Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard.

Déjà je n’avais pas été passionnée par « la liste de mes envies » , mais ce roman est une vraie déception, de celles qui me font fuir les auteurs français. Non, pourtant, ce n’est pas une de ces habituelles autofiction, mais ni le sujet ni la façon dont il est traité n’ont réussi à m’intéresser. Je résume rapidement, la mort accidentelle de sa mère fait de Martine alias « Betty » une enfant élevée par un père trop porté sur la bouteille. Elle grandira cahin-caha jusqu’à l’âge où sa mère est morte, puis son apparence se figera dans une éternelle jeunesse extérieure. Elle restera à jamais une jeune femme de trente cinq ans. Et commence alors une vie étrange qui ne lui apporte aucun bonheur mais au contraire que des problèmes : une séparation, la perte de son emploi, l’éloignement de ses amies. À travers de courts chapitres, de paragraphes encore plus courts, les années s’envolent très vite, on voit passer soixante de vie sans que rien n’accroche l’intérêt. Les personnages secondaires sont, cependant plus intéressants, on imagine bien son père estropié pendant la guerre d’Algérie et sa compagne qui se réconfortent l’un l’autre des blessures de la vie. L’amour d’André et de Betty est totalement irréaliste, il me fait penser irrésistiblement à la BD de Fabcaro : « Si l’amour c’était d’aimer », et tant pis pour les « antidivulgâcheuse », il résistera à toutes les vicissitudes de la vie.

Citations

Un paragraphe et un souvenir

Maman a commencé à porter des jupes qui découvraient ses genoux grâce à une certaine Mary Quant, en Angleterre ; puis bientôt elles révélèrent presque toutes ses cuisses. Ses jambes étaient longues, et pâles, et je priais pour plus tard avoir les mêmes 

Pour donner une idée du style

À trente ans, quarante cinq, je vivais depuis plus de deux ans dans un grand studio, rue Basse.

 J’avais perdu l’envie de cuisiner, découvert chez Picard les plats pour personnes seules, et lorsque mon fils venait déjeuner je faisais livrer ses chers sushis. 
André moi étions restés amis. Il passait de plus en plus de temps en Suède où il choisissait ses mélèzes, ses trembles, ses épicéas, et lorsqu’il revenait, il ne manquait jamais de m’appeler ou de m’inviter à dîner ; j’étais chaque fois ensorcelée par son regard triste, toi Gene Kelly, moi Françoise Dorléac, je l’aimais encore, je l’aimais toujours. 
Je rédigeais mes textes pour La Redoute en regardant des séries télé – » Dawson », mon côté fleur bleue, « Dr Quinn, femme médecin », même si elle m’agaçait terriblement, « Urgences », ah, Doug Ross, et « Twin Peaks ». Je n’envisageais ni chien ni chat de compagnie, ils auraient été capables, à quatre ans de me reprocher d’être plus jeune qu’eux. 
Je vous laisse cette chanson car, pour moi, elle me parle beaucoup mieux beaucoup du vieillissement que ce roman

 

 

 

 

Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard.

 

J’explique mon peu d’enthousiasme pour ce roman. Du même auteur j’avais bien aimé « le réveil du cœur« . Je m’intéresse rarement aux écrivains qui racontent leur difficulté d’écrire pour finalement nous donner un roman sur le manque d’inspiration. La crise de la cinquantaine chez un homme qui a peu de raisons de se plaindre m’énerve un peu, enfin les formules toutes faites qui passent de mode très vite m’exaspèrent. Je ne peux pas trouver dans ce « Le presque » un seul aspect qui retienne mon attention. Sûrement pas la fin, (tant pis pour les anti-divulgâcheuses), car en plus ça se termine bien : la femme parfaite qui se sacrifie par amour retrouve son Marc de mari qui pourtant l’a repoussée ainsi que ses amis. Tout le monde ne lui veut que du bien, même son patron, mais lui n’est que « presque » heureux . Sans doute, on retrouve là quelques traits de notre société mais l’intrigue est trop faiblarde : il va partir dans une chambre isolée de tous pour essayer d’écrire , il rencontrera le whisky mais sera sauvé par sa merveilleuse femme est ses merveilleux amis !

