Traduit de l’allemand et annoté par Élisabeth Guillot.


Les cinq coquillages veulent dire, tout simplement, qu’il faut lire ce livre car il nous en apprend tant sur une période qu’on voudrait à jamais voir bannie et fait réfléchir sur la langue du monde politique qui veut manipuler plus que convaincre. Rosa Montero dans « la folle du logis« en parlait et elle m’a rappelé que je voulais le lire depuis longtemps. À mon tour de venir conseiller cette lecture à toutes celles et tous ceux qui se posent des questions sur le nazisme en particulier sur l’antisémitisme des Allemands. Ce pays hautement civilisé qui en 1933 permit que l’on inscrive à l’entrée de l’université de Dresde où Victor Klemperer enseignait la philologie  :

« Quand le Juif écrit en allemand, il ment. »

Comment cet homme qui se sent tellement plus allemand que juif peut-il comprendre alors, qu’aucun de ses chers confrères n’enlèvent immédiatement cette pancarte ? Cet homme qui a failli laisser sa vie pour sa patrie durant la guerre 14-18 ne peut accepter le terrible malheur qui s’abat sur lui. Pour ne pas devenir fou, il essaie d’analyser en bon philologue la langue de ses bourreaux. Il cachera le mieux qu’il peut ses écrits et leur donnera une forme définitive en 1947. Comment a-t-il survécu ? contrairement à son cousin Otto le chef d’orchestre, il est resté en Allemagne, marié à une non-juive ; il a survécu tout en subissant les lois concernant les Juifs alors qu’il était baptisé depuis de longues années. La veille des bombardements de Dresde, il devait être déporté avec sa femme, les conséquences tragiques du déluge de feu qui s’est abattu sur sa ville lui ont permis de fuir en dissimulant son identité.

Son essai montre de façon très précise comment on peut déformer l’esprit d’un peuple en jouant avec la langue et en créant une pseudo-science . Il semble parfois ergoter sur certains mots qui ne nous parlent plus guère, mais ce ne sont que des détails par rapport à la portée de ce livre. Il est évident que Victor Klemperer réussit à survivre grâce à l’amour de sa femme et le dévouement d’amis dont ils parlent peu. Il est tellement choqué par la trahison des intellectuels de son pays qu’il a tendance à ne rien leur pardonner et être plus attentif aux gens simples, qu’ils jugent plus victimes du régime que bourreaux . Pour ceux qui avaient la possibilité de réfléchir, il démontre avec exactitude qu’ils ont failli à leur mission d’intellectuels. Malheureusement dans un passage dont je cite un court extrait, on voit que sa clairvoyance s’est arrêtée au nazisme et qu’il est lui-même aveuglé par l’idéologie communiste. Le livre se fait poignant lorsque Victor Klemperer se laisse aller à quelques plaintes des traitements qu’il subit quotidiennement. Que ce soit » le bon » qu’il reçoit pour aller chercher un pantalon usagé réservé aux juifs, puisqu’il ne peut plus acheter ni porter des vêtements neufs, ou le geste de violence qui le fait tomber de la plate-forme du bus, seul endroit que des juifs peuvent utiliser dans les transports en commun. Avec, au quotidien, la peur d’enfreindre une des multiples règles concernant les juifs et l’assurance, alors, d’être déporté : avoir un animal domestique, avoir des livres non réservés aux juifs, dire Mendelssohn au lieu du « juif Mendelssohn », sortir à des heures où les juifs n’ont pas le droit d’être dehors, ne pas laisser la place assez rapidement à des aryens, ne pas claironner assez fort « Le juif Klemperer » en arrivant à la Gestapo où de toutes façon il sera battu plus ou moins fortement … un véritable casse-tête qui fait de vous un sous-homme que vous le vouliez ou non.

Lors de la réflexion sur le poids des mots et des slogans en politique, j’ai pensé que nous avions fait confiance à un parti qui s’appelle « En marche », et que ces mots creux ne dévoilaient pas assez, à travers cette appellation, les intentions de ceux qui allaient nous gouverner. En période troublée, les mots comme « République » ou « Démocratie » sont sans doute plus clairs mais engagent-ils davantage ceux qui s’y réfèrent ?

Citations

Pour situer ce livre, on peut lire ceci dans la préface de Sonia Combe

À la fin de la guerre, Victor Klemperer et à double titre un survivant. Tout d’abord, bien entendu, parce qu’il a fait partie de ces quelques milliers de Juifs, restés en Allemagne, qui ont échappé à la déportation. Mais, en second lieu, parce qu’il demeure ce qu’il a toujours été, un Juif irrémédiablement allemand, un rescapé de la « symbiose judéo-allemande », de ce bref moment de l’histoire allemande qui permit la sécularisation de l’esprit juif, l’acculturation des juifs et leur appropriation de l’univers culturel allemand. Quoi qu’il en soit de la réalité de cette symbiose, aujourd’hui le plus souvent perçu comme un mythe ou l’illusion rétrospective d’une relation d’amour entre Juifs et Allemands qui ne fut jamais réciproque, Klemperer est l’héritier spirituel de cette Allemagne fantasmé et désiré – au point qu’elle restera, quoi qu’il arrive et pour toujours, sa seule patrie possible.

La mauvaise foi des scientifiques allemands de l’époque nazie

Le congrès de médecine de Wiesbaden était lamentable ! Ils rendent grâce à Hitler, solennellement et à plusieurs reprises, comme « Au Sauveur de l’Allemagne »-bien que la question raciale ne soit pas tout à fait élucidée, bien que les « étrangers » , August von Wassermann médecin allemand 1866 1925, Paul Ehrlich,médecin allemand 1854 1915 prix Nobel de médecine en 1908 et Neisser aient accompli de grandes choses. Parmi « mes camarades de race » et dans mon entourage le plus proche, il se trouve des gens pour dire que ce double « bien que » est déjà un acte de bravoure et c’est ce qu’il y a de plus lamentable dans tout cela. Non, la chose la plus lamentable entre toutes, c’est que je sois obligé de m’occuper constamment de cette folie qu’est la différence de race entre Aryens et Sémite, que je sois toujours obligé de considérer tout cet épouvantable obscurcissement et asservissement de l’Allemagne du seul point de vue de ce qui est juif. Cela m’apparaît comme une victoire que l’hitlérisme aurait remportée sur moi personnellement. Je ne veux pas la lui concéder.

L’influence Nazie dans les couches populaires.

Frieda savait que ma femme était malade et alitée. Un matin, je trouvais une grosse pomme au beau milieu de ma machine. Je levais les yeux vers le poste de Frieda et elle me fit un signe de tête. Un instant plus tard, elle se tenait à côté de moi : « pour ma petite mère, avec toutes mes amitiés ». Puis d’un air curieux et étonné, elle ajouta :  » Albert dit que votre femme est allemande. Est-elle vraiment allemande ? »
 La joie que m’avait causée la pomme s’envola aussitôt. Dans cette âme candide qui ressentait les choses de manière absolument pas nazie mais, au contraire, très humaine, s’était insinué l’élément fondamental du poison nazi ; elle identifiait  » Allemand » avec le concept magique d’  » Aryen » ; il lui semblait à peine croyable qu’une Allemande fut mariée avec moi, l’étranger, la créature appartenant à une autre branche du règne animal ; elle avait trop souvent entendu et répété des expressions comme « étrangers à l’espèce »,  » de sang allemand », « racialement inférieur », « nordique » et « souillure raciale » : sans doute n’associait-elle à tout cela aucun concept précis, mais son sentiment ne pouvait appréhender que ma femme pût être allemande.

L’auteur se pose cette question :

Mais voilà que le reproche que je m’étais fait pendant des années me revenait à l’esprit, ne surestimais-je pas, parce que cela me touchait personnellement de manière si terrible, le rôle de l’antisémitisme dans le système nazi ?
 Non, car il est à présent tout à fait manifeste qu’il constitue le centre et, à tout point de vue, le moment décisif du nazisme dans son ensemble. L’antisémitisme, c’est le sentiment profond de rancune éprouvés par le petit-bourgeois autrichien déchu qu’était Hitler ; l’antisémitisme, sur le plan politique, c’est la pensée fondamentale de son esprit étroit. L’antisémitisme, du début jusqu’à la fin, le moyen de propagande le plus efficace du Parti, c’est la concrétisation la plus puissante et la plus populaire de la doctrine raciale, oui, pour la masse allemande c’est identique au racisme. effet, que sait la masse allemande des dangers de l » negrification » (Verniggerun) et jusqu’où s’étend sa connaissance personnelle de la prétendue infériorité des peuples de l’Est et du Sud-Est ? Mais un Juif, tout le monde connaît ! Antisémitisme et doctrine raciale sont, pour la masse allemande, synonyme. Et grâce au racisme scientifique ou plutôt pseudo-scientifique, on peut fonder justifier tous les débordements et toutes les prétentions de l’orgueil nationaliste, chaque conquête, chaque tyrannie, chaque extermination de masse.

Originalité de l’antisémitisme nazie

Dans les temps anciens, sans exception, l’hostilité envers les Juifs visait uniquement celui qui était en dehors de la foi et de la société chrétienne ; l’adoption de la confession et des mœurs locales avait un effet compensateur, et (au moins pour la génération suivante) oblitérant. En transposant la différence entre Juif et non-Juifs dans le sang, l’idée de race rend tout compensation impossible, elle rend la séparation éternelle et la légitime comme œuvre de la volonté divine

Aveuglement sur le communisme

Car il est urgent que nous apprenions à connaître le véritable esprit des peuples dont nous avons été isolés pendant si longtemps, au sujet desquels on nous a menti pendant si longtemps. Et l’on ne nous a jamais menti autant que sur le peuple russe… Et rien ne nous conduit au plus près de l’âme d’un peuple que la langue… Et pourtant, il y a  » mettre au pas » et « ingénieur de l’âme » -tournures techniques l’une et l’autre. La métaphore allemande désigne l’esclavage et la métaphore russes, la liberté.

Le cogneur et le cracheur les deux hommes de la Gestapo qui ont tourmenté Klemperer pendant de longues années, ils les opposent aux intellectuels

Le cogneur et le cracheur, c’étaient des brutes primitives (bien qu’ils eussent le grade d’officier), tant qu’on ne peut pas les assommer, il faut supporter ce genre d’homme. Mais ce n’est pas la peine de se casser la tête dessus. Alors qu’un homme qui a fait des études comme cet historien de la littérature ! Et, derrière lui, je vois surgir la foule des hommes de lettres, des poètes, des journalistes, la foule des universitaires. Trahison, où que se porte le regard.
 Il y a Ulitz, qui écrit l’histoire d’un bachelier juif tourmenté et la dédie à son ami Stefan Zweig, et puis au moment de la plus grande détresse juive, voilà qu’il dresse le portrait caricatural d’un usurier juif, afin de prouver son zèle pour la tendance dominante.

