Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard. Édition de l’Olivier

J’ai été très touchée par ce roman car tout est en nuances ce qui n’enlève aucune profondeur au propos. Une écrivaine qui est proche de la personnalité de Fanny Chiarello , d’ailleurs c’est sans doute elle-même ou du moins une des ses facettes, aperçoit une jeune joggeuse dans un quartier populaire du bassin minier. Elle en fait une photo car elle est très attirée par elle. Puis, elle lui écrit ce roman où elle imagine sa vie. Une vie qu’elle connaît bien car elle est elle même issue du même milieu. Ainsi dans ce dialogue avec Sarah, elle révèle aux lecteurs et lectrices que nous sommes, à quel point c’est douloureux de se sentir différente dans ses orientations sexuelles, alors que tout dans la société vous pousse à être normal, c’est à dire attirée par des garçons. Est-ce plus difficile dans ce milieu que dans la bourgeoisie, je n’en sais trop rien ? Je sais depuis Edouard Louis, que cette différence peut conduire à des réactions très violentes. Je pense que dans des familles catholiques conservatrices ou musulmanes, peu importe l’origine sociale, cela doit être très douloureux pour la jeune adolescente. Dans ce livre, la famille de Sarah n’est pas caricaturée, même si la mère est intrusive et pense qu’elle a le pouvoir de remettre sa fille dans « le droit chemin » , elle le fait certainement par amour et par par peur des malheurs que peut engendrer l’aveu de l’homosexualité. Tout en étant une mère qui essaie de bien faire elle est d’une rare violence pour la jeune adolescente qui se cherche et ne voudrait rencontrer que douceur et compréhension. J’ai trouvé la construction romanesque intéressante et les sentiments de la jeune fille très bien décrits. En revanche, j’ai trouvé un peu convenues et sans originalité les remarques sur la langue française et différents passages obligés sur les différences entre l’homosexualité et l’hétérosexualité. À la fin du livre, quand je l’ai refermé et laissé mûrir dans mes pensées, je me suis dit que c’était déjà compliqué d’être adolescente, encore plus, sans doute quand on vient d’un milieu dont on n’épouse pas les codes mais quand, en plus, on se sent juger pour ses émois sexuels alors cela doit devenir proche de la cruauté ce qui peut pousser suicide ou au moins au repliement sur soi. Je me suis demandée si Sarah n’allait pas devenir anorexique, tant les moments à table où elle sent le regard de chacun la scruter, la juger et enfin la condamner sont pénibles pour elle.

PS . Je suis très contente d’avoir lu et apprécié un roman de cette auteure qui m’avait tellement ennuyée dans le précédent « Une faiblesse de Carlotta Delmont »

 

 

Citations

 

Détail bien vu

Son jean taille haute est si moulant que , quand elle glisse son téléphone dans la poche arrière , on pourrait taper un message à travers la toile .

Une homosexualité discrète

Quand tu entends Lou faire bruyamment étalage de ses attirance, tu es mal à l’aise pour elle. Ni plus ni moins que tu ne le serais si elle se jetait sur des garçons. Tu ne comprends pas les gens qui se donnent en spectacle, toi qui place l’intimité en tête des luxes possibles et y aspire de toutes tes forces.

Être végétarienne

 Tu as plaidé pour le droit d’être végétarienne mais ta mère a répondu qu’il était de sa responsabilité de t’assurer une croissance normale. Tu as alors tenté de démontrer qu’une croissance normale ne passait pas nécessairement par la consommation de viande ; pour étayer tes propos tu as imprimé quelques articles qui l’expliquaient mais ta mère a estimé avoir plus de bon sens que les scientifiques.

Je comprends

La plupart des gens trouvent les érudits passionnant, mais moi, ils me dépriment. Quand je suis amenée à en écouter (ce qui signifie que je suis tombée dans un guet-apens), je délaisse très vite le contenu de leur discours pour me concentrer sur sa forme, sa longueur, son rythme, son lexique, je l’observe comme une pathologie un peu triste.

 

14 Thoughts on “Le sel de tes yeux – Fanny CHIARELLO

  1. keisha on 9 novembre 2020 at 08:43 said:

    Donc elle imagine la vie de Sarah, Ok,

  2. tu as l’art de dégotter des auteurs peu connus et qui peuvent procurer un grand plaisir de lecture
    je suis un peu dépassée en ce moment car mon rythme de lecture est au ralenti mais qu’importe je note malgré tout

    • pour ce roman c’est la bibliothécaire de la médiathèque de Dinard qu’il faut féliciter, elle sait ouvrir les horizons de lecture à toutes les participantes de ce club qui hélas est de nouveau fermé!

  3. Pourquoi pas, l’écriture semble jolie et sensible… Et puis, pour la mentalité des bassins miniers, en savoir plus sur d’autres gens.

  4. merci pour cette découverte qui a l’air émouvante et sensible

  5. Evidemment, un titre qui me fit penser au premier titre d’Edouar Louis, En finir avec Edy Belle gueule, à cause du sujet. Mais ce titre semble moins violent ( il faut dire que plus, ce serait difficile …). En tout cas, je note, car l’idée de départ, la photo, la vie imaginaire, me plait bien.

  6. Sujet intéressant et pas simple…

  7. Je suis persuadé d’avoir déjà lu cette autrice mais je ne me souviens plus du tout du titre…! Assez tentée par son dernier du coup !

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