Édition Plon, feux croisés . Traduit de l’anglais Aurélie de Maupéou

Tout est dit avec ces deux coquillages : ce roman n’était pas pour moi ! Pourtant Keisha en avait parlé avec un tel enthousiasme, je n’avais donc aucun doute sur mon plaisir de lecture. C’est peu dire que je me suis ennuyée avec cette pauvre Frances . Cependant, tout le long de la lecture, je me tançais en me disant : « Si Keisha a aimé c’est qu’il y a quelque chose que tu ne vois pas allez continue ! ». Mais tout est triste fade et convenu dans ce roman et j’ai été bien soulagée de le terminer et d’aller bien vite m’en débarrasser. Voici le sujet : Frances est correctrice dans un journal, mais là il ne se passe rien mais alors, rien du tout. Si vous voulez en savoir plus sur le monde de la correction et vous amuser un peu, lisez l’excellent livre de Muriel Gilbert « Au bonheur des Fautes » . Les parents de Frances sont « ordinaires » et leur fille les aime en les méprisant quelque peu. Ce sont les quelques soirées chez eux qui sauvent un peu le livre, je suis toujours intéressée par les différences sociales et les préjugés qui vont avec. Frances est le témoin d’un accident mortel pour la femme d’un écrivain de renom Laurence Kyte. Commence alors les manœuvres pour cette pauvre fille un peu terne pour se faire aimer du grand écrivain. Et tant pis pour vous, je vais raconter la fin (ce livre m’a tellement énervée !) : OUI la correctrice anonyme va devenir l’épouse du grand Laurence Kyte . Elle va savoir se rendre indispensable pour les deux enfants dans un premier temps, puis saura se faire aimer par leur père. Tout est prévisible dans ce roman et jamais mon attention n’a été captée, il est possible que je n’étais pas d’humeur à me laisser porter par ce roman qui vaut sans doute mieux que ce que j’ai éprouvé. Et surtout, je vous recommande chaudement le blog de Keisha chez qui je trouve souvent des suggestions de lectures merveilleuses !

 

Citations

Le jardin de sa mère

C’est un jardin de très bon goût. Avec un minimum de couleur et d’odeur – ma mère considère que la plupart des fleurs sont vulgaires, or elle a une terreur profonde de la vulgarité, comme si celle-ci pouvait l’attaquer par surprise dans une ruelle sombre – mais une abondance de textures et de formes. À cette époque de l’année, tandis que le crépuscule s’épaissit, il semble plus triste encore que d’habitude.

Humour

Parfois, tout au moins en ce qui concerne ma mère, je soupçonne que le but réel d’avoir une famille consiste à avoir un sujet de conversation tout prêt quand elle croise madame Tucker au supermarché.

J’ai découvert ce roman sur un blog que je lis régulièrement « La souris jaune« . J’aime bien ce blog car j’y trouve des livres qui ne sont pas dans l’actualité littéraire. La Souris Jaune, fouine dans tous les lieux où l’on trouve des livres pas chers ou dans les médiathèques pour assouvir ses envies de lecture. Ce roman avait tout pour me plaire, car il parle d’un sujet très peu traité : que sont devenus les traces de la présence juive en Egypte ? Le début m’a enchantée et je me suis installée pour faire un voyage original dans un pays où je n’irai sans doute jamais. Mais lorsque l’héroïne, Camélia arrive en Egypte, très vite, j’ai déchanté. Elle arrive dans ce pays avec l’argent de sa mère et des ses tantes pour faire construire une sépulture digne des attentes des sœurs de la morte, Carlotta . Carlotta est restée en Egypte et n’a pas suivi ses sœurs en France. Cela aussi m’intéressait, celle qu’on surnommait « la juive au nombril arabe » a mené une vie hors du commun. Mais il en est si peu question ou d’une façon si embrouillée que je me suis vite lassée. Vers la page 200 d’un roman qui en compte 350, j’ai parcouru en diagonal un récit qui ‘arrivait pas à retenir mon attention. Je n’ai rien compris aux aventures amoureuses de Camélia qui a des relation sexuelles avec l’homme qui la reçoit et qui l’oblige à l’appeler « papa ». Ses rencontres avec les pensionnaires de l’ancienne demeure qui étaient la maison de retraite de sa tante sont totalement étranges. On sent que l’auteur veut nous faire vivre à la fois la décrépitude de ce monde ancien et celui de la vieillesse , j’ai parfois pensé à la famille « Mangeclous » d’Albert Cohen, mais le récit n’arrivait pas à se construire. Comme « la souris jaune » j’ai bien aimé les incessants coups de fil de Lounna la mère juive plus vraie que nature de Camélia. Et puis je dois souligner la scène de départ dans l’aéroport qui est vraiment très drôle. Au moment où j’écris ce billet, alors que je ne peux pas dire que j’ai lu jusqu’au bout ce roman, j’espère que plusieurs d’entre vous l’avez lu et que vous saurez m’expliquer ce que vous avez aimé dans la partie égyptienne

