dans un camion sur une route anglaise montre que leur calvaire n’est pas terminé et rejoint celui des migrants contemporains.

 

Extraits

Début.

Novembre 1978- Vung Tham, Vietnam

Il y a les adieux, et puis on repêché les corps- entre les deux, tout est spéculation.
Dans les années à venir. Thi Anh laisserait les souvenir atroce du bateau et du camp s’en aller, goutte à goutte, jusqu’à n’être plus que murmures.

 

Le titre.

 Il leur a présenté un système de sonorisation en désignant la jungle toute proche. « Il faut aller là-bas poser l’engin pas trop loin du camp et appuyer sur lecture . » Il a sorti une cassette de sa poche avec une étiquette sur la tranche : « Cassette fantôme n° 10 » . Smith l’a insérée dans l’appareil et a jeté un coup d’œil aux deux soldats riant de leur perplexité.
« Opération Âme Errante » a-t-il dit pour foutre une trouille de tous les diables à ces niakoués. »

Les pêcheurs thaïs …

Il semblerait qu’environ cinq-cents pêcheurs Thaïs aient violé à tour de rôle trente-sept femmes sur Ko Kra pendant vingt-deux jours consécutifs ce mois-ci. Ces femmes étaient à bord de quatre bateaux différents et elles ont été amenées sur Ko Kra par les pêcheurs qui ont pris d’assaut leurs embarcations pour les empêcher de fuir.

Ce qui a aidé son frère en Angleterre.

Son voisin ne connaissait que le début, et bientôt il passa à « Yesterday » et « Hey Jude » puis une fois son répertoire des Beatles épuisé, il retourna dans le bungalow en disant à Thanh de l’attendre. Quelques minutes plus tard, il revint avec un morceau de papier où il avait noté des mots en anglais dont Thanh ignorait le sens : Pink Floyd, Led Zeppelin, Fleetwood Mac.
« Quand tu seras en Angleterre, il faut que tu trouves les disques de ces groupes-là. »

Le poids qui pèse sur les épaules de l’écrivain.

Je m’aperçois qu’il y aurait encore beaucoup à dire.
Je pourrais raconter aux gens les viols, les meurtres, les rumeurs de cannibalisme.
J’ai lu des témoignages, des livres, des journaux, des encyclopédies, et toute ces connaissances sont devenues un fardeau que je porte. Mais dans quelle mesure dois-je en parler ?

Les inquiétudes d’une mère .

 Elle s’était inquiétée à propos des drogues et de l’alcool, du racisme et de la violence, mais elle n’avait jamais craint que Platon et Aristote, Kant et Marx puissent lui ravir sa fille. Anh imaginait Jane traînant avec ses amis défoncés, débattant du sens de l’existence, de la vie après la mort, et elle songeait :  » Quelle perte de temps incroyable ». À ses yeux, la vie c’était la vie ; ce qu’il y avait après, c’était ce que vous vouliez. Mais elle taisait ses craintes. Elle n’avait pas envie de tomber dans le cliché – la mère immigrée, la mère-tigre. Ainsi encouragée par son mari, Android avait donné à Jane sa bénédiction pour aller faire ses études à Leeds, se préparant mentalement à ce qu’elle soit au chômage pour le restant de ses jours. 



Édition Pocket . Traduit de l’anglais par Nathalie Cunnington

 

