Édition le livre de poche jeunesse, 2021, 2022, janvier 2023, octobre 2023.

 

Tous les étés, depuis quatre ans, je lis un tome de ces romans à Arthur et Clémentine, ils avaient 6 et 4 ans le premier été, ils ont immédiatement adoré le premier roman. Dans l’internat de l’île aux Cigales, une femme appelée « La Cigale » recrute 5 enfants avec un don ou une passion, elle les choisit pour qu’ils puissent suivre des études aux collèges en internat sur une île au large de Cherbourg et améliorer leur don avec un professeur particulier. Nous suivrons la scolarité au collège, de Marguerite, violoncelliste, Agostino, peintre et guitariste, Caleb, math et piano, Nordine sportif et joueur de Derbouka et Cerise chanteuse.

Dans le premier tome, on verra les enfants résoudre une énigme à propos d’une enfant juive qui a été cachée dans ce manoir pendant la deuxième guerre mondiale, dans le deuxième tome ils feront la connaissance d’Annie la nièce de la Cigale et cuisinière extraordinaire, mais aussi d’Omid un jeune réfugié Afghan, dans le troisième tome les enfants se lanceront dans la création d’un disque, et enfin dans le dernier tome, alors que leur île a été détruite par un ouragan, les « tigres » (nom de leur groupe de musique) essaient de gagner un tremplin pour obtenir une somme d’argent importante permettant de reconstruire leur cher internat. Des personnages secondaires souvent très intéressants sont aux côtés des enfants.

Beaucoup de thèmes sont abordés, l’adolescence et les problèmes familiaux, la shoah, le réchauffement climatique, la place des handicapés dans notre société, l’exil des émigrés, et pendant tous les tomes la création musicale, il faut dire que l’autrice est aussi chanteuse et connaît bien les difficultés des groupes de musique.

Pour expliquer les cinq coquillages je vais laisser la parole aux enfants :

Est ce que vous avez aimé que je vous lise ces romans ? et pourquoi ?

Clémentine 8 ans :

Oui, parce qu’ils permettent d’apprendre beaucoup de choses sur la musique.

Arthur 10 ans

Oui, je suis d’accord avec Clémentine pour la musique , mais surtout les histoires sont très bien racontées .

 

Quel est ton personnage préféré ? Pourquoi ?

Arthur

Caleb, parce qu’il fait des math et moi j’adore les math et qu’il fait du piano et j’aime bien le piano moi aussi.

 

Clémentine

Mia, parce qu’elle a un petit frère adorable, moi j’en ai un grand et que j’adore, comme elle, faire de la danse.

 

Est ce que les quatre tomes sont très différents ?

Clémentine

Les tomes ne se répètent pas, les histoires sont différentes même si on suit les mêmes collégiens.

 

Arthur

Chaque roman est vraiment différent.

 

Est ce que tu aimerais aller au collège de l’île aux Cigales ?

Arthur

Oui, parce que le travail est très rigoureux et que je pourrais choisir la spécialité mathématiques

Clémentine

Oui j’aimerais aller à cet internat car cela permet de faire évoluer nos talents et moi je choisirais la gymnastique.

Que pourrais-tu dire pour donner envie à d’autres enfants de lire cette série ?

Clémentine (8 ans !)

Comme ça se passe au collège, cela pourrait apprendre aux collégiens à vivre des moment difficiles et à devenir plus autonomes.

 

Arthur

Je suis jeune et j’ai beaucoup aimé, ces romans peuvent être lus par des enfants plus jeunes que des collégiens car l’auteur écrit bien et on peut tout comprendre. Cela nous permet de savoir comment ça se passe pour faire de la musique et surtout à devenir plus solidaires entre enfants.

 

 

 

 


Édition Flammarion, 284 pages, mars 2024.

Comme vous pouvez le voir sur ma photo ce roman a reçu 3 coups de cœur de notre club, cela veut dire que toutes les lectrices lui en avait attribué un, aucune n’avait de réserves. Je l’ai donc lu après elles, moi aussi, car elles en parlaient bien. Je pense que j’aurais émis une réserve, car je trouve une histoire un peu simple. En même temps, sous cette apparente simplicité du quotidien vie se cache beaucoup d’analyses exactes à propos des rapports humains aujourd’hui.

J’ai aimé le procédé de départ : elle répond à une lettre qu’elle aurait écrite quand elle avait seize ans, vingt deux ans plus tard elle répond à cette toute jeune fille. Dans la vie comme dans le roman, la narratrice a écrit un roman l’année de seize ans « Respire » qui a connu un succès immédiat, l’adulte qu’elle est aujourd’hui, sait que les médias s’emballent facilement et respectent peu quelqu’un qui ne sait pas se défendre. C’était son cas, elle a été la coqueluche des plateaux de télé, avant d’être traitée de « petite dinde » par son agent littéraire. La description du monde de l’édition, qui veut pousser les auteurs dans des succès rapides, est implacable et sans doute exacte. La jeune écrivaine se bat dans une relation amoureuse nocive, son amoureux la dévalorise sans cesse, et dans des amitiés féminines où la jalousie n’est pas absente. Elle raconte aussi la difficulté pour une femme d’être respectée, on retrouve ici tout ce qui fait notre actualité : un féminicide, une relation sexuelle pas vraiment consenti avec un vieux bien sûr de son pouvoir, une jeune femme qui fait un mariage de rêve mais lutte contre chaque gramme en trop. C’est peut être de là que ma réserve est née, c’est peut être un peu trop, mais Anne-Sophie Brasme le raconte très bien.
J’ai beaucoup aimé que finalement, elle s’épanouisse dans le métier de professeure de lettres au lycée, elle en parle très bien. Mais surtout j’aime le message que contient ce livre à l’adresse des jeunes, « devenez ce que vous voulez être, ne laisser personne vous définir ».