Citations

Le Presque

Et puis cette vie de famille, stéréotypée jusqu’à la caricature, qui voit petit à petit s’éloigner Marion et Valentine, avec la froide ingratitude de l’entrée dans l’âge adulte, loin, très loin des gamines qui lui sautaient au cou il y a peu encore. Et pour finir, surtout, cette vie avec Chloé, vingt ans d’une union sans nuage, d’abord amants, puis amoureux, puis parents… Avec juste ce qu’il faut de sexe, à la faveur des soirs d’alcool, pour tenir sans mourir… Loin, si loin de la passion des débuts. Franchement, à quoi ça ressemble. À quoi ça ressemble, ce boulot qui l’alimente sans le nourrir, qui le paie sans l’enrichir, ses ambitions inassouvies, cet amour sans grand A. À quoi ça ressemble, cette place d’éternel numéro deux, ou de numéro trois, ou pire encore, sur le glorieux podium des projets aboutis des rêves accomplis, loin, très loin du médaillé d’or qu’il aurait aimé être… À quoi ça ressemble, tout ça, bordel ?

Le dur métier de comédienne

Avec Paula, on peut rire de n’importe quoi, sauf de tout ce qui touche à sa balbutiante carrière de comédienne. Monter sur les planches, pour elle, c’est plus qu’un rêve, c’est sa vie. Hélas, les rôles sont rares, et la vache enragée est bien la seule viande que consomme cette végétarienne convaincue. Alors, comme beaucoup, elle survit en animant des ateliers en MJC et en accumulant les animations supermarché. Ainsi des dernières fêtes de Pâques, qui l’ont ont vue déambuler en lapin au rayon chocolat d’un hyper( » Et encore, j’aurais pu être la cloche », sourit-elle amèrement).

Est-ce vrai ?

C’est compter sans l’eau qui dort… Et dont il faut toujours se méfier chez les femmes, tant elle peut se lever d’un coup en une vague énorme. C’est compter sans la propension qu’elles ont à ne jamais se contenter d’une situation bancale, pas nette, pas tranchée , là où les hommes composent souvent avec leur conscience -Marc plus que tout autre. Dans ces cas-là, pas de demi-mesure : quand elles tranchent, elles tranchent, quand elles arrachent, elles arrachent, et quand bien même l’arbre planter l’est depuis vingt ans, il entraîne tout dans sa chute : la souche, les racines et la motte de terre qui va avec, aussi considérable soit-elle. Il ne reste qu’un trou, une dent creuse de la taille d’un cratère.

 

 

Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard.

 

Ce roman a été chaudement défendu par une partie des lectrices du Club et cela lui a valu de participer « au coup de cœur des coups de cœurs » de l’année 2017/2018.
J’avais déjà essayé de le lire, mais l’écriture m’avait immédiatement rebutée. Je ne suis pas à l’aise lorsque je sens que, de façon artificielle, l’écrivain adopte une style « poétique » . Ici , cela passe par des mots vieillis qui ne rajoutent pas grand chose au récit : Corroyage, Extrace, Hierophante, Hongroye. Et puis par un rythme de phrases très particulier. L’écrivain dit qu’il a voulu décrire le basculement d’une petite ville de province : Besançon qu’il ne nomme pas (mais il dit que c’est la ville où est né Victor Hugo), vers le monde moderne pendant les années 1970/1980. Mais ce n’est vraiment qu’une toile de fond très lointaine à une vie de famille totalement perturbée par la mort d’un jeune enfant, le petit frère du narrateur. Sa mère va continuer à le faire vivre dans son imaginaire et dans sa folie, elle lui dresse un couvert, fait son lit, achète des vêtements et des fournitures scolaires pour lui…. Le père essaiera d’oublier tout cela dans l’alcool. Mais ce drame semble très lointain car il est vu à travers les yeux d’un enfant. Je pense que la seule façon d’aimer ce livre c’est d’aimer la langue de cet auteur, langue à laquelle je n’ai pas été sensible. Les deux passages que j’ai notés vous permettront, je l’espère, de vous faire une idée par vous même.