 

 

Citations

Quand j’ai cru à la première page que je lirai ce roman jusqu’au bout

Morte Carlotta ? Morte la sœur aînée née de la même mère ? Maman s’échauffait . Le mystère de la mort la laissait sans voix hurlait-elle, et je sus qu’elle criait en montrant toutes ses dents au téléphone. Les morts vont vite ! Le monde s’en va. ! Quoi ! apprendre la funeste nouvelles aujourd’hui samedi ? Le seul jour consacré à la partie de bridge hebdomadaire ? Voilà bien la chance de maman ! Tant pis, Dieu était grand, ce qu’il donnait d’une main il le reprenait de l’autre, bientôt il prendrait tout des deux mains…. Maman sentait approcher sa dernière heure.

Toujours sa mère

Sa liaison avec le producteur Rachid « Un musulman qui n’est même pas chrétien » fulminait Maman.

 La scène de l’aéroport sa fille de 26 ans doit écouter les conseils de ses tantes, comme tous les voyageurs car elles parlent très fort.

Je vous la confie, dit maman à l’hôtesse de l’air en charge des bagages. C’est ma fille unique et je l’aime. Surveillez la bien, elle a l’air grande du dehors mais dans sa tête elle est très petite. Il marche bien votre avion ?
Les voyageurs, écartés de force du guichet, parurent fort intéressés par les conseils des dames en noir.
– Il n’y a pas, criait tante Marcelle, tu te débrouilles et tu pousses, mais tu prends place dans la queue, pour la vie sauve si l’avion s’écrabouille en mer, Dieu préserve !
– Tu mettras immédiatement le gilet gonflant, renchérissait tante Fortunée.
-Tu n’iras pas à la toilette suspendue, disait tante Melba à cause de l’aspiration, sait-on jamais. Il n’y a pas de cannibales, au moins ? Elle jeta alentours des regard courroucé. Ah chères, j’ai lu l’article abominable, les uns mangeant les autres et tous commençant par les plus jeunes !
– Aucune boisson alcoolisée, vociférait Maman on te connaît, un verre, deux verres, trois et tu t’endors, quatre tu manques l’arrêt du Caire.
– Camélia chérie, n’oublie pas de sucer le bonbon de l’envol, conseillait tante Fortunée sinon tu retourneras tes vomissements sur les voisins.
-Tu mangeras tout, approuvait maman. Ça fait passer le temps c’est compris dans le prix, mon Dieu comme tout augmente.
– Si tu n’aimes pas la confiture disait tante Melba, garde-moi le petit pot. Ça fait dînette, on voyage par le palais, et le goût est très français.
-Boucle-la Melba, se fâchait tante Marcelle, sommes-nous des mendiants ? Tu ne vois pas que les oreilles françaises nous écoutent

Vraie question

Ils ont vendu le patrimoine des ancêtres. Un rouleau sacré par-ci, une relique du Temple de Jérusalem par là, une synagogue, quelques belles maisons du quartier juif. Les Américains raffolent des marques du passé. Ils ont acheté. Qu’est-ce qu’ils n’ont pas acheté. Lequel est le plus coupable ? Celui qui achète ou celui qui vend ?

