Un livre que ma sœur m’a prêté en me disant : « Ce roman raconte parfaitement, ce qui se passe quand une famille nombreuse a la chance d’avoir une grande maison de vacances. ». Dans ma ville, je connais bien ce genre de maisons et de familles qui s’y retrouvent l’été et que je croisent tous les étés sur ma plage. Le roman se passe dans les régions des abers, une Bretagne plus sauvage que la côte d’émeraude dinardaise. Mais les comportements sont les mêmes. Réunis ces familles forment des clans et se sentent intouchables. Ils ont leurs rituels, se savent observés sans que cela ne les dérange. Dans ce récit l’auteur raconte très bien le poids et le charme de la maison, on sent aussi que celle-ci devient un peu lourde financièrement pour chacun, elle ne restera peut-être pas dans la famille dans une autre génération. Il décrit aussi le bonheur des enfants, ce sont eux qui vivent le mieux ce genre de vacances. La plage et les jeux d’enfants dans le grand jardin ont marqué l’écrivain et il pense qu’il en sera de même pour les enfants de la nouvelle génération. Un enfant le touche particulièrement, un petit Jean qui lui fait penser à lui, enfant ? C’est grâce à lui qu’il comprendra que c’est à son tour maintenant de passer du côté des adultes et de transmettre aux enfants les savoirs importants : faire du vélo, la pêche aux crabes … pour les jeux, les enfants n’ont besoin de personne.
Le hasard de mes lectures, font que je rapproche l’histoire de deux maisons de famille, qui se ressemblent dans ce qu’elles disent des joies et des souvenirs d’enfance heureuse. Mais ce roman est plus léger, sauf bien sûr la tragédie qui touchera le petit Jean. J’en ai aimé la lecture, et l’évocation d’une Bretagne que je connais bien. La volonté de l’auteur de ne pas nous faire connaître davantage la vie du narrateur rend le récit un peu vide. On ne sait pas pourquoi il a détesté cette famille ni pourquoi il est revenu. Il veut que ce mois d’août soit celui de son retour vers une maison et des rituels familiaux dont un m’a semblé bien cruel : chaque enfant, l’été de ses six ans, doit jeter son doudou dans la mer … Quand on sait ce qui arrive au petit Jean quinze jours plus tard, on peut imaginer que sa mère aura trouvé cette violence bien inutile !

En réalité on ne connaît très bien personne de cette famille, on reste à la surface des gens, nous avons le décor et un film qui nous permet de voir ces gens de loin sans qu’ils ne nous deviennent familiers. Comme le dit l’auteur, cette famille sait appartenir à une forme d’aristocratie qui reste sur son quant à soi. Les personnages du peuple ont eux plus de consistance , comme l’ostréiculteur qui vend ses huîtres en Italie, mais ils n’appartiennent pas au clan .

Un roman qui décrit bien les vacances d’été pour les enfants, dans un cadre dont l’auteur sait nous décrire tout le charme. Mais un roman qui m’a aussi agacée par son côté « grande famille comme il faut » qui regarde un peu de haut le brave peuple dont je fais partie.

 

Citations

Ceux qui ont eu la chance d’avoir une grande maison de vacances se reconnaîtront dans ce passage.

Quand on croisait un nouveau parent ou des amis de passage, la discussion s’engageait toujours de la même façon : Quand es-tu arrivé ? Quand repars-tu  ? Les grandes vacances signifiaient la succession des arrivées et des départs des uns et des autres. On ne retenait jamais. Mais quand un visage disparaissait, on devinait qu’il était parti pour de bon. On ne le reverrai plus avant l’année prochaine. Et on acceptait de ne pas le revoir pendant si longtemps seulement parce qu’il était aussi la promesse du prochain été. Il y a comme ça des gens qu’on ne peut voir à aucune autre époque. Ils sont d’août. 

Ceux qui viennent d’une famille nombreuse se reconnaîtront .

 Je subissais un paradoxe familial, balançant entre la joie des retrouvailles et le soulagement du départ prochain. Nous formions un monde à part autosuffisant, suffisant, envié par d’autres sûrement. Mais le cercle familial excluait autant qu’il rapprochait.

Le déclin religieux .

Des messes, il y en avait dans chacune des trêves de la paroisse et tous les dimanches. Désormais, il n’y avait plus qu’un seul office dominical pour le canton., deux peut-être, en plus de la messe anticipée du samedi soir il fallait lire la feuille paroissiale pour se tenir au courant. Ce pays de prêtres en était devenu orphelin. Ce pays de fidèles les voyait disparaître ; ils s’étaient pourtant tassés en foule, les femmes d’un côté, les hommes de l’autre, sur les bancs en bois aujourd’hui clairsemés. 

Genre de comparaison pas terrible, si ?