Pourquoi une petite réserve ? très légère d’ailleurs, peut-être une trop grande proximité avec ce récit. Je me trouve bien sévère mais je n’arrive pas à lui mettre cinq coquillages.

 

Extraits

Début .

Entre mes seize et dix huit ans, juste avant la parution du « Premier Roman » , j’ai tenu un cahier.
 Ce n’était pas vraiment un journal ni un cahier d’histoire comme ceux que je remplissais depuis le primaire. Cela ressemblait plutôt à une collection. Une superposition hétéroclite de fragments – citations, photos, collages, réflexions diverses – qui mises bout à bout, constitue désormais une sorte de portrait cubiste de mon adolescence.

L’imposture .

 L’imposture me colle à la peau. C’est à elle que je dois mes timides avancées dans l’écriture, malgré un début tonitruant. À elle que je dois mes relations toxiques. mon idolâtrie pour des êtres que je croyais supérieurs. Cette imposture, c’est cette voie encore qui me murmure en ce moment même :  » Mais pour qui tu te prends ? Qui es-tu pour raconter ta vie ? » Même à trente-huit ans, je ne peux m’empêcher de lui donner raison.

La Sorbonne, licence de lettres.

Tes profs de fac sont des pontes, ils ont écrit des livres que tu étudies. Beaucoup d’hommes, blancs, sexagénaires, alors que les trois quarts de l’amphi sont des jeunes filles. Tu te demandes ce qui se passe entre la première année de fac et le statut de professeur d’université pour que tant de femmes renoncent à leurs ambitions. Tu n’as pas encore entendu parler du « syndrome de l’imposteur », tu ne sais pas encore que le brio n’y est pour rien dans cette absence de représentativité, que c’est une question politique.

Le plaisir d’être professeure.

Toi qui n’a jamais su prendre la parole en public, toi qui n’as pour toi-même aucune estime, tu t’étonneras de faire cours avec autant d’aisance. Devant ces adolescents assis devant toi, tu te trouveras une épaisseur jamais soupçonnée. Toi l’austère, la solitaire, tu t’apprendras énergique, enthousiaste, parfois même drôle. Tu oublieras les heures de route quotidiennes, les paysages métalliques, les couloirs gris aux odeurs de cantine. La classe sera ton refuge. L’espace que tu n’auras jamais rue Taison, il est là, le voici  : dans la salle 240, où pendant des centaines d’heures tu commenteras les textes de Flaubert de Camus ou de Duras. C’est là que tu seras toi-même. Sans inquisiteur. Sans faux-semblants. Là que ton cœur recommencera à frapper, sans craindre les défis, les gamins des abusés, les misères sociales, le niveau parfois désastreux. Là te que tu te découvrira capitaine capable d’emmener loin d’autres que toi.

Liste des enseignants titulaires du département Littérature et Linguistique Françaises et Latines Sorbonne

Juste pour montrer que les temps ont bien changé il y a 40 femmes, 21 hommes , deux Dominique (hommes ou femmes ?)

 


Édition Points

 

Le foot n’est pas une option. Le latin. Le grec, sont des options. Le foot c’est obligé. Si tu es un garçon. 

 

Il est des livres qui donnent immédiatement envie de lire tout ce qu’a écrit l’auteur. Pourquoi ? parce que j’ai lu avec un tel regret la dernière phrase du livre qui pourtant est une fin superbe à ce récit. Je sais que je peux relire encore une fois la trajectoire de ce personnage qui réalisera un de ses plus grands rêves : voir une fille à poil ! Mais j’aimerais aussi découvrir ce qu’il a écrit d’autre, pour voir si je retrouve le même plaisir.

Tout m’a plu dans ce récit , la naïveté de l’enfance, l’incompréhension du monde des adultes en particulier celui de ses parents, ses questions sur l’existence de Dieu, puis le mal-être de l’adolescence, son inadéquation au système scolaire.
Cet enfant, fils donc d’un professeur de lycée, sent que sa mère va mal, elle est souvent triste, et son père va passer du statut du Dieu qui sait tout à celui du père dépassé qui ne comprend pas ce fils qui lui même ne sait plus très bien ce qu’il veut. La naissance de son petit frère est compliqué pour lui, car il semble réussir là où lui ne fait que se poser des questions.
Une question qui revient à plusieurs reprises dans ce roman : Pourquoi Dieu a-t-il demandé à Abraham de tuer son fils ? Est ce que son père l’aurait, lui aussi, sacrifié si Dieu le lui demandait ?

Tout aussi important ou presque, comment devenir bon au foot, car à Saint-Étienne dans ces années là, le foot « ce n’était pas une option », c’est lui qui le dit. Il va y arriver, il va réussir aussi à ne plus croire en Dieu mais surtout il va réussir à approcher une fille, la plus belle du monde, même si elle ne porte pas de porte-jarretelles. Elle va surpasser les images de la Redoute et c’est tant mieux pour lui !

Évidemment, un tel roman ne tient que par le style : cet auteur est à la fois drôle et tendre et il sait raconter aussi bien l’insouciance de l’enfance que les tourments de l’adolescences. Je conseille à tous ceux (et à toutes celles) qui se sont ennuyés à 17 ans dans une ville de province, de lire les déambulations du personnage dans les rues de Saint -Étienne, je serai bien surprise qu’ils ne s’y reconnaissent pas.

 

 

Extraits

Début.

Quand j’étais enfant je trouvais tout normal. Ma mère m’enfermait régulièrement dans la cave dans le noir complet. Je trouvais ça normal.

Sympa.

Lina ma petite cousine me dépassait d’une tête. C’est une particularité des filles, je le découvrais : elles ont des cheveux longs, elles portent des jupes et des fois, elles sont plus grandes même quand elles sont plus jeunes. Les filles ne font rien comme tout le monde.

Les disques.