Le cimetière juif du Caire

Plus loin, deux jeunes femmes étendaient du linge entre les piliers de la nef consacrée en 1912 à un certain Isaac Pinto, le délivré, selon l’épitaphe, d’une longue vie de douleur et de solitude. À deux pas de là, un vieillard arrosait d’urine la dalle de Léda Gattegno (1903 1933) trop tôt arrachée à son juge d’époux, lequel avait mis une vingtaine d’années à la rejoindre sous le caveau où fleurissait la menthe sauvage et le persil. Des fèves cuisaient à gros bouillons dans la vasque funéraire de Simon Francis Bey, fumet exquis qui partait chatouiller les narines d’un autre pair d’Égypte, le baron Mustapha Lévy, un grand philanthrope , dit Sultana, il a beaucoup construit pour les pauvres, décédé en l’an 1948 et dont le mausolée, un petit palais baroque, s’envahissait de volailles.

Édition Belfond Traduit de l’américain par Oristelle Bonis

 

Désolée Yv nous ne serons pas d’accord pour cette lecture. Certes les précisions techniques sur les incendies sont intéressantes, certes à la fin on sait tout sur les fraudes divers et variées aux assurances. Mais ! il y a pour moi un gros « mais », la cascade des malversations et des crimes auxquels nous assistons rendent ce récit totalement indigeste. Je suis certaine que cet auteur a un public et des lecteurs qui se laissent emporter par sa fougue narrative . Ils n’ont pas peur de lire des récits sur les procédés du KGB et de la mafia russe, ils savent que tout le monde peut être corrompu : il suffit d’y mettre le prix. J’avais vraiment l’impression d’être dans une série américaine où on ballade le spectateur d’épisode en épisode avec un gradation dans l’horreur et l’abject. Je ne sais pas quel ressort le romancier a oublié de mettre en action dans cette intrigue. La corruption, de la police et des assureurs, les avocats véreux qui s’engraissent sur le dos des malfrats, un médecin totalement incompétent qui ne vit que pour les mallettes d’argent que la mafia dépose à son cabinet. Et puis, l’enquête de cet ancien flic passé aux enquêtes pour son assurance, qui est le seul à vouloir punir le méchant .
Bref un roman qui m’est tombé des mains mais pourquoi me suis-je laissé aller à lire un tel livre Yv l’annonçait bien comme un thriller ? Seulement voila, souvent la Californie flambe – comme l’été dernier – et je pensais, donc, en savoir davantage sur ces feux qui ravagent une si belle région.

Citations

 

Portrait du flic ripoux

Une des raisons, parmi une tripotée d’autres, pour lesquelles Jack le déteste à ce point est que Bentley, ce cossard de première, n’aime pas faire son boulot. Pour Bentley, n’importe quel incendie est a priori d’origine accidentelle. S’il s’était trouvé à Dresde après les bombardements, il aurait découvert à coup sûr une couverture chauffante défectueuses sous les décombres. Histoire de limiter au minimum la corvée de paperasse et les témoignages sous serment devant le tribunal. En tant qu’expert en incendie, Bentley et un pêcheur à la ligne hors pair.

Genre de sentences qui m’agacent

Il y a deux types d’amour : celui qui passe et celui qui dure. D’un côté, l’amour qui satisfait le corps et le cœur, l’amour qui passe, de l’autre l’amour qui nourrit l’âme, l’amour qui dure.
 Le mobilier ancien est le seul objet d’amour capable de nourrir l’âme de Nicky.

 

 

Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard.

Édition Les Éditions de Minuit

Ce roman prend comme point de départ l’installation de deux Parisiens dans une proche banlieue et dans un petit ensemble « écoquartier ». Leur bonheur sera de courte durée car les voisins vont s’avérer plus pénibles à supporter qu’ils ne l’avaient imaginer. De plus, la construction de ce quartier n’échappe pas aux malfaçons habituelles et rendent assez vite la vie de tous les jours fort désagréables. En réalité ce roman est une satyre de tous les comportements à la mode autour de l’écologie et des clichés autour du « mieux vivre ensemble ». Je n’ai pas adhéré au projet de l’auteur qui ne m’a pas embarquée dans son histoire ni dans la description des personnages. Je m’explique assez mal pourquoi car le sujet aurait dû m’intéresser. Le côté décalé sans doute, et, l’accumulation des petits détails signifiants qui m’ont semblé assez lourds. Cela donne souvent cette impression quand on n’adhère pas à un roman. Beaucoup d’avis positifs sur ce livre qui permettront de se rendre compte que je suis passée à côté d’un roman qui a trouvé son public.

Géraldine ,par exemple avait bien aimé (sauf la fin).

