20151010_105342Traduit, de façon si agréable que l’on pense que ce roman est écrit en français, par Laurent LOMBARD.

Après l’horreur du 13 novembre à Paris, nous devons, nous, les blogueurs et blogueuses amoureux des livres, surveiller qu’aucune petite lumière chargée de culture, d’espoir et d’humanité ne s’éteigne à jamais.

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C’est un article d’Aifelle, suivi de tous vos commentaires, qui m’ont dirigée vers cette lecture. Quel petit bijou ! Totalement inclassable, mais dans une langue si belle que l’on pourrait oublier la narration. Je comprends bien pourquoi toutes les blogueuses qui aiment l’évocation de la nature ont été subjuguées, moi j’y suis moins sensible et pourtant la langue poétique Antonio Moresco a su complètement me séduire. J’ai lu et relu les descriptions des arbres, des plantes, des vols d’hirondelles. Tout est d’une majesté mais aussi d’une précision à couper le souffle. Autant l’histoire ne se décide pas entre le réel et le surnaturel, autant les évocations de tous les éléments sont pratiquement l’œuvre d’un scientifique spécialiste de la nature. De l’infini petit jusqu’à de l’infini de l’univers. C’est grâce à cela que j’ai accepté de ne pas exactement comprendre si l’enfant et la petite lumière sont de notre monde ou pas, si le narrateur les rejoint dans l’infini de l’univers ou dans la mort. Un jour la nature sera là pour engloutir toutes les créations humaines à l’image de ce village de montagne abandonné par les hommes et régulièrement secoué par des tremblements de terre.

Citations

La beauté d’une description qui sonne juste

Quand il y a la lune, on voit distinctement, éclairé comme en plein jour par sa lumière spectrale, le talus de la petite route envahi par la végétation, les précipices d’où monte un bruit d’eau creusant son lit dans les antres sonores des montagnes imprégnées de pluie, les hautes silhouettes des arbres qui se découpent sur le ciel. Il n’y a que la nuit, dans la lumière lunaire, que l’on comprend ce que sont les arbres, ces colonnes de bois et d’écume qui s’élancent vers l’espace vide du ciel.

Un châtaigner et la question du livre

En face, plus bas, sur l’à-pic recouvert de forêts, se dresse un châtaigner moitié vivant et moitié mort. Sa haute cime s’élève, nue et blanche, sur le vert des arbres, pétrifiée, tandis que le reste est un déchaînement luxuriant de feuilles. Il y en a beaucoup d’autres comme ça, des châtaigniers surtout, je crois. Certains sont presque complètement morts, et se découpent sur la forêt dans leur évidence spectrale. Mais, de quelque point de ces troncs fossiles, quand c’est la saison, partent deux ou trois branches chargées de bogues à se briser.
Parfois je m’arrête devant un de ces arbres et je le regarde.
– Mais comment on peut vivre comme ça ? je lui demande. C’est impossible pour les hommes : ou ils sont vivants ou ils sont morts. Enfin, c’est ce qu’on croit…

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20151011_123211Traduit de l’anglais par Florence VIDAL. Titre original : One Step too Far.
Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard.

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Je me demande ce que veut dire cette catégorie « Thriller », je l’y ai mis car c’est écrit sur la couverture. Pas de suspens difficile à supporter, pas de sang, pas de peur. Alors ? sans doute le manque d’imagination de l’éditeur et la volonté d’attirer un public plus large. J’imagine facilement sa déception. Bien sûr, je vais tout faire pour ne pas « divulgacher » la fin, car une surprise il y en a une, que je n’avais pas vu venir, donc si vous voulez lire ce roman, je ne vous dis que l’essentiel. Une femme décide de recommencer sa vie en quittant son foyer et en essayant de ne laisser aucune chance à ses proches de la retrouver. Parmi ses proches, une sœur jumelle qui est très perturbée et qui détruit tous les gens autour d’elle

C’est le récit de l’ascension dans une nouvelle vie, de cette femme qui était douce, équilibrée et sage, elle va se mettre à la cocaïne et à voler dans les magasins, et tout lui réussira. La quatrième de couverture dit qu’« elle cache un secret obsédant, jusqu’à la dernière ligne, sans aucun répit ». Je n’ai pas ce plaisir de lecture, et les personnages que l’on voit passer sont trop proches de la caricature sans y tomber complètement, cependant. Comme pendant le festival du film britannique, j’ai retrouvé l’ambiance du milieu branché de Londres, alcool et cocaïne ne rendent pas les gens très attrayants. Un roman qui se lit en deux soirées et s’oubliera encore plus vite.

