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3
Cet écrivain sait particulièrement bien décrire les maux de notre époque. Le malaise de Sarah qui ne se sent pas bien dans le monde compétitif où l’on conduit ses études d’économie, permet de décrire tous les travers des entreprises où il faut être toujours et tout le temps, le meilleur et si possible écraser les faibles. Le séminaire de formation est petit morceau de bravoure et, j’en ai bien peur, proche de vérité. Mais ,il est vrai que l’on sait déjà tout ça.
Dans le genre, je préfère l’arrogance d’un Benacquista.

Ce que j’ai vraiment bien aimé,c’est la peinture les problèmes dans lesquels se bat Sarah, brillante étudiante de Dauphine, ses origines modestes la rendaient mal à l’aise avec les étudiantes et étudiants très bourgeois de son université. Son mariage ne la protègera pas du malaise grandissant, souligné par la maladie mentale de son frère Nathan qui lui ne veut ni ne peut s’adapter au monde. Elle part au Japon pour comprendre ce frère tant aimé et finalement, elle se découvrira elle-même.

J’ai été moins séduite par la partie japonaise du roman, on sent l’auteur visiteur du pays mais il n’a pas évidemment toutes les clés du mal de vivre japonais. On reste un peu dans le cliché et la poésie des paysages japonais ne m’ont pas touchée. Beaucoup de lecteurs sont plus enthousiastes que moi, je reconnais à cet auteur un véritable talent pour témoigner d’un certain mal de vivre on se laisse prendre par la lecture et les souffrances de Sarah.

Citations

« Ressemble à une vieille refaite plutôt qu’à une vieille tout court (…) , ajoute le pathétique à l’irréversible »

 

Le jardinage qu’il tenait pour une activité fasciste (garder ce qui est fort, couper ce qui est faible et empêcher le fort d’être plus fort)

 

Parfois je me dis que je suis devenue la cliente idéale pour une secte, quiconque me promettrait le repos, la paix intérieure me verrait rappliquer et lui baiser les mains de gratitude.

 

Personne n’a envie de mourir. Tout le monde veut vivre. Seulement, à certaines périodes de notre vie, ça devient juste impossible.

 

Je l’ai épousé parce qu’il m’aimait et qu’auprès de lui je me sentais en sécurité. Auprès de lui j’avais moins peur.

On en parle

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J’ai complètement détesté ce film. Je me suis terriblement ennuyée, en plus je confondais la réalité et les rêves. Je sais que c’est fait exprès, mais ça ne permet pas de se raccrocher au film. Je n’ai pas vu la poésie que d’autres ont vue.

Vraiment « la palme d’or à Cannes » est pour le moins étonnante ! Le résultat que je trouve intéressant, c’est de permettre de passer en salle un film qui n’aurait aucun succès autrement. Le spectateur se pose, alors, plein de questions : Est-ce ce genre de films que les autres cinéastes ont envie de faire ? Pourquoi ? Pourquoi est-ce si attirant pour eux, les plans qui durent plus de 6 minutes sur la forêt ou les naseaux d’un buffle ?

Une critique plus positive

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Grande nouvelle ! La compétition pour Le prix littéraire du club des lectrices de Dinard 2010/ 2011, prix recherché par tant et tant et d’auteurs et d’auteures, est lancée ! La compétition s’annonce acharnée : le choix des 8 œuvres a déjà donné lieu à une belle montée d’adrénaline. J’étais très inquiète pour Dany Laferrière car nous étions que trois à l’avoir lu… et finalement il a passé le cap !

Je suis ravie de cette liste, et je me fais déjà une joie de tous les relire.

PS. Inutile de vouloir soudoyer les membres du jury, nous sommes toutes, incorruptibles …. Ah oui, j’ai oublié de le redire, ce club est uniquement féminin ! Comme le dit ma sœur,nouvellement arrivée dans la région, mais où sont les hommes ? Ni au cours d’histoire de l’art, ni à la marche, ni à l’anglais ; elle a trouvé : elle les voit tous ……. à la déchetterie !