 Sur les disques de mes parents il y avait parfois un personnage qui avait l’air de revenir d’un enterrement, habillé en noir et qui ne rigolait pas. Sur les pochettes de Lina envoyer toujours des barbus colorés et des filles aux cheveux longs avec des foulards partout.

Les majuscules.

 Mon père m’aidait à faire mes devoirs. À ce moment là ça voulait dire faire des lignes d’écriture, pas toujours des trucs utiles, par exemple les lignes de k majuscules. Je ne connais aucun adulte capable d’exécuter correctement un k majuscule en cursive, et pour être honnête ça ne sert pas souvent.

Le désir de plaire à son père.

 Quand il m’expliquait je levai les yeux sur lui et je les ouvrais en grand, je voulais qu’il voie comme j’étais attentif. Je voulais qu’il reste là dans la chambre, avec moi, à m’expliquer. Je faisais tellement d’effort pour avoir l’air d’écouter ce que la plupart du temps je n’entendais rien de ce qu’il me disait.

Aller sur la lune.

 Quand Neil Armstrong met le pied sur la Lune en 69, je ne suis pas très impressionné. En fait des trouve ça assez normale je lis « Guy L’Éclair » depuis que je suis tout petit, j’ai toujours vécu au milieu des fusées, des Skorpies et des planètes lointaines. Je suis né dans un monde de science-fiction. La Nasa est très en retard sur moi.

Le mépris de son père pour les BD.

– Il faut lire des livres. Des vrais livres, pas ces âneries dessinées.
 Son mépris était aussi lisible que s’il avait arboré des peintures de guerre sur la figure. Qu’est-ce que je pouvais dire ? Cétait un excellent album en plus, « Les Pirates du désert ». Hubinon commençait à trouver son style, plus académique, mais aussi plus étrange, que ses modèles américains.
Des vrais livres. Évidemment, ce n’était pas compliqué, dans cette maison. Il y en avait partout. On pouvait se demander pourquoi je persistais à lire « Tif et Tondu » de préférence à Tolstoï.

Qu’est ce que tu vas devenir ?

 C’était une drôle de question. Je n’avais jamais pensé que j’étais censé devenir quelque chose. Le monde des adultes ne ressemblait pas à un avenir possible. Je ne pouvais pas devenir kiné, comme mon kiné ou pharmacien. Et surtout pas prof. Les adultes étaient une race à part. Leurs petites vies prosaïques et monotones, leur calvitie, leur embonpoint, leurs conversations creuses et répétitives, sur le temps pourri qu’on avait et que fait le gouvernement, ils ne faisaient pas envie.


Éditions Allary. 

Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard.

 

 

Un roman très étonnant dont le sujet est la souffrance des jeunes adolescents soignés dans des centres psychiatriques.
On commence le récit avec Jérôme, un trentenaire que sa femme Léa va quitter car il ne veut pas d’enfants.
Il lui faut retourner vers son enfance pour expliquer pourquoi il ne peut pas avoir d’enfant et pourquoi « une fille ce serait pire ». Lorsqu’il a dû être interné dans un centre, il y a rencontré une jeune fille Colette dont il est immédiatement tombé amoureux. Hélas ! elle se suicidera et lui devra continuer sa vie. Il a réussi à vaincre ses démons et à vivre.
La souffrance de ces jeunes, est très bien racontée . On ressort de ce livre avec plein d’interrogations et une série de citations dont on voudrait se souvenir à jamais.
L’auteur dans une interview dit que le système capitaliste est responsable de cette souffrance . Je n’en suis pas du tout sûre mais même si cela le semble inexact cela ne m’a pas empêchée pas d’avoir été très intéressée par ce texte.
Citations que j’aime et qui ont aidé Jérôme à se sortir de son mal être d’adolescent
Romain. Gary :
La tendresse a des secondes qui battent plus lentement que les autres.
Mark Twain :
Chaque fois que vous vous retrouvez du côté de la majorité, il est temps de vous, arrêter et de réfléchir.
Steinbeck :
La force est d’aimer le faible

Extraits

Début .

Le mot le plus utilisé dans une conversation entre deux êtres humains est « Je . La photo la plus likée sur Instagram est celle d’un œuf. Selon Amazon, les livres les plus consultés sont la bible et la biographie de Steve Jobs.

Un moment très fort du livre quand il décrit les cinq « dragons voici le premier , ils commencent tous parce ne savais pas » :

 Je les jugeais parce que j’ignorais tout.
Je ne savais pas que la rousse famélique qui regarder ses pieds s’appelait Vinciane, qu’elle avait seize ans et de bonnes raisons de ne pas lever les yeux. J’ignorais qu’après la mort de sa mère, son père pressé de pouvoir baiser sa nouvelle copine sans avoir a étouffer ses soupirs, lui avait construit une cabane au fond du jardin pour qu’elle y emménage. Je ne savais pas que, lorsque cette femme l’avait quitté, son père l’avait rapatriée dans la maison pour faire la bouffe et qu’un soir sur deux, lorsque la nuit tombait, il passait dans sa chambre. Je ne savais pas que cet enculé lui mettait un sac en plastique sur la tête pendant qu’ils la violait parce qu’il ne la trouvait pas assez joli.

Une réflexion intéressante .

 Avant les parents étaient heureux d’annoncer la naissance de la petite Joséphine. Il y avait une filiation de haut en bas. On venait de quelque part. Maintenant, sur les faire-part, il y a la photo de la petite Joséphine et il est écrit : « Me voilà ! » comme si la gamine était tombée d’un arbre. Qu’elle ne venait finalement de nulle part. Qu’elle naissait hors de tout arbre généalogique. C’est ça que le monde veut créer  : des générations d’êtres humains isolée qui ne viennent de nulle part. Et sont donc incapable de collaborer pour savoir où aller.

Édition Gallimard NRF.