 

Citations

La métaphore des soucis qui traverse le roman

Après quoi elle s’est penchée par la fenêtre pour admirer mes soucis. J’avais vraiment la main verte, s’est elle exclamée, il faudrait que je lui donne des conseils.
– Les soucis sont résistants, ai-je répondu, ils se relèvent du pire comme du meilleur.
Et nus avons ri. 

 

Le quartier devient invivable

J’ai laissé mon regard errer vers la fenêtre. Les trouées des canalisations béaient à ciel ouvert. Sous la chaleur, la boue craquelait en plaques assoiffées, pourtant le gazon demeurait irréductiblement vert. Il m’a semblé qu’on pourrait toujours en resté là, à mi-chemin de la résolution sans que la balance penche jamais d’un côté ni de l’autre.

 

 

Traduit de l’anglais (États-Unis) par Claude et Jean Demanuelli. Édition Cherche midi.

 

Livre critiqué dans le cadre du programme Masse Critique de Babelio

Ouf ! j’ai terminé cet énorme pavé de 560 pages ! Énorme : car je n’ai absolument pas apprécié cette lecture que je m’étais engagée à lire dans le cadre d’une masse critique de Babelio. Le sujet m’intéressait, j’avais compris que c’était un roman historique et qui devait me permettre de revivre la peste de Londres au XVII ° siècle – en période de pandémie cela me semblait une bonne idée que de se plonger dans des épidémies meurtrières du passé. Le roman se situe dans le milieu juif qui commençait tout juste à se réinstaller en Angleterre après les horreurs de l’inquisition en Espagne et au Portugal. Mais ce n’est pas du tout le thème le plus important du roman. L’auteure a voulu cerner ce qui aurait pu se passer à cette époque si une femme avait voulu se mêler d’écriture et de philosophie. Il s’agit donc d’une oeuvre d’une féministe qui veut faire comprendre la condition de la femme. D’ailleurs elle le dit clairement dans son interview que l’on peut lire à la fin du livre :

Question : Comment vous est venue l’idée de ce roman ? 
Réponse : Dans une chambre à soi, Virginia Woolf pose la question suivante : si William Shakespeare avait eu une sœur aussi douée que lui, quelle aurait été son sort ?
Elle apporte elle-même une réponse succincte à la question. « Elle mourut jeune … Hélas, elle n’écrivit jamais une ligne. « 
Woolf a raison bien sûr. C’était le sort le plus vraisemblable qui pouvait échoir à une femme de cette période douée d’un esprit développé. Les conditions dans lesquelles vivaient alors les femmes leur rendaient virtuellement impossible toute expression artistique ou intellectuelle.
La fiction romanesque commence par une découverte de manuscrits datant des années 1660, dans une très belle demeure du XVII° à Londres. Ensuite les chapitres se succèdent soit à Londres avec Esther au service d’un rabbin rendu aveugle par les tortures de l’inquisition, soit à Londres du XXI° siècle avec Helen Watt et son jeune assistant Aaron Levy. Les deux destinées sont construites en parallèles : Esther doit cacher à sa communauté qu’elle lit et écrit et même trahira son rabbin tant respecté pour pouvoir dialoguer avec Spinoza. Helen Watt est obligée de cacher ses découvertes le plus longtemps possible car personne, aujourd’hui encore, n’est prêt à admettre qu’une femme puisse atteindre un tel degré en matière philosophique. Toutes les deux sont dans l’urgence de la maladie, la peste pour Esther et la maladie de Parkinson qui ronge le cerveau d’Helen. Enfin les deux ont connu un véritable amour qui a bouleversé leurs certitudes. Ce roman décrit aussi l’ivresse de la découverte de vieux documents par des historiens et les rivalités du monde universitaire. Il décrit aussi les différences entre la froideur britannique et l’enthousiasme déplacé des américains.
Tout cela aurait pu m’intéresser mais je n’ai jamais accroché à cette lecture qui a pourtant reçu toutes les louanges de la presse américaine. La « construction étourdissante » dont parle la quatrième de couverture m’a semblé d’une lourdeur incroyable. Je vais peut-être me mettre à dos les féministes américaines mais je trouve le projet malhonnête. Certes, les femmes du XVII° étaient interdites de créations littéraires et artistiques et on peut supposer qu’une jeune fille de religion juive avait encore moins d’opportunités de se libérer des carcans de la tradition pour se permettre de philosopher avec Spinoza. Autant un exemple pris dans la réalité m’aurait intéressée mais inventer un tel personnage me semble vouloir faire correspondre l’idéologie de l’auteure à la réalité historique.
Quant-à la partie XXI° siècle, l’auteure met ses personnages dans des tensions qui rappellent celle des juifs ayant connu l’inquisition et la peste de Londres, et je n’y ai pas cru non plus, évidemment !
Et comme l’auteure essaie d’être dans la précision historique et psychologique la plus proche de ce qu’elle croit être la réalité, il lui faut presque six cent pages pour ne me convaincre ni dans l’histoire ancienne ni dans les conflits universitaires britanniques actuels . À ce roman trop bavard, je préfère et de loin la réponse lapidaire de Virginia Woolf. :
« Elle mourut jeune … Hélas, elle n’écrivit jamais une ligne. « 