 

http://ecx.images-amazon.com/images/I/51dKh8AWCfL._SL160_AA115_.jpg Le testament caché

Barry Sébastien

 

 

 

http://ecx.images-amazon.com/images/I/31B8G9q5A-L._SL160_AA115_.jpg L’énigme du retour

Laferrière Dany

 

 

 

 

http://ecx.images-amazon.com/images/I/41zl3QQRYzL._SL160_AA115_.jpg Ce que je sais de Vera Candida

Ovalde, Véronique

 

 

 

 

http://ecx.images-amazon.com/images/I/41MJ33vGetL._SL160_AA115_.jpg Le naufrage de la vesle Mari, et autres racontars

Riel,Jorn

 

 

 

 

http://ecx.images-amazon.com/images/I/41fTtGctIIL._SL160_AA115_.jpg Tom, petit tom, tout petit homme, Tom

Constantine, Barbara

 

 

 

 

http://ecx.images-amazon.com/images/I/41eMDnvMZvL._SL160_AA115_.jpg Mon couronnement

Bizot, Véronique

 

 

 

 

http://ecx.images-amazon.com/images/I/41oVdHN-9gL._SL160_AA115_.jpg Ru

Thuy, Kim

 

 

 

 

http://ecx.images-amazon.com/images/I/41hOy7uNDRL._SL160_AA115_.jpg L’étoile du matin

Scchwartz-Bart, André

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Il est des films dont on se dit, « Bof ! Ce serait mieux à la télé ! » Et bien non, expérience faite, c’est pire à la télé. Parce que c’est filmé pour le cinéma et que ça se sent. Pourtant, je n’ai rien d’une spécialiste. C’est une comédie familiale , dans le genre, je recommande chaudement, la série « Fais pas ci. Fais pas ça » On passe alors de vraies bonnes soirées devant le petit écran. Ce film veut éviter les clichés et l’outrance , il faut lui reconnaître ces qualités-là. On suit, à travers les yeux d’une adolescente, la vie des enfants d’un couple divorcé. Ni pire ni mieux qu’un autre.

Le père est assez crédible dans sa reconversion en psychothérapeute du câlin mais Bernard Campan me gène toujours à cause de ses oreilles en pointe qui bougent, je crois toujours qu’il va se mettre à jouer Spock dans Star-trek. La mère en superwoman ne renonçant pas à sa vie de femme séduisante, me semble, elle, dans l’outrance, mais je pense ça de tous les rôles joués par Mathilde Seigner. L’adolescente est pénible comme le sont les ados encore une fois sans relief particulier elle est amoureuse, elle a un passage à vide à l’école, ses copines sont pestes ; les profs sont vieux et moches…

Le film est fadasse, sans trop de clichés, c’est vrai mais inodore et sans saveur malgré les scènes de cuisine. Bref une meilleure soirée que le foot que je ne regarde jamais.

On en parle

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Traduit de l’allemand alémanique par Olivier Mannoni

5
Je ne sais pas s’il mérite ces cinq coquillages, mais je n’hésite pas à les donner , je m’explique. Ce livre m’a remis dans le même état que mes lectures d’enfant et d’adolescente, je ne voulais pas le lâcher. Je l’ai lu jusqu’à trois heures du matin, et ce matin je me suis réveillée uniquement pour le finir. J’ai pratiquement pleuré à la description de la mort de l’enfant soldat, j’ai été écœurée par les marchands d’armes. Il m’est arrivé de ralentir la lecture pour savourer les odeurs et les émotions !

Sans doute, en tant qu’œuvre littéraire, il ne mérite pas autant d’éloges. Mais un livre ce n’est pas que le style, qui, par ailleurs, est bon si je peux en juger à travers la traduction, mais sans invention particulière. C’est le récit qui est parfait, j’avais déjà beaucoup aimé « Small World ». Dans « Le cuisinier » le monde actuel est mis en scène : les réfugiés en situation presque régulière, la situation des populations vaincues, ici les Tamouls, mais cela pourrait être des Kurdes ou tout autre peuple victime à la fois d’une nation qui ne veut plus d’eux et d’une guerre de libération sanglante, (Les tigres Tamouls ne sont pas épargnés !), la crise financière, les marchands d’armes , la restauration de luxe et l’ambiance dans les cuisines étoilées… rien de ce qui fait les choux gras des journaux n’est absent de ce roman. Et tout cela mêlé à une intrigue passionnante et une évolution dans les sentiments amoureux peu banales. J’ai trouvé très bien la façon dont martin Suter a décrit l’opposition entre tradition et mœurs occidentaux, rien n’est manichéen tout est traité avec beaucoup d’humanité.