Traduit de l’anglais (américain) par Jean Esch.

Deux livres qui se suivent traduits par le même traducteur, j’aimerais tant confronter mon opinion à la sienne. Autant je me suis sentie enfermée dans le bon roman « les filles au lion » autant je me suis sentie libre dans celui-ci. Libre d’aimer , libre de croire à l’histoire , libre d’imaginer les personnages. La cuisine et la recherche (parfois très compliquée) des bons aliments sont à le mode visiblement dans tous les pays. L’avantage de prendre comme fil conducteur la cuisine , c’est de traverser toutes les couches de la société américaine. Entre le grand bourgeois raffiné qui peut payer un repas d’exception et le petit mitron qui épluche les légumes l’éventail des personnalités et des situations est assez large. L’avantage aussi, c’est que comme pour toute forme d’art, seul le travail paye. Et devenir une chef mondialement connue comme le personnage Eva Thorvald est une tension de tous les instants entre les exigences de la vie et celle du créateur.

Dans ce roman, la très bonne cuisine n’est pas tant une sophistication de la cuisson que l’exigence de la qualité des produits. Toute création cache une souffrance et celle d’Eva vient de sa naissance , abandonnée par sa mère , orpheline trop tôt d’un père qui a juste eu le temps de lui donner le goût de la bonne nourriture, elle rame pour survivre d’abord au lycée. Ah ! les lycées américains la violence qui y règne est d’autant plus surprenante que ce n’est pas l’image que j’en avais. Souvent quand j’interrogeais les étudiants américains sur leurs années lycée, ils me disaient que cela représentait pour eux un grand moment de bonheur, alors que les jeunes Français détestent presque toujours leur lycée. Le roman s’intéresse ensuite à différents personnages, l’on croit quitter Eva mais on suit son parcours et sa progression comme chef d’exception à travers les rencontres qu’elle est amenée à faire, elle n’est plus alors le personnage principal, et cela nous permet de comprendre un autre milieu à travers une autre histoire.

On passe du concours de cuisine consacré aux barres de céréales où toutes les mesquineries habituelles dans ce genre de compétition sont bien décrites, à l’ouverture de la chasse aux cerfs d’une violence que je ne suis pas prête d’oublier. La scène finale rassemble les éléments du puzzle de la vie d’Éva dans un moment d’anthologie romanesque et culinaire. Finalement c’est au lecteur de réunir tous les personnages, j’ai relu deux fois ce roman pour être bien sûre d’avoir bien tout compris. Un grand moment de plaisir dans mon été qui était plutôt sous le signe de romans plus tristes et je le dois à Aifelle qui avait été tentée par Cuné et Cathulu.

Citations

Légèreté et d’humour explication du lutefisk

Peu importe que ni Gustaf ni sa femme Elin, ni ses enfants n’aient jamais vu, et encore moins attrapé, assommé, fait sécher, trempé dans la soude, retrempé dans l’eau froide, un seul poisson à chair blanche, ni accompli la délicate opération de cuisson nécessaire pour obtenir un aliment qui, quand il était préparé à la perfection, ressemblait à du smog en gelée et sentait l’eau d’aquarium bouillie.

 Toujours le lutefisk

Lars, quant à lui, fut stupéfait par ces vieilles scandinaves qui vinrent le trouver à l’église pour lui dire :  » Un jeune homme qui prépare le lutefisk comme toi aura beaucoup de succès auprès des femmes ». Or, d’après son expérience, la maîtrise du lutefisk provoquait généralement du dégoût, au mieux de l’indifférence, chez ses rencards potentiels. Même les filles qui prétendaient aimer le lutefisk ne voulaient pas le sentir quand elles n’en mangeaient pas, mais Lars ne leur laissait pas le choix.

Rupture amoureuse

« – Mais en attendant, contentons-nous d’être amis. »
Will avait déjà entendu cette phrase et il avait appris à ne plus écouter ce que disait la fille ensuite parce que c’était du baratin.

Le maïs

Anna Hlavek cultivait un produit rare, presque inouï : une variété de maïs à pollinisation libre qui n’avait pas changé depuis plus de cent ans. D’après ce qu’elle savait, Anna avait hérité d’un stock de semences ayant appartenu à son grand-père, qui les avait achetés par correspondance ….en 1902. C’était exactement le même maïs que mangeait les arrières-grands-parents d’Octavia dans leur ferme près de Hunter dans le Dakota du Nord : des grains charnus, fermes et juteux qui explosaient dans la bouche, si sucrés qu’on aurait pu les manger en dessert.

Classe aisée américaine

 Octavia qui avait grandi à Minnetonka, entouré de gens fortunés au goût sûr, qui avait obtenu des diplômes d’anglais et de sociologie à Notre-Dame, dont le père était avocat d’affaires et la belle-mère un ancien mannequin devenue représentante dans l’industrie pharmaceutique, était destinée à épouser un homme comme Robbe Kramer. Elle n’aspirait pas à une vie meilleure que celle qu’elle avait connue dans son enfance ; elle n’avait pas besoin d’être plus riche, juste aisée, auprès d’un ami comme Robbe, attaché au même style de vie. Elle serait heureuse, elle le savait, de l’accompagner dans ses dîner de bienfaisance politique, et de charmer les épouses moins intelligentes de ces futurs associés. Elle avait même appris à jouer au golf, elle savait confectionner vingt sept cocktails différents, elle pouvait regarder un match des Minnesota Vikings et comprendre ce qui se passait sans poser de questions.

Traduit de l’anglais (États-Unis) par Marie Bisseriex. Livre lu grâce à Babelio et offert par les éditions « le nouveau pont ».


Pat Conroy fait partie des auteurs qui savent me transporter dans un autre monde et dans un autre genre de vie. J’ai lu tous ses romans et sa mort m’a touchée. Le monde dans lequel il me transporte, c’est la Louisiane ou l’Alabama. Il sait me faire aimer les états du Sud, pourtant souvent peu sympathiques. Il faut dire qu’il vient d’une famille pour le moins non-conventionnelle  : sa mère qui se veut être une « parfaite dame du Sud », n’est absolument pas raciste, car si elle est en vie, c’est grâce à une pauvre famille de fermiers noirs qui l’a nourrie alors qu’elle et ses frères et sœurs mouraient de faim pendant la grande dépression. Le racisme, l’auteur le rencontrera autant à Chicago dans la famille irlandaise qu’à Atlanta mais sous des formes différentes. L’autre genre de vie, c’est sa souffrance et sans doute la source de son talent d’écrivain : une famille « dysfonctionnelle », un père violent et des enfants témoins d’une guerre perfide entre parents dont ils sont toujours les premières victimes.

Ce livre est donc paru (en France ?) après la mort de son auteur et explique à ses lecteurs pourquoi malgré cette enfance absolument abominable il s’est réconcilié avec ses deux parents. Il montre son père « le grand Santini » sous un jour différent grâce au recul que l’âge leur a donné à tous les deux. Cet homme aimait donc ses enfants autant qu’il les frappait. Il était incapable du moindre mot de gentillesse car il avait peur de les ramollir. Plus que quiconque le « grand Santini » savait que la vie est une lutte terrible, lui qui du haut de son avion a tué des milliers de combattants qui menaçaient les troupes de son pays. Un grand héros pour l’Amérique qui a eu comme descendance des enfants qui sont tous pacifistes.

Pat Conroy a fait lui même une université militaire, et il en ressort écœuré par les comportements de certains supérieurs mais aussi avec une certaine fierté de ce qu’il est un … « Américain » . Il décrit bien ces deux aspects de sa personnalité, lui qui pendant deux ans est allé enseigner dans une école où il n’y avait que des enfants noirs très pauvres. Il dit plusieurs fois que l’Amérique déteste ses pauvres et encore plus quand ils sont noirs. Mais il aime son pays et ne renie pas ses origines.

On retrouve dans cette biographie l’écriture directe et souvent pleine d’humour et dérision de cet écrivain. Il en fallait pour vivre chez les Conroy et s’en sortir. On reconnaît aussi toutes les souffrances qu’il a si bien mises en scène dans ses romans. On peut aussi faire la part du romanesque et de la vérité, enfin de la vérité telle qu’il a bien voulu nous la raconter. Ce livre je pense sera indispensable pour toutes celles et tous ceux qui ont lu et apprécie Pat Conroy

Citations

Un des aspect de Pat Conroy son estime pour certains militaires

À la dernière minute de ma vie surmilitarisée, j’avais rencontré un colonel que j’aurais suivi n’importe où, dans n’importe quel nid de mitrailleuse et avec lequel j’aurais combattu dans n’importe quelle guerre. Ce colonel, dont je n’ai jamais su le nom, me permit d’avoir un dernier aperçu du genre de soldat aux charmes desquels je succombe toujours, dévoués, impartiaux et justes. C’est lui qui me flanqua à la porte et qui me renvoya dans le cours de ma vie.

Genre de portrait que j’aime

Sa relation avec la vérité était limitée et fuyante -mais son talent pour le subterfuge était inventif et insaisissable par nature.

Toute famille a son barjot

 Autant que je sache, chaque famille produit un être marginal et solitaire, reflet psychotique de tous les fantômes issus des enfers plus ou moins grands de l’enfance, celui qui renverse le chariot de pommes, l’as de pique, le chevalier au cœur noir, le fouteur de merde, le frère à la langue incontrôlable, le père brutal par habitude, donc qui essaie de tripoter ses nièces, la tante trop névrosée pour jamais quitter la maison. Parler moi autant que vous voulez des familles heureuses mais lâchez-moi dans un mariage ou dans un enterrement et je vous retrouverai le barjot de la famille. Ils sont faciles à repérer.

Son père

Les années les plus heureuse de mon enfance étaient celles où Papa partait à la guerre pour tuer les ennemis de l’Amérique. À chaque fois que mon père décollait avec un avion, je priais pour que l’avion s’écrase et que son corps se consume par le feu. Pendant trente et un ans, c’est ce que j’ai ressenti pour lui. Puis j’ai moi-même déchiré ma propre famille avec mon roman sur lui, « Le grand Santini ».