Citations

le linge qui sèche

Marguerite-des-Oiseaux possédait des culottes semblables à des voiles. Des culottes de trois trois-mâts que l’on imaginait gréées sur son fessier et que le moindre pet gonflait comme un grand foc afin de la propulser de la cuisine aux latrines. Les culottes de grand-mère, simples esquifs, ne prenaient pas le large et ressemblaient plutôt à des taies d’oreiller munies de deux grands trous. Celles de maman étaient à peine un peu moins prudes et formaient presque un V du côté de l’entre-cuisse. Quant aux slips de Lucien : inexistants. Elle les pendait ailleurs, Fernande, avec ses culottes à elle, dans un bûcher fermé à clé, hors de la vue des cuistres. Quand on a épousé un Monsieur d’importance qui possède pardessus, brillantine et joues flasques, on exhibe pas ces choses de basse extrace aux yeux du tout-venant.

Effet de style « poétique »

 Il possédait en lui, quelque chose d’inné, de bestial, comme un cri des cavernes lorsqu’un premier orage illumina la grotte ; un cri qui se serait transmis le silex en silex, de tison en disant, de feu en feu, de foyer en foyer, de forge en forge, et qui aurait fini par échouer, ici, entre ses mains de forgeron, comme il l’était sans doute écrit de toute éternité tant il semblait évident que Jacky avait dû naître d’un ventre de fer en fusion entre deux cuisses de lave au temps des grandes fissures cambriennes tandis que les volcans projetaient dans les menus quelques myriades d’enclumes phosphorescentes.

 

Traduit de l’anglais Françoise du Sorbier. Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard.

 

Voici la phrase d’accroche de la quatrième de couverture

Un petit bijou d’intelligence et d’esprit typiquement british, dans la lignée du « Cercle littéraire des amateurs d’épluchures de patates » et de « la dernière conquête du major Pettigrew »

Tout est dit ! La volonté de la maison d’édition de réaliser un maximum de ventes ! Un roman qui se lit facilement (trop sans doute !) des femmes britanniques courageuses, certaine indignes d’autres sublimes et tout cela sur fond de deuxième guerre mondiale. Si comme moi vous savez lu le roman de Mary-Ann Shaffer, vous aurez une curieuse impression de « déjà-lu » qui enlèvera une bonne partie de l’intérêt à cette histoire. Résumons : ce petit village anglais voit donc une superbe histoire d’amour, un horrible tyran familial organiser un échange de bébés, une femme énergique mais un peu stupide se laisser corrompre par l’argent, une Miss Marple bis qui résout un enquête un peu sordide, un bombardement qui tue deux personnages sympathiques, une enfant juive tchèque réfugiée, et un beau ténébreux qui n’est pas l’homme corrompu que l’on croyait. Nous suivons toutes ces histoires grâce aux courriers des unes et des autres ou aux journaux intimes qui étaient parait-il en usage pendant la guerre. J’ai bien aimé la construction de la choral et l’évocation des cantiques qui ponctuent le récit et avec Youtube, on peut les écouter tout en continuant la lecture qui ne vous fatiguera pas.

 

Citation

La couleur du roman

L’enthousiasme ouvre toutes les voies, car il les éclaire d’une lumière vive.

 

Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard.

 

Un livre très vite lu et sans doute très vite oublié, je n’ai aimé ni le style ni le propos. Une femme cadre dans une importante boite de communication, se sent dépassée par la jeune génération. Elle est mal dans sa peau et n’aime ni sa vie de femme ni sa vie de cadre. Elle s’invente une grossesse pour fuir ses problèmes, mauvaise idée ! Pendant cette fuite en avant dont elle finira par se sortir, elle connaîtra toutes les difficultés du monde moderne et les angoisses d’une femme de quarante trois ans qui souffre de renoncer à la maternité . La fin est très (trop) optimiste : elle retrouve son mari, un autre travail, sans doute en province loin du quartier de la Défense où elle n’a rencontré que la dureté et où la performance consiste surtout à écraser les autres.