Et je n’ai pas encore parlé du thème central : la cuisine… je pense que tout le monde aura envie d’essayer les recettes de la fin du livre, bien qu’elles semblent horriblement compliquées à réussir, exemple dans le menu promotion :

  • Chappatis au caviar de cannelle et de caloupilé
  • Tandoori de poussins fumés au bois de hêtre sur sa gelée de beurre de tomate
  • Kuffi à l’air de mangue
  • Les recettes du Love-menu, c’est encore plus compliqué et surtout, il faut bien choisir le partenaire avec lequel on les dégustera ….

Ce roman est traduit par Olivier Mannoni et il est si bien traduit qu’on oublie qu’il n’a pas été écrit en français !

Citations

Pour le reste, on trouvait là un importateur de voitures, le propriétaire d’une agence de publicité et un président de banque dont la démission récente n’avait pas été tout à fait volontaire, tous avec leurs grandes, minces, blondes deuxième épouse.

 

– Je croyais que les castes avaient été abolies ?
– Exact. Tu dois faire partie de la bonne caste abolie.

 

– Mes parents ils sont morts en 1983,on a mis le feu à leur voiture.
– Pourquoi ?
– Parce qu’ils étaient Tamouls

Oui. Mais pas du Sri Lanka que j’ai quitté. Juste celui du pays où j’aimerais revenir. Pacifique et juste.

Et réunifié ?

..

Les trois à la fois ? Pacifique, juste et réunifié ? Ce serait bien.

 Et c’est ainsi que pour Maravan, le Tamoul, prépara sans se douter de rien pour Razzaq, le Pakistanais, un repas au cours duquel se nouerait une affaire qui, par quelques détour, permettraient à l’armée sri-lankaise de se procurer des chars suisses d’occasion.

 

– Ce sont des gens comme Dalman qui ont ces enfants sur la conscience.
Maravan balança la tête.
– Non. Ce sont ceux qui déclenchent ces guerres.

Eux, ce sont des idéologues. Bien sûr, ils sont épouvantables, eux aussi ; Mais pas autant que les fournisseurs. Ceux qui permettent les guerres en livrant les armes. Ceux qui gagnent de l’argent avec les guerres et qui les prolongent. des gens comme Dalman.

C’était un silence qui dévorait tout. Un silence plus puissant à chaque seconde qui s’écoulait. …. Et tout à coup, ce silence. Comme un bijou. Un article auquel des gens comme lui ne pouvaient pas prétendre.

Les journalistes n’enquêtent pas sur les révélations de leurs collègues. Ils les recopient.

 

L’amour passe pour une marieuse peu fiable

J’ai bien aimé ce film que j’ai vu en DVD , je regrette de ne pas l’avoir vu en salle car les décors sont somptueux et doivent très bien rendre au cinéma. L’histoire est émouvante, Sophie Marceau en paraplégique et Christophe Lambert en ex-boxeur alcoolique sont excellents dans ce film. Contrairement à la critique de « BIBI » dans cinétrafic, (je vais essayer de vous mettre sa critique en lien) je ne trouve pas tous les seconds rôles insignifiants, l’amie de Muriel est un beau rôle mais surtout la jeune fille des rues est étonnante de vie. On croit à son personnage et la scène de la soirée où elle danse pour aguicher l’homme qu’elle aime, est splendide. La Colombie, plus précisement Carthagène, est très bien filmé et donne beaucoup de relief à ce film.

L’histoire est terrible : cette jeune femme qui ne remue que la tête et qui a gardé des envies de vivre et de séduire est bouleversante, j’ai cru comprendre qu’ils disparaissaient tous les deux dans les flots, j’aimerais bien savoir si d’autres ont compris comme moi. Christophe Lambert est bon dans ce rôle malgré son strabisme vraiment gênant. Une bonne soirée que je regrette de ne pas avoir passé devant grand écran.

On en parle

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Traduit de L’anglais par Christiane Besse

3
Trois coquillages ! Pour un excellent roman, oui mais voilà je ne suis pas fan du genre policier. J’ai pourtant adoré « La vie aux aguets » du même auteur. Disons que c’est un trois coquillages qui en vaut quatre…. L’intrigue est très bien menée mais la fin est étrange ou appelle une suite.