 La maison était comme le corps d’une femme aimée dans la nuit totale ; sans en distinguer l’épiderme j ‘en savais tous les contours

Je suis d’accord avec cette remarque.

 J’avais de la sympathie pour lui mais je savais qu’il était de ceux qu’il vaut mieux ne pas trop connaître pour continuer à les aimer. 

Édition de L’Olivier

Traduit de l’anglais (États-Unis) par Céline Leroy

 

Un roman, ou plutôt une autobiographie qui commence par la fin : l’assassinat de la mère de l’auteure. Celle-ci part dans ses souvenirs pour comprendre les raisons de cette mort. Elle est , elle même la fille d’un poète universitaire irlandais et d’une femme noire américaine du Mississipi. Ses parents se sont mariés au début de l’assouplissement des lois régissant les mariages mixtes, mais cela ne veut pas dire qu’ils ne souffriront pas du racisme. L’auteure n’explique pas pourquoi le mariage de ses parents n’a pas résisté , ni le rôle que son père biologique a joué dans sa vie. Hélas, pour elle sa mère se remariera avec un homme ancien soldat qui a fait la guerre du Vietnam. Ils ont un enfant ensemble, et c’est la raison pour laquelle elle ne le quitte pas immédiatement. L’enfant sera malheureuse et cet homme la fera souffrir en cachette de sa mère, l’enfant ne le lui dira pas et s’en voudra parce que cela aurait peut être sauvé sa mère. Je ne vous apprends rien en disant qu’un jour celui-ci tuera sa femme. Ce qui révolte sa fille c’est que la police n’a pas cherché à protéger sa mère. Un témoignage terrible qui est, hélas, bien banal .

Le livre se termine par la retranscription des enregistrements des dernières conversation de sa mère avec son mari. On devine une femme lucide et courageuse , mais qui ne pourra pas se défendre face au pistolet de celui qui n’a qu’une idée en tête : l’empêcher de vivre.

Un livre qui a connu un grand succès aux États-Unis, (enfin c’est ce que dit la quatrième de couverture) qui m’a intéressée sans me passionner je n’arrive pas à savoir pourquoi. En revanche j’ai bien aimé la façon dont cette auteure raconte le racisme ordinaire des américains et aussi le courage des femmes qui s’y opposent. Par exemple, sa tante qui ne veut pas qu’un homme blanc l’appelle « hé , Tantine  » et qui lui répond  :

Ça alors, j’aimerais bien savoir quand est ce que mon frère a épousé votre mère !

Mais avec un fusil à portée de main .. on ne sait jamais !

 

Citation

L’enfant métissée.

 

 J’ai mis leurs mains côte-à-côte et j’ai demandé pourquoi ils n’étaient pas de la même couleur, pourquoi je ne correspondais à aucun d’eux. « Qu’étais-je » « Tu as le meilleur des deux mondes », m’ont ils répondu, une réponse que j’avais déjà entendue.
À l’extérieur, seule avec l’un ou l’autre, un profond sentiment de dislocation s’emparait de moi. Si j’étais avec mon père, je mesurais les réactions polies des Blancs, la façon dont ils s’adressaient à lui en l’appelant « monsieur » alors qu’ils appelaient ma mère « ma fille », jamais « mademoiselle » ni « madame » comme la politesse l’exigeait, comme on me l’avait appris. Le traitement que je recevais variait tellement selon que je me trouvais avec ma mère ou mon père que je n’étais pas sûre de savoir à qui ou à quel lieu j’appartenais.

 


Édition Gallimard NRF

J’avais peu apprécié « Le dernier hiver du Cid » même si cet écrivain raconte bien le deuil. Il s’agit encore de deuils dans cet essai, celui de sa mère un belle personnalité puis six mois plus tard celui de son frère qui était handicapé. C’est un récit très sensible qui raconte bien sa peine, sa mère était était une femme courageuse et énergique elle a fait face à la mort du jumeau de Jérôme, à l’âge de 6 ans puis de son mari et enfin elle a soutenu son dernier fils . À l’occasion de la découverte du handicap de cet enfant, les médecins découvrent une maladie génétique dont sont porteurs les hommes de la famille. Cela fait partie des « fragiles » de sa lignée, on sent le poids de cette révélation sur le destin de cet écrivain.

Je pense qu’écrire fait du bien à l’auteur et lui permet de surmonter ses peines. Je reste quand même un peu étonnée qu’il ait autant besoin de les raconter à un plus large public Je sais que j’oublierai vite cette lecture .

 

Citations

Le début.

 J’avais un frère fragile. Maintenant qu’il est mort, il me parait plus fort, et je me sens plus faible. En vérité je ne sais plus qui, de nous deux, était le plus fragile.

Sa mère .