 Citation

Les femmes juives au XVII° siècle

Je comprends très bien ton désir de l’étude, mais tu dois réfléchir au choix qui se présente à toi. Je ne peux pas faire comme si Dieu t’avait créée homme, et par conséquent capable de vivre de son esprit et de son savoir. Dieu a mis en nous des désirs innombrables. Mais nous les contrôlons pour pouvoir vivre. J’ai été obligé, pour ma part, de maîtriser mes propres désirs quand la perte de ma vue m’a interdit de devenir le savant que je voulais être, ou de fonder une famille. Je regrette vraiment, dit-il en baissant encore la voix, de t’avoir induite à croire que tu pourrais être une érudite. Tu en avais l’étoffe, cependant.

La fuite du Portugal , parole de la mère juive rebelle.

« Quand ma mère et moi nous sommes enfuies de Lisbonne, c’était pour sauver nos vies. Pas nos vies de juive. Nos vies, tout court. Nous nous sommes enfuies parce que même si nous ne récitions jamais une prière, même si ma mère et mes tantes allaient danser après leur festin du vendredi, même ainsi, les prêtres voulaient nous traîner dans leur chambre de torture. »

Dialogue en Israël au XX° siècle

« Donne-moi le nom d’un pays, n’importe lequel, et je te parlerai de l’époque où il ne pensait qu’à tuer les Juifs. Sais-tu que des nazis allaient recruter des paysans locaux en Russie pour les aider à noyer les Juifs, avant qu’ils aient trouvé des méthodes d’extermination plus efficaces ? Trente mille morts en deux jours à Babi Yar. » Un silence. 
 » Par noyade.
– Dror arrête.
-Je veux que tu essaies d’imaginer ça. 
Elle le regarda effarée.
 » Moi, je l’imagine. On ne peut pas noyer les gens en masse tu vois, il faut procéder individuellement. Peux-tu imaginer ce que c’est que de forcer un enfant, une femme, un homme à garder la tête sous l’eau ? Et pas juste une seconde comme si tu agissais par réflexe avant d’avoir eu le temps de réfléchir. Noyer quelqu’un suppose que tu le maintiennes … Il faut que tu continues jusqu’à l’extinction de toute vie » conclut-il d’une voix brisée.

 

Édition Stock.Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard.

Journaliste écrivain, l’auteur a vécu toute sa vie dans l’ignorance de ce qui s’est passé pour son grand-père Paol, ex-officier de l’Indochine et soldat décoré de la grande guerre 14/18. En 1943, il est arrêté par la Gestapo et partira dans le camp de Dora, là où les nazis ont construit les missiles V2. Son petit fils est obsédé par ce qui s’est vraiment passé pour son grand-père et il part dans une enquête qui essaie d’ouvrir toutes les portes vers la vérité que ni sa grand-mère ni son père n’ont voulu ouvrir.

Nous voyons donc le passé glorieux de cet officier de l’armée française à travers ses différentes affectations et aussi son passé de père d’une famille heureuse. Et puis, la guerre le retrouve en Bretagne et toute la famille est bouleversée par son arrestation, le départ en Angleterre du fils aîné et la mort de pneumonie de leur sœur. Le père de l’auteur, Pierre sera à jamais cet enfant blessé par ces morts. Puis nous suivons le trajet de Paol dans les prisons puis de sa mort à Bergen-Belsen. Le principal intérêt est de faire revivre l’horreur de Dora :

 

On apprendra même les raisons pour lesquelles cet homme a été arrêté et qui l’a dénoncé.