En regardant ce que cet auteur avait écrit, je me suis rendu compte qu’on lui devait «  L’homme qui murmurait à l’oreille des chevaux » que je n’ai pas lu, mais j’ai aimé le film qui en a été tiré. Ce roman parle de la passion de l’auteur pour le Far-West américain vu à travers le cinéma et les feuilletons tournés pour la télévision. L’enfance du jeune héros, Tommy, a été bercée par les héros au grand cœur qui sauvent les pures jeunes filles blanches des griffes des méchants indiens.
Mais avant de raconter (le moins possible) le fil narratif de ce récit, j’explique sa construction. L’auteur, dans des chapitres assez courts donnent des aperçus de la vie de Tommy, en ne respectant pas la chronologie . Il faudra lire tout le roman pour remettre dans l’ordre la vie du personnage principal qui donne l’impression d’un puzzle. Lorsque la dernière pièce sera mise en place alors tout sera tellement clair pour le lecteur qui pourtant n’a jamais été perdu (en tout cas, je ne l’ai jamais été)
Le premier chapitre est une des clés du roman. Tommy a 13 ans, il rend visite à sa mère qui est condamnée à mort. Le deuxième chapitre, il est enfant à Bristol et suit avec passion son feuilleton télévisé dans le quel Red McGraw « se dresse seul contre l’injustice ». La construction parcellaire du roman sert l’intrigue car la vie de Tommy est construite sur un énorme mensonge, celle qui prend pour sa sœur est en réalité sa mère, et ses parents sont en réalité ses grands parents. Sa mère l’arrache à une pension anglaise où il était très malheureux et l’emmène avec lui à Hollywood.
Il y rencontre l’acteur Ray qui sera l’amant puis le mari de sa mère mais aussi l’acteur qui jouait Red McGraw dans son feuilleton préféré.
Un autre mensonge aussi énorme que le premier viendra troubler le passage de Tommy dans la vie adulte. Et il ne saura pas être le père de son fils. Celui-ci sera accusé de meurtre de civils pendant la guerre en Irak et c’est alors que père et fils se retrouveront en se dévoilant réciproquement leurs propres mensonges.
Les réflexions sur le poids de la culpabilité sonnent très justes et la façon dont est traité le rapport à la vérité est passionnant. Je pense que le thème principal du roman c’est cela  : le poids que représente pour un enfant un mensonge sur lequel il a construit sa vie.
Mais les thèmes annexes sont tout aussi passionnants, par exemple le passage du travail d’acteur de la télévision au cinéma et du poids de son image qui passe de mode et comment cela peut devenir insupportable pour lui. On retrouve aussi les indiens qui sont si loin de l’image qu’en donnait la télévision, Tom le découvrira grâce à Cal, un indien blackfoot, qui sera son père adoptif. Autre blessure invisible celle avec les quelles reviennent les marines américains qui ont tué des civils en Irak ou qui ont vu tuer les meilleurs d’entre eux.
Un roman foisonnant qui sonne très juste qui se lit d’une traite même si certains passages méritent une lecture plus attentive car ils révèlent des comportements humains très intéressants.

 

Citations

Passage plein d’humour .

 « Vous ne seriez pas Thomas Bedford, par hasard ?
– Si, c’est moi. Je m’excuse mais… »
Elle tendit la main et il la serra, un peu trop fort. Comme le documentaire qu’il avait fait cinq ans auparavant sur l’histoire et la culture des indiens blackfoot avait été récemment diffusé sur PBS, il se dit qu’elle l’avait reconnu à cause de cela. Ou peut-être avait-elle assisté à l’une des conférences qu’il donnait de temps en temps à l’université. La jeune femme était une beauté discrète. Elle devait avoir une trentaine d’années au plus, elle avait la peau pâle, des taches de rousseur, une épaisse chevelure rousse enserrée dans un foulard vert en soie,. Tom rentra le ventre et sourit
« Je me présente : Karen O’Keefe. Nous avons le même dentiste. Je vous ai vu chez lui il y a deux ou trois semaines.
-Ah !

Le mensonge.

 Un mensonge raconté plusieurs fois à cette faculté étrange d’acquérir une sorte de consistance. À mesure qu’on se le répète, il devient aussi solide et rassurant que la vérité. Tom s’était parfois demandé, après le départ de Gina, si les choses se seraient passées différemment, s’il lui avait dit la vérité à propos de Diane. Cela l’aurait peut-être aidée à comprendre ses difficultés de père et de mari. Ou bien n’aurait fait que lui inspirer de la pitié. Et pour Tom la pitié, c’était pire que la honte.

Être américain sous Kennedy .

C’est ainsi qu’il se joignit à ses camarades comme s’il était un vrai petit américain. Ce qu’il avait toujours souhaité être. Parce que ça lui semblait plus moderne – plus cool comme dirait Wally- que d’être anglais. Il n’y avait qu’à voir le président qu’ils venaient d’élire ! Jeune, toujours souriant, avec ses enfants et sa jolie femme, tandis que le premiers ministre britannique ce vieux Macmillan, devait avoir au moins cent ans et ressemblait à un morse qui aurait perdu ses défenses.

Les fragilités du métier d’acteur.