 En roulant, chaque mois d’août, dans un Paris désert et surchauffé, pour aller la voir à l’hôpital, je rendais même grâce aux maladies, qui, durant la dizaine d’années où elle les a combattues, où nous les avons affrontées ensemble, nous ont rapprochés et soudés comme jamais auparavant.

Le rapport mère fils handicapé .

 Mais la famille n’était pas au complet. Un seul être manquait à l’appel de la mère, au faire-part de la mort. Il était pourtant le plus précieux. Son fils Laurent. Son grands petit garçon. Son émotif. Son informulé. Son attendrissant. Celui qu’elle s’obstinait à refuser de voir vieillir. 

 




Éditions Pocket . traduit de l’anglais (États-Unis) par Christine Auché

lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard

 

La mythologie grecque a toujours été, depuis l’enfance, une de mes passions. Et pour une fois, je ne suis pas encombrée par le suspens car, oui, je connais la fin de l’histoire et vous aussi n’est ce pas ? Ce qui peut vous conduire à lire ce livre, ce n’est donc pas si Achille survivra à la guerre de Troie, ni même comment il mourra, tous les épisodes de sa courte vie, on les connaît. Achille celui qui a choisi la gloire et la mort précoce plutôt que la survie et l’oublie pour les générations futures peut-il encore passionner les générations actuelles. Vous toutes, les antidivulgâcheuses qui me surprennent tant malgré votre nombre, je sais comment vous attirer vers ce roman : je trouve très intéressante la relecture d’une autrice américaine à propos de ce personnage grec. J’ai quelques réserves sur ses partis pris , pour elle le personnage d’Achille se définit à travers son amour homosexuel pour Patrocle et elle décrit avec une sensibilité contemporaine cet amour plus ou moins interdit. Elle dit bien que le sexe entre garçons était accepté mais pas pas l’amour. Ça se discute. Ce que j’ai aimé c’est le rôle des dieux et déesses qui interviennent tout le temps dans les histoires humaines, c’est simplifié par rapport à mes souvenirs mais cela rend le roman facile à lire. Ensuite la deuxième partie du roman la guerre, elle même, est aussi horrible que dans mes souvenirs.

J’ai bien aimé retrouver les personnages tels qu’on les connaît : le rusée Ulysse, l’horrible Agamemnon qui n’hésite pas à trancher la gorge de sa douce Iphigénie, les différents rois de la Grèce. Leurs débats sans fin, leur jalousie et leur mesquinerie . Pour résumer mes réserves je dirai que je me suis senti à Hollywood au pays de la culture mythologique grecque (cet avis ‘engage que moi) mais si ce livre permet à une jeune génération de se mieux connaître cette culture, alors, pourquoi pas ! J’ai été loin, très loin du plaisir que m’avait procuré  » L’univers, les Dieux Les hommes » de Pierre Vernant.

 

Citations

Les demi dieux

 Le sang divin coulait différemment dans les veines de chaque enfant né d’un dieu. La voix d’Orphée faisait pleurer les arbres, et Héraclès pouvait tuer un homme en lui tapant dans le dos. Ce qui était miraculeux chez Achille, c’était sa rapidité. Lorsqu’il entama la première passe d’armes, sa lance bougeait si vite que je n’arrivais pas à la suivre du regard.

Discussion à propos de la guerre.

 -Peut-être bien, mais je ne vois pas de raison de le tuer, répondit froidement Achille. Il ne m’a rien fait. 
Ulysse s’esclaffa comme s’il venait d’entendre une bonne plaisanterie.
– Si chaque soldat ne tuait que les ennemis qui l’ont personnellement offensé, Pélides, il n’y aurait aucune guerre, oberva-t-il narquois. Quoique ce ne soit peut-être pas une si mauvaise idée.

Édition Gallimard . Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard

 

Après Les invités et Le portrait voici ma troisième lecture de Pierre Assouline. Il s’agit là d’un roman de 400 pages qui se passe sur la Paquebot « Georges Philppar » connu pour avoir été celui où Albert Londres a perdu la vie en revenant de Chines en 1932.

Pierre Assouline connaît bien Albert Londres, puisqu’il lui a consacré une biographie que je n’ai pas lue. Mais ce grand journaliste n’arrivera dans ce livre qu’à la page 300. Tout le roman est construit autour d’un personnage collectionneur de livres rares qui est venu sur ce bateau pour vendre et acheter à l’escale de Shangaï des raretés très très chers, mais aussi pour rencontrer Alber Londres. Comme on ne connaît que tardivement les raisons de cette volonté je ne la dévoilerai pas, même si je la trouve sans aucun intérêt.