Humour que l’on retrouve dans les romans de Pat Conroy

-Ton oncle Joe veut te voir. Il habite dans un bus scolaire avec vingt-six chiens.
-Pourquoi ?
– Il aime les chiens, je crois. Ou alors les bus scolaires

La sœur poète et psychotique

Ma sœur Carole Ann a vécu une enfance vaillante et sans louange mais surtout une enfance d’une solitude presque insupportable. Elle aurait été un cadeau pour n’importe quelle famille mais passa inaperçue la plupart du temps. À tout point de vue, c’était une jolie fille qui n’arrivait pas à la hauteur des attentes des mesures et de sa mère. Malgré elle, Peg Conroy avait le don insensé de faire croire à ses filles qu’elles étaient moches.

Son rapport à l’Irlande

Dans mon enfance, tout ceux qui me frappaient était irlandais, depuis mon père, ses frères et ses sœur, jusqu’aux nonnes et aux prêtres qui avaient été mes enseignants. Je percevais donc l’Irlande comme une nation qui haïssait les enfants et qui était cruelle envers les épouses.

L’éloge funèbre de Pat Conroy à son père

Il ne savait pas ce qu’était la mesure, ni même comment l’acquérir. Donald Conroy est la seule personne de ma connaissance dont l’estime de soi était absolument inébranlable. Il n’y avait rien chez lui qu’il n’aimait pas . Il n’y avait rien non plus qu’il aurait changé. Il adorait tout simplement l’homme qu’il était et allait au devant de tous avec une parfaite assurance. Papa aurait d’ailleurs aimé que tout le monde soit exactement comme lui.

 Son obstination été un art en soi. Le grand Santini faisait ce qu’il avait à faire, quand il le voulait et malheur à celui qui se mettait en travers de son chemin.

J’ai racontés tous les soirs, cet été, les trois albums de loup gris. Merci à leurs auteurs Gilles Bizouerne et Ronan Badel

Arthur adore les trois albums. Il est incapable de vous dire celui qu’il préfère. Il connaît certaines phrases par cœur et vous explique très bien ce que veut dire « évanoui ». Il n’a pas du tout peur de Loup gris « le plus beau le plus costaud », il le trouve même un peu bête. Et comme pour loup gris, on a beaucoup de mal à savoir si Arthur dit « chef » ou « Sef » alors il comprend très bien que l’on peut zeuzeuter « un peu », mais manger une mouche (une mousse ») ça jamais ! Son passage préféré ? quand le chien mange la queue du loup et les pages d’après, celles où on voit le loup courir avec un moignon de queue : cet âge est charmant !

J’ai pris beaucoup de plaisir à raconter ces histoires car on peur faire des effets de voix et c’est vraiment très drôle pour un adulte aussi, les dessins sont parfaits.

 

Comme le goût des loups était bien installé j’ai rajouté

 « les quatre loups » de Alain Gaussel et Caroline d’All Ava

Le problème de cet album c’est qu’il y a » le loup de la nuit » qui fait peur, donc Arthur écoute cette histoire avec son épée et menace le loup si par hasard celui-ci ne se tenait pas tranquille. Il aime beaucoup ce petit garçon qui n’a pas peur des loups et d’ailleurs au zoo de la Bourbansais, il voulait surtout voir les loups et vérifier la taille de leurs grandes dents. C’est une histoire bien écrite pour être racontée à voix haute et qui a un rythme de conte poétique. Je n’apprécie pas trop les dessins mais ils plaisent beaucoup à Arthur.

Encore un loup, et quel Loup !

Mordicus un jour, Mordicus toujours Didier Levy et Marie Novion

Encore un loup et quel loup ; Le plus féroce de tous les loups : Mordicus. Donc, quand l’épicière disparaît, ce n’est pas très compliqué de chercher qui a fait le coup. Tout le monde en est bien persuadé cela ne peut être que Mordicus. Et cela rend très triste Félix son arrière petit fils qui aime beaucoup son arrière grand-père. Je vais divulgâcher la fin pour que tout le monde puisse raconter cette histoire si Mordicus aime dire qu’il est méchant il ne l’est pas tant que ça.

Arthur a un peu de mal à comprendre pourquoi il n’a pas mangé l’épicière mais il adore cette histoire. Moi, j’aime beaucoup les dessins et j’aime faire la voix chantée, je trouve la leçon de morale un peu trop lourde mais pourquoi pas : »il ne faut pas juger les gens sur la mine ».

Cet été sous le signe du loup a inspiré Arthur voici Loup gris :

 

et voici la terrible bataille de Louis gris et le chien qui lui mange la moitié de la queue (le passage préféré d’Arthur !)

 

Quand nous quittons les loups c’est pour trouver des monstres et une sorcière

 

Dehors les monstres par Cyril Hahn

 

C’est un grand classique de ma maison mais il plaît toujours autant. J’aime beaucoup le papa flegmatique qui ne se panique jamais. J’aime que ce soit un papa qui passe l’aspirateur. Arthur est très content de voir qu’un crocodile a réussi à se cacher derrière la porte de la chambre, il est complètement dégoûté par la soupe de la sorcière, c’est sans doute son passage préféré

 

Pierre et la sorcière Gilles Bizouerne et Roland Garrigue


J’ai acheté cet album en espérant retrouvé l’humour de « Loup Gris » c’st un peu raté, mais cette histoire plaît bien à Arthur surtout quand Pierre pousse la sorcière dans le four aussi quand elle dit les gros mots. Il aime aussi répondre à la dernière question du livre : « Est ce que Pierre va aller combattre le dragon du château » . C’est un livre agréable à raconter, on peut faire des effets de voix et il y a un rythme rapide bien agréable.

 

et puis trois nouveautés

« Tu ne m’attraperas pas » de Timothy Knapman et Simona Giraolo

Pas de pitié pour Jacky la souris la plus « rapide du monde » elle est délicieuse d’après le chat le plus rusé du monde. Album agréable à raconter et pas trop long. C’est parfois un avantage

 

Lièvre et Ours , C’est à moi Emily Gravavett

Bel album , images superbes mais un peu enfantin pour Arthur qui aime bien quand même, surtout quand le ballon éclate à la tête des deux compères.

 

Profession crocodiles Giovanna Zoboli et Mariachiara di Giorgo

un flop total avec cet album pourtant conseillé par Noukette qui m’a fait découvrir des livres absolument merveilleux pour les enfants. En réalité cet album est superbement dessiné mais l’histoire est horrible, Un crocodile a comme profession d’être crocodile dans un zoo. Je me demande quel enfant peut comprendre un tel message. La seule chose qui plaise à Arthur c’est de distinguer dans des dessins très fouillés les animaux qui se sont mélangés aux humains. Pour moi c’est un livre pour adulte qui se cache derrière un album pour enfant.

 

et quand on a fini toutes les histoires on peut passer du temps avec

la famille Oukilé de Béatrice Veillon

 

Je perds plus vite patience qu’Arthur mais lui aime vraiment beaucoup et cherche avec une grande attention tous les membres de la famille. Arthur les retrouve plus rapidement à la fin de l’été qu’au début.


Vous avez été nombreux à parler en bien de ce roman, je vous ai donc suivis et je l’ai trouvé très instructif. Il fait réfléchir sur le trafic de drogue en France et le fonctionnement de la justice. J’ai moins aimé le côté roman policier mais je ne suis pas adepte du genre. L’auteure est avocate et connaît bien son sujet, on peut supposer qu’à part les exagérations imposées par le genre, ce qu’elle nous décrit est assez proche de la réalité. Je ne sais pas pourquoi elle fait un portrait aussi terrible de ses parents, qui engraissent leur jardin à coups de cadavres, et ce n’est certainement pas cette partie qui m’a fait mettre quatre coquillages. Cette auteure a un style enlevé et souvent drôle, voire très drôle. Quand son personnage principal devient interprète pour la justice, l’auteure qui en sait long sur la question nous fait découvrir le monde de la drogue en France qu’elle décrit ainsi :

Quatorze millions d’expérimentateurs de cannabis en France et huit cent mille cultivateurs qui vivent de cette culture au Maroc. Les deux pays sont amis et pourtant ces gamins dont j’écoutais à longueur de journée les marchandages purgeaient de lourdes peines de prison pour avoir vendu leur shit aux grosses des flics qui les poursuivent, à ceux des magistrats qui les jugent ainsi qu’à tous les avocats qui les défendent.

Je me suis fait ma philosophie personnelle à la lecture de ce roman, pour lutter contre la drogue et les mafias qui en vivent, il n’y a que deux solutions :

  • légaliser toutes les drogues, et voir immédiatement toute une partie de la jeunesse mourir devant nos yeux.
  • Où comme en Thaïlande ou au Maroc (où elle est cultivée !) punir de 20 ans de prison tous les consommateur et de mort tous les trafiquants.

Sinon, toutes les autres solutions apporteront des situations bancales laissant place à la création littéraire de bons romans policiers !

Citations

Le nerf de la guerre et depuis si longtemps !

L’argent est « le Tout » ; le condensé de tout ce qui s’achète dans un monde où tout est à vendre. Il est là réponse à toutes les questions. Il est la langue d’avant Babel qui réunit tous les hommes.

Humour

 À l’époque on parlait beaucoup du créationnisme aux États-Unis et on pouvait lire des conneries du genre : les dinosaures ont disparu parce qu’ils étaient trop lourds pour monter sur l’arche de Noé.

Regard sur les années 70

Dans les années 70 ça se disait PDG . Ça allait avec le canard à l’orange, les cols roulés jaunes sur des jupes-culottes et les protège-téléphones fixes en tissu galonné.

Ses parents

En couvrant sa femme des yeux avec fierté, mon père, qu’au passage toutes les prostituées du quartier de la Madeleine appelaient par son prénom, disait d’elle qu’elle était comme une oeuvre d’art : très belle, mais d’une valeur d’usage absolument nulle.

Vision réaliste du trafic de drogue en France. Point de vue de la traductrice

Quoi qu’il en soit le trafic de stups m’a fait vivre pendant pratiquement vingt cinq ans au même titre que les milliers de fonctionnaires chargés de son éradication ainsi que les nombreuses familles qui sans cet argent n’auraient que les prestations sociales pour se nourrir.