– Dans mon type de boulot, si quelque chose se passe mal, on l’arrange, on se débrouille pour faire mieux la fois suivante. Mais vous autres, les acteurs, vous n’avez pas le droit à l’erreur. Vous êtes seuls. Si vous vous trompez, ça vous touche au cœur. Désolé, je n’arrive pas à exprimer ce que je veux dire.
– Je comprends.
– Je ne suis pas en train. De dire qu’il n’y a aucune technique, aucun talent là-dedans . Il y en a, bien sûr. Vous devez savoir vous placer, repérer la caméra, et tout et tout. Mais au bout du compte, l’essentiel, c’est vous, ce que vous êtes. Et si quelqu’un critique ça, vous dit que ça ne va pas, ce n’est pas votre travail qu’il critique, c’est vous. Ce qui est déjà difficile à accepter pour n’importe qui. Alors pour les acteurs, c’est pire encore parce que… Bon sang, qu’est ce qui me prend de vous parler comme ça. ?
– Je vous en prie continuez.
– Ce que je voulais dire, c’est qu’ils ont très peu confiance en eux. Ils veulent qu’on les approuve, qu’on les aime. Comme nous tous bien entendu, mais chez certains acteurs, c’est comme une sorte de faim. Et s’ils n’obtiennent pas ça, ils sont complètement défaits.
– Quand même, Cal, il y a des métiers bien plus dur que celui-là.
– Peut-être, mais pas beaucoup qui peuvent à ce point blesser un homme dans l’image qu’il a de lui même. 

Toujours le mensonge.

 Le mensonge lui parut usé. Il ne s’était pas entendu le raconter depuis longtemps. Il fut soudain pris de l’envie d’avouer comment Diane était réellement morte. Mais mais pouvait-il raconter à cette quasi inconnu ce qu’il n’avait jamais réussi à dire à quiconque ? Même pas à son psy, même pas à Gina. Ce serait une véritable trahison. Le problème avec le mensonge, c’était cela. Tels les pins tout tordus et noueux qui poussaient dans les montagnes, plus ils étaient vieux plus ils devenaient résistants.

Dernière phrase (on imagine avec un soleil couchant..) happy end .

 Elle le regarda longuement puis se pencha vers lui et l’embrassa tendrement sur la joue. Alors, Tom passa le bras autour de sa taille. Ils firent demi-tour et traversèrent la pelouse ensoleillée vers la maison.

 

Édition Seuil

 

Dicton syrien

 « En chaque personne que tu connais, il y a quelqu’un que tu ne connais pas. »

 

Je vais finir par croire que les apiculteurs sont des humains supérieurs après « les abeilles grises » et « les abeilles d’hiver » voici l’histoire de deux apiculteurs pris dans la tourmente de la guerre en Syrie. Le portrait de ces apiculteurs ont des points communs, ils résistent tous à l’ambiance totalitaire ou à la guerre. est-ce le fait qu’ils sont amenés à mieux comprendre le comportement des abeilles qui les conduit à relativiser les engagements politiques extrémistes ?

J’avais déjà bien aimé de la même auteure « Les oiseaux chanteurs » sur un drame se passant à Chypre le pays dont elle est originaire.

En tout cas le portrait de Nuri et de son cousin Mustapha, les deux apiculteurs d’Alep est de la même trempe que celui de Sergueï – héros involontaire ukrainien ou celui d’Egidius Arimond – cet homme qui cachaient des juifs dans ses ruches. Les deux cousins, non seulement récoltent le miel de leurs abeilles mais ils ont également crée une petite entreprise autour de l’exploitation des ruches : miel, cire et autres produits dérivés, leur affaire marche très bien. La guerre va hélas tout détruire et comme les deux cousins tardent à partir – pour ne pas abandonner leurs abeilles- leurs deux fils vont être tués. La douleur est trop intense, en particulier pour Afra, la femme de Nuri qui en état de sidération et ne veut plus quitter la Syrie alors que c’était encore assez facile de le faire. Elle finira par accepter et avec Nuri les voilà sur le chemin de cet exil si douloureux pour les syriens qui ne sont pas partis assez vite. Ils connaîtront la traversée vers la Grèce dans un canot pneumatique, les camps en Grèce. C’est d’ailleurs là que tous les deux rencontreront l’horreur absolue. On sent que l’écrivaine y a elle même séjournée longuement , car elle sait nous rendre palpable l’insoutenable. Puis finalement ils arrivent en Grande Bretagne où les attend le cousin Mustapha.
Ne vous inquiétez pas je ne divulgâche rien du récit , car Chrsty Leftery commence son récit en Grand Bretagne, dans la pension où Afra et Nuri attendent de recevoir un statut de réfugiés politiques. Cette écrivaine mêle avec talent les trois temps forts du récit : Alep et la guerre, les destructions par les bombardements russes, les meurtres gratuits de l’état islamique, et le parcours des exilés via la Grèce. Afra est devenue aveugle de trop de souffrance et Nuri a des crises de panique totale pendant lesquels il revit les horreurs de son passé récent.
Je ne dis rien d’un petit Mohammed de l’âge de leur fils (7 ans ) qui va les accompagner pendant leur fuite car je ne veux pas enlever l’effet de surprise que vous aimez tant.