 

Ce peuple des promesses duquel il faut se méfier, car il est désespérément myope et doté d’une mémoire reptilienne. La preuve en est que depuis deux cents ans, à chaque tournant majeur de son histoire, il fait toujours le pire des choix.

 

Les trois coups de cœur du club de lecture sont entièrement mérités ainsi que mes cinq coquillages. Ce roman est extraordinaire, car il mêle l’analyse fine et fouillée du sentiment amoureux avec l’horreur de la lutte politique en Iran, de la chute du Shah à la répression la plus totale de la dictature islamique. Au début nous sommes dans une petite ville, une station balnéaire, Chamkhaleh sur la mer Caspienne où la vie, l’été, se déroule comme dans toutes les stations balnéaires, les filles sont jolies, montrent volontiers leur sourire et leur corps, les garçons sont amoureux mais n’osent pas s’approcher. Surtout de la si belle et si libre Niloufar, cousine du narrateur.

Comment peut on imaginer que ce monde a entièrement disparu sous le régime des Mollahs . L’auteur mêle avec un brio incroyable le récit de cet amour d’adolescent pour une jeune fille qui a trois ans de plus que lui avec la tragédie iranienne . Quand on a treize ans une jeune fille de seize ans , c’est une femme . Il raconte bien aussi toutes les contradictions qui divisent la société et les familles. Mais quel pauvre pays qui a cru se débarrasser d’un tyran est s’est jeté dans les bras de brutes sanguinaires bien pire que le Shah ! Ce que j’avais un peu oublié, c’est le rôle de la guerre contre l’Irak qui a conforté la répression contre la moindre opposition.

Ce récit est aussi une remise en cause de l’engagement politique, son héros n’est jamais sincère : il prend des postures et veut juste séduire celle qu’il aime. Mais surtout personne n’avait une vision claire de ce qui allait se passer.

Voilà ce qu’un roman peut apporter de mieux : comprendre grâce à ce récit l’absurdité du régime iranien et le côté factice des révoltes. Et pourtant , il s’agit surtout et avant tout d’un roman d’amour. J’ai vraiment été séduite par la performance littéraire et si triste pour ce pays qui n’est pas prêt de se débarrasser de ses tortionnaires.

 

Citations

C’est hélas vrai ! (et cela ressemble à l’incendie du Reichstag !).

 L’été 1978, le cinéma Rex d’Abadan prenait feu. . Plus de quatre cents personnes y périssaient brûlées vive. Un incendie de toute évidence criminel. Les doigts accusateurs se sont pointés vers le Shah et sa police secrète. Unanimement tu t’en souviens ? Toutes tendances confondues. C’était le coup fatal. L’étincelle dans les barils de poudre. Des corps calcinés ont été montrés sur les photos qui circulaient sous le manteau. Le régime du shah n’a jamais pu s’en remettre.
 Quelle énorme mensonge ! Quel coup de maître. Quii peut encore ignorer aujourd’hui que le cinéma a été mis à feu par des activistes musulmans appliquant une fatwa émise par un ayatollah ?, Quel intérêt avait le régime du shah à incendier un cinéma dans un quartier populaire d’une ville de second rang ? Vraiment quel intérêt ? Mais à ce moment-là dans ce pays de presque quarante million d’habitants, nul n’a été suffisamment lucide pour poser cette simple question ait dénoncé l’absurdité de la chose. Nous avons tous pris part à ce mensonge.

À l’époque du shah !

 Attention ! C’était l’Iran de l’époque du shah. Tu ne l’as pas vraiment connu. Il n’y avait pas encore la moindre femme voilée sur le rivage, et les foulards et tchadors n’étaient pas de mise. À la place, il y avait elles, avec leurs minuscules bikinis, leurs débardeurs, leurs robes légères, ouvertes aux quatre vents, leurs éclats de rire. Elles se déhanchaient sur le sable chaud. Rigolaient à gorge déployée. Je te promets, devant un tel spectacle, les bronzés de Malibu pouvaient aller se rhabiller.

Son père .

 Mais, à chaque fois, je m’apercevait avec étonnement que mon père était le seul qui ne m’écoutait pas. Il était, toujours, rouge de honte, souffrant secrètement comme a son habitude. Un jour, il m’a avoué à quel point il détestait mes sorties, mes tirades savantes, mes discours. Il me trouvait vulgaire, vantard et malhonnête. Il disait que j’étais l’échec de sa vie et qu’il regrettait amèrement de n’avoir pas su m’inculquer un brin d’abnégation, de bon sens et d’honnêteté, valeurs indispensables à ses yeux pour être un homme bon. Là il avait raison. Il voyait juste, mon pauvre père !

La guerre Irak Iran.

 Malgré le massacre, personne n’avait intérêt à mettre fin au conflit. Ni les mollahs qui avaient trouvé dans cette guerre la garantie de rester au pouvoir. Ni les chefs de guerre, alliés aux nouveaux hommes d’affaires et qui gagnaient des sommes vertigineuses en contournant l’embargo américain. Ni les grandes démocraties européennes qui vendaient des armes aux belligérants, clients dociles et solvables, vu les gisements pétroliers sur lesquels ils étaient assis. Ni les riches émirats arabes sunnites terrorisés par la montée de l’islam chiite expansionniste. Bref, chacun trouvait son compte dans la prolongation du conflit. Des hôtels macabres, surmonté de l’image de jeunes martyrs étaient dressés à chaque coin de rue. Les murs et les portes étaient couverts de photos de jeunes soldats tombés au front.