Les dealers la plupart Marocains en France

En semaine, leurs journées commencent vers quatorze heures et se terminent à trois heures du matin. Elles se résument à des va-et-vient en scooter ou en Smart entre leur point de réapprovisionnement et de deal et leur bureau sis au kebab du coin ou à la salle de sport.
Si j’avais à les filmer dans leurs activités, je mettrais en fond sonore « What a wonderful world » de Louis Armstrong.
Toutes leurs conversations tournent autour de l’argent : celui qu’on leur doit, celui qu’ils auraient dû toucher, celui qu’ils rêvent d’avoir… Cet argent, ils le claquent le weekend en boîte de nuit -les mêmes que les cadres de la Défense… Qui sont aussi leurs clients – sauf que eux, la bouteille de champagne à mille euros, lorsqu’elle arrive sur leur table, ils la vident en la retournant dans son seau car ils ne boivent pas d’alcool. Souvent, à la sortie de la boîte, ils se battent et sont systématiquement arrêtés et condamnés sans que l’on cherche même à savoir si ce sont où les cadres de la Défense qui ont commencé.
 Leur hiver, ils le passent comme leurs clients en Thaïlande, notamment à Phuket mais dans un autre quartier : à Patong, rebaptisé « Les 4000 » du nom de la cité de La Courneuve en Seine-Saint-Denis. Les Thaïlandais les appellent les « French Arabics ».
 Là-bas, c’est les vacances, ils ne dealent pas parce que le simple usage de stups est puni de vingt ans. L’été, ils se tapent le bled avec la famille. Là non plus il ne dealent pas pour les mêmes raisons.
Leurs films préférés sont « Fast and Furious » 1, 2, 3 … 8 et « Scarface ». Ils sont tout sur les réseaux sociaux – libres ou en taule, c’est selon ou ils s’affichent comme travaillant chez Louis Vuitton et fréquentant Harvard University. Ils y échangent de grandes vérités où l’islam sunnite (la partie qui a trait à la polygamie, principalement), se mele aux répliques cultes de Tony Montana et aux textes des rappeurs qui dépassent les cinq cents millions de vues sur YouTube.
Ils sont en matière d’introspection comme tous les mes commerçants du monde… D’une pauvreté crasse.
….And I think tout myself Whatsap à Wonder full world ..
Je sais, ça n’a pas l’air, mais j’ai pour certains d’entre eux comme de l’affection car ils me rappellent l’anarchisme de droite pratiqué par mon père et ils parlent comme lui la langue universelle : « l’argent ».

Traduit de l’anglais par Hélène Claireau j’aimerais savoir pourquoi cette traductrice n’a pas traduit cette expression « afin de rompre les chiens » par « rompre la glace » ? Merci Keisha de m’avoir fait connaître l’expression en français et toutes mes excuses à Hélène Claireau

Ce livre est paru en France pour la première fois en 1947 sous le titre « la tour d’Ezra » et a certainement contribué à faire connaître et aimer Israël et les Kibboutz. Je me souviens bien de l’enthousiasme que soulevait cette vie en communauté chez les jeunes de ma génération. Le récit s’appuie sur l’expérience personnelle de Koestler qui a lui-même participé à la vie d’un Kiboutz . Cette ambiance de jeunes pionniers entourés de l’hostilité des Arabes et des Anglais est très bien rendue. Car c’est un écrivain qui sait raconter et décrire. Nous sommes avec lui sous les ciels étoilés de ce pays qui ne s’appelle pas encore Israël, nous vibrons aux évocations de tous les dangers qui les entourent. Mais cet écrivain est aussi un esprit totalement libre, et il montre bien les points de vue des trois acteurs qui se confrontent ici. Les Juifs qui en 1938 sentent le danger menacer les Juifs du monde entier, et qui veulent accélérer leur venue dans ce petit bout de territoire. Les Arabes qui, même si par intérêt financier, vendent leur terre, ne veulent pas pour autant être dépossédés de leur pays, les moins glorieux des trois, les Anglais profondément antisémites le plus souvent, et qui jouent un jeu dangereux d’alliances qui ne peuvent que tourner à la catastrophe. Ce livre est aussi un précieux rappel des faits historiques, et jamais Koestler n’élude le fait qu’Israël a été créé sur un pays qui était auparavant peuplé d’Arabes. Par ailleurs, les scènes de reconduites dans les bateaux de Juifs ayant échappé aux camp de concentration sont absolument insoutenables, il est si facile alors d’imaginer que lorsque la Shoah sera de notoriété publique rien ne pourra arrêter leur exode vers Israël.

Citations

Mariage typiquement britannique

Mrs. Newton était fille d’un sergent-major de l’armée des Indes. Une analyse serrée des motifs qui avait attiré le timide monsieur Newton vers cette grande, osseuse et virginale femelle eût produit des résultats gênants révélant la haine secrète, continue et fervente qu’avaient inspirée à Monsieur Newton Roonah, son club, l’administration et et l’armée des Indes, et la tournure d’esprit toute spéciale qui lui permit d’imaginer pour la première fois l’anguleuse et chaste fille du sergent-major dans la série d’attitudes absurdes qu’entraîne l’acte procréateur.

 

La langue d’Israël l’hébreu

Tirer l’hébreu de sa sainte pétrification pour en refaire une langue vivante à été un tour de force fantastique. Mais ce miracle implique des sacrifices. Nos enfants se servent d’une langue qui n’a pas évolué depuis le commencement de l’ère chrétienne. Elle ne porte aucun souvenir, presque aucune trace de ce qui est arrivé à l’humanité depuis la destruction du Temple. Imaginez que la langue française ait cessé de se développer depuis la « Chanson de Roland » ! Et encore, est-elle de dix siècles plus près de nous. Nos classiques sont les livres de l’Ancien Testament ; nos poèmes s’arrêtent au Cantique des Cantiques, nos nouvelles à Job. Depuis lors… Un blanc millénaire..
 L’emploi d’un idiome archaïque a évidemment son charme. Voyageant en autobus, nous offrons une cigarette à notre voisin :
-« Monseigneur désir peut-être faire la fumée ?
 – Non, merci. Faire la fumée n’est pas agréable à mes yeux. »

Dialogue impossible entre les arabes et les juifs

Cette colline n’a pas porté de récoltes depuis que nous aïeux l’ont quittée, dit Ruben Vous avez négligé la terre. Vous avez laissé les terrasses tomber en ruines et la pluie a emporté la terre. Nous allons dépierrer la colline et apporter des tracteur et des engrais. – Ce que produit la vallée nous suffit, dit le vieillard. Nous ne devons pas enlever les pierres que Dieu a placées là. Nous vivrons comme ont vécu nos pères et nous ne voulons ni de vos tracteurs ni de vos engrais, et nous ne voulons pas de vos femmes dans la vue nous offense.
 
 
(Et un peu plus loin)
– Qu’est-ce que le vieux cheik t’expliquait avec tant de solennité ?
– Que chaque peuple a le droit de vivre à sa façon, bien ou mal, sans ingérence extérieure. Il a expliqué que l’argent corrompt, que les engrais puent et que les tracteurs font du bruit, toutes choses qu’il déteste.
– Et qu’as-tu répondu ?
– Rien dit Bauman.
– Pourtant, tu as compris sa position ?
Bauman le regarda :
– Nous ne pouvons pas nous permettre de comprendre la position des autres.
Quand vous, madame, me fait l’honneur de m’inviter chez vous, est-ce que je vous demande vos conditions ? Et quand j’ai le privilège de goûter votre hospitalité, est-ce que je demande à être le maître de la maison ? Non, madame, je ne le fais pas. Il en est de même de nos amis hébreu. Ils jouissent de notre hospitalité -ahlan w’sahlan, vous êtes les bienvenus. Nous serons comme des frères. Nous vous recevrons à bras ouverts en qualité d’invités…
Nous sommes dans la même position. Nous ne demandons qu’à aider ces pauvres gens et voyez comme comment il nous remercie ils veulent nous prendre notre maison.
– La barbe avec votre histoire de maison ! Pendant les cinq cents dernières années, elle n’était pas à vous mais aux Turcs.
– la majorité de la population a toujours été arabe, dit Kemal Effendi. Ma famille, par exemple, descend directement de Walid el Shallabi, le général de Mahomet. Nous sommes la plus ancienne famille de Palestine. – Mon père est un Cohen, dit Mrs.Shenkin, Élie Cohen sont les descendants des Kohanim, les prêtres de l’ancien temps.

Un moment vivant

 Joseph déjeuna hérétiquement dans un petit restaurant arabe ou la nourriture était bon marché, sale et épicée, et dont le gros propriétaire lui confia que Hitler, protecteur de l’islam, allez bientôt détruire l’empire britannique, rendre le pays aux Arabes efflanqué les Juifs à la mer – à l’exception de Joseph qui, étant un homme instruit et l’ami du propriétaire, serait épargné et pourrait même trouver un emploi dans son établissement, à condition d’apporter quelques capital.

Traduit de l’anglais (États-Unis) par Sarah Gurcel

 Je dois la lecture de ce livre à Philippe Meyer (avec un « e » à Philippe) il anime une émission que j’écoute tous les dimanches matin, « L’esprit public » , elle se termine par une séquence que j’attends avec impatience celle des « brèves » où chaque participant recommande une lecture, un spectacle, un CD. Un jour Philippe Meyer a recommandé ce roman et ses mots ont su me convaincre. Je profite de billet pour dire que la direction de France-Culture, après avoir censuré Jean-Louis Bourlanges, évince Philippe Meyer en septembre. Je ne sais pas si des lettres de protestations suffiront à faire revenir cette curieuse direction sur cette décision, mais j’engage tous ceux et toutes celles qui ont apprécié « L’esprit public » à écrire à la direction de France-Culture.
J’ai rarement lu un roman aussi éprouvant. J’ai plus d’une fois pensé à Jérôme qui, souvent s’enthousiasme pour des écritures sèches décrivant les horreurs les plus absolues. C’est exactement ce que j’ai ressenti lors de cette lecture. Les massacres de la famille du colonel McCullough par les Comanches, celui de la famille Garcia par les rangers américains sont à peu près insoutenables parce qu’il n’y a aucun pathos mais une précision qui donne envie de vomir. Ce grand pays est construit sur des monceaux de cadavres. Je suis restée une quinzaine de jours avec les trois personnages qui, à des époques différentes, finissent par décrire exactement d’où viennent les États-Unis. L’ancêtre Elie McCullogh est né en 1836, il vivra cent ans et établira la fortune de la famille. Son passage chez les Comanches fera de lui un redoutable prédateur mais aussi un homme d’une intelligence remarquable. Son fils Peter né en 1870 ne se remettra jamais de l’assassinat par son père et ses amis de la famille Garcia des Mexicains qui avaient 300 années de présence à côté du ranch de son père, eux-mêmes avait, évidemment auparavant, chassés les Indiens. Enfin, la petite fille de Peter Jeanne-Anne McCullogh née en 1926, enrichie par le pétrole et qui sera la dernière voix des McCullogh.
La vie chez les Comanches est d’une dureté incroyable et n’a rien à voir avec les visions romantiques que l’on s’en fait actuellement. Mais ce qui est vrai, c’est que leur mode de vie respectait la nature. La civilisation nord-américaine est bien la plus grande destructrice d’un cadre naturel à l’équilibre très fragile. Entre les vaches ou le pétrole on se demande ce qui a été le pire pour le Texas. Lire ce roman c’est avoir en main toutes les clés pour comprendre la nation américaine. Tous les thèmes qui hantent notre actualité sont posés : la guerre, la pollution des sols, le racisme, le vol des terres par les colons, la place des femmes.. mais au delà de cela par bien des égards c’est de l’humanité qu’il s’agit en lisant ce roman je pensais au livre de Yuval Noah HARARI. C’est une illustration parfaite de ce que l’homme cueilleur chasseur était plus adapté à son environnement que l’agriculteur.