Keisha avait bien aimé , mais elle a la chance de pouvoir lire en anglais, cela rajoute sans doute au plaisir.

Citation

La méchante sœur

– Le rôti était vraiment savoureux, maman, où est-ce que tu l’as acheté ? 
– En ville, chez le boucher, ma chérie. Je trouve que la viande est meilleure qu’en grande surface.
– Certes, lâcha Caroline. Je préfère largement les animaux morts quand ils sont du quartier.

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Un livre différent, un bel objet et des photos qu’on n’oublie pas. L’imaginaire se remplit pour un moment d’images de feu, de croûtes, de farine, d’eau. Geneviève Hofman est une artiste photographe reconnue, et chacune de ses expositions sont des moments de doux bonheurs. Elle recherche à chaque fois à interpeler notre regard au-delà de nos évidences. Comme le dit si bien dans l’introduction Héloïse Conésa (conservatrice responsable de la collection de photographie contemporaine de la BnF) :

Si la photographe s’attache depuis plus de trente ans à représenter ce qu’elle nomme sobrement les « matières » : linge, marbre, chaux et sable de l’estran, ce n’est pas tant pour en sonder les caractéristiques que pour les transformer en surfaces de projection propices aux analogies.

J’étais au vernissage de son exposition dans le fournil du boulanger où sa recherche a commencé, et comme beaucoup de gens je suis repartie avec son livre et un pain de Thierry Depaix, propriétaire du fournil artisanal de Saint Cast-Guildo, sous les regards complices du boulanger et de la photographe. Les textes permettent aussi de comprendre ce qui a motivé quatre ans de travail, comprendre la magie de cet aliment si simple et si fondamental. La longue et très riche introduction « du » grand spécialiste du pain Steven Laurence Kaplan se termine par un très bel hommage :

Aucun photographe avant Geneviève Hofman n’a su rendre à cette pâte son statut primordial de chose vivante.

Si les photos m’ont entièrement séduite, j’ai été, également, agréablement surprise par la qualité des textes qui savent allier l’information à l’intensité des sensations ressenties par l’auteure-artiste dans les différents fournils.

Pour donner envie de tourner les pages une photo mais qui est tellement plus belle dans le livre !

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Nicolas Supiot referme la porte derrière lui pour garder la chaleur et pendant une heure environ, la pâte va « pousser », grandir, « maturer ; on va laisser le temps aux chaînes de protéines du gluten de se dérouler et de s’agripper les unes aux autres, sans brusqueries, dans un mouvement d’expansion. La pâte peut et va tranquillement lever, tout en restant tendre et d’une grande douceur, de celle qui remplit maintenant toute la pièce.

SONY DSCLu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard.
Traduit de l’américain par Hélène Fournier.

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Ma bibliothécaire préférée m’avait encouragée à le lire, en me disant que ce n’était pas un polar classique. Elle avait bien raison, c’est plus un roman de caractère sur une petite ville américaine qui ne va pas si mal. Les habitants non plus. Ils ne sont ni meilleurs ni pires que beaucoup d’autres. Leurs bonheurs et leurs peines sont ceux de tout le monde. Une grande partie de la société américaine est représentée : la professeur du collège qui a bien du mal à intéresser sa classe et qui n’aime plus son mari, les adolescents si cruels entre eux, les ouvriers vieillissants qui ont peur de perdre leur boulot, le policier noir bel homme qui a ressenti autrefois le rejet d’une population blanche traditionnelle et enfin Ronny celle par qui le scandale arrive, trop libre, trop en dehors des clous trop malheureuse, et donc méchante parfois.

