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cocardes
Une rumeur s’est emparée du monde des blogs : il faut lire « 14 juillet » d’Éric Vuillard. Emportée par l’enthousiasme de Keisha, de Dasola de Sandrine et bien d’autres, (excusez-moi je n’ai pas le talent d’Éric Vuillard pour rappeler tous les noms qui permettent de créer un événement) je n’ai pas résisté à cet élan républicain. Les quatre cocardes tricolores en disent long sur mon plaisir de lecture et saluent un livre dont le projet est très original malgré mes réserves sur le message final. L’auteur n’a pas fait qu’une oeuvre d’historien, il a voulu mettre tous les procédés de langue dont il disposait pour rendre compte d’une émotion qui a soulevé tout le peuple de Paris ces quelques jours de juillet 1789. Son texte nous permet de ressentir la peur, l’exaltation, le désespoir, la joie de la victoire, tout cela dans des odeurs de sueur, de larmes, de poudre, de sang et de cadavres en décomposition. On passe deux jours, heure après heure avec le petit peuple de Paris, réduit à un misère noire par des gens inconscients que leur mode de vie pouvait être menacé par un trop plein d’injustices. On espère avec eux, on tremble pour eux, et on se réjouit quand enfin, le symbole de la royauté est envahi. La Bastille est prise par un peuple affamé que rien ne pouvait plus arrêter.

Éric Vuillard souligne avec insistance combien les participants à cette insurrection ne possédaient rien, et comment leurs noms sont immédiatement tombés dans l’oubli. Alors que les nantis nobles ou pas sont restés dans les mémoires et sont le sujet de nombreux chapitres des historiens comme Michelet par exemple. S’il est vrai que le gouverneur de Launay fut tué ce jour là et sa tête mise au bout d’une pique, Vuillard rappelle que sa veuve reçut une pension de trois mille livres, alors que Marie Bliard veuve de l’allumeur de réverbère ne reçoit qu’un pauvre papier lui signifiant la mort de son compagnon. Ces deux poids deux mesures choquent tant l’auteur qu’il fait tout pour retrouver le nom et la vie des obscurs participants à cet acte fondateur de notre République. Le livre se termine par un vibrant appel à mettre le feu aujourd’hui à toute la bureaucratie qui étouffe selon lui la société française. Hélas, je ne suis absolument pas sûre que ces solutions violentes puissent servir au mieux vivre de notre société certes sclérosée. Si certains aimeront ce livre pour son message, je l’apprécie, quant à moi, pour son style.

Citations

Mélange de style et d’époque

Et ce jour là, Necker fut exactement ce qu’il était, froid, démonstratif, il ne parla que de finances et d’économie politique ; il fut abstrait, hautain, et il assomma tout le monde pendant trois plombes par un discours techniques.

Pour se défendre, les gens improvisent des barricades de chaises puis ils se saisissent de bâtons, de caillasses, et c’est l’intifada des petits commerçants, des artisans de Paris, des enfants pauvres.

Le style

Et dans la nuit du 13 juillet tout cela résonne, ça gratte entre les pattes du petit chien qui traîne, ça urge entre les jambes du vieil ivrogne qui pisse qui poisse sous les aisselles du chiffonnier, ça démange tout le monde.

Un trait de caractère souvent vérifié

Enfin, Louis XVI, le débonnaire, monte sur le trône ; mais comme tous les tyrans indulgents et magnanimes, il sera plus féroce que ses prédécesseurs.

41 Thoughts on “14 juillet – Éric VUILLARD

  1. Mais oui, la fin : en lecture l’auteur n’a pas vraiment appelé à l’émeute non plus. Les allusions à notre époque sont parfois décelables dans le texte, mais je ne pense pas que Vuillard appelle à prendre les armes ‘physiques’

    • je n’ai pas dit cela non plus, mais ce qui me gène dans son livre c’est que l’auteur a une telle volonté de comprendre les révolutionnaires ( ce qui est très intéressant) qu’il arrive à justifier ou à passer sous silence ce qui est inqualifiable et qui entraînera le spires horreurs. mettre une tête sur une pique me révulse.