Citations

PREMIÈRE PHRASE

On a prophétisé que je vivrai jusqu’à cent ans et maintenant que je suis parvenu à cet âge je ne vois pas de raisons d’en douter.

Humour

On sait bien qu’Alexandre le Grand lors de sa dernière nuit parmi les vivants, a quitté son palais en rampant pour tenter de se noyer dans l’Euphrate, sachant quand l’absence de corps son peuple le croirait monter au ciel parmi les dieux. Sa femme l’a rattrapé sur la berge ; elle l’a ramené de force chez lui où il s’est éteint en mortel. Et après on me demande pourquoi je ne me suis jamais remarié.

La dure loi du Texas

 » C’est comme ça que les Garcia ont eu leur terre, en se débarrassant des Indiens et c’est comme ça qu’il fallait qu’on les prenne. Et c’est comme ça qu’un jour quelqu’un nous les prendra. Ce que je t’engage à ne pas oublier ».
Au final mon père n’est pas pire que nos voisins : eux sont simplement plus modernes dans leur façon de penser. Ils ont besoin d’une justification raciale à leurs vols et leurs meurtres. Et mon frère Phinéas est bien le plus avancé d’entre eux : il n’a rien contre les Mexicains ou contre toute autre race , mais c’est une question économique. La science plutôt que l’émotion. On doit soutenir les forts et laisser périr les faibles. Ce qu’aucun d’eux ne voit, ou ne veut voir, c’est qu’on a le choix.

les différences de comportement selon les origines

L’Allemand de base n’était pas allergique au travail : il suffisait de voir leurs propriétés pour s’en convaincre. Si, en longeant un champ, vous remarquez que la terre était plane et les sillons droits, c’est qu’il appartenait à un Allemand. S’il était plein de pierres et qu’on aurait dit les sillons tracés par un Indien aveugle, ou si on était en décembre et que le coton n’était toujours pas cueilli, alors vous saviez que c’était le domaine d’un blanc du coin qui avait dérivé jusqu’ici depuis le Tennessee dans l’espoir que, par quelque sorcellerie, Dame Nature, dans sa largesse lui pondrait un esclave.

Le charme des noms Comanches

Bien des noms Comanches étaient trop vulgaires pour être consignés par écrit, aussi, quand la situation l’exigeait, les Bancs les modifiaient. Le chef qui emmena le fameux raid contre Luneville en 1840 (au cours duquel cinq cents guerriers pillèrent un entrepôt de vêtements raffinés et s’enfuirent en haut de forme, robe de mariée et chemise de soie) s’appelait Po-cha-na-quar-hip ce qui signifiait Bite-Qui-Reste-Toujours-Dure. Mais pas plus cette version que la traduction plus délicate d’Érection- Permanente ne pouvait paraître dans les journaux,aussi décida-t-on de l’appeler Bosse-de-Bison.

Après 15 pages inoubliables pour expliquer l’utilisation de la moindre partie du corps du bison pour les Comanches, voici la dernière phrase

 On laissait toujours le cœur la même où le bison était tombé : lorsque l’herbe pousserait entre les côtes restantes, le Créateur verrait que son peuple ne prenait que ce dont il avait besoin et veillerait à ce que les troupeaux se renouvellent et reviennent encore et encore
 

Les richesses dues au pétrole

La provision pour reconstitution des gisements et quelque chose de totalement différent. Chaque année, un puits qui produit du pétrole te fait gagner de l’argent tout en te permettant de réduire des impôts.
– Tu fais un bénéfice mais tu appelles ça une perte ».
Elle voyait bien qu’il était satisfait.
– » Ça paraît malhonnête.
– » Au contraire. C’est la loi aux États-Unis.
-Quand même.
– Quand même rien du tout. Cette loi a une bonne raison d’être. Il y a des gens pour élever du bétail, même à perte : pas besoin de mesures incitatives. Alors que le pétrole, lui, coûte cher à trouver, et encore plus cher à extraire. C’est une entreprise infiniment plus risquée. Alors si le gouvernement veut que nous trouvions du pétrole, il doit nous encourager.

Le fils (d’où le titre)

Être un homme signifiait n’être tenu par aucune règle. Vous pouviez dire une chose à l’église, son contraire au bar, et d’une certaine façon dire vrai dans les deux cas. Vous pouviez être un bon mari, un bon père, un bon chrétien, et coucher avec toutes les secrétaires, les serveuses, les prostituées qui vous chantaient.

La guerre de Sécession

À la fin de l’été, la plupart des Texans étaient persuadés que si l’esclavage été aboli, le sud tout entier s’africaniserait, que les honnêtes femmes seraient toutes en danger et que le mot d’ordre serait au grand mélange. Et puis, dans le même souffle, ils vous disaient que la guerre n’avait rien à voir avec l’esclavage, que ce qui était en jeu, c’était la dignité humaine, la souveraineté, la Liberté elle-même, les droits des états : c’était une guerre de légitime défense contre les ingérences de Washington. Peu importait que Washington ait protégé le Texas des visées mexicaines. Peu importait qui le protège encore de la menace indienne.

La Californie

Une fois la sécession votée, l’ État du Texas se vida……
Des tas de sécessionnistes partirent aussi. Sur les nombreux train qui s’en allaient vers l’ouest, loin des combats, on voyait souvent flotter haut et fier le drapeau de la Confédération. Ces gens-là était bien favorables à la guerre, tant qu’ils n’avaient pas à la faire. J’ai toujours pensé que ça expliquait ce que la Californie est devenue.

Principe si étrange et malheureusement pas si faux !

Mon père a raison. Les hommes sont faits pour être dirigés. Les pauvres préfèrent moralement, sinon physiquement, se rallier aux riches et aux puissants. Ils s’autorisent rarement à voir que leur pauvreté et la fortune de leurs voisins sont inextricablement liés car cela nécessiterait qu’ils passent à l’action, or il leur est plus facile de ne voir que ce qui les rend supérieurs à leurs autres voisins simplement plus pauvres qu’eux. 

 

Traduit de l’espagnol par Myriam Chirousse , d’ailleurs j’ai une petite remarque à propos de la traduction, que penser de cette phrase : »John Berger accompagne John Sassal, un médecin de campagne un ami à lui » ? 

 

Je savais pour avoir lu les critiques sur de nombreux blogs, que je lirai ce roman, La souris jaune, Keisha, Dominique, Krol, Aifelle (et sans doute, bien d’autres encore) en ont parlé avec enthousiasme . Je partage avec Aifelle l’agacement à propos des #hashtag malgré la justification que j’ai lue. Je ne trouve pas du tout que cela crée un réseau souterrain au roman, mais ce qui est sûr c’est que ça freine désagréablement la lecture. Ce roman est un travail de deuil pour l’auteure qui vient de perdre un compagnon, Pablo, tendrement aimé et qui raconte celui que Marie Curie a été amenée à faire lors de la mort accidentelle de Pierre. Les deux souffrances se mêlent pour nous donner ce roman dont j’ai eu envie de recopier des passages entiers pour vous faire partager mon plaisir et aussi retenir ce que Rosa Montero nous dit de façon si simple et si humaine. J’ai beaucoup lu à propos de Marie Curie, en particulier, il y a bien longtemps, le livre d’Ève Curie, et je me souviens très bien de la souffrance de Marie, la scène où elle brûle les effets tâchés du sang de Pierre sont gravés dans ma mémoire. J’aime cette femme de tout mon être , elle correspond à un idéal qui a marqué la génération de mes parents. Mais c’est aussi un idéal impossible à atteindre, comme tous les génies elle est hors de portée des autres femmes. Mais cela fait tant de bien qu’elle ait existé. Je connaissais aussi l’épisode où la presse s’est évertuée à la détruire car elle a été la maîtresse de Paul Langevin . De tout temps la presse a été capable de s’amuser à détruire la réputation d’une personne surtout si elle est célèbre. Mais l’accent que met Rosa Montero sur la personnalité de Paul Langevin montre les petitesses de ce personnage. Il a trompé sa femme et il l’a fait jusqu’au bout de sa vie mais il n’est victime d’aucun jugement de la part de la presse ni de l’opinion publique. Bien sûr il ne défendra pas Marie qu’il laissera tomber, mais finalement il se rappellera à son bon souvenir en lui demandant une place dans de chercheuse dans son laboratoire pour une fille qu’il a eu avec une de ses étudiantes . Quel galant homme !

Ce roman nous entraîne donc dans une réflexion sur le deuil et la condition de la femme dans le couple. Cette superbe énergie que l’on connaît chez Marie Curie, on sait qu’elle habite Rosa Montero qui roman après roman nous livre le plus profond de son imagination. Rien ne peut l’arrêter d’écrire, comme rien n’a pu arrêter Marie d’aller vérifier ses expériences dans son laboratoire. Seulement ce sont aussi des femmes de chaires et de sang et elles peuvent flancher. Marie après la mort de Pierre s’est enfermée dans un silence mortifère et après la cabale de la presse à propos de son amour avec Paul Langevin, elle est restée un an loin du monde et de ses chères recherches. Est-ce la façon de cette auteure de nous dire que sa souffrance a failli, elle aussi, la faire trébucher vers la non vie ?

Citations

l’écriture

Je me sens comme le berger de cette vieille blague qui sculpté distraitement un morceau de bois avec son couteau, et qui, quand un passant lui demande : « Mais vous faites la figure de qui ? » répond : « Eh bien, s’il a de la barbe saint Antoine, sinon la Sainte Vierge. « 

 Autobiographie ou roman ?

Même si, dans mes romans, je fuis l’autobiographie avec une véhémence particulière, symboliquement je suis toujours en train de lécher mes blessures les plus profondes. À l’origine de la créativité se trouve la souffrance, la sienne et celle des autres.