Un livre d’une beauté totale grâce à une écriture très en finesse. On sent bien la retenue de Christy Lefteri face aux horreurs qu’elle a rencontrées en Grèce.

 

Citations

J’ai tout de suite aimé le style de cette écrivaine .

 Il y avait notamment un tableau du Qouiiq que j’aimerais revoir. Elle en avait fait un pauvre caniveau traversant le parc de la ville. Afra avait don. Elle révélait la vérité des paysages. Cette toile et sa rigole dérisoire représentent à mes yeux notre combat pour rester en vie. À une trentaine de kilomètres au sud d’Alep. Le Qoueiq renonce à lutter contre l’impitoyable steppe syrienne et s’évapore dans les marais.

Destruction d’Alep.

Je lui avais pourtant dit que le souk était vide, une partie des allées bombardée et incendiée. Ces ruelle qui grouillaient naguère de marchands et de touristes étaient devenues le territoire de l’armée, des chiens et des rats. Tous les étals étaient abandonnés, hormis un, où un vieil homme vendait du café aux soldats. La citadelle convertie en base militaire était entourée de chars.

Procédé de mise en forme , je n’ai pas trouvé le pourquoi de ce procédé sauf peut être que tout s’enchaîne ?

Chaque chapitre se termine avec un mot en moins
Qui est à la fois le nom du prochain chapitre
Exemple :
Mes yeux restent ouvert dans le noir, car j’ai peur de
Le Chapitre suivant s’appelle :
la nuit
et débute ainsi :
tombait ; nous étions à Bab al-Faradj, dans la vieille ville.

La mer, l’attente .

 Le bateau parti la veille avait chaviré et la plupart des gens à bord avaient disparu. Seules quatre personne avaient été repêchées et on avait retrouvé huit cadavres. Voilà le genre de conversations que j’entendais autour de moi.

Genre de pensées qui torturent les survivants.

 Souvent, je regrette d’être resté à Alep, de ne pas être parti avec ma femme et ma fille, car, alors, mon fils serait encore parmi nous. Cette pensée me donne envie de mourir. Nous ne pouvons pas revenir en arrière, changer les décisions que nous avons prises. Je n’ai pas tué mon fils. Je m’efforce de m ‘en souvenir pour ne pas errer à jamais dans les ténèbres.

Les camps de réfugiés.

 C’était sale et, même à l’air libre, l’odeur était pestilentielle : un mélange de pourriture et d’urine. Mais notre guide poursuivit son chemin sans s’arrêter. Plus on s’enfonçait dans le parc, plus les sentiers étaient défoncés et envahis de mauvaises herbes cassantes. Quelques personnes promenaient leur chien, des retraités bavardaient sur des bancs. Plus loin des drogués préparaient leur dose. Enfin, nous débouchâmes sur un autre campement. Neil nous trouva un espace sur des couvertures entre deux palmiers. En face se dressait la statue d’un ancien guerrier. Un homme émacié était assis sur le piédestal. Ses yeux me rappelèrent ceux des jeunes dans la cour de l’école la veille.
 Cet endroit avait quelque chose de malsain, mais je ne m’en aperçu que bien plus tard, après le départ de Neil lorsque la nuit se referma sur nous . Les hommes se regroupaient en meutes, comme des loups. Les Bulgares, les Grecs, les Albanais. Ils regardaient et attendaient quelque chose : ça se voyait dans leurs yeux. Des yeux de prédateurs intelligents.
 Il faisait froid. Afra frissonnant. Elle n’avait quasiment rien dit depuis notre arrivée. Elle avait peur. Je l’enveloppais de couvertures. Nous n’avions pas de tente, seulement un grand parapluie qui nous protégeait du vent du nord. Quelqu’un avait allumé un feu à côté. Il nous réchauffait un peu mais pas assez pour nous procurer du confort

 

Édition J’ai lu

Est-ce que je peux vraiment remercier Krol de m’avoir conseillé ce roman ? j’en ressors tellement pessimiste sur la nature humaine et si effrayée par les conduites des hommes pendant la guerre que celle qui frappe à notre porte me fait encore plus peur ! À mon tour, je vais vous dire qu’il faut lire ce roman même si comme moi vous serez horrifié par ce que vous allez découvrir sur cette guerre au Cambodge qui semble si lointaine dans le temps.