  2. Les cocardes à la place des coquillages, cela m’a sourire ! Comme tant d’autres blogueuses, je me suis laissée convaincre par la rumeur. Ma note sera la prochaine publication chez moi, je pense. Et même si je n’en parlerai pas, je te rejoins sur les limites du message final ( sinon, il aurait eu 5/5 ?)

    • 5 cocardes si j’enlevais mes quelques réserves , mais je suis vraiment partie avec lui dans les rues de Paris ces journées de juillet 1789

  3. Je suis en train de le lire… bravo pour ta photo qui met en scène le livre !

    • Merci mes photos reflètent le hasard de mes lieux de lecture. Je lisais ce livre à Paris et il me donnait envie d’aller sur les lieux dont il parle.

  4. C’est le style d’Eric Vuillard qui m’a séduite aussi, et même transportée dans les rues de Paris en ce lointain mois de juillet : quel voyage, quelle journée !

  5. Voilà un mélange des genres que je n’aime pas beaucoup, la révolution a servi jusqu’à devenir serpillère !! la violence du moment et les tueries ne sont guère justifiables même si on peut les comprendre
    bref c’est un peu pour ça que j’hésite à lire ce livre qui va certainement me plaire et m’agacer

  6. Tu confirmes tout le bien que je pense de ce titre. Il va vraiment falloir que je le lise.

  7. Tu es plus enthousiaste que Brize, dont l’avis aujourd’hui est nettement plus réservé. Je le note pour la bibli.

  8. delph on 17 octobre 2016 at 14:52 said:

    Eric Vuillard doit venir à la Bib de Dinan au mois de novembre avec la librairie Le Grenier..Je te laisse aller voir sur le blog du Grenier pour la date, ze sais pu!…
    bises Luocine!
    (Tu viendras au prochain café coup de coeur où tu sais, vendredi 25 nov 18h00???, ça me ferait trop plaisir!!!)

    • Je note cette date et je viendrai avec un coup de cœur je me mets un rappel mais dis moi l’heure. car j’ai manqué le spectacle de Virginie je suis bien triste tu y étais?

  9. A force de le voir partout, ce livre, je vais peut-être finir par craquer, bien que je ne sois pas une fan de l’auteur.

  10. Ouah ouh ! La photo ! J’ai prévu de le lire un jour… devant tant d’enthousiasme de tant de personnes… je ne pourrai pas passer à côté !

  11. Beaucoup ont apprécié le style. Effectivement, quel succès ce roman…

  12. Je vais le lire j’avais adoré le précédent !

  13. C’était quoi le précédent, je lirai avec plaisir ton avis.

  14. Super tes cocardes ! Il faut vraiment que je le lise celui-là !

  15. Sur le papier, vu la thématique, ce roman n’est pas pour moi… Mais plus ça va, plus je me dis que j’aurais tort de ne pas tenter l’expérience !

  16. Cela me semble très intéressant, mais je redoute un peu le côté « roman à thèse » en lisant ce que tu dis sur la conclusion ainsi que les quelques extraits cités. A voir !

  17. Bonjour Luocine, merci pour m’avoir citée. C’est vraiment un livre agréable à lire et qui j’espère donne envie de se plonger dans la Révolution française. Bonne après-midi.

  18. C’est tout à fait ça, une vraie frénésie s’empare de la blogo à propos de ce roman. C’est toujours drôle, ce genre de phénomène. Il est vrai qu’il a l’air tout à fait intéressant. Je me suis déjà arrêtée plusieurs fois devant, reste à savoir si je vais finir par succomber aussi…
    Bon dimanche !

  19. Ta remarque en intro m’a fait rire.
    J’avoue que je ne sais pas comment réagir face à ce titre. Pas tentée le moins du monde mais les éloges me pousseraient presque à changer d’avis.

  20. C’est l’avantage des blogs : ils nous emmènent parfois où on irait pas tout seul.

  21. Je n’en ai lu que des avis positifs ! Mais le sujet ne m’attire pas trop…

  22. Je viens d’audiolire ce roman, je l’ai surtout apprécié pour sa version assez inédite qu’il propose : celle au coeur du peuple.

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