 

Citations

Travailler à la défense

Avant, les gens travaillaient à Paris toute leur existence….À la défense on erre comme des malheureux sur le parvis, ou bien dans les galerie commercial des quatre temps. D’ailleurs je ne sors plus. Je bosse sans arrêt. Une pause d’une demi-heure, et c’est tout.
 Le bus. Les gens. On voit qu’ils vont à la défense. Leurs visages portent l’uniforme de la gravité et de l’ennui.

Une écriture que je n’apprécie pas et des portraits trop rapides

Alysson se tait enfin. Son bureau est en face au mien. Brune pas vilaine, mais une peau boutonneuse. Elle me sourit. Elle sourit tout le temps. Elle retire ses écouteurs, extirpe de son sac Lancel le dernier Musso, son iPhone, et pose le tout sur sa table. Elle est un peu maigre. Un nez pointu. Des lèvres fines. Alison, étonnante personne sûre d’elle-même, répond à Lionel comme à un pair. Très performante. Lorsqu’il s’agit de travail, ses prestations sont remarquables : elle a fait Dauphine. Mais sur les autres sujets, on dirait une midinette, une cagole. Pourquoi ne suis-je pas à l’aise ? Vis-à-vis d’elle, j’éprouve un sentiment de gêne, presque d’infériorité. Elle est exactement ce que je voudrais être : à l’aise dans mon travail. La force d’Alison est de ne pas douter d’elle-même.

Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard.


Si vous voulez passer quelques heures avec une personne ignoble, allez-y, ce Marcello Martini est pour vous ! Je vous le laisse avec grand plaisir. Yves Ravey, a un talent incroyable pour distiller les vilenies à petit feu. Le pire est toujours là, au chapitre suivant ! Je ne peux pas vous les raconter car l’intérêt du livre tient en cela, que l’on ne les découvre que petit à petit. Pour vous donner une idée de l’ambiance du roman, vous avez entendu parler des rapaces qui tournent autour des vieilles dames trop vieilles et trop riches (Liliane Bettencourt par exemple) ? En lisant ce roman, vous serez aux premières loges. Heureusement notre Marcello, quoique très malin, sans scrupule et incapable d’émotion, multiplie gaffe sur gaffe. En fera-t-il assez pour se faire prendre ?

Tout le long de la lecture, je me demandais quel plaisir avait éprouvé l’écrivain à rester pendant des jours et des jours auprès d’un tel personnage. Je sais que certaines et certains (surtout certains, il est vrai) aiment bien les histoires sordides et sans émotion. Ils vont être servi ! Quant à moi, j’ai trop besoin de croire dans l’humanité pour apprécier ce roman qui est, quand même, je le souligne, un petit chef d’oeuvre de suspens littéraire.

Un passage

Discussion avec Honorable son surveillant d’internat dans « l’école » en Afrique créée par Marcello .

Il reste quelques enfants, a répondu mon surveillant. Ils logent juste pour une nuit encore dans le dortoir, avant de repartir pour la frontière… Donc, tout le monde se porte bien, c’est ce que tu es en train de me dire, Honorable… ? Tout est en ordre, monsieur Marcello, un seul problème, avec la banque, le directeur de l’agence de voyage s’est déplacé en personne, il dit qu’il n’arrive pas à obtenir le paiement de votre billet d’avion… Mais enfin ! Honorable ! Ce n’est pas difficile de se déplacer en personne, le bureau est en face de son agence, suffit de traverser la rue, cette histoire de billet d’avion, rien de grave, tu le fais patienter…. Mais, dites, patron, j’ai avancé personnellement l’argent, par chèque, maintenant, je suis à découvert sur mon compte, et qui va payer les intérêts ? J’ai soupiré, bon Dieu mais ce n’est pas possible ces banquiers, Honorable il faut leur répondre, tu leur dis que tu ne paieras pas un centime d’agios un point c’est tout ! il ne faut surtout pas se laisser faire par ces gens là ! c’est tous les mêmes tu sais…. ! C’est peut-être tous les mêmes, comme vous dites monsieur Marcello, mais c’est eux qui avancent l’argent et qui prennent les intérêts et là ils vont pas gêner faites-moi confiance.

Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard.


J’ai beaucoup aimé de cette auteure deux de ses romans historique « L’adieu à la reine » que j’ai lu avant Luocine et « Le testament d’Olympe« . Son livre de souvenirs était proposé à notre club de la rentrée, je l’ai donc commencé avec un a priori favorable. De plus les jeux d’enfant sur les plages me sont familiers ainsi que les ambiances de ville balnéaires en saison comme hors saison. Mais malgré ma bonne volonté, je n’ai rien reçu en lisant ce livre, qui n’est ni déplaisant ni plaisant. Je me disais sans cesse que si cette auteure n’était pas connue, peu de gens liraient ce livre qui est, je le reconnais, élégant et délicat. Chantal Thomas,( pour moi c’est une qualité), n’est pas de la veine des femmes qui aiment avec courage mais souvent trop d’impudeur étaler la moindre de leurs souffrances, elle reste mesurée et par touches très fines nous fait vivre une enfance bercée par les embruns et les odeurs d’estran et une mère fantasque. Elle raconte ses châteaux sur le sable, ses pêches miraculeuses dans les rochers, des grands parents qui pallient l’absence d’une mère plus intéressée par son propre bonheur que celui de ses proches. Je sais que j’oublierai ce livre aussi vite que la marée défait les œuvres éphémères des enfants sur la plage.

Citations

Parce que je connais des amoureux du tandem

Si aimer ce n’est pas se regarder l’un l’autre c’est regarder ensemble dans la même direction, alors le tandem et le véhicule par excellence de l’amour. L’un derrière l’autre, pédalant de concert dans la même direction, ils avaleront des kilomètres.

Les châteaux de sable

Le château continue de crouler. Vous auriez dû le construire dans le sable sec, là où la marée ne monte pas, pontifie un père qui ignore l’attrait des causes perdues et l’empire des ruines. C’est parce que le château s’écroule, c’est dans l’intervalle où, quoique délabré, il garde des traces de sa gloire passée, que soudain il s’anime et devient habité. Il est traversé de voix, on entend des appels au secours, des histoires se nouent, et une grande tristesse nous abat.

La maladie d’Alzheimer

Ma mère a tellement travaillé dans le sens de l’oubli, tellement voulu oublier, que maintenant que l’oubli lui arrive de l’extérieur, en forme de pathologie, elle a une supériorité sur ceux qui ne s’étaient pas entraînés, ceux que l’oubli frappent de plein fouet. Elle est étrangement à l’aise avec le processus mystérieux et actif en train d’effacer certaines de ses données existentielles. Elle est à l’aise, elle n’est pas complice. Elle sent que quelque chose la dépasse, qui ne s’agit plus d’une amnésie sous contrôle des noms de personnes et de lieu rayés de son monde comme porteur de mauvaises ondes, d’images désagréables et douloureuses. Un enfouissement réussi. Chez-elle les gens, les lieux, les noms, bétonnés sous une couche de silence, n’émergent plus jamais dans un espace vivant de conversation, de rires, de larmes, ni même par une allusion, une soudaine tristesse où se fige l’expression. Le nom de mon père n’a aucune chance de franchir la barrière de ses lèvres, pas plus que celui d’Arcachon.

Traduit de l’anglais (Irlande) par Isabelle D. Philippe. Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard thème : « en chantant ».

Pour une fois, je crois qu’il vaut mieux voir le film que lire le livre qui l’a inspiré.

Film d’Alan Parker.


Le film est très drôle, visiblement, j’admire le talent des cinéastes qui savent à partir d’un tel livre faire un excellent film. On sent bien cependant toute la vie qui jaillit des dialogues mais c’est très très pénible à lire. Pour vous faire une idée je vous recopie un passage, tout le roman est écrit sous cette forme là. J’ai fini par survoler plus que vraiment le lire.