La vie londonienne d’aujourd’hui est très bien rendue, le héros doit passer inaperçu dans la capitale anglaise, j’ai trouvé passionnant de suivre l’imagination de l’écrivain pour que Adam devienne invisible aux yeux d’une ville entière. Police et Mafia sont à ses trousses et il arrive à survivre. C’est l’occasion aussi de connaître de plus près les exclus de la société anglaise. Et comme les méchants sont des gens qui travaillent dans les hautes sphères de la finance te des laboratoires pharmaceutiques, on voit aussi la haute société dans tout ce qu’elle a de déplaisant. Le grand complot autour d’un médicament plaira à tous les amateurs de romans policiers.

J’ai trouvé intéressant la traversée dans la maladie d’un personnage, son médecin lui parle de symptômes dus au stress alors qu’il a une tumeur au cerveau. Pour avoir eu une amie qui a connu la même tragédie, j’ai trouvé cela très réaliste. J’ai lu dans la blogosphère que c’était un bon William Boyd, je l’ai dit au début j’ai préféré « La vie aux aguets », mais, le moins qu’on puisse dire, c’est qu’on ne s’ennuie pas, que les personnages sont intéressants un peu à la limite de la caricature parfois. Depuis que le traducteur de Suter, m’a écrit un mail je souligne le travail de la traductrice : Christiane Besse. Il faut que j’avoue je n’ai qu’un critère pour dire qu’une traduction est bonne : j’ai l’impression que le livre est écrit en français.

Citations

 Ingram avait horreur d’exhiber, quand il s’asseyait jambes croisées un mollet blanc poilu entre le haut de la chaussette et le revers du pantalon- c’était en quelque sorte le prototype du péché capital vestimentaire anglais.

 

Il sentait instinctivement que la seule manière d’éviter d’être repéré dans une ville du vingt et unième siècle était de ne tirer aucun avantage des services qu’elle offrait –téléphonique, financiers, sociaux, municipaux ou autres.

 

Jonjo tira un peu sur la laisse du Chien et ils s’en allèrent. Il aurait préféré rôtir en enfer plutôt que de suivre son chien avec un sac en plastique pour ramasser sa merde.

 

La redoutable Déesse Stress. Elle peut faire les choses les plus étranges à un corps

On en parle

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Traduit de l’espagnol par Isabelle Gugnon

1
Ouvrez le lien que j’ai mis à la fin de mon texte, et vous verrez qu’on peut adorer ce livre que j’ai personnellement détesté. (De là, à le comparer avec  » Les mémoires d’Hadrien » de Marguerite Yourcenar… à vous de juger !). Je ne cours pas après les romans historiques, mais alors celui-là, c’est exactement ce que je déteste. Je le pense assez racoleur pour connaître un certain succès et pour un roman d’été il ne fatiguera personne. Comme on y parle beaucoup de sexe, il peut plaire. Je ne supporte pas le mélange des genres, entre les explications pseudo historiques et les romans d’amour de la belle madame Tallien, l’auteur non seulement ne choisit jamais, mais explique le comportement des personnages par nos façons de penser actuelles

La rédaction des mémoires de cette trop jolie femme espagnole qui a résisté à trois maris , beaucoup d’amants et aux épisodes les plus sanglants de la révolution française devait sembler un bon sujet romanesque, hélas ! c’est peut être trop romanesque justement. Pour un public étranger qui ne connaît ni la révolution, ni cette période, il y trouvera peut-être un peu d’intérêt mais j’en doute. L’érudition distillée dans ce roman est insupportable. On a l’impression que l’auteur a écrit en consultant Wikipédia pour chaque personnage et même pour certains objets (voir ce qu’elle écrit sur le condom ou Madame Tussauds puis l’article de Wikipédia). On a eu l’occasion de lire tellement d’ouvrages passionnants sur la révolution française, c’est vraiment dommage que, celui consacré à cette figure féminine, soit si peu sérieux. Je ne reproche pas le côté féminin du point de vue sur les événements, je pense même que c’est le seul intérêt du roman, ce qui m’est insupportable c’est l’absence de profondeur du personnage. Et du coup le roman tombe à plat, le côté historique est plus que superficiel , alors il reste quoi ?