La féminité dans les années 70

J’appartiens à la contre-culture des années 70 : nous avions banni les soutiens-gorge et les talons aiguilles, et nous ne nous épilions plus sous les bras. J’ai recommencé à m’épiler par la suite, mais quelque part j’ai continué de lutter contre le stéréotype féminin traditionnel. Jamais je n’ai porté de talons (je ne sais pas marcher avec). Jamais je ne me suis mis du vernis à ongle. Jamais je ne me suis maquillée les lèvres.

Réflexions sur le couple

« Le problème avec le mariage, c’est que les Femme se marient en pensant qu’ils vont changer, et les hommes se marient en pensant qu’elles ne vont pas changer. »Terriblement lucide et tellement bien vu ! L’immense majorité d’entre nous s’obstine à changer l’être aimé afin qu’il s’adapte à nos rêves grandioses. Nous croyons que, si nous le soignons de ses soi-disantes blessures, notre parfait bien-aimé émergera dans toute sa splendeur. Les contes de fées, si sages le disent clairement : nous passons notre vie à embrasser des crapauds , convaincues de pouvoir en faire des princes charmants. ….. quand Arthur dit que les hommes croient que nous n’allons pas changer, il ne veut pas parler du fait que nous prenions un gros cul et de la cellulite, mais que notre regard se remplit d’amertume, que nous ne les bichonner plus et ne nous occupons plus d’eux comme si c’étaient des dieux, que nous pourrissions notre vie commune par des reproches acerbes.
Tant de fois, nous menton aux hommes. À tant d’occasions, nous faisons semblant d’en savoir moins que nous n’en savons, pour donner l’impression qu’ils en savent plus. Ou nous leur disons que nous avons besoin d’eux pour quelque chose alors que ça n’est pas vrai. Juste pour qu’ils se sentent bien. Ou nous les adulons effrontément pour célébrer la moindre petite réussite. Et nous allons jusqu’à trouver attendrissant de constater que, si exagérée soit la flatterie, ils ne s’aperçoivent jamais que nous sommes en train de leur passer de la pommade, parce qu’ils ont véritablement besoin d’entendre ces compliments, comme des adolescents auxquels il faut un soutien extérieur afin qu’ils puissent croire en eux

Le cadeau de Pierre à son amoureuse

Avec Marie il avait trouvé son âme sœur. En fait, au début de leur relation, au lieu de lui envoyer un bouquet de fleurs ou des bonbons, Pierre lui avait envoyé une copie de son travail, intitulé  » Sur la symétrie des phénomènes physiques. Symétrie d’un champ électrique et d’un champ magnétique » : on convient que ce n’est pas un sujet qui fascine toutes les jeunes filles.

J’ai souri

On se mit tout de suite à utiliser les rayons x pour diagnostiquer les fractures des os, comme maintenant, mais aussi à des fins absurdes comme par exemple pour combattre la chute des cheveux : on dirait que chaque nouveauté inventée par l’être humain est testé contre la calvitie, cette obsession terrible attisée par le fait que ceux qui perdent leurs cheveux, ce sont des hommes.

La mort

Je suis sûre que nous parlons tous avec nos morts  : moi bien évidemment je le fais, et pourtant je ne crois pas du tout à la vie après la mort. Et j’ai même senti Pablo à mes côtés de temps à autre ……. Marie s’adresse à Pierre parce-qu’elle n’a pas su lui dire au revoir, parce-qu’elle n’a pas pu pu lui dire tout ce qu’elle aurait dû lui dire, parce qu’elle n’a pas pu achever la narration de leur vie commune.

Paul Langevin le grand homme !

Quelques années plus tard Paul Langevin eut une enfant illégitime avec une de ses anciennes étudiantes ( un vrai cliché) et il demanda à Madame Curie de donner à cette fille un travail dans son laboratoire. Et vous savez quoi ? Marie le lui donna.

20150917_105711D’abord écrit en hébreu par l’auteur traduit par lui-même en anglais et traduit en français par Pierre Emanuel DAUZAT.

Pour satisfaire les optimistes aussi bien que les pessimistes, nous pouvons conclure que notre époque est au seuil du ciel et de l’enfer, passant nerveusement de la porte de l’un à l’antichambre de l’autre. L’histoire n’a pas encore décidé où elle finira.

Non seulement, il est sur ma liseuse, mais je l’ai offert à mon petit fils. J’attends avec impatience ses réactions. Il est un peu jeune (14 ans) mais c’est un passionné de pré-histoire, je pense qu’il le lira entièrement plutôt vers 16-17 ans.

Un énorme merci à Dominique, pour m’avoir donné envie de lire ce livre que tout humain devrait lire, c’est un pavé, bien sûr mais à l’échelle de l’histoire de l’humanité ce n’est qu’un feuillet. J’ai relu trois fois ce livre avant de me lancer dans la rédaction de ce commentaire. Je voudrais tellement convaincre toutes celles et tous ceux qui n’ont pas encore découvert Yuval Noah HARARI de se mettre immédiatement à le lire. Pour cela, il ne faut pas que vous ayez peur des quelques centaines de pages que vous allez devoir avaler. Ce livre extraordinaire se lit Très facilement . Et pour une simple raison vos petites cellules grises sont maintenues en éveil par des idées qui mettent sans arrêt en cause ce que vous croyiez savoir. Pas de pitié pour les évidences ni les conforts que vous pouviez avoir, il vous faudra réfléchir mais cet écrivain a un tel sens de l’humour que vous serez bien obligé de le suivre. Je vous donne un exemple, comme moi vous avez sans doute pensé que si les femmes ne sont pas plus présentes dans les armées, c’est que dans les temps anciens se battre était surtout une question de force physique. Certes, mais de tout temps la stratégie et l’organisation des armées ne demandent aucune force physique et pourtant… Il en faudra du temps pour qu’une femme française soit à la tête des armées ! Comme moi aussi vous avez pensé que la révolution agricole a constitué un progrès pour l’humanité. Alors lisez vite ce livre pour vous rendre compte que l’homme cueilleur chasseur était beaucoup plus adapté à son environnement que l’homme qui a fait dépendre sa survie d’une seule céréale : le blé. Et vous perdrez toute estime pour l’homo-sapiens quand, vous vous rendrez compte qu’à peine celui-ci met le pied sur un continent ou sur des îles habitées seulement par des animaux parfois gigantesque en très peu de temps tous ces animaux disparaissent. Et quand, par hasard, des organisations humaines différentes de la notre, comme celles des Aborigènes de Tasmanie ont survécu à la terrible révolution agricole, il faudra moins de 30 ans aux glorieux colonisateurs britanniques pour faire disparaître complètement une population de 10 000 personnes . Cette île porte aujourd’hui, le nom du Hollandais, Abel Tasman, à l’origine de ce terrible massacre.

Si j’ai autant de citations c’est que sur ma liseuse, c’est assez simple de créer des notes et de me les envoyer. J’en ai supprimé beaucoup mais si j’en ai laissé tant ce n’est pas seulement pour vous donner envie d’aller lire ce livre mais aussi pour essayer de garder en mémoire toutes ces idées que j’ai trouvé absolument géniales. La conclusion n’est pas franchement optimiste : cette créature devenue maître de la terre et qui se prend pour Dieu pourra-t-elle surmonter ses frustrations et laisser une chance à la vie ? La question finale de Yuval Noha Harari, nous nous la posons avec lui :

Ainsi faisons-nous des ravages parmi les autres animaux et dans l’écosystème environnant en ne cherchant guère plus que nos aises et notre amusement, sans trouver satisfaction.

Y-a-t-il rien de plus dangereux que des dieux insatisfaits et irresponsables qui ne savent pas ce qu’ils veulent

 

Citations

Propos du livre

Trois révolutions importantes infléchirent le cours de l’histoire. La Révolution cognitive donna le coup d’envoi à l’histoire voici quelque 70 000 ans. La Révolution agricole l’accéléra voici environ 12 000 ans. La Révolution scientifique, engagée voici seulement 500 ans, pourrait bien mettre fin à l’histoire et amorcer quelque chose d’entièrement différent. Ce livre raconte comment ces trois révolutions ont affecté les êtres humains et les organismes qui les accompagnent.

L’arrivée de l’homme

Ce qu’il faut avant tout savoir des hommes préhistoriques, c’est qu’ils étaient des animaux insignifiants, sans plus d’impact sur leur milieu que des gorilles, des lucioles ou des méduses

 

les Hommes sont victorieux

Le Sapiens, en revanche, ressemble plus au dictateur d’une république bananière. Il n’y a pas si longtemps, nous étions les opprimés de la savane, et nous sommes pleins de peurs et d’angoisses quant à notre position, ce qui nous rend doublement cruels et dangereux. Des guerres meurtrières aux catastrophes écologiques, maintes calamités historiques sont le fruit de ce saut précipité.

 

Humour et comparaison

Tandis qu’un chimpanzé passe cinq heures à mâchonner de la nourriture crue, une heure suffit à un homme qui mange de la nourriture cuisinée. L’apparition de la cuisine permit aux hommes de manger des aliments plus variés, de passer moins de temps à se nourrir, et de le faire avec des dents plus petites et des intestins plus courts. Selon certains spécialistes, il existe un lien direct entre l’apparition de la cuisine, le raccourcissement du tube digestif et la croissance du cerveau. Les longs intestins et les gros cerveaux dévorant chacun de l’énergie, il est difficile d’avoir les deux.

Sapiens et Neandertal

Une autre possibilité est que la concurrence autour des ressources ait dégénéré en violences et en génocide. La tolérance n’est pas une marque de fabrique du Sapiens. Dans les Temps modernes, une petite différence de couleur de peau, de dialecte ou de religion a suffi à pousser un groupe de Sapiens à en exterminer un autre. Les anciens Sapiens auraient-ils été plus tolérants envers une espèce humaine entièrement différente ? Il se peut fort bien que la rencontre des Sapiens et des Neandertal ait donné lieu à la première et la plus significative campagne de nettoyage ethnique de l’histoire.

L’importance du bavardage

On pourrait croire à une plaisanterie, mais de nombreuses études corroborent cette théorie du commérage. Aujourd’hui encore, la majeure partie de la communication humaine – e-mails, appels téléphoniques et échos dans la presse – tient du bavardage. Celui-ci nous est si naturel qu’il semble que notre langage se soit précisément développé à cette fin

Fonction du langage

La capacité de dire : « Le lion est l’esprit tutélaire de notre tribu. » Cette faculté de parler de fictions est le trait le plus singulier du langage du Sapiens. On conviendra sans trop de peine que seul l’Homo sapiens peut parler de choses qui n’existent pas vraiment et croire à six choses impossibles avant le petit déjeuner

 

L’importance de la fiction

Le secret réside probablement dans l’apparition de la fiction. De grands nombres d’inconnus peuvent coopérer avec succès en croyant à des mythes communs. Toute coopération humaine à grande échelle – qu’il s’agisse d’un État moderne, d’une Église médiévale, d’une cité antique ou d’une tribu archaïque – s’enracine dans des mythes communs qui n’existent que dans l’imagination collective.