 

 

Édition Les Escales. Traduit de l’italien par Anaïs Bouteille-Bokobza
Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard 
Le portrait du père violent et dominant sa famille de toute ses colères et de ses mots assassins est criant de vérité. Il s’agit certainement d’une part de l’enfance de l’autrice qui par se livre se libère du poids de son enfance à Bari capitale des Pouilles italiennes. On sent tout le poids de la souffrance des femmes italiennes qui subissent leur sort avec courage. La petite Rosa vit dans l’amour de sa mère et la terreur que son père éclate d’une colère incontrôlée. Elle s’éveille à la sexualité dans un quartier où règne la prostitution. Elle reproduira , hélas le schéma familial et son Marco s’avèrera un homme dur et violent. Mais à la différence de sa mère elle réussira à s’en séparer.
Le roman décrit bien la pauvreté des villes du Sud de l’Italie et la difficulté de mener une vie correcte quand la misère vous tient dans ses filets. C’est vraiment le meilleur aspect du roman.
Mais je suis peu sensible au côté « rédemption par l’écriture », cette impudeur me gêne surtout dans la deuxième partie quand on voit cette jeune femme s’accrocher à un homme qui ne lui apporte rien. L’écrivaine n’a pas réussi à m’intéresser , mais cela vient du peu de goût que j’ai pour l’auto -apitoiement sur son propre sort. C’est sans doute vrai que c’est compliqué de ne pas reproduire le schéma parental mais cela ne justifie pas pour autant le fait d’en faire le récit. Je sauve de ce roman toute la première partie de son enfance à Bari dans les quartiers miséreux, on vit au plus près de ces familles qui cherchent par tous les moyens de s’en sortir. C’était mon dernier roman italien proposé par mon club de lecture, j’ai lu de bien beaux romans même si celui-ci m’a moins intéressée.

Citations

J’aime bien ce passage :

 Il s’est bien habillé pour l’occasion il a plaqué ses cheveux en arrière pour dégager son front large et il porte un parfum agréable, nouveau. Moi aussi, j’ai fait un effort, j’ai sorti une vieille robe à fleurs qui me serre un peu, je me suis coiffée et j’ai mis des chaussures neuves. Sans véritable raison, en réalité. Peut-être que les amours terminées méritent encore une belle tenue.

Alors que son père vient d’être cruel avec son amoureux :

Ne t’inquiète pas Rosa. S’il t’aime il ne se laissera pas impressionner par les discours de papa, m’as-tu dit. 
T’en souviens-tu maman ? Moi, très bien, de même que de la douceur de ta main qui me caressait les cheveux d’un geste prudent et léger ; peut-être avais-tu peur que je te repousse. Tu parlais toujours avec une émotion qui te ramenait aux mêmes sujets : le mauvais caractère de papa,  » Il est comme ça on y peut rien », le sort inéluctable du quartier, « C’est comme ça, on ne peut pas le changer « . Tu tressais les fils de notre destin dans un mouvement circulaire auquel on n’échappait jamais

Attention !
Si vous aimez le suspens, j’en dis visiblement trop dans ce billet (je me demande comment font ces lectrices pour relire les livres qu’elles ont aimés !)

L’auteure cite Erri de Luca, je trouve cette phrase très juste

 Prendre connaissance d’une époque à travers les documents judiciaires, c’est comme étudier les étoiles en regardant leur reflet dans un étang.

 

Un cadeau ! quelle bonne idée de s’offrir des livres car cela permet d’aller vers des lectures que je n’aurais pas remarquées. Le titre résume le roman, pour moi c’est un régal que de lire un roman dont je connais l’issue mais je pense que cela a dû en déranger certains et certaines. Après il faut beaucoup de talent pour faire comprendre pourquoi cette malheureuse Lisa s’est enferrée dans son mensonge. Elle a accusé un homme de viol et tout le monde l’a crue. Tout l’intérêt du roman s’est de raconter que bien qu’elle ait menti cette ado était quand même une victime. Simplement les véritables coupables n’ont jamais été inquiétés. L’auteure à travers l’enquête de l’avocat nous fait revivre les années collège quand on est une fille mal dans sa peau mais dont les seins font beaucoup d’effet aux garçons. Mal dans sa peau , moins aimée que sa sœur à qui tout réussit, enfant d’un couple qui ne s’aime plus, Lisa a voulu trouver un statut et c’est celui de victime qui lui allait le mieux. Car victime elle l’était réellement d’un groupe de garçons en particulier d’un sale môme qui l’avait filmée dans une relation sexuelle avec celui qu’elle prenait pour son petit ami. Et c’est, pour que cette vidéo ne soit jamais publiée, que finalement elle s’est empêtrée dans un mensonge qu’un pauvre homme va payer très cher : 1195 jours de prison pour rien !

C’est un livre facile à lire et très prenant mais qui ressemble plus à un long article de presse qu’à un roman. Malgré ce bémol, je dois dire que j’apprécie beaucoup le courage de l’écrivaine pour nous dire qu’il faut parfois douter de la parole des enfants et des adolescents, recevoir leurs témoignages demande sûrement beaucoup d’intelligence et de délicatesse car il est certain que les jeunes sont le plus souvent victimes, même s’ils sont aussi, parfois, menteurs.

 

Citation

Description des cours de justice .

 Ces juges, plus ça va, plus je les hais. Bornés, biberonnés à la moraline. Et lâche avec ça. Y a plus que des bonnes femmes de toutes manières. Les derniers mec que tu croises dans les couloirs, ils ont un balai et un seau à la main. Et les jeunes, elles sont pires. Non, mais tu les as vus, avec leurs baskets ? elle juge en bas-kets ! Les jurés, c’est pareil. Gavés de séries télé. Ils t’écoutent. Ils te regardent avec l’air de tout savoir mieux que toi, parce qu’ils ont vu l’intégrale des « faites entrer l’accusé ». Plus moyen de les faire douter. Ils ont trop peur de se faire engueuler. Quand je pense à tout ceux que je faisais acquitter avant ! Et, crois moi, il y avait une palanquée de coupable là-dedans… dis, tu crois que je suis vraiment trop vieux ?