Je ne « divulgacherais » rien de l’enquête policière pour ne pas perdre de lecteurs ni de lectrices, car l’enquête est loin d’être un élément mineur du roman. Je dois dire que je n’avais pas imaginé cette fin qui pourtant est hyper logique et dont l’auteure sait distiller des petits indices tout le long du livre. Non, je n’en dirais pas plus, car je sais que les amateurs du genre se diront comme moi lorsqu’ils fermeront ce roman : « Mais bon sang, c’est bien sûr ! ». Donc avis aux amateurs, c’est un bon polar et une plongée dans le quotidien des américains qui vaut la lecture.

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Voilà le roman que je lisais pendant les longs moments d’attente du festival du film britannique. Pour s’évader des atmosphères glauques des cas sociaux anglais, de la drogue et de la violence quoi de plus bienfaisant que les embruns du grand Nord. Et puis, j’avais tellement apprécié « L’égaré de Lisbonne » . Hélas ! la magie a beaucoup moins fonctionné, nous sommes ici dans un parfait roman historique, et ce n’est vraiment pas mon genre préféré. J’ai bien senti tout le sérieux des recherches de l’auteur, pour faire revivre une époque et des lieux qui nous sont étrangers, il est vrai que je ne connaissais rien à l’Islande du XVe siècle et que je suis beaucoup plus savante aujourd’hui. J’imagine que tous les passionnés d’Histoire salue ce roman, à juste raison. Mais pour ma part, lorsque le travail de l’historien prend le pas sur celui du romancier, je préfère lire un essai qu’un roman. Malgré ces réserves, je conseille ce livre à tous les gens qui ont envie de découvrir la vie dans les rudes contrées du grand nord aux siècles passés.

Comme je suis plongée, grâce aux conseils de Dominique dans Sapiens, tout ce que je lis se colore de cette lecture passionnante et dont j’espère écrire la chronique bientôt. Ici la disparition d’un peuple libre pêcheur cueilleur au profit des agriculteurs sédentaires qui épuisent les sols sans pour autant permettre le mieux être d’une population est une illustration exacte du propos de Yuval Noah Harari. J’ai aimé aussi retrouver tout ce qu’on sait sur la découverte des nouveaux continents américains et les raisons pour lesquelles, notre mémoire collective a retenu le nom de Christophe Colomb, plutôt que des courageux navigateurs Vikings peu en odeur de sainteté. Ce fut pour moi une lecture laborieuse, mais cette remarque en dit plus long sur mon peu d’appétence pour ce genre littéraire que pour le roman lui-même.

Citations

Les légendes du grand nord

Les gens débattirent de l’origine des elfes. La plupart expliquaient qu’ils descendaient de certains enfants d’Adam et Eve, que celle-ci avait caché à Dieu car ils n’étaient pas lavés. Dieu avait alors déclaré : « Ce qui doit m’être caché sera caché aux hommes. » Ces créatures équivoques, sans âme, avaient néanmoins le pouvoir de se laisser voir des hommes s’ils le désiraient. Mais d’autres parmi l’assistance prétendaient qu’à la suite d’une révolte au paradis , provoquée par le diable, ceux qui s’y étaient ralliés avaient été relégués en enfer, alors que ceux qui étaient restés neutres a aient été renvoyés sur Terre , condamnés à vivre cachés dans des monticules, des collines et des rochers.

L’orgueil des gens de mer

Je sais bien que tu as mérité d’être arrivé le premier. Mais ne t’en vante pas trop. Les hommes n’aiment pas qu’on ternissent leur réputation, et tu pourrais bien t’attirer des jalousies. N’oublie jamais ça : la première qualité d’un marin, c’est l’humilité. 

Le goût des livres en Islande

Non seulement Jon aimait lire, mais il était fasciné par les livres en tant qu’objets capables de renfermer de la culture, du savoir, de la mémoire. La production d’un livre lui paraissait être comme une alchimie complexe, dont il voulait tout savoir. Pour faire un livre, il fallait des hommes capables d’écrire, des animaux -peau de veau et plumes de cygne – , des plantes qui servaient à élaborer l’encre et la couleur.

Le mal de mer

Il était inutile de lutter contre les mouvements d’un bateau. Ceux qui résistaient se soumettaient immédiatement au mal de mer. Seuls ceux qui composaient parvenaient à percevoir, dans leur chair, les moindres humeurs de leur embarcations.