Saravouth est un jeune Cambodgien élevé par un père intègre fonctionnaire de l’état cambodgien et d’une mère dont le père était français, il a une petite soeur, Dara. Sa vie est harmonieuse, c’est un enfant à l’imagination débordante nourrie de la lecture de « Peter Pan » et « L’Odyssée ». Il se construit un monde intérieur imaginaire qui le protège de toutes les horreurs du monde de l’extérieur.

Hélas ! la guerre commence et la corruption du régime de Lon Nol sera bien incapable d’arrêter les Khmers Rouges qui gagnent du terrain par des méthodes d’une barbarie incroyables. Je ne résiste pas à citer le journal du « Monde » la veille de la prise de la capitale par les Khmers rouges. (Je cite l’auteur, je ne peux en vérifier la vérité de chaque mot, mais en revanche je peux témoigner de l’ambiance générale de la gauche bien-pensante française)

Les journaux anglais sont formels : le Cambodge n’en a plus pour longtemps. Phon Penh va tomber. Le peuple sera libéré écrit Philippe Saintes dans les pages du « Monde ».

« Libération » qui a couté deux millions de morts

La famille de Saravouth n’est pas victime des Khmers mais de la lutte du clan Lon Nol contre les habitants qui étaient suspectés d’être d’origine Vietnamienne ou comme son père d’être incorruptible. Ils sont emmenés en forêt et là commence la deuxième partie de la vie de Saravouth. Il est recueilli par une vieille femme qui le soigne grâce à des plantes, il est persuadé que ses parents et que sa soeur sont vivants et il veut absolument les retrouver. Dès qu’il le peut il repart à Phnom Penh pour retrouver sa famille. Mais ce parcours à travers le Cambodge dévasté, c’est une horreur absolue, il arrivera quand même dans la ville où évidemment il ne retrouvera pas ses parents.

Un jour l’horreur envahira complètement son monde intérieur et il perdra toute son innocence. Une dernière partie très courte c’est la vie de Saravouth aux USA, on peut le voir sur un très court reportage que l’auteur nous conseille de regarder. Sa tragédie et ses multiples blessures l’empêcheront de vivre normalement mais la prédiction de la la première femme qui lui a sauvé la vie dans la forêt cambodgienne, les gens auraient toujours envie de l’aider. D’ailleurs pour faire connaître son histoire Guillaume Sire dit qu’il l’a rencontré pendant trois ans et qu’il bénéficiait de l’aide de nombreuses autres personnes.

Citations

La tragédie.

Saravouth se souvient clairement de tout ce qui s’est passé jusqu’au moment où son père s’est mis à courir. Après, il a vu les palmiers devant lui s’effondrer. Il n’a pas senti la balle lui percuter la tête, mais une pression sur ses poumons, depuis l’intérieur, la langue de Shiva. La dernière chose dont il se souvient c’est d’avoir lâché la main de Dara.

La fuite dans les marais.

 Ils ont de la vase jusqu’au genou. Les moustiques se posent sur leurs fronts, près des paupières enflées, sous leur menton. Rida et Thol respirent par la bouche, fort, sûrement à cause du paludisme qui le jour est contrôlable mais la nuit grattent par l’intérieur des nerfs. Après une heure de marche, éclairés à la seule lumière d’un croissant de lune visqueux, ils sentent enfin la présence de l’eau. Derrière une ligne d’arbres abondants, les marécages débouchent sur une étendue de clarté.

Saravouth cherche ses parents.

 Quand il a l’idée de l’envoyer chez ce libraire français que Phusati aime tant, et qui est pour elle une espèce de confident, il reprend espoir, parce que c’est logique, depuis le début ses parents étaient cachés dans une librairie, à l’abri sous les ficelles des mots. Où est ce que sa mère aurait pu se cacher sinon chez Monsieur Antoine, le libraire avec son sourire gêné et ses lunettes au bout du nez ? Mais non, ils n’y sont pas. Vanak apprend à Saravouth que la librairie est fermée depuis un an. Monsieur Antoine a laissé un mot « Fermé à de la folie des hommes, les livres sont en vacances ».

Philosophie de Vanak.