Réalité imaginaire plus forte que le réel

Depuis la Révolution cognitive, les Sapiens ont donc vécu dans une double réalité. D’un côté, la réalité objective des rivières, des arbres et des lions ; de l’autre, la réalité imaginaire des dieux, des nations et des sociétés. Au fil du temps, la réalité imaginaire est devenue toujours plus puissante, au point que de nos jours la survie même des rivières, des arbres et des lions dépend de la grâce des entités imaginaires comme le Dieu Tout-Puissant, les États-Unis ou Google.

 

Les élites avec l’humour de l’auteur

Un exemple de choix est l’apparition répétée d’élites sans enfants telles que le clergé catholique, les moines bouddhistes et les bureaucraties chinoises d’eunuques. L’existence de pareilles élites va contre les principes les plus fondamentaux de la sélection naturelle puisque ces membres dominants de la société renoncent volontiers à la procréation. Ce n’est pas en refilant le « gène du célibat » d’un pape à l’autre que l’Église catholique a survécu, mais en transmettant les histoires du Nouveau Testament et du droit canon

Supériorité sur les singes

On aurait cependant tort de rechercher les différences au niveau de l’individu ou de la famille. Pris un par un, voire dix par dix, nous sommes fâcheusement semblables aux chimpanzés. Des différences significatives ne commencent à apparaître que lorsque nous franchissons le seuil de 150 individus ; quand nous atteignons les 1 500-2 000 individus, les différences sont stupéfiantes. Si vous essayiez de réunir des milliers de chimpanzés à Tian’anmen, à Wall Street, au Vatican ou au siège des Nations unies, il en résulterait un charivari. En revanche, les Sapiens se réunissent régulièrement par milliers dans des lieux de ce genre. Ensemble, ils créent des structures ordonnées – réseaux commerciaux ..

Connaissance de la nature

De nos jours, la grande majorité des habitants des sociétés industrielles n’a pas besoin de savoir grand-chose du monde naturel pour survivre. Que faut-il vraiment savoir de la nature pour être informaticien, agent d’assurances, professeur d’histoire ou ouvrier ? Il faut être féru dans son tout petit domaine d’expertise mais, pour la plupart des nécessités de la vie, on s’en remet aveuglément à l’aide d’autres connaisseurs, dont le savoir se limite aussi à un minuscule domaine d’expertise. La collectivité humaine en sait aujourd’hui bien plus long que les bandes d’autrefois. Sur un plan individuel, en revanche, l’histoire n’a pas connu hommes plus avertis et plus habiles que les anciens fourrageurs.

Survivre en ce temps-là nécessitait chez chacun des facultés mentales exceptionnelles. L’avènement de l’agriculture et de l’industrie permit aux gens de compter sur les talents des autres pour survivre et ouvrit de nouvelles « niches pour imbéciles ». On allait pouvoir survivre et transmettre ses gènes ordinaires en travaillant comme porteur d’eau ou sur une chaîne de montage

Supériorité du fourrageur

De surcroît, côté corvées domestiques, leur charge était bien plus légère : ni vaisselle à laver, ni aspirateur à passer sur les tapis, ni parquet à cirer, ni couches à changer, ni factures à régler. L’économie des fourrageurs assurait à la plupart des carrières plus intéressantes que l’agriculture ou l’industrie. De nos jours, en Chine, une ouvrière quitte son domicile autour de sept heures du matin, emprunte des rues polluées pour rejoindre un atelier clandestin où elle travaille à longueur de journée sur la même machine : dix heures de travail abrutissant avant de rentrer autour de dix-neuf heures faire son travail domestique.

Moins malade

De surcroît, n’étant pas à la merci d’un seul type d’aliment, ils étaient moins exposés si celui-ci venait à manquer. Les sociétés agricoles sont ravagées par la famine si une sécheresse, un incendie ou un tremblement de terre ruine la récolte.
Les anciens fourrageurs souffraient aussi moins des maladies infectieuses. La plupart de celles qui ont infesté les sociétés agricoles et industrielles (variole, rougeole et tuberculose) trouvent leurs origines parmi les animaux domestiqués et n’ont été transmises à l’homme qu’après la Révolution agricole.

L’homme arrive en Australie

Or, plus de 90 % de la mégafaune australienne a disparu en même temps que le diprotodon. Les preuves sont indirectes, mais on imagine mal que, par une pure coïncidence, Sapiens soit arrivé en Australie au moment précis où tous ces animaux mouraient de froid.

Si l’extinction australienne était un événement isolé, nous pourrions accorder aux hommes le bénéfice du doute. Or, l’histoire donne de l’Homo sapiens l’image d’un serial killer écologique.

Les coupables, c’est nous. Mieux vaudrait le reconnaître. Il n’y a pas moyen de contourner cette vérité. Même si le changement climatique nous a aidés, la contribution humaine a été décisive.

 La révolution agricole

 La révolution agricole est l’un des événements les plus controversés de l’histoire. Certains de ses partisans proclament qu’elle a engagé l’humanité sur la voie de la prospérité et du progrès. D’autres soutiennent qu’elle est la voie de la perdition. C’est à ce tournant, selon eux, que Sapiens s’arracha à sa symbiose intime avec la nature pour sprinter vers la cupidité et l’aliénation. Où qu’elle menât, c’était une voie sans retour. L’agriculture permit aux populations une croissance si forte et si rapide qu’aucune société complexe ne pourrait plus jamais subvenir à ses besoins.

L’angoisse du paysan

Le paysan anxieux était aussi frénétique et dur à la tâche qu’une fourmi moissonneuse en été, suant pour planter des oliviers dont ses enfants et petits-enfants seulement presseraient l’huile, mettant de côté pour l’hiver ou l’année suivante des vivres qu’il mourait d’envie de manger tout de suite. Le stress de la culture fut lourd de conséquences. Ce fut le fondement de systèmes politiques et sociaux de grande ampleur. Tristement, les paysans diligents ne connaissaient quasiment jamais la sécurité économique dont ils rêvaient en se tuant au travail. Partout surgirent des souverains et des élites qui se nourrirent du surplus des paysans

Richesse et révolutions

Et si aucun accord n’est trouvé, le conflit se propage – même si les entrepôts regorgent de vivres. Les pénuries alimentaires ne sont pas à l’origine de la plupart des guerres et des révolutions de l’histoire. Ce sont des avocats aisés qui ont été le fer de lance de la Révolution française, non pas des paysans faméliques. La République romaine atteignit le faîte de sa puissance au premier siècle avant notre ère, quand des flottes chargées de trésors de toute la Méditerranée enrichirent les Romains au-delà des rêves les plus fous de leurs ancêtres. Or, c’est à ce moment d’abondance maximale que l’ordre politique romain s’effondra .

L’importance de la religion

De toutes les activités humaines collectives, la violence est la plus difficile à organiser. Dire qu’un ordre social se maintient à la force des armes soulève aussitôt une question : qu’est-ce qui maintient l’ordre militaire ? Il est impossible d’organiser une armée uniquement par la coercition. Il faut au moins qu’une partie des commandants et des soldats croient à quelque chose : Dieu, l’honneur,

Les septiques

Le philosophe grec Diogène, fondateur de l’école cynique, logeait dans un tonneau. Un jour qu’Alexandre le Grand lui rendit visite, Diogène se prélassait au soleil. Alexandre voulut savoir s’il pouvait faire quelque chose pour lui, et le Cynique lui répondit : « Oui, en effet. Ôte-toi de mon soleil ! » Voilà pourquoi les cyniques ne bâtissent pas d’empire, et pourquoi un ordre imaginaire ne saurait être maintenu que si de grandes sections de la population – notamment, de l’élite et des forces de sécurité – y croient vraiment. Le christianisme n’aurait pas duré deux mille ans si la majorité des évêques et des prêtres n’avaient pas cru au Christ

les femmes et les travaux de force

Beaucoup de femmes courent plus vite et soulèvent des poids plus lourds que beaucoup d’hommes. Secundo, et c’est des plus problématiques pour cette théorie, les femmes ont été tout au long de l’histoire exclues surtout des tâches qui exigent peu d’effort physique (prêtrise, droit, politique) et ont dû assumer de nombreux travaux manuels rudes aux champs, dans les artisanats et à la maison.

L’expérience communiste

L’expérience la plus ambitieuse et la plus célèbre de ce genre fut menée en Union soviétique : ce fut un échec lamentable. En pratique, le principe du « chacun travaillait suivant ses capacités et recevait suivant ses besoins » se transforma en « chacun travaillait aussi peu que possible pour recevoir le plus possible »

La monnaie

La monnaie est donc un moyen d’échange universel qui permet aux gens de convertir presque tout en presque tout. Le soldat démobilisé peut délaisser la force musculaire pour se muscler la cervelle en utilisant sa solde afin de payer ses droits d’inscription en fac. La terre peut se convertir en loyauté quand un baron vend des biens pour entretenir sa suite. La santé peut se convertir en justice quand un médecin se sert de ses honoraires pour recourir aux services d’un avocat – ou soudoyer un juge. Il est même possible de transformer le sexe en salut : ainsi les putains du xve siècle, quand elles couchaient avec des hommes pour de l’argent qu’elles utilisaient ensuite pour acheter des indulgences à l’Église catholique.

Des chrétiens et des musulmans qui ne sauraient s’entendre sur des croyances religieuses pourraient néanmoins s’accorder sur une croyance monétaire parce que, si la religion nous demande de croire à quelque chose, la monnaie nous demande de croire que d’autres croient à quelque chose

L’importance de la religion

De nos jours, la religion est souvent considérée comme une source de discrimination, de désaccord et de désunion. En vérité, pourtant, elle a été le troisième grand unificateur de l’humanité avec la monnaie et les empires. Les ordres sociaux et les hiérarchies étant toujours imaginaires, tous sont fragiles, et le sont d’autant plus que la société est vaste.

Reste que si l’on additionne les victimes de toutes ces persécutions, il apparaît qu’en trois siècles les Romains polythéistes ne tuèrent pas plus de quelques milliers de chrétiens[1]. À titre de comparaison, au fil des quinze siècles suivants, les chrétiens massacrèrent les chrétiens par millions pour défendre des interprétations légèrement différentes d’une religion d’amour et de compassion.