Philosophie du couple

Tu sais mon fils, un mari et une femme, c’est comme les deux berges d’une rivière : il y a des méandres et des rapides, mais aussi des gués. Il faut prendre la rivière comme elle va. Et le temps n’était plus loin où elle allait devenir un torrent infranchissable. Pourtant, on s’aimait sincèrement. J’ai aimé ton père pour son esprit ouvert, sa curiosité,son caractère libre, aventureux. Je l’ai détesté pour les mêmes raisons.

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Étrange roman, d’une auteure francophone d’origine iranienne. Sorour Kasmaï veut à travers une histoire quelque peu fantastique, nous faire vivre l’atmosphère du début de la révolution iranienne. Elle veut également mettre en scène les différentes composantes des histoires religieuses et mythologiques du passé de ce grand pays la Perse. La religion Zoroastrienne n’était pour moi qu’un nom avant la lecture de ce roman.

Mariam héroïne de cette histoire jeune fille de 16 ans, m’a d’abord prodigieusement agacée : parce qu’elle éprouve le besoin impérieux de changer son prénom, elle va provoquer une série de catastrophes qui risque de la détruire ainsi que tous les siens. Cela m’a semblé tellement stupide comme démarche, un peu comme si on pouvait imaginer un juif en 1938 s’adressant aux tribunaux nazis pour rétablir la vérité de son identité juive au risque de dénoncer ses parents qui auraient réussi à la dissimuler. Évidement son parcours dans les méandres de la justice islamiste est complètement kafkaïen. Ce qu’elle découvre de son identité et des secrets de sa naissance ne peuvent entraîner qu’une série de drames. Sans « divulgacher » le roman, je veux expliquer ma photo. L’ombre de la croix sur laquelle a été crucifié le Christe, joue un rôle très important dans l’histoire de cette jeune Mariam. Les trois religions, Zoroastrienne, chrétienne et islamiste se rejoignent dans une croyance vers la résurrection des morts qui ne fait aucun bien aux vivants.

J’ai fini par me laisser emporter par l’écriture de Sorour Kasmai, mais je préviens tous ceux et toutes celles qui fuient le mysticisme de se méfier de ce roman. Cela ne veut pas dire qu’il fait la part belles aux mystiques bien au contraire, mais pour arriver à comprendre l’élan de tout un peuple vers un islam rétrograde, l’auteure est allée chercher dans les fondements d’une civilisation qui m’est vraiment étrangère tout cela dans une très belle langue, surtout quand elle se met au service des mythologies anciennes.

Citations

les Zoroastriens (écrit Zorastriens dans le roman)

On ne parlait pas encore de révolution. Personne ne prenait les événements au séreux. Seule ma femme avais peur. « Tu n’es jamais là. Abbas est tout le temps dans la rue. Il ne fréquente que les petits musulmans. Il s’est mis à faire la prière comme eux. Il dit même vouloir faire le ramadan » . C’était à la mode. Du jour au lendemain , tout le monde était devenu croyant, ou même pratiquant. Le problème, c’est que nous n’étions pas musulmans. Ma femme et moi, sommes tous les deux zorastriens de naissance.

Les changements avec la révolution

La Révolution avait fait de la fillette joyeuse d’autrefois une sœur musulmane sévère en colère et renfrognée.

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J’ai beaucoup apprécié « le cas Einstein » le précédent roman de cet auteur. J’ai reçu celui-ci en cadeau et je l’ai lu avec grand plaisir. J’ai aimé sa construction, la vie de Léna Kotev, serait incompréhensible sans l’évocation de tous les morts de médecins juifs qui peuplent son histoire. L’alternance des chapitres assez courts, permet de supporter la lecture des violences antisémites. Le fait de retrouver Léna, dans sa vie de femme chef de service en cancérologie dans un grand hôpital parisien en 2015, me permettait de reprendre ma respiration. Car du souffle, il en faut pour supporter la description des pogroms de Ludichev en 1904, puis la folie des Nazis à Berlin en 1934, puis a Nice en 1943, et enfin à Moscou en 1953, la folie antisémite des communistes staliniens.