– Tu es orphelin maintenant, dit Vanak en choisissant le cirage et la graisse de phoque.
-Qu’est-ce que tu racontes ? 
-Les adultes, quand ils volent, c’est parce que ce sont des voleurs. Les enfants, c’est parce que ce sont des orphelins.

Fin du livre.

 Saravouth a survécu à la guerre, mais rien en lui de ce qui était davantage que lui-même n’a survécu, sinon dix-neuf éclats d’obus. 
« Je ne suis pas mort, m’a-t-il dit un soir, mais la mort grâce à moi est vivante ».
Le cheval est entré à l’intérieur de Troie. 

 

Édition du Rocher

 

Curieuse coïncidence ce roman dont le sujet est l’amnésie est chez moi depuis un certain temps et j’ai complètement oublié comment il y est arrivé.
William Noone est un pauvre hère, il est recueilli dans un hospice pour indigents à Londres en 1889. Le médecin qui s’occupe de lui, Oscar Klives, comprend peu à peu que cet homme souffre d’une amnésie étrange. D’abord, il se croit toujours en 1847 et ne peut expliquer pourquoi il a été retrouvé sur les quais de Londres. Et de plus sa mémoire est si défaillante qu’il ne peut la faire fonctionner que par tranche de quatre minutes. Puis tout s’efface, et il repart à zéro. En revanche tout ce qui s’est passé avant 1847 est très précis dans sa mémoire. Le médecin qui le recueille est fasciné par ce cas si étrange . Lui-même a une personnalité que nous découvrirons peu à peu : son amour (hélas non partagé !) pour une infirmière plus humaine que la moyenne de celles qui s’occupent des indigents de cet hospice, ainsi que les raisons qui l’ont amené à suivre cette carrière moins glorieuse que celle à laquelle ses brillants études le destinaient.

Il comprend assez vite que le mystère de cette mémoire défaillante doit venir de traumatismes subis en 1847, date à laquelle tout s’est subitement effacé pour William Noone.
Il va donc partir au Canada pour pouvoir réécrire la vie de quelqu’un qui n’en a aucun souvenirs.

Ce roman permet de découvrir la vraie misère des gens sans ressource à la fin du 19° siècle en Angleterre ( cela ne doit guère être mieux ailleurs !). On voit aussi la dure condition des marins, mais le sujet principal c’est la souffrance apportée par l’amnésie. Jamais le malade qui en est atteint ne peut prendre sa vie en main et à l’époque, comme la médecine commençait tout juste à essayer de comprendre ce genre de phénomène le patient est considéré comme responsable de ses actes et il finit le plus souvent en prison.
Le roman m’a intéressée sans me passionner. La forme peut-être ? Nous découvrons cette histoire grâce au cahier personnel du médecin qui distille peu à peu ses confidences, sur son amour, le personnel de l’hospice, le marin amnésique, et enfin son incroyable recherche vers les trente années qui ont disparu de la mémoire de Willam Noone. Très vite le lecteur comprend qu’il n’y aura pas de solution pour ce pauvre hère et que, finalement, il a une certaine chance d’avoir oublié certains aspects de sa vie. Alors pourquoi en faire un roman ? Peut-être pour nous faire découvrir cette époque et ceux qui ont été broyés par l’ère industrielle. Sans doute, mais j’ai lu des textes plus prenants sur le sujet, tout en lisant attentivement ce roman je m’y suis ennuyée il manquait un souffle, ma lecture était plus appliquée qu’interessée.

Citations

Les hospices anglais en 1880.

 Chaque matin, ce sont plusieurs nouveaux spécimens de cette triste race qui attendent en silence, le regard éteint, sur le banc du couloir reliant mon cabinet à celui d’Irvin Owen, mon adjoint. et qu’attendent-ils ?… Leur tour de passer la visite médicale avant d’être conduit aux douches comme du bétail à l’abattoir ; le moment de se laisser dépouiller de leurs hardes et du peu qu’il leur reste, en échange de cet uniforme de pensionnaires qui sera la livrée de leur indignité. À vrai dire, ils n’attendent plus rien 

Observation logique est elle vraie ?

 J’en suis pour ma part venu à la conclusion que la folie naît et se fortifie de son propre déni ; que ce chancre de l’âme se nourrit principalement de l’horreur qu’il inspire ; ou, pour le dire autrement, que le fou ne devient (vraiment) fou que parce que l’impossibilité psychologique dans laquelle il se trouve de s’avouer qu’il déraisonne l’accule à sacrifier des pans toujours plus larges de la réalité à sa lubie initiale, exactement comme le menteur après un premier mensonges est contraint d’en inventer d’autres, toujours plus emberlificotés.