 

Sans aucun jeu de mots, j’arrive « après » le grand succès de ce roman et « après » avoir lu « American Rust« . Le sujet est le même : que se passe-t-il dans une région qui a perdu ce qui faisait sa richesse économique, dans les deux cas, il s’agit de s’agit de la disparition de l’industrie métallurgique. dans les deux romans on voit la disparition d’un rôle masculin évident car fondé sur la force physique, la différence c’est que l’on sent que la région lorraine peut revivre autrement alors que dans le roman de Philip Meyer c’est la nature qui reprend ses droits, la région retournant à l’état sauvage.

Je ne voulais pas lire ce roman car j’avais peur de retrouver une atmosphère trop sombre et sans espoir. C’est bien le cas mais le talent de l’écrivain est tel que j’ai lu avec beaucoup d’intérêt ce gros roman. Il s’attache à décrire tous les habitants d’une ville imaginaire du bassin des Hauts-Fourneaux, on voit des hommes déclassés dont la seule façon de tenir est de consommer de l’alcool à haute dose : « eux » ce sont ces anciens ouvriers. Leurs femmes parfois boivent mais le plus souvent elles essaient de tenir leur famille. Et leurs enfants ? Ils s’ennuient et cherchent à satisfaire leurs besoins sexuels, ils boivent aussi mais rajoutent la drogue qui leur ouvre un monde plus souriant. À côté et se mélangeant assez peu des arabes, une famille marocaine très cliché : le père épuisé par une vie de labeur, la mère retournée au pays, et un fils dealer de haschisch. On voit aussi deux filles de la bourgeoisie qui s’encanaillent mais réussiront à sortir de cette région.

La construction du roman se passe autour d’un vol de moto qui sera le déclencheur de la catastrophe entre les jeunes, la violence des bagarres est terrible et laisse des traces indélébiles. En revanche, il n’y a pas de meurtre contrairement à ce qui se passe dans les romans américains, donc, un après sera possible pour ces jeunes mais cela ne veut pas dire un avenir positif. Le roman se termine sur un deuxième vol de moto, rouler sur une moto semble donner aux jeunes une impression de liberté. Le dernier été se passe lors de la coupe de monde de foot en 1998 et l’écrivain décrit cette population d’anciens ouvriers réunie dans un élan « patriotique » presque unanime.

On peut reprocher à ce texte de faire une peinture trop noire d’une population qui a certainement plus de richesse personnelle que celle des différents personnages, on peut aussi ne pas trop aimer le langage des jeunes, les descriptions des beuveries à la bière (arrosée de picon, ou non), les hallucinations dues à la drogue, les très nombreuse scènes de baise… Je suis d’accord avec tout cela mais ce qui m’a empêchée de mettre cinq coquillages c’est de n’avoir aucun personnage positif dans le roman. On a l’impression que tous les gens de cette région sont décrits dans ce roman, or je suis certaine qu’il existe des gens de valeur qui ne sont ni alcooliques ni drogués et dont la principale activité n’est pas sexuelle.

Cette dernière remarque ne m’a pas empêchée de lire avec beaucoup d’intérêt ce roman de Nicolas Mathieu et de retenir son nom pour d’autres lectures.

 

Citations

Le style de l’auteur .

 Anthony venait d’avoir quatorze ans. Au goûter, il s’enfilait toute une baguette avec des Vache qui Rit. La nuit il lui arrivait parfois d’écrire des chansons, ses écouteurs sur les oreilles. Ses parents étaient des cons. À la rentrée, ce serait la troisième.

Ambiance de la cité.

 Un peu après 15h, le temps devint comme une pâte, grasse, étirable à l’infini. Chaque jour, c’était pareil. Dans le creux de l’aprèm, un engourdissement diffus s’emparait de la cité. On n’entendait plus ni les enfants ni les téléviseurs par les fenêtres ouvertes. Les tours même semblaient prête à s’affaisser, hésitant dans les brumes de chaleur. Par instant, une mob kitée pratiquait une incision bien nette dans le silence. Les garçons clignaient des yeux et essuyaient la sueur qui venait noircir leurs casquettes. Au-dedans, la nervosité marinait sous son couvercle. On était somnolent, haineux, et ce goût acide du tabac sur la langue. Il aurait fallu être ailleurs, avoir un travail, dans un bureau climatisé peut-être bien. ou alors la mer.

L’après de la métallurgie .

 Un siècle durant les hauts fourneaux d’Heillange avaient drainé toute ce que la région comptait d’existence, happant d’un même mouvement les êtres, les heures, les matières premières. D’un côté, les wagonnets apportaient le combustible et le minerai par voie ferrée. De l’autre, des lingots de métal repartaient par le rail, avant d’emprunter le cours des fleuves et des rivières pour de longs cheminements à travers l’Europe. 
Le corps insatiable de l’usine avait duré tant qu’il avait pu, à la croisée des chemins, alimenté par des routes et des fatigues, nourri par un réseau de conduites qui, une fois déposées et vendues au poids, avaient laissé de cruelles saignées. Ces trouées fantomatiques ravivaient les mémoires, comme les ballasts mangés d’herbe, les réclames qui pâlissaient sur les murs, ces panneaux indicateurs grêlés de plombs.

L’éducation .

 L’éducation est un grand mot, on peut le mettre dans des livres et des circulaires. En réalité tour le monde fait ce qu’il peut. Qu’on se saigne ou qu’on s’en foute, le résultat recèle toujours sa part de mystère. Un enfant naît, vous avez pour lui des projets, des nuits blanches. Pendant 15 ans, vous vous levez à l’aube pour l’emmener à l’école. À table, vous lui répétez de fermer la bouche quand il mange et de se tenir droit. Il faut lui trouver des loisirs, lui payer ses baskets et des slips. Il tombe malade, il tombe de vélo. Il affûte sa volonté sur votre dos. Vous l’élevez et perdez en chemin vos forces et votre sommeil, vous devenez lent et vieux. Et puis un beau jour, vous vous retrouvez avec un ennemi dans votre propre maison. C’est bon signe. Il sera bientôt prêt. C’est alors que viennent les emmerdes véritables, celles qui peuvent coûter des vies ou finir au tribunal.