Lors du massacre de la Saint-Barthélemy, entre 5 000 et 10 000 protestants trouvèrent la mort en moins de vingtquatre heures. Quand le pape apprit la nouvelle à Rome, sa joie fut telle qu’il organisa des prières de liesse pour célébrer l’occasion et chargea Giorgio Vasari de faire une fresque du massacre dans une salle du Vatican (aujourd’hui inaccessible aux visiteurs[2]). Plus de chrétiens moururent de la main d’autres chrétiens au cours de ces vingt-quatre heures que sous l’Empire romain polythéiste tout au long de son existence.

La révolution scientifique

La Révolution scientifique a été non pas une révolution du savoir, mais avant tout une révolution de l’ignorance. La grande découverte qui l’a lancée a été que les hommes ne connaissent pas les réponses à leurs questions les plus importantes. Les traditions prémodernes du savoir comme l’islam, le christianisme, le bouddhisme et le confucianisme affirmaient que l’on savait déjà tout ce qu’il était important de savoir du monde.

Mortalité enfantine

la reine Eleanor eut seize enfants entre 1255 et 1284 : 1. Fille anonyme née en 1255, morte à la naissance. 2. Catherine, morte à 1 ou 3 ans. 3. Joan, morte à 6 mois. 4. John, mort à 5 ans. 5. Henry, mort à 6 ans. 6. Eleanor, morte à 29 ans. 7. Fille anonyme morte à 5 mois. 8. Joan, morte à 35 ans. 9. Alphonso, mort à 10 ans. 10. Margaret, morte à 58 ans. 11. Berengeria, morte à 2 ans. 12. Fille anonyme morte peu après la naissance. 13. Mary, morte à 53 ans. 14. Fils anonyme mort peu après la naissance. 15. Elizabeth, morte à 34 ans. 16. Édouard. Le plus jeune, Édouard, fut le premier des garçons à survivre aux dangereuses années de l’enfance

L’horreur du monde moderne

Pire encore fut le destin des indigènes de Tasmanie. Ayant survécu à 10 000 ans de splendide isolement, ils furent tous éliminés : un siècle après l’arrivée de Cook, hommes, femmes et enfants avaient disparu jusqu’au dernier. Les colons européens commencèrent par les refouler des parties les plus riches de l’île, puis, convoitant même les parties désertiques restantes, ils les traquèrent et les tuèrent systématiquement

Une blague (drôle)

Un jour qu’ils s’entraînaient, les astronautes tombèrent sur un vieil indigène américain. L’homme leur demanda ce qu’ils fabriquaient là. Ils répondirent qu’ils faisaient partie d’une expédition de recherche qui allait bientôt partir explorer la Lune. Quand le vieil homme entendit cela, il resta quelques instants silencieux, puis demanda aux astronautes s’ils pouvaient lui faire une faveur. « Que voulez-vous ? – Eh bien, fit le vieux, les gens de ma tribu croient que les esprits saints vivent sur la Lune. Je me demandais si vous pouviez leur transmettre un message important de la part des miens. – Et quel est le message ? » demandèrent lesastronautes. L’homme marmonna quelque chose dans son langage tribal, puis demanda aux astronautes de le répéter jusqu’à ce qu’ils l’aient parfaitement mémorisé. « Mais qu’est-ce que ça veut dire ? – Je ne peux pas vous le dire. C’est un secret que seuls sont autorisés à savoir notre tribu et les esprits de la Lune. » De retour à leur base, les astronautes ne ménagèrent pas leurs efforts pour trouver quelqu’un qui sût parler la langue de la tribu et le prièrent de traduire le message secret. Quand ils répétèrent ce qu’ils avaient appris par cœur, le traducteur partit d’un grand éclat de rire. Lorsqu’il eut retrouvé son calme, les astronautes lui demandèrent ce que ça voulait dire. L’homme expliqua. Ce qu’ils avaient si méticuleusement mémorisé voulait dire : « Ne croyez pas un seul mot de ce qu’ils vous racontent. Ils sont venus voler vos terres. »

L’esclavage

Dix millions d’esclaves africains, dont près de 70 % pour les plantations de canne à sucre. Les conditions de travail étaient abominables. La plupart avaient une vie brève et misérable. Des millions d’autres moururent au cours des guerres menées pour les capturer ou au cours du long voyage du cœur de l’Afrique aux côtes de l’Amérique. Tout cela pour que les Européens sucrent leur thé et mangent des bonbons… et que les magnats du sucre empochent d’énormes profits

Le consumérisme

L’obésité est une double victoire pour le consumérisme. Au lieu de manger peu, ce qui provoquerait une récession économique, les gens mangent trop puis achètent des produits diététiques – contribuant ainsi doublement à la croissance économique.

Le temps

En 1784 commença à opérer en Grande-Bretagne un service de voitures avec des horaires publics : ceux-ci n’indiquaient que l’heure de départ, pas celle d’arrivée. En ce temps-là, chaque ville ou chaque bourg avait son heure locale, laquelle pouvait différer de celle de Londres d’une bonne demi-heure. Quand il était midi à Londres, il pouvait être 12 h 20 à Liverpool et 11 h 50 à Canterbury. Comme il n’y avait ni téléphones, ni radio, ni télévision, et pas de trains rapides, qui pouvait savoir, et qui s’en souciait[2] ? 

L’importance de l’état

L’État prête aussi une attention plus soutenue aux relations familiales, surtout entre parents et enfants. Les parents sont obligés d’envoyer leurs enfants à l’école. L’État peut prendre des mesures contre les parents particulièrement abusifs ou violents. Au besoin, il peut même les jeter en prison ou placer leurs enfants dans des familles nourricières. Il n’y a pas si longtemps, l’idée que l’État doive empêcher les parents de battre ou d’humilier leur progéniture eût été balayée d’un revers de main comme une idée ridicule et inapplicable. Dans la plupart des sociétés, l’autorité parentale est sacrée.

Ce livre est dans mes listes depuis …… longtemps ! j’apprécie cette auteure qui fait partie des gens qui me font du bien. D’abord parce que Katarina Mazetti aime raconter des histoires et que j’adore que l’on m’en raconte. Ensuite, parce qu’elle a un sens de l’humour avec lequel je suis bien : jamais méchant mais tellement pertinent. La fin est peut-être trop gentille, mais elle ne fait que deux pages et il fallait bien finir ! C’est pourtant pour cette raison et l’aspect un peu caricatural de certains personnages que ce roman n’a pas eu ses cinq coquillages que j’ai parfois eu très envie de lui mettre. Nous sommes embarqués sur un bateau de croisière vers l’Antarctique avec des Suédois sans soucis financiers mais avec parfois des difficultés bien plus graves. Les deux personnages centraux sont un journaliste et une certaine Wilma. Le journaliste se noie dans un divorce qui le prive de ses enfants. Tous les torts sont évidemment, selon lui, du côté de son épouse, mais peu à peu on se rendra compte que ce n’est peut être pas si simple. Et surtout, comme dit mon beau-frère préféré « il y a malheur plus grand » : que cache, en effet, la raideur et la maladresse de Wilma ? Il prend le risque à force de ne s’intéresser qu’à sa petite personne et profiter sans vergogne de la gentillesse et de l’optimisme de celle qui ne veut pas étaler ses problèmes de passer à côté d’une véritable difficulté de la vie. Et puis, il y a, Alba qui compare chaque type humain à des comportements des animaux mais préfère ces derniers au hommes car  : l’expression « les hommes sont des animaux » est une offense aussi bien envers les manchots que les autres espèces animales. C’est vrai que ce n’est pas un roman qui va rester à vie dans ma mémoire mais il m’a fait sourire et j’ai bien aimé les observations sur les comportements des mammifères dits supérieurs, un peu caricaturaux, peut-être comme ces deux sœurs : l’une, la riche exploite sans pitié la gentillesse de l’autre, la plus pauvre. Ces petits bémols ne doivent pas faire oublier que c’est avant tout un roman léger et agréable et pas l’étude du siècle sur les mœurs de la société suédoise.

Citations

Préface

Tous les personnage de ce roman ont été tirés d’un compost d’observation diverses et de fragments de souvenirs qui a mûri dans la tête de l’auteur durant un laps de temps indéfini.

C’est indiqué « bagages » avec une flèche à droite et une autre à gauche. Sur le même panneau ! J’ai un faible pour les Français, mais Charles-de-Gaulle est un concentré de leurs pires défauts.

Des noms qui font rêver (ou pas)

Thiruvananthapuram 

C’est vrai en France aussi

Regardez le public au théâtre ou dans les vernissages ! Quatre-vingt-dix pour cent sont des femmes, la plupart ayant dépassé la cinquantaine, les dix pour cent restants y ont été traînés par une femme. Interdisez l’accès aux femmes de plus de quarante-cinq ans et vous pouvez annuler toute vie culturelle suédoise !

Le résultat d’une enquête journalistique

Le conseiller d’éducation s’est pendu avant le procès laissant une épouse et trois enfants dont deux fréquentaient son école. La réputation de la remplaçante a été ruinée et elle a perdu son boulot. Le seul à être vraiment heureux à probablement été l’enfoiré qui avait vendu l’histoire au départ. Et puis, nous les trois épaulards . Dans une bonne humeur forcée, nous sommes allés nous saouler au pub pour célébrer notre activité si utile à la société.
Bon évidemment qu’elle était utile à la société, je le soutiens encore aujourd’hui. Mais. La vie de six personnes à été détruite.

Philosophie du marin

Tout le monde devrait connaître un bon mal de mer de temps en temps, a-t-il marmotté. Ça vous rend humble et doux, on se rend compte qu’on n’a pas grand-chose à opposer à la nature. Je crois que je vais inventer un comprimé de mal de mer qui fonctionne à l’envers. Pour le jeter dans le gosier des tyrans omnipotents aux quatre coins du monde quand ils s’apprêtent à envahir un pays , ou à dévaster une forêt, ou simplement à battre leur femme.

Un vantard

Göran est resté au bar à raconter à ceux qui voulaient bien l’écouter qu’il n’avait jamais eu le mal de mer. Ce qui est sans doute vrai -mais il n’a pas précisé qu’il n’avait jamais vraiment pris la mer, seulement fait des courses en hors-bord sur le lac près de chez nous.

J’ai souri

C’est un peu comme boire un verre de cognac quand on sent venir un gros rhume. Ça ne guérit personne, mais on s’amuse plus en attendant d’être patraque.