Mémoire et imagination.

 Sir Herbert insiste longuement sur les rapports étroits qu’entretiennent ces deux facultés de l’esprit humain, traditionnellement tenues pour distante par la philosophie classique, que sont la Mémoire et l’Imagination. Il y a une part d’imagination dans tout ce qui nous vient de notre mémoire, comme une part de mémoire dans tout ce que crée notre imagination, écrit-il. Et, pour suit-il, ces apports respectifs sont si bien mélangés dans notre esprit que la question de savoir laquelle de ces deux faculté s’exerce en nous à un moment donné et bien moins évidente qu’on ne poyrrair le penser au premier abord.

Les riches anglais.

Ce gentleman se trouvant néanmoins fort occupé par les préparatifs de son prochain voyage -fort occupé comme tous ceux que leur naissance et leur patrimoine dispensent de travailler : à croire que l’oisiveté est la plus apparente des conditions. 

Le Canada.

 Comme toute cette grande et forte nature n’a que peu à voir avec celle si familière et domestiqué de mon cher Devon ! C’est ici le royaume des sapins et des épinettes, des bises sifflant dans les cimes, des eaux glacées même en été. C’est ici le royaume des saumons remontant à toute force les torrents pour frayer … et des industrieux castor… et des paisibles élans. C’est ici le royaume des innombrables oiseaux de la création : fous blancs planant dans le ciel bleu, autours qui hantent les forêts, tant d’autres dont je ne sais pas les noms ! Malgré leurs trains et leurs gares, malgré leurs pauvres petites villes disséminées de loin en loin, on sent bien que les hommes ne sont point ici chez eux. Du moins pas les hommes que je connais, ceux qui portent des montres dans leurs goussets et qui ont depuis longtemps perdu l’habitude de se régler sur le lever et le coucher du soleil, ceux qui n’ont jamais eu besoin d’attraper ou de faire sortir de terre ce qu’ils mangent mais toujours de tromper leur ennui au club, au théâtre, au cabaret.

L’oubli.

 Quand les vivants qui ont connu les morts meurent à leur tour, quand plus aucun d’entre-eux n’est là pour entretenir leurs tombes et honorer leur mémoire, ces morts du temps passé meurent une seconde et dernière fois. Peu de temps sépare la mort organique de cette seconde mort définitive qui est la vrai et dont le nom est l’Oubli – une génération à peine , l’homme est si peu de choses 

Édition Liana Levi, traduit de l’anglais par Franchita Gonzales Battle. 

Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard 

Sur Luocine, c’est mon deuxième billet sur cet auteur dont j’apprécie l’humour et surtout la concision et la précision des récits. Après « Une canaille et demie » voici donc « Un voisin trop discret ». Après une série de romans américains qui mettent six cent pages à dessiner une intrigue et des caractères, voici un roman de deux cent dix huit pages que je ne suis pas prête d’oublier.

Un couple risque de perturber la vie de Jim, un chauffeur Uber, on devine assez vite, que la vie de ce soixantenaire a dû être un peu compliquée. En attendant, il va aider sa voisine qui vient d’emménager à côté de chez lui : Corina mariée à un soldat Grolsch. et mère d’un petit garçon de quatre ans Après la mort tragique(ô combien !) de son coéquipier, il fera équipe avec Kyle qui bien qu’homosexuel se mariera avec Madison pour l’aider à élever son enfant et ainsi s’assurer une couverture pour faire carrière dans l’armée. Les fils de cette histoire sont incroyablement bien tissés et au passage on découvre les ravages que peut faire une guerre dans la personnalité de ceux qui la font et à qui on donne le droit de tuer. La vie très artificielle dans la base militaire ponctuée par la visite de deux gradés en uniforme qui viennent annoncer la mort du mari soldat, la difficulté des femmes qui élèvent seule leur enfant, et comme je l’ai déjà souligné les conséquences de la guerre en Afghanistan, tout cela en peu de pages (mais tellement plus efficace qu’un énorme pavé) est percutant et si bien raconté !

L’intrigue autour de Jim est très bien conduite avec une fin originale mais cela je vous le laisse découvrir seul, évidement !