Ado dans une famille de la classe moyenne .

 Quand elle rentrait le week-end, elle trouvait ses parents occupés à mener cette vie dont elle ne voulait plus, avec leur bienveillance d’ensemble et ces phrases prémâchées sur à peu près tout. Chacun ses goûts. Quand on veut on peut. Tout le monde peut pas devenir ingénieur. Vanessa les aimait du plus profond, et ressentait un peu de honte et de peine à les voir faire un si long chemin, sans coup d’éclat ni défaillances majeures. Elle ne pouvait pas saisir ce que ça demandait d’opiniâtreté et d’humbles sacrifices, cette existence moyenne, poursuivie sans relâche, à ramener la paie et organiser des vacances, à entretenir la maison et faire le dîner chaque soir, à être présents, attentifs tout en laissant à une ado déglinguée la possibilité de gagner progressivement son autonomie.

Une méchanceté gratuite.

 Il ne reste plus d’idiots dans les villages, mais chaque café conserve son épave attitrée, mi-poivrot, mi-Cotorep, occupé à boire du matin au soir, et jusqu’à la fin

La vie sans alcool.

Mais au fond, le problèmes d’une vie sans alcool n’était pas celui là. C’était le temps. L’ennui. La lenteur et les gens. Patrick se réveillait d’un sommeil de vingt années, pendant lesquelles il s’était rêvé des amitiés, des centres d’intérêt, des opinions politiques, toute une vie sociale, un sentiment de soi et de son autorité, des certitudes sur tout un tas de trucs, et puis des haines finalement. Or il était juste bourré les trois quarts du temps. À jeun , plus rien ne tenait. Il fallait redécouvrir l’ensemble, la vie entière. Sur le coup, la précision des traits brûlait le regard, et cette lourdeur, la pâte humaine, cette boue des gens, qui vous emportait par le fond, vous remplissait la bouche, cette noyade des rapports. C’était ça, la difficulté principale, survivre à cette vérité des autres.

Le Maroc et la drogue.

 Le Rif produisait chaque année des milliers de tonnes de résine de cannabis. Des champs dans un vert fluorescent couvraient des vallées entières, à perte de vue, et si le cadastre fermait les yeux, chacun savait à quoi s’en tenir. Sous les dehors respectables, ces hommes matois qu’on voyait aux terrasses des cafés, avec leurs moustaches et leur gros estomac, étaient en réalité d’une voracité digne de Wall Street. Et l’argent du trafic irriguait le pays de haut en bas. On construisait avec ces millions des immeubles, des villes, tout le pays. Chacun à son échelle palpait, grossistes, fonctionnaires, magnat, mules, flics, élus, même les enfants. On pensait au roi sans oser le dire.

Retour dans sa ville de la Parisienne .

 Ils papotèrent un moment, mais sans y croire. Au fond, Steph était le centre d’un jeux de société assez vain. Sa mère l’exhibait, les gens feignaient de s’intéresser, la jeune fille donnait le change. Il circulait comme ça toute une fausse monnaie qui permettait d’huiler les rapports. À la fin, personne n’en avait rien à battre.

 


Édition J’Ai LU

 

Un livre à faire lire à toutes les adolescentes qui grâce aux éclats de rire accrocheront au récit et comprendront mieux que dans une histoire sérieuse voire tragique, tout le mal que peuvent faire les posts sur les réseaux sociaux. Et moi, qui ne suis plus adolescente depuis si longtemps, je découvre avec plaisir le langage des jeunes d’aujourd’hui et toutes les difficultés auxquelles elles sont confrontées. C’est un roman jubilatoire qui fait du bien. En effet des filles dont on se moque au collège, car elles sont soi-disant moches, se rebellent de façon tellement intelligente et drôle.

Dans cette bonne ville de Bourg en Bresse au collège, un sale gamin organise sur internet le concours du « boudin d’or , d’argent et de bronze ». Les filles tremblent d’être désignées « boudin » de l’année. Toutes les filles ? Non, Mireille qui a été deux ans de suite « Boudin d’or », n’a plus peur de rien et pour consoler les deux filles qui cette année l’ont rejointe dans ce qui doit être une infamie, elle va les entrainer dans une course à vélo jusqu’à Paris.
Elles décident de vendre des boudins sur la route et arriver jusqu’à Paris pour participer à la « party » du 14 juillet à l’Élysée, avec le frère d’Hakima, Kader, un soldat de l’armée française gravement blessé dans une opération militaire dans un pays qui pourrait être le Mali et qui a dû être amputé de ses deux jambes. Il les accompagnera en fauteuil roulant. Je ne peux pas évidemment tout vous raconter et surtout ne cherchez pas de vraisemblance, laissez vous porter par les délires de Mireille. Sachez simplement qu’avec beaucoup de courage et d’intelligence, elles ont su retourner les réseaux sociaux .

Si je n’avais jugé ce roman qu’avec mes critères habituels, je ne lui aurais attribué que trois coquillages mais en pensant à tout le bien qu’il peut faire (et le sourire que j’avais en le lisant) il en vaut bien quatre.

Merci à cette écrivaine qui porte un prénom qui m’est si cher et qui a su avec autant d’humour dénoncer un phénomène qui fait des ravages dans les collèges, je viens hélas d’en être témoin très récemment.

 

Citations

L’adolescence.

 Je ne sais pas pourquoi j’aime à ce point exténuer ma mère. Je ne sais pas pourquoi j’ai jeté dans les toilettes tout le flacon de parfum « Flower by Kenzo » de Philippe Dumont m’avait gentiment offert pour mon anniversaire. -« Dis donc Mireille tu as remercié Philippe pour le parfum qu’il t’a gentiment offert pour ton anniversaire »- et sans tirer la chasse, histoire de bien lui faire comprendre que ses 54 euros de fragrance avaient fini dans les égouts.
Je ne sais pas pourquoi, mais c’est comme ça. 