Donc pendant 300 pages nous suivons les réflexions, les descriptions des passagers et les penchants amoureux du narrateur, c’est parfois intéressant et souvent très ennuyeux. C’est certain que lors d’une croisière de plusieurs mois, confinés dans un espace assez réduits les gens s’ennuient et ce n’est pas toujours le meilleur d’eux même qui apparaît au grand jour. Les passages les plus intéressants racontent la montée du National Socialisme en Allemagne et la façon dont des grands industriels allemands voient en Hitler un pantin qu’ils sauront dominer. On retrouve dans ce huis clos toutes les peurs et les discussions qui ont animer les salons d’avant la guerre et cela rappelle les discussions autour du danger de la Russie et de Poutine avant 2014.

Sinon, chacun le sait, Pierre Assouline est très cultivé et peut citer un nombre d’auteurs absolument stupéfiant, bien sûr ce n’est pas lui qui parle mais son personnage , mais cette érudition à toutes les pages ou presque est très pesante. Le livre fonctionne comme une mise en abîme de tous les livres qu’il a lus (l’auteur ou son narrateur). Je ne peux pas toutes les citer sans apparaître moi même pédante et en oublier certains ce qui montrerait mon inculture ! Mais cela m’a agacée autant que le plaisir des traits d’esprit qui me semble un plaisir assez vain.

Et Albert Londres dans tout ça  ? il semble bien loin de ce monde là, lui qui toute sa vie a ouvert les yeux sur la vraie vie : Les bagnards à Cayenne, les malades dans les asiles psychiatriques, la misère absolue dans la Russie soviétique… On ne saura jamais ce qu’il voulait écrire sur le communisme en Chine car son article a disparu avec lui et ses amis morts dans un crash d’avion. De là, à imaginer un complot pour le faire taire définitivement … mais ce n’est visiblement pas ce que pense l’auteur …

Il y a aussi un autre aspect qui m’a bien plu : les paquebots étaient très dangereux en particulier pour les risques d’incendies. La sécurité passait après le désir de construire un superbe décor, le plus important c’était de faire appel aux plus célèbres décorateurs, tant pis pour les risques que l’on faisait courir aux passagers. Ainsi, sur ce bateau, les fils électriques, très mal isolés, couraient derrières des lambris de bois vernis qui se sont enflammés comme une boîte d’allumette. La raison du départ de l’incendie est plus complexe, sans doute l’utilisation du courant continue alors que l’installation ne le supportait pas bien.

Un roman, que toutes les lectrices et tous les lecteurs, qui aiment cet auteur liront avec plus de passion que moi.

 

Citations

Première phrase

On peut adorer s’en aller. Ivresse du départ, volupté de l’arrivée ; encore faut-il revenir.

Les privilégiés.

 Un certain nombre de passagers des catégories de luxe sont des invités de la compagnie. Ceux-là vivront le voyage comme une pure villégiature. Certains parmi ces heureux du monde se connaissent, d’autres se reconnaissent. Tout dans leur attitude insouciante reflète le seul tourment d’avoir à se laisser vivre. Ils se comportent comme des invités permanents de la société.

Je ne sais pas si c’est vrai ?

 Si tout paquebot est une ville flottante, et le nôtre possédait même une cellule, une salle de quarantaine et une cabine capitonné pour aliénés, son pont promenade en est le boulevard à ragots.

Un portrait cruel

 Notre célibataire de l’art, ce bellâtre italien à l’évidence entretenue par la compagne hors d’âge appuyée d’ordinaire à son bras (on le sait depuis la belle Otéro, la fortune vient en dormant, mais pas en dormant seul) se faisait appeler Luigi Caetani et laissait croire à qui voulait l’entendre une parenté avec l’illustre famille de cardinaux. Tout en lui suintait l’arrivisme, jusqu’à son eau de toilette ; son ambition avait quelque chose de pestilentiel.

Encore un portrait cruel.

 La crainte de paraître goujat inciter sa petite cour brillante au bar de la piscine, à la contempler comme l’ébouissant vestige d’un révolu ; à force de fréquenter son mobilier, son visage en était devenu Art déco ; son corps, un temple autrefois beaucoup visité, conservait ses adorateurs bien que des racines en eussent remplacés les piliers, un peu comme à Ankor ; en vérité c’était une ruine.

Mot d’esprit.

Le genre de type qui devait porter sa rosette de la Légion d’honneur jusque sur le revers de sa veste de pyjama.

Un français attiré par les thèses nazies.

 Je monte régulièrement à cheval au bois de Boulogne et j’ai constaté une chose : à peine est-on en selle que, de là-haut, on se sent déjà moins républicain ..

L’horrible Modet-Delacourt.