Citation

Création du groupe

-Tous ces trucs à la noix sur l’amour, la campagne et les rendez-vous avec les meufs dans les supermarchés ou au McDonald, c’est fini, à la masse. C’est malhonnête, déclara Jimmy.C’est bourgeois…
-Merde !
-C’est des trucs ringards, Dieu merci !
-Qu’est ce qui marche alors ? lui demanda Outspan
-Je vais te le dire. Le sexe et la politique.
-Quoi ?
-Le vrai sexe. Pas le genre sentimental « Je te tiendrai la main jusqu’à la fin des temps » Baiser, foutre… tu vois ce que je veux dire ?
-Je crois.
-Mais on ne peut pas dire « foutre » dans une chanson objecta Derek…

Traduit de l’anglais (États-Unis) par Bernard Hœpffner avec la collaboration de Catherine Goffaux.


Le récent article de Keisha m’a amenée à relire ce roman que j’avais abandonné, il m’a fallu toute la force de sa conviction pour que je le termine. J’ai failli plus d’une fois faire comme Sandrine renvoyer ce roman aux oubliettes. Il est construit autour d’un texte perdu, caché, présenté comme « unique » et « superbe », il donne, donc, au lecteur une seule envie : le lire à son tour pour partager et comprendre ce plaisir mais les extraits qui sont donnés sont (pour moi) des flops, cette déception a entraîné une partie de mon désamour pour ce ce livre.

Extrait du livre présenté comme un chef d’oeuvre

Pendant l’age du verre, chacun pensait qu’une partie de son corps était extrêmement fragile. Pour certains c’était une main, pour d’autres un fémur, et d’autres encore pensaient que c’était leur nez qui était en verre. L’âge du verre avez suivi l’âge de la pierre en tant que processus évolutif de correction, avait introduit un sentiment nouveau de fragilité dans les relations humaines qui encourageait la compassion.

Pourquoi autant de mystère autour d’un texte aussi inintéressant ! Mais le pire n’est pas là, le côté absolument insupportable de ce roman c’est sa construction. Les personnages sont reliés entre eux par des fils qui sont si emmêlés que l’on ne sait pas ce qui les rapproche. Il y a cependant de très beaux passages, les évocations des différents aspects de l’extermination des juifs de Pologne et d’Europe centrales. Le poids de tous ces morts et les souvenirs qui ne peuvent plus être ravivés par les vivants mais qui se sont arrêtés alors que les parents, les frères les sœurs, les amants et amantes avaient encore le reste de leur vie à partager avec la fratrie ; cela finit par étouffer les survivants. J’aurais tant voulu apprécier ce livre, je suis bien triste de ne pas y être parvenue.

Citations

Une mère envahissante

Quand je disais que j’allais dans ma chambre elle m’appelait : « Que puis-je faire pour toi, je t’aime tellement », et j’avais toujours envie de dire,mais sans jamais le faire : Aime- moi moins.

Le grand amour

Et si l’homme avait autrefois été un garçon qui avait promis qu’il ne tomberai jamais amoureux d’une autre fille tant qu’il vivrait a tenu promesse, ce n’est pas parce qu’il était têtu ni même loyale. Il ne pouvais pas faire autrement. Et, après s’être caché pendant trois ans et demi, caché son amour pour un fils qui ne savait même pas qu’il existait ne paraissait pas impensable. Pas si c’était ce que la seule femme qu’il aimerait jamais lui demanderait de faire. Après tout, quelle importance si un homme doit cacher une chose de plus lorsqu’il a complètement disparu ?

Un juif réfugié au Chili et le poids de la découverte du sort de ceux qui sont restés en Pologne.

La guerre s’acheva. Petit à petit, Livinov apprit ce qu’était devenu sa soeur Myriam, et de ses parents, et de quatre autres frères et sœurs (ce qui était arrivé à son frère aîné André, il ne put le deviner qu’à partir de probabilité). Il apprit à vivre avec la vérité. Pas à l’accepter, mais vivre en sa compagnie. C’était comme s’il vivait avec un éléphant. Sa chambre était minuscule et, chaque matin, il devait se glisser le long de la vérité simplement pour se rendre à la salle de bains. Pour atteindre l’armoire et sortir des sous-vêtements, il lui fallait passer à quatre pattes sous la vérité, en priant qu’elle ne choisisse pas ce moment précis pour s’asseoir sur son visage. La nuit, quand il fermait les yeux, il la sentait planer au-dessus de lui.