Réagir face à l’inacceptable.

 Je sais que ma vie sera bien meilleur quand j’aurai vingt-cinq ans ; donc j’attends. J’ai beaucoup de patience.
– « C’est triste de devoir attendre d’aller mieux. »
J’ai envie de lui répondre , : « Oh, seulement les trois premières années après on s’y fait. » Mais il clair que la pauvre Astrid chez les sœurs n’a pas eu le même entraînement que moi on n’a pas dû lui répéter assez souvent qu’elle était grossémoche alors que moi c’est arrivé tellement de fois que désormais je m’en gausse. Ça glisse comme de l’eau sur des feuilles de lotus.

Hakima a ses règles . (Et l’humour de Mireille !).

 – Je peux appeler ma mère sur son téléphone pour lui dire ? Je veux pas que Kader le sache, tu promets que tu dis rien à Kader ? OK. 
– Promis juré. Je ne dirai rien. 
( trois minutes plutôt 
– Ma sœur a ses règles, c’est ça ?
– Comment tu sais ? 
– Quand une fille dit qu’elle a mal au ventre, qu’elle va ensuite s’enfermer aux toilettes avec une autre fille plus grande pendant trois heures, et puis que les trois se disent des trucs en secret sur un ton de conspirateur… 
– oh, ça aurait très bien pu être un avortement discret )

 


Édition JC Lattès

Encore une fois c’est La souris Jaune qui m’a tentée pour ce roman très prenant. La tension est palpable dès le début et va en augmentant jusqu’à un certain jour d’été. Nous suivons l’adolescence de Joy et Stella deux très jeunes filles qui se ressemblent physiquement et qui nouent un lien amical très fort. L’une comme l’autre ont des vies déséquilibrées : Joy est élevée par un père seul, sa femme est partie alors que sa fille avait huit ans. Stella est élevée par une mère qui fréquente le monde artistique dans une très belle maison où les fêtes alcoolisées résonnent trop souvent. Et puis un jour, après le séjour d’été chez la grand mère aux États-Unis, Stella se sépare de Joy et au retour en France, elle coupe définitivement avec son amie sans aucune explication.

La deuxième partie du roman se passe trente ans plus tard et on finit par comprendre ce qui a poussé Stella à couper définitivement avec son amie.

En dehors de cette révélation, ce que je trouve très intéressant c’est la façon dont les deux adolescentes se trompent toutes les deux sur leur famille respective. Et surtout, le style de l’auteur sert très bien cette histoire tragique, la voix des deux jeunes filles qui racontent bien le plaisir qu’elles ont à se retrouver et à passer du temps ensemble : faire le mur, aller danser, s’échanger leurs vêtements et surtout écouter David Bowie en boucle. Elles ne perçoivent pas ce que les adultes veulent leur cacher et inventent une vie imaginaire comme les adolescentes savent si bien le faire.

Celle qui a subi le drame c’est Stella mais elle arrivera à se reconstruire une vie heureuse. En revanche, Joy à qui on a tout caché et qui ne peut même pas imaginer le début d’une vérité n’a pas réussi à être heureuse dans sa vie amoureuse.

Un roman sur un sujet souvent traité mais d’une façon originale grâce au suspens très bien mené par cette écrivaine, mais je n’ai vraiment profité du roman qu’à le relecture lorsque j’ai été débarrassée du suspens (Je sais que je ne fais pas la l’unanimité quand je dis cela), et je l’ai trouvé un peu vide tout l’intérêt est dans le drame dévoilé au trois quart du récit.

 

Citations

L’amitié adolescente .

 L’adolescence est une fiction ; l’amitié, un pacte temporaire. On cherche et reconnaît en nos rencontres ce qui nous fait défaut, on leur jure fidélité en échange, chacun devient l’armure de l’autre pour se jeter à l’assaut du monde, puis s’en déleste, une fois l’obstacle surmonté ou la défaite admise.

La réalité derrière la fête.

 Joy a idéalisé ce qui se passait villa Adrienne. Ce n’était pas le monde généreux qu’elle décrivait. Ces types prenaient la maison pour une auberge, ils traitaient Domino et sa fille comme leur soubrette. Jamais Stella n’en a vu un apporter un bouquet de fleurs ni se mettre en cuisine. À part ça, ils étaient formidables.
 Domino était passée d’une vie modeste avec un réfugié laotien obsédé par l’intégration a une communauté foutraque et intellectuellement vivifiante, mais son rôle n’avait pas changé, elle faisait les courses, les repas, le ménage, et elle gueulait. Ou alors elle pleurait parce qu’une fois de plus elle était tombée amoureuse d’un tocards qui avait pris la poudre d’escampette.

Comment empêcher une adolescente de parler.

 Dottie, elle, n’a pas gobé son mensonge. Elle est venue la trouver dans le garage et lui a demandé très gentiment ce qu’il lui arrivait, parce qu’elle croyait que les deux amies s’étaient disputées. Stella s’est sentie en confiance : 
– il y a eu un problème avec votre fils… 
Dottie lui a jeté un coup d’œil furtif, méfiant aussitôt contré par son bon sourire.
– Il est incorrigible, hein ? Ce n’est pas bien grave tu sais. Tu t’en remettras, s’il t’a volé un baiser .
– Non ce n’est pas… 
 Dottie l’a interrompue sèchement cette fois.
– Quand on a le feu au cul, on allume.
 Oui ce sont les mots de la gentille vieille Dame qui aimait les expressions idiomatiques. Ses grands yeux bleus avait rétréci en tête d’épingle noires. Un regard d’une dureté abyssale.