 

Citations

La voisine idéale

 Il espérait qu’elle serait aussi calme que la femme qu’elle remplaçait, une étudiante timide de troisième cycle qui faisait de son mieux pour toujours éviter que leurs regards se croisent, l’idée que se fait Jim de la voisine idéale.

La vieillesse

 La pire des choses quand on devient vieux ce n’est pas de se rapprocher de la mort, c’est de voir sa vie effacée lentement. on cesse d’abord d’être insouciant, ensuite d’être important, et finalement on devient invisible.

La guerre

C’est un petit drone caméra, un jouet d’enfant, un rectangle de moins de trente centimètres de long avec un rotor à chaque coin. Pas un vrai drone lanceurs de missile Helfire comme ceux que nous utilisons, pense-t-il. C’est un drone contrôlé à distance par les hadjis du village. Il vole juste au-dessus d’eux et repère les effets du mortier. Grolsch se débarrasse vite de son paquetage et sort son pistolet Glock. Quand il le pointe sur le trône, la minuscule machine s’envole vers la gauche, puis elle revient vite à droite. Ils me voient, pense-t-il. Ils me voient pointer mon arme. Ils voient nos gueules.

Un couple

 Il venait d’une longue lignée de fermiers allemands du Middle-West qui était bon en sport et en travaux des champs, et elle d’une longue lignée de Portoricains vendeurs de drogue, strip-teaseuses et voleurs de voiture. Les opposés s’attirent, jusqu’au jour où ils cessent, sauf que maintenant il a un fils de quatre ans qui courent se cacher, effrayé, chaque fois qu’il rentre de mission.

 

 

 

Édition Hervé Chopin (H.C) . Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard.

 

Je dis souvent (par exemple dans mes commentaires sur vos blogs) que je lis peu de romans policiers, et bien en voilà un que je vous recommande. L’enquête policière est moins passionnante que la toile de fond de ce roman, qui analyse en détails ce qu’on connaît bien maintenant « le choc post-traumatique ». Est-ce que le nom de Vukovar vous dit quelque chose ?

Ce roman décrit avec un réalisme à peine soutenable le terrible siège de cette ville par les Serbes, il est décrit par le petit Duso un enfant de huit ans qui a vu l’innommable. On comprend que Duso est, vingt plus tard, Nikola Stankovik accusé du meurtre de la jeune et jolie Ivanka, croate elle aussi réfugiée en Belgique à Bruxelles. Le lecteur en sait donc plus que les enquêteurs, l’avocat, et la psychiatre chargée de faire un diagnostique sur l’état mental de Nikola. Celui-ci est un dessinateur de talent et graffeur de génie. À travers ses dessins, il en dit plus que par les mots qui sont définitivement bloqués dans son inconscient. Le long processus pour remonter au traumatisme d’une violence absolue est bien décrit et sans doute très proche des efforts que doivent faire les thérapeutes pour libérer la parole de leurs patients. Ensuite ceux-ci doivent se reconstruire mais est-ce toujours possible ? Au moment où je rédige ce billet, l’actualité raconte le procès des assassins du Bataclan, et certains rescapés racontent des traumatismes qui les ont marqués à tout jamais, mais on mesure aussi l’importance de dire en public ce qu’ils ont vécu, ce que ne peuvent pas faire des enfants trop jeunes qui enfouissent leurs souvenirs traumatisants au plus profond de leur mémoire.

Je n’ai mis que quatre coquillages à ce roman car j’ai trouvé que le genre « policier » exigeait des simplifications dans les personnages qui m’ont un peu gênée. La psychiatre qui lutte contre un collègue arriviste qui ne soigne qu’à coups de calmants, est un grand classique du genre et c’est trop manichéen pour moi. Mais ce n’est qu’un détail et je retiendrai surtout la description du siège de Vukovar que j’avais déjà bien oublié, et les dégâts dans une personnalité d’un enfant qui a vu sans pouvoir en reparler des horreurs de la guerre civile : oui, quand la violence des hommes se déchaîne, les enfants sont des proies trop faciles, trop fragiles et même s’ils survivent on ne sait pas grand chose des répercussions sur leur personnalité.

Citation

L’image des Français en Belgique

 L’homme était d’origine française.
 Les français savent tout sur tout et tiennent à ce que ça se sache. Il avait d’emblée revendiquer sa nationalité, en précisant la région et la ville de naissance, comme ils le font généralement entre eux pour évaluer les forces en présence.
 Les chiens se reniflent le derrière, au moins, c’est silencieux.