En refermant le livre, je me suis demandé s’il ravivait quelques souvenirs de mes cours d’histoire, pas grand-chose il est vrai. Je me souvenais que Madame Tallien avait échappé à la guillotine. C’est vrai que sa vie est beaucoup plus passionnante que ce simple épisode, et je pense qu’à l’occasion je me plongerai dans un véritable ouvrage historique.

 Citations

Une dame riche ayant des amants est une grande dame ; une femme pauvre et volage n’est en revanche qu’une garce.

 

Savoir de quel pied boite l’ennemi est toujours utile au moment de l’affronter.

On en parle

En bien : link, en beaucoup moins bien : link.

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Traduit de l’allemand par Brigitte Hébert

5
Il y a deux ans, je découvrais ce témoignage grâce à une amie allemande. Je ne lui dirai jamais assez merci. Je l’ai relu pour le mettre, avec ses cinq coquillages tellement mérités, dans mon blog. J’avais acheté ce livre car Ursula m’avait expliqué que la jeunesse allemande l’avait plébiscité : Sebastian Haffner permettait de comprendre le basculement de toute la nation vers le nazisme. La lecture est tout aussi intéressante pour les Français.

Le destin de ce livre est étonnant, il est écrit à chaud en 1938 par un homme qui a refusé le nazisme et qui s’est réfugié en Angleterre. Il ne sera pas publié. En 1999, à la mort de Sebastian Haffner, devenu journaliste et écrivain de renom , ses enfants trouvent ce manuscrit et le publient. La puissance du livre vient de là : il est écrit à chaud au plus près des événements, parfois au jour le jour, à travers les yeux d’un enfant puis d’un adolescent et enfin d’un jeune adulte. On comprend qu’il s’en est fallu de peu pour que lui-même accepte sans jamais l’apprécier, la tyrannie nazie.On suit avec dégoût toutes les veuleries des partis politiques traditionnels. On est horrifié par la façon dont les gens se tuent pour des causes plus ou moins claires. Puis l’horreur s’installe et là c’est trop tard plus personne ne pourra se défendre.

Mais peut-on en vouloir au peuple allemand alors qu’aucune puissance étrangère ne saura résister aux premières provocations d’Hitler quand cela était encore possible ? L’analyse est très poussée, et brasse l’ensemble de la société allemande, comme Haffner fait partie de l’élite intellectuelle, c’est surtout les élites que l’on voit à l’œuvre. Elles ont longtemps méprisé Hitler qu’elle prenait pour un fou sans importance, « un comploteur de brasserie », mais elles n’ont compris le danger que lorsqu’il était trop tard.

La cause principale du nazisme est à rechercher dans la guerre 14/18, comme on l’a déjà souvent lu, ce qui est original ici, c’est la façon dont cet auteur le raconte. Sebastian Haffner a sept ans quand la guerre éclate, pendant quatre longues années, il vivra en lisant tous les jours les communiqués de victoire de l’armée allemande, pour lui c’est cette génération là qui sera le fondement du Nazisme.

Enfant j’étais vraiment un fan de guerre…. Mes camarades et moi avons joué à ce jeu tout au long de la guerre, quatre années durant, impunément, en toute tranquillité- et c’est ce jeu-là, non pas l’inoffensive « petite guerre » à laquelle il nous arrivait de jouer à l’occasion dans la rue ou au square, qui nous a tous marqués de son empreinte redoutable.

Son récit séduira bien au-delà du cercle habituel des historiens, car il est vivant, concret émouvant parfois. Il permet, soit de revivre une période étudiée en lui donnant le visage de la réalité, soit de comprendre le nazisme à travers la vie d’un allemand embarqué bien malgré lui dans la tourmente de son pays.

Citations

… l’étrange talent de mon peuple à provoquer des psychoses de masse (Talent qui est peut-être le pendant de son peu d’aptitude au bonheur individuel)

 

L’âme collective et l’âme individuelle réagissent de façon fort semblable. Les idées avec lesquelles on nourrit et ébranle les masses sont puériles à ne pas croire.

 

La guerre est un grand jeu excitant, passionnant, dans lequel les nations s’affrontent ; elle procure des distractions plus substantielles et des émotions plus délectables que tout ce que peut offrir la paix : voilà ce qu’éprouvèrent quotidiennement, de 1914 à 1918, dix générations d’écolier allemands.