 « Non vraiment, n’insistez pas, vous comprenez les bourgognes, les vins de la Loire, tout ce que vous nous proposez, ça ne vaut même pas d’être pissé », ce qui contrasta brutalement avec l’arôme de violette qui mûrit puis s’épanouit en un goût de pétales de roses à peine fanée que le sommelier venait d’évoquer. Il aurait pu réussir à être blessant sans se montrer grossier, mais non, pas son genre. C’est aussi à cela que l’on juge une éducation :cette faculté d’humilier
 publiquement le personnel, lequel n’en peut mais, par définition.

Citation et trait d’esprit.

 Elle me paraissait incarner la femme telle que Beaumarchais la définissait : une âme active dans un corps inoccupé.

Genre de remarque qui truffe ce roman et le rend pédant.

 Milk n’en fit même pas cas, tous occupé à discuter des vertus de l’odontomettre pour mesurer la dentelure des timbres ou à plus de plaider, une fois de plus, la cause de l’adoption du néologisme « timbrologie » en lieu et place de « philatélie » au motif que si l’on avait vraiment voulu s’en tenir à l’étymologie grecque, c’est de « philotélie » qu’on devrait parler.

 

 

Édition inculte

J’avais dit à « lireaulit » que je lirai ce livre, il ne faut pas être trop pressé car c’est chose faite en 2023 , (son article date du 11 avril 2020), j’ai enfin pu rayer dans ma liste ce livre auquel elle avait attribué un « énorme » coup de coeur. J’ai aimé aussi , mais un peu moins qu’elle vous pourrez comparer nos deux points de vue.

C’est un roman qui raconte un drame en milieu rural montagnard. La famille Anfosso se sent propriétaire non seulement de chez eux, ce qui est normal après tout, mais aussi de la montagne environnante qui est leur terrain de chasse au sens propre, mais aussi des consciences de tous les villageois car il ne fait pas bon s’opposer aux Anfosso, surtout quand ils lâchent leurs chiens ou qu’ils sont armés de leurs fusils toujours chargés.

Guillaume, un beau jeune homme, fils de gens qui sont venus à la retraite dans ce village, décide d’y construire une bergerie.

Des moutons sur leur montagne ! les Anfosso, en particulier Joseph, ne peuvent le supporter. Le roman se situe donc dans cette guerre et cette rancune si tenace et si amer qu’elle monte à la tête de tous les Anfosso . Tout le village le sent et sait que ça va mal se finir mais quand ce genre de conflit arrive dans un village fermé sur ses certitudes rien ne peut arrêter le torrent de la haine.

L’écriture cerne au plus près ce qu’il se passe dans ce genre de situation et nous entrons dans les réflexions les plus intimes de tous les protagonistes et en toile de fond le village qui est plus ou moins d’accord.

Je comprends bien le plaisir des mots et aussi celui que procure une tragédie annoncée au dénouement inéluctable, mais si j’ai un bémol à ce genre de lecture c’est justement que ce côté tragique ne raconte pas assez la diversité du monde. Les parents du beau et jeune berger habitent aussi ce village et ils y semblent heureux, pourquoi n’ont-ils pas réussi à briser ce cercle infernal ?

La jeune femme de Guillaume parle avec le médecin du village et on sait à quel point l’influence du médecin peut peser sur les consciences.
En réalité mon bémol vient de là , je ne crois pas à l’isolement de Guillaume, en revanche je n’ai aucune illusion sur le » bonheur » de vivre à la campagne.

Cela reste un bon moment de lecture et une très belle écriture.

Citations

Les cafés de village.

 Dans ces cafés de villages, les tables sont privées d’autonomie et d’intimité. On s’imagine passer quelques instants avec son employés ou son meilleur ami, mais en réalité on est tous ensemble assis à une immense table imaginaire. Que l’on soit derrière le zinc, juché sur une chaise haute, à une table au fond où qu’on s’abandonne quelques secondes sur le perron avant d’aller arroser les fleurs de la grand-mère, on participe de la même chose, chacun construit le bric-à-brac vacillant de la discussion 

Le chœur des femmes du village

(connaissez vous l’expression « se devoir se devoir de quelqu’un » ?)
 Le chœur sentait qu’il perdait Mireille et ça lui faisait un peu mal parce que tout le monde se devait un peu de Mireille – surtout Denise qui avait toujours tout partagé avec elle- mais on se refusait de sacrifier le collectif millénaire. Et puis, elle était vieille, on ne lui donnait plus très longtemps. Alors on préférait invoquer la dépression, le dérèglement, la sénilité. Il valait mieux se couper une main que laisser passer la gangrène.
Mireille basculait du côté du berger irrémédiablement. Bientôt elle aurait rentré sa chaise, ne participerait plus à aucune discussion Et perdrait de ce fait tous ses droits.

Lorsqu’on a que la haine en partage.