J’avoue n’avoir eu que peu d’intérêt pour ce livre même si j’ai bien compris pourquoi l’auteur a eu ce besoin impérieux de l’écrire. Entre ce besoin et l’intérêt du lecteur il y a une grand différence, je suis vraiment restée en dehors de ce livre de mémoires .

 

PS :

Ingannmic m’a fait remarquer qu’Aifelle était plus enthousiaste que moi à propos de ce roman.

 

Citations

Portrait

Il était devenu cet homme fiable, taciturne, mesuré en tout. Un père sur qui on pouvait compter, présent parmi les absents, tenace dans les incertitudes, mais qui ne demandait rien, ne s’apitoyait jamais ni sur les autres ni sur lui-même. Taiseux surtout.

Édition folio. Traduit de l’anglais (Canada) par Clélia Laventure 

Je cherche désespérément qui m’a donné la mauvaise idée d’acheter ce livre … Ce roman a sûrement de l’intérêt mais il n’est pas pour moi. Cependant, il pose de vraies questions sur le journalisme d’aujourd’hui et le goût pour le sensationnalisme. Mais pauvre petite Luocine ! Plonger dans le glauque et le pervers : tu n’as plus la force de rechercher la substantifique moelle à travers des corps torturés, violés, dévorés .. et j’en passe. J’ai donc lâchement abandonné Nathan et Noémie à la page 100 . L’un avec ses relations sexuelles avec une femme cancéreuse et l’autre à la recherche du philosophe français qui a tué et dévoré sa femme. Si la blogueur ou la blogueuse qui a aimé ce livre au point de me le faire acheter se reconnaît qu’elle ou qu’il me le dise, je mettrai volontiers un lien vers un avis plus courageux que le mien.

 

Citation

L’éthique journalistique

Naomi appartenait en quelque sorte à une autre génération que Nathan, plus récente, bien qu’ils aient le même âge. Nathan semblait avoir façonné son éthique journalistique à partir de vieux film sur les reporter de presse. Pour Naomi, la collecte d’infos et la récupération sur Internet était une forme absolument valable de journalisme, ne présentait aucun nuage déontologique sur son horizon en open source. Ne pas être photographié de manière quotidienne, même par soi-même, ne pas être enregistré ni filmé pour être dispersé dans les vents turbulents du net, c’était s’exposer à la non-existence. Elle savait qu’elle se montrait fourbe vis-à-vis du Dr Trinh en lui parlant de preuves, mais, si elle en étais consciente, sa tromperie avait pour unique effet de la faire se sentir plus professionnelle. Ainsi en allait le net, et c’était libérateur.

Édition Gallimard NRF, Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard.

Je me rends compte que je n’ai noté qu’un passage sur cet essai, c’est le signe du peu d’intérêt que j’ai ressenti à cette lecture. Jérôme Garcin est le gendre de Gérard Philip, toute la famille vit dans le souvenir de cet acteur qui émouvait tant ma grand-mère et ma mère. L’auteur veut nous faire revivre cette émotion. Je me souviens du livre de son épouse que j’avais lu à l’époque. Je m’en excuse mais je vais faire du mauvais esprit mais j’ai pensé en lisant ce livre : sur ce même sujet, on a eu sa femme, on a maintenant son gendre à quand les petits enfants ? Et puis malgré moi j’ai pensé aussi  : voici une mort qui rapporte … Je sais, c’est horrible mais c’est à l’image du vide que j’ai ressenti à cette lecture. J’ai quand même retenu trois choses, je trouve toujours aussi inadmissible qu’on lui ai caché son cancer. Je savais mais j’avais oublié que son père était un riche bourgeois compromis au moment de Vichy, Et j’ai appris aussi, que, pour lui, le plus grand homme du siècle était Lénine…. Une lecture donc tout à fait inutile même si, comme moi, vous avez aimé sa voix lisant « le Petit Prince » et racontant Mozart aux enfants.

Citation

La mort

C’est à Rodrigue, un Rodrigue au visage pâle, presque transparent, que, toute la journée, des visiteurs vont venir dire adieu. Comme si la tragédie de Corneille se prolongeait dans un post scriptum grandiose, il reçoit, couché sur son lit, dans la chambre en hauteur où l’on accède en montant quelques marches, à la manière d’un prince espagnol exposé dans la salle des audiences du palais Sévillan de l’Alcazar. Jamais la mort n’a été plus théâtrale.