Je suis toujours à la recherche de nouvelles pour pouvoir les lire à haute voix à un public de vieilles dames. J’aime beaucoup l’écriture de Benoît Duteutre, et ce livre est encore une fois parfaitement écrit. Ces nouvelles ont été rédigées au moment où sa mère mourait dans une maison adaptée à la grande vieillesse dépendante d’autrui pour survivre. Et toutes ces nouvelles sont marquées par cette tristesse et même si c’est bien vu, c’est trop triste pour moi (et pour mon public qui a surtout besoin d’optimisme pour vaincre le poids des soucis de santé). Dans un des textes, il met en scène les retrouvailles des familles sur la plage d’Étretat (cela pourrait être Dinard) qui s’émerveillent devant le dernier né de la famille et toutes les petites têtes blondes qui jouent sur la plage. Face à ce que peuvent devenir chaque humain au choix (selon lui) : délinquant, abruti, cancéreux, sectaire ou drogué, il a du mal à être au diapason de cette joie qu’il trouve factice. Constatant de plus que l’homme est, quelque soit son destin, le plus grand prédateur de la planète, il se réjouit que lui et son compagnon n’aient pas d’enfants.

Dans une autre nouvelle, son personnage principal s’agace du musicien de rue qui joue toujours le même morceau. Son agacement tournera à l’obsession, et il perdra son goût pour l’écriture, son logement et son amie qui tombera amoureuse du musicien en question. Toutes les nouvelles ont cette couleur là, et, ce n’est évidemment pas la description de la vie de la maison dans laquelle sa mère va mourir qui peut nous réjouir. Il passe aussi ses vacances dans les Vosges, la description de la fin du monde rural est d’une tristesse infinie. Bref si vous avez un moral d’acier et que vous voulez une petite note de tristesse ce livres est pour vous, sinon fuyez, vous allez devenir neurasthénique !

Citations

« La vie » à la campagne  :

Il vivait avec ses deux sœurs, l’une neurasthénique et l’autre aveugle, si je me souviens.Le peuple de la campagne acceptait ses imperfections comme un des caractères de l’humanité : on y rencontrait des sourds-muets, des boiteux, des idiots, mais aussi quantité de vieux célibataires dans cette vallée progressivement dépeuplée.

L’enterrement

La mort de Mme Maréchal, en 1976, est l’une des premières dont je me souvienne. Je me rappelle surtout que ma grand-tante, excellente musicienne, joua de l’harmonium pour l’inhumation et que pour la remercier, M. Maréchal vint chez nous quelques jours plus tard, en costume noir, coiffé d’une casquette. De sa voix de sourdine, il voulait savoir comment il pourrait dédommager ma grand-tante pour les obsèques de sa femme. Timide, hésitant, il finit par lui demander si elle aimerait quelques brouettes de fumier. Ainsi s’achevaient les vies d’autrefois, quand toutes les pensées retournaient vers la terre.

Le charme de la campagne

Un jour, enfin, à ce qu’on m’a dit, il est sorti de chez lui au petit matin, puis s’est rendu au ruisseau où il a plongé sa tête dans l’eau froide et l’y a maintenue volontairement jusqu’à l’asphyxie. Son nom est venu s’ajouter à la litanie des suicides paysans, à ces fins obscures dans les fermes perdues, à ces pendus des greniers à foi. Et à tous ces campagnards mélancoliques hantés par le destin.

Dernière phrase de ce livre trop triste

Le mois de septembre approche et, déjà, je songe au fagot de petit bois que je vais bientôt aller ramasser, dans mon coin des Vosges, dans le nord-est de la France, près du cimetière qui m’attend, qui nous attend… Mais, pour l’heure, j’écoute la voix de la mère et je me sens bien.