 Dans ces moments de faiblesse, il détestait les chasseurs et il se détestait de les haïr autant. Et les tenant pour responsable de ce dévoiement, il nourrissait une haine de plus en plus effrayante.
 Voilà, il leur ressemblait désormais. Voilà ce que je suis devenu, un Anfosso, se disait-il.
Puis il se reprenait, s’inventait une indifférence, à divertissement. Il se tournait vers sa femme, vers son fils, vers ses bêtes se rassurait, se laissait fondre en quelques instants, quelques heures au mieux.
Mais cela revenait. 
Cela revenait sans cesse.

 

 

 

 

 

 

 


Édition Folio poche . Traduit du finnois par Anne Colin du Terrail

Un auteur qui m’avait déçue avec la douce empoisonneuse et ravie avec le dentier du maréchal , ici je suis à mi route. J’ai bien aimé mais ce récit manque un peu de légereté. Le récit est en deux partie, la première raconte la construction d’un pont par Akseli Jaatinen dans le village de Kuusmäki. (Vous remarquerez le gout des finlandais pour les doubles voyelles ! !) . Tout de suite les notables du village déteste cet ingénieur trop efficace et aux méthodes expéditives. malgré tous le sennuis que la municipalité essaient de lui causer jusqu’à vouloir le mettre en prison il réussit à construire le pont dans le temps imparti.
la deuxième partie raconte sa vengeance contre tos ceux qui lui ont fait du mal. mais contrairement à Edmond Dantes (excusez cette comparaison mais mon petit fils adore Monté Christo) il ne cherche pas à nuire au village bien au contraire il ne cherche qu’à enrichir le village. Il applique des méthodes révolutionnaires pour construire une usine de ciment qui profite à tout le village et réussît à construire en trois mois une voie ferrée que tout le monde attendait depuis des lustres. En revanche le sdeux femmes qu’il honore de ses faveurs sont très heureuses de partager sa vie et de faire de lui « un homme heureux »

Seuls ceux qui continuent à lui nuire auront le spires ennuis mais il faut dire aussi qu’ils le cherchent bien. C’est un roman sympathique et qui se lit bien. J’ai lu ce livre à la suite d’un article sur la blogosphère mais j’ai oublié de noter le nom du blog.

 

Citations

Le coup de foudre.

 C’était une femme. Elle était là parmi les autres, mais ne leur ressemblait en rien. Elle était belle, douloureuses belle. Comment la décrire ? Des boucles brunes, des traits délicats, un nez droit, parfait, des yeux brillant de milliers de secrets … son cou de cygne émergeait de sa robe avec une grâce de déesse, ses seins idéalement placés se balançaient doucement tels de précieux trésors… et son corps ! Il cascadait des épaules aux hanches puis aux cuisses, aux genoux déliés à partir desquels les jambes s’amenuisaient, devenant chevilles, avant de disparaître dans délégants escarpins un ravissement !

Un finlandais amoureux .

 Un ingénieur des ponts, dans ces circonstances ressemble trait pour trait à toute autre Finlandais amoureux : il a un sur le visage une expression d’une incroyable stupidité, sa bouche se tord, un semblant de chansons monte vers le ciel et son regard erre dans les broussailles, et il roule sur sa bicyclette du côté gauche de la route.

Comment reconnaître un artiste.

 On vit arriver par l’autocar de Helsinki un petit moustachu fripé qui se présenta à Manssila et Jaatinen venus l’attendre à la gare routière : Kasurinen, sculpteur. L’homme sentait l’alcool frelaté, ce qui leur sembla prometteur. Kasirnen était de toute évidence un véritable artiste.

 


Édition Liana Levy

Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard 

On ne peut pas changer le monde Ben, mais il faut tout faire pour qu’il ne nous change pas.

Sans mon club je n’aurai jamais ouvert ce roman car je déteste tout ce que l’auteur soutient, mais j’aurais eu tort car cet écrivain a une langue très particulière qui donne un ton original et très séduisant à son roman. Qu’est ce que je déteste ? Ce livre justifie sans aucune nuance toutes les violences des mouvements contestataires et se termine par enfin une action réussie qui n’a pas encore eu lieu la prise de l’assemblée nationale par le héros de l’histoire.

Ce qui m’a le plus manqué dans ce livre c’est l’humour (celui de Safr par exemple !) tout est tragique et sans espoir. J’ai quand même souri lorsque le héros rassemble tous les sigles créés par l’administrations françaises.

Et pourtant il y a de très belles pages dans ce livre. Des pages qu’on a envie de lire à haute voix car elle résonne comme des slams. Rouda sait raconter la violence, l’amour et l’amitié aussi . On peut le lire sans partager ses idées, sauf si pour l’auteur ce livre livre est une demande d’adhésion au parti de ceux qui pensent que seul une révolution violente serait la solution à tous les problèmes de la société française.