Édition Acte Sud.Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard.

Quelle horreur ce roman. Il détruit une des rares valeurs à laquelle je crois depuis toujours : l’écriture. Pia Petersen a imaginé une histoire horrible et tout le long de cette lecture, je me demandais pourquoi elle a eu besoin d’imaginer cela. Un écrivain américain, Gary Montaigu vient de gagner un prestigieux prix littéraire aux États-Unis. À partir de là tout devient absurde car il accepte de participer à une émission de téléréalité qui se nomme  : « un écrivain un vrai ». Une équipe de télévision s’installe dans la maison de Gary et de sa femme Ruth. Mais au bout d’un mois ils ne supporte plus cette situation, il s’enferme chez lui dans le sous-sol et décide qu’il n’en peut plus qu’il ne peux même plus marcher, il ne se déplace qu’en fauteuil roulant.Il passe son temps à regarder une araignée et un mouche, c’est sans doute ce qui m’a le plus intéressée dans ce roman : comment remplir le vide par de tous petits détails. Le livre est construit comme un thriller, on sent l’ angoisse terrible du personnage qui s’est enfermé lui-même dans son sous-sol, il est comme la mouche qui va être prise pris dans la toile de l’araignée ; le suspens est assez bien raconté et effectivement la fin va être tragique. Les personnages féminins sont horribles sa femme est une arriviste qui vit sur du talent de son mari et une jeune femme journaliste qui ne rêve que d’aimer cet homme est tout aussi horrible qu’elle. En fait aucun personnage n’est positif, la société américaine est totalement stupide et ne pense qu’à la réussite télévisuelle. Bref c’est un monde d’horreur d’une tristesse infinie et j’espère que jamais une telle émission ne verra jamais le jour.

Même si ce roman et efficace , pour dénoncer « la télé-réalité » je ne comprends pas son utilité je pense qu’aucun écrivain ne se laisserait aller à une telle un tel voyeurisme et il y avait bien d’autres façons de dénoncer ces phénomènes de télévision que de choisir l’écriture qui est justement un acte individuel , et repose sur l’intime. Cette écrivaine Pia Peterson est d’origine danoise mais a choisi d’écrire en français ce que je trouve assez extraordinaire. Elle traite son sujet de façon efficace mais je ne lui ai pas trouvé un grand intérêt tant les personnages sont caricaturaux, la lecture m’a rendu tellement triste que j’aurais bien du mal à le recommander à tous les gens qui, comme moi, aiment la lecture.

Citation

L’animateur de la télé-réalité

Irrité, Miles boit une gorgée. Gary le défie. Persuadés d’être des créateurs, les écrivains se prennent décidément trop au sérieux comme s’ils étaient destinés à écrire et c’est vraiment n’importe quoi, voilà ce qu’il pense. Les scénaristes aussi écrivent mais ne se prennent pas pour des dieux, pas comme ces écrivains obtus qui pensent que leur travail s’inscrit dans une logique historique. Miles songe un bref instant qu’ils détestent plus que tout les écrivains.

 

 

Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard.

Édition STOCK

Après « le roi disait que j’étais le diable » voici donc la suite de la vie mouvementée d’Aliénor d’Aquitaine. Elle n’est plus la Reine de France , ni l’épouse du trop sage et trop pieux Louis VII, mais elle est Reine d’Angleterre et l’épouse du fougueux et cruel Henri Plantagenêt. « La révolte » dont il est question ici, est celle qu’elle a fomentée avec ses trois fils pour reprendre à Henri le trône de l’Angleterre. Cela lui vaudra d’être emprisonnée pendant quinze ans dans des donjons britanniques très « inhospitaliers » (En période de confinement, elle aurait peut-être eu des conseils à nous donner !). Mais elle en sortira et soutiendra ses fils qui ne cesseront, eux, de se faire la guerre. C’est une période incroyablement violente, trop pour moi c’est sûr et je n’arrive pas à voir dans Aliénor d’Aquitaine une féministe lettrée que l’auteure veut nous présenter. C’est une femme de pouvoir cruelle et calculatrice et rien ne l’arrête quand elle veut étendre son influence. En revanche, je suis prête à croire au portrait de Henri Plantagenêt, un homme d’action violent et déterminé. Le roman se présente comme un long monologue de leur fils Richard (Cœur de Lion) qu’il adresse à sa mère. Si cette période m’intéressait, je crois que je préférerais lire l’oeuvre d’un historien, je sens trop dans ce récit l’envie de l’auteure de présenter Aliénor comme une femme moderne « féministe ». Cela n’enlève rien au style très alerte de cette auteure mon peu de goût pour ce roman en dit beaucoup sur mon dégoût des scènes de batailles successive où on embroche, on viole, on assassine allègrement.