 

la génération des tranchées dans son ensemble a fourni peu de véritables nazis ; aujourd’hui encore, elle fournit plutôt des mécontents et les râleurs,. Cela est facile à comprendre, car quiconque a éprouvé la réalité de la guerre porte sur elle un jugement différent.

 

… les militaires allemands manquent de courage civique.
Le courage civique- c’est-à-dire le courage de décider soi-même en toute responsabilité- est d’ailleurs rare en Allemagne… Cette vertu fait totalement défaut à l’Allemand dès lors qu’il endosse un uniforme.

 

Rathenau et Hitler sont les deux phénomènes qui ont le plus excité l’imagination des masses allemandes le premier par son immense culture le second par son immense vulgarité.

 

Et pourtant la personne de Hitler son passé, sa façon d’être et de parler pouvaient être d’abord un handicap… le rédempteur bavarois d e1923, l’homme au putsch grotesque perpétré dans une brasserie… Son aura personnelle était parfaitement révulsante pour l’allemand normal, et pas seulement pour les gens « sensés » : sa coiffure de souteneur, son élégance tapageuse, son accent sorti des faubourgs de Vienne, ses discours trop nombreux et trop longs qu’il accompagnait de gestes désordonnés d’épileptiques, l’écume aux lèvres, le regard tour à tour fixe et vacillant.

 

C’était étrange d’observer cette surenchère réciproque. L’impudence déchaînée qui transformait progressivement en démon un petit harceleur déplaisant, la lenteur d’esprit de ses dompteurs, qui comprenaient toujours un instant ce qu’il venait de dire ou faire- c’est-à-dire quand il l’avait fait oublier par des paroles encore plus insensées ou par un acte encore plus monstrueux-, et l’état d’hypnose où il plongeait son public qui succombait de plus en plus passivement à la magie de l’abjection et à l’ivresse du mal.

3
Sur la couverture, c’est écrit « Thriller », on peut donc s’attendre à de l’horreur, du sang de la peur de l’angoisse. C’est plus subtil que ça, on y retrouve toutes les failles de notre monde avec une petite pointe d’exagération, ce qui rend alors le tout absolument insupportable. Ce roman est dérangeant, également, car c’est une attaque en règle contre la génération des « baby-boomers » tellement égoïste, et c’est ma génération ! Je donne un exemple des procédés utilisés. Dans ma région, les paysans produisent les ¾ des choux-fleurs pour toucher la prime européenne à la destruction des légumes non vendus.

On peut se demander pourquoi ils continuent à produire des choux-fleurs que personne ne mange, mais bon c’est comme ça ! Dans le roman c’est la production animale qui subit le sort des choux-fleurs bretons. Les trains transportant des carcasses avariées dégagent des odeurs peu ragoutantes, avant d’arriver à destination où elles seront transformées en ciment. Tiens, tiens on a déjà vécu ça non ?

Inquiétant ! C’est la même compagnie qui s’occupe du train des « baby-boomers ». Plus le train avance, plus se dévoilent les turpitudes des uns et des autres, des pans entiers de l’économie de la société de profit du culte de la jeunesse sont passés au crible de la critique du romancier, évidemment, on doute de plus en plus du paradis promis à l’arrivée des voyageurs de l’eternity-express.

Peut-on avoir de la compassion pour ces soixantenaires du train, eux qui n’ont connu qu’une vie facile, et qui n’ont recherché que le plaisir à tout prix ? Pour l’auteur certainement pas, ils ont eu tout faux, ils laisseront après eux une planète dévastée. Ce n’est franchement pas un roman qui remonte le moral, quand je pense que l’an dernier j’étais dans « le cercle littéraire des mangeurs d’épluchures de patates  » ou « La tombe du mec d’à côté  », les étés se suivent et ne se ressemblent guère. Sauf pour la pluie fidèle au rendez-vous !

Citations

Comme toujours pour mobiliser les masses, il avait suffi d’une grande peur et d’un grand mensonge. Pour lancer l’Eternity rush, on avait fait donner la mer des peurs – celle de la mort- et le plus antique des mensonges- celui de la jeunesse éternelle.

 

 Du fait de leur abandon, ces moribonds étaient de véritables mines d’or et les mois qui leur restaient à vivre se transformaient en calvaire médical.

 

Comme tous tes distingués confrères. Vous vous rêvez docteurs en vie éternelle, vous finirez ingénieurs en mort douce.