 

Citations

L’art de la formule.

 J’ai déjà confondus des cris de dispute avec des soupirs d’amour. Et comme mes parents s’engueulent plus qu’ils ne font l’amour, je préfère imaginer qu’ils s’aiment. Parfois entre les silences et les bruits de fourchettes qui raflent la faïence, j’essaie de leur poser des questions. Mais mon père répond toujours que c’est mieux de finir son assiette que de finir une phrase.

Un portrait positif d’une jeune femme.

 Oriane est curieuse de tout, elle te pose de vraies questions. Elle plante son menton dans ses mains, elle plonge ses yeux couleur de nuit dans les tiens et tu te sens unique. Comme elle s’intéresse à toi, à ce que tu as fait de ta journée, à ce que tu comptes faire des prochaines de ta vie elle te rend toujours intéressant. Elle écoute. Elle attend que tu ais finis tes phrases pour commencer les siennes.

Phrase d’Oriane.

On ne peut pas changer le monde Ben, mais il faut tout faire pour qu’il ne nous change pas.

Portrait de lui en militant avec un peu de distance !

 Je suis incollable sur l’Histoire de la gauche française. Lorsqu’on sort en soirée, je tiens de grands discours sur les luttes politiques. J’ai un avis sur tout et surtout un avis sur rien. J’arrive à me persuader que je suis convaincu de ce que je dis, et je porte de la banlieue en étendard. Je me prends pour un militant du réel avec ma paire de Nike est ma veste Lacoste.

Le goût de la France pour les sigles ou acronymes.

Mon CDD, qui ne sera jamais un CDI, se passe dans un CADA. Attention. Pas un SPADA. Ni un CHRS. Quand l’ADA est enregistré au GUDA, et si l’OPC est validée les demandeurs d’asile peuvent avoir accès aux CMA. Alors, je peux les accompagner pour la CMU, l’AME et l’ASA. Mais s’ils sont déboutés par l’OFPRA, je les aide à monter leurs dossiers CNDA, pour éviter qu’ils attendent dans un CRA avec une OQTF.


Édition Rivages(Plont) 

Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard 

 

J’ai adoré la première partie de ce roman, un peu lassée dans la seconde et ennuyée à la fin. Je m’explique le début du roman décrit un homme très oublié : Augustin Mouchot qui croit à l’énergie solaire et qui invente une machine dont il fera la démonstration à Napoléon III à Biarritz. Son enfance est marquée par la maladie , et son père comprendra très vite que ce petit être souffreteux réussira mieux dans les études que dans son atelier. Mouchot devient donc professeur dans un lycée mais sa grande idée c’est d’utiliser le soleil comme source d’énergie. Et ça a presque marché , pour cela il faut du soleil ! et la Touraine n’en est pas toujours pourvue.
Dans la seconde partie on le voit grâce à l’aide d’un homme plus entreprenant que lui réussir à s’imposer comme chercheur et décidé de partir en Algérie pays où le soleil est plus fréquent.

En réalité, ses recherches se heurtent à l’essor du charbon. l’Europe profite alors une source d’énergie si peu chère que le solaire, très compliqué à dompter, intéresse peu les dirigeants de ce monde.
Arrive la troisième partie du livre, la déchéance du presque complètement oublié Augustin Mouchot qui vit avec une mégère alcoolique dans un bouge immonde ! Et là j’aurais volontiers abandonné la lecture sans la motivation de la discussion du club.

Je rédige bien vite cet article car, malgré le talent et l’humour de l »auteur, je sais que je vais tellement vite l’oublier moi aussi ce pauvre Augustin Mouchot.. La seule question que je me pose c’est de savoir ce qu’il aurait fallu pour que les recherches autour du soleil continuent même si l’énergie fossile a été pendant plus de deux siècles très bon marché.
J’avais lu de cet auteur « Sucre noir » que j’avais bien aimé.

 

Citations

 

Un début accrocheur.

 Son visage n’est sur aucun tableau, sur aucune gravure, dans aucun livre d’histoire. Personne n’est présent dans ses défaites, rares sont ceux qui assistent à ses victoires.

L’enfance sous le signe de la maladie en 1826.

 Il attrapa la variole, la scarlatine, la diphtérie, la fièvre, une diarrhée qui dura 14 jours, une forme rare de chlorose qu’on disait réservé aux jeunes filles de la haute société et, longtemps, le voisinage se demanda comment cet être sans force ni résistance avait pu survivre à une telle tempête d’infections.
Il resta ses trois première année au lit. Jamais il ne vit la lumière du jour, muré dans l’ombre de sa chambre, veillé par sa mère à la torche. Cette carence de vitamine s’accentua par la venue de l’été et couvrit sa peau d’une constellation de boutons rouges, de squames sèches, de fétides inflammations en plaques arrondies.