 

Citations

Tout oppose le roi de France, Louis VII à Aliénor

Blois s’apprêtait à fêter les Rameaux. Ma mère se réjouit. Durant ces années de mariage, au côté d’un Louis si pieux, son sang d’Aquitaine a failli s’assécher. Il réclamait la foule, la musique, les façades décorées. Il était malade de calme. Mais demain, ma mère se glissera au milieu des rondes et boira du vin.

Une belle tempête

 Les marins implorent le ciel, les yeux mouillés de pluie. La mer joue avec le vaisseau comme une balle. Les vagues se dressent, s’abattent et balaient le pont telle une langue blanche surgit des tréfonds . On tombe, s’agrippe, on disparaît. Un marin hurle. Il se balance le long de la coque, son pied coincé dans un cordage la tête en bas. Des lames d’eau frappe sa silhouette, il agite les bras puis devient pantin mou, renversé, qui fait de grands allers-retours au bout de sa corde, et ce mouvement répond à la danse des tonneaux sur le pont qui roulent d’avant en arrière. Autour, dans la vapeur grise, on ne voit rien, mais tout est bruit. On jurerait que le vent ricane, le ciel rugit de joie. Le bois grince tant qu’il semble crier, la coque résonne des hennissements affolés des chevaux. La cale du bateau inondée, recrache les outils des charpentiers. Il faut éviter l’avancée fulgurante des scies, invisible dans les remous, ainsi que celles des clous. À la proue, les bannières tordues de vent rappellent la trace dérisoire d’un prestige. Soudain les nuages s’écartent et découvrent une lune pareille à un œil blanc et fixe. Chacun se tait, figé dans cette clarté sinistre. Puis les brumes se referment comme une bouche, l’obscurité tombe et la tempête reprend.

Genre de scènes « sympathique »

Nous contourneront l’abbaye de Fontevraud que certains voudraient piller, j’entends les mercenaires comparer cette abbaye à une orgie car elle est mixte, hommes et femmes y vivent ensemble, « de quoi se régaler l’heure des messes », ricanent les hommes. Mercadier essaie discrètement de les faire taire. Trop tard. Je remonte les rangs. Le plaisantin est facile à repérer. Il transpire. Je prends le temps de l’observer, puis de sortir mon épée. Elle glisse lentement le long de sa tante ruisselants. D’un seul coup, elle coupe son oreille. Le mercenaire hurle et se plie sur son cheval. Je tourne bride en veillant à ce que les sabots marchent sur l’organe sanglant. Je reprends ma place devant les troupes. Piller Fontevraud ! Ces guerriers ignorent donc que ma mère veut y être enterrée ? Il est hors de question d’y toucher.
 Je lance le départ. Ille chevaux s’ébranlent derrière moi. Ce grondement est une sève, rage et joie mêlées. Mercadier exulte. Un chant monte en puissance.
J’aime quand les coureurs
 Font fuir gens et troupeaux
Et j’aime quand je vois après eux
Venir les venir les gens d’armes…
 Mon épée cogne ma cuisse à chaque foulée, battements d’acier qui rythme ma vie, Au son d’un air gaillard repris par des ogres.

Les souvenirs d’une reine enfermée pendant quinze ans

 Mais je ne dois pas me laisser distraire. La mémoire est un soldat aux jambes maigres et infatigable. Elle attaque la nuit. Inutile de la fuir. Elle grimpe vos murs et rampe sous vos portes. Elle agit sans haine, avec la lenteur sereine de celle qui connaît ses droits. Qu’importe que son scintillement ressemble au robe des fées. Le dormeur, lui, ne peut plus bouger, et se sent gagné par le froid.