L’art de la formule.

 Il avait cette fragilité endurante qu’on trouve chez les hommes voués à une mort précoce et que pourtant rien ne tue .

Le sort des soldats.

C’était un vieil officier de l’armée, né dans le siècle des philosophes, grand amateur de sciences, qui avait perdu une main lors de la prise d’Alger, un œil pendant le siège de Sébastopol, une jambe à la fin de la bataille de Malakoff et boitait de l’autre depuis qu’un cheval d’une demi-tonne s’était effondré sur son genou et dans les marécages de Crimée.

L’art du portrait.

Abel Pifre avait tout ce qui lui faisait défaut. Il parlait sans hésitation ni tremblement. Il marchait droit le menton haut. Sa veste était toujours serrée à la ceinture, ouverte sur la dentelle de son jabot, retenue par d’élégants boutons de manchette qui laissaient voir la finesse de ses poignets. Son pantalon avait la raie du milieu pliée au cordeau et descendait jusqu’à de luisantes bottines vernies qui le forçaient à marcher lentement avec une distinction délicate. Coquet, intelligent, il ne portait que des cravates de mousseline, des chemises en toile de baptiste et une canne au pommeau orné d’un soleil qui donnait à tout ce qu’il faisait un caractère étincelant. Il parlait comme il faut, en homme ayant vécu. Sa conversation était pétillante parsemée de mots anglais comme s’il revenait de voyage, ornée de plaisanteries savantes et de légèretés pudiques, si bien que lorsque Mouchot le rencontra pour la première fois, il pensa qu’Abel Pifre était ce en quoi le soleil s’il s’était fait homme, ce serait incarné.
Édition Les Escales. Traduit de l’italien par Anaïs Bouteille-Bokobza
Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard 
Le portrait du père violent et dominant sa famille de toute ses colères et de ses mots assassins est criant de vérité. Il s’agit certainement d’une part de l’enfance de l’autrice qui par se livre se libère du poids de son enfance à Bari capitale des Pouilles italiennes. On sent tout le poids de la souffrance des femmes italiennes qui subissent leur sort avec courage. La petite Rosa vit dans l’amour de sa mère et la terreur que son père éclate d’une colère incontrôlée. Elle s’éveille à la sexualité dans un quartier où règne la prostitution. Elle reproduira , hélas le schéma familial et son Marco s’avèrera un homme dur et violent. Mais à la différence de sa mère elle réussira à s’en séparer.
Le roman décrit bien la pauvreté des villes du Sud de l’Italie et la difficulté de mener une vie correcte quand la misère vous tient dans ses filets. C’est vraiment le meilleur aspect du roman.
Mais je suis peu sensible au côté « rédemption par l’écriture », cette impudeur me gêne surtout dans la deuxième partie quand on voit cette jeune femme s’accrocher à un homme qui ne lui apporte rien. L’écrivaine n’a pas réussi à m’intéresser , mais cela vient du peu de goût que j’ai pour l’auto -apitoiement sur son propre sort. C’est sans doute vrai que c’est compliqué de ne pas reproduire le schéma parental mais cela ne justifie pas pour autant le fait d’en faire le récit. Je sauve de ce roman toute la première partie de son enfance à Bari dans les quartiers miséreux, on vit au plus près de ces familles qui cherchent par tous les moyens de s’en sortir. C’était mon dernier roman italien proposé par mon club de lecture, j’ai lu de bien beaux romans même si celui-ci m’a moins intéressée.

Citations

J’aime bien ce passage :

 Il s’est bien habillé pour l’occasion il a plaqué ses cheveux en arrière pour dégager son front large et il porte un parfum agréable, nouveau. Moi aussi, j’ai fait un effort, j’ai sorti une vieille robe à fleurs qui me serre un peu, je me suis coiffée et j’ai mis des chaussures neuves. Sans véritable raison, en réalité. Peut-être que les amours terminées méritent encore une belle tenue.

Alors que son père vient d’être cruel avec son amoureux :

Ne t’inquiète pas Rosa. S’il t’aime il ne se laissera pas impressionner par les discours de papa, m’as-tu dit. 
T’en souviens-tu maman ? Moi, très bien, de même que de la douceur de ta main qui me caressait les cheveux d’un geste prudent et léger ; peut-être avais-tu peur que je te repousse. Tu parlais toujours avec une émotion qui te ramenait aux mêmes sujets : le mauvais caractère de papa,  » Il est comme ça on y peut rien », le sort inéluctable du quartier, « C’est comme ça, on ne peut pas le changer « . Tu tressais les fils de notre destin dans un mouvement circulaire auquel on n’échappait jamais