J’ai aimé également que le roman soit elliptique et fasse l’impasse sur les détails des connexions de tous les personnages. On a l’impression de n’avoir que les temps forts de cette histoire dont on peut imaginer les passages non écrits. Quand on referme ce roman après la page 296, comme l’histoire se déroule de 1904 à 2015, on a l’impression d’avoir lu des milliers de pages.

Si j’ai mis ce livre dans une bibliothèque, c’est que le père de Léna, Tobias, est un fou amoureux des livres, qui ont une grande importance tout le long du roman. Laurent Seksik, médecin, écrivain et historien, parle d’une façon très riche de l’être humain. Celui qui souffre dans son corps, comme celui qui souffre dans son âme. Ses personnages traversent différentes périodes de l’histoire, et on vit intensément chaque moment car il a su rendre réels les événements dont il parle. Les pogroms de Ludichev sont une pure horreur dont je n’avais pas vraiment pris conscience. La nuit de Cristal, la persécution Nazie en France, le procès des médecins juifs sous Staline tout cela est plus présent dans la littérature comme dans notre mémoire collective. Mais on doit au talent de Laurent Seksik de savoir nous en parler avec un nouvel éclairage et sans aucune lourdeur. Chaque personnage est habité par une foi indestructible d’abord dans la foi juive dans la vieille russie, puis dans le progrès scientifique à Berlin et enfin dans l’humanité en 2015. C’est vraiment un roman superbe : quelle leçon de vie !

Citations

Réflexion du médecin le soir chez lui, jolie phrase

Son cerveau était un dispensaire à l’heure où les douleurs languissent.

Description de la vérole

Pavel n’avait pas été alerté par la petite écorchure sur le pénis que présentait son patient. Le chancre avait rapidement disparu, la maladie s’était éclipsée. La vérole était revenue de longs mois plus tard, sous d’autres masques, plaques rosées sur la peau, gorge enrouée puis, lentement, le mal avait ravagé chaque partie du corps, de la plante des pieds au cuir chevelu, jusqu’à pourrir les chairs, briser les os, boucher les artères, broyer le visage, rendre taré, débile, estropié, tordu ; les tourments de la peste et du choléra réunis dans une lenteur programmée. À la fin, le mal avait mordu le cœur, liquéfié l’encéphale. La mort seule mettrait un terme au supplice.

Condition juive du temps des pogroms, débats à l’infini sur la théologie

Dans le doute, chacun faisait à sa manière. Trois ou quatre heures ? Cette seule question résumait aux yeux de Pavel toute la condition juive, une interrogation permanente, un questionnement de tous les instants, un interminable, dérisoire et splendide voyage dans un infini et vain champ de réflexion.

La vérité est dans les romans

Moi, je me moque de la stricte vérité. Si je veux le vrai, je lis le journal. Si je veux de l’intelligence, je lis la philosophie. Mais la vérité de l’homme – qui n’a rien à voir, j’en conviens, avec la vérité des faits- est dans l’émotion. Je la trouve dans les romans. 

La plainte d’un hypocondriaque

Tu ne prends pas ma souffrance au sérieux. Personne n’a jamais pris ma souffrance au sérieux de toute façon. C’est à désespérer de souffrir.

Le communisme

Camarade Kotev, n’attends rien non plus de notre humanité. La compassion est au pouvoir communiste ce que l’autoritarisme est à la démocratie.

Citation du journal L’humanité de 1953

Un groupe de médecins terroristes vient d’être découvert en Union soviétique : ils ont été démasqués commis des agents des services de renseignement américains, certains d’entre eux avaient été recrutés par l’intermédiaire du Joint, organisation sioniste internationale.
Les médecins français estiment qu’un très grand service a été rendu à la causé de la paix par la mise hors d’état de nuire de ce groupe de criminels…

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3L’avantage de prendre une année de plus ce n’est pas d’en avoir une de moins à vivre, évidemment, mais c’est de recevoir des livres qui ont plu à vos proches. Je ne connaissais pas cet auteur, je suis ravie de l’avoir découvert. Je l’ai lu dans le train Saint Malo-Paris, et le plus gros reproche que je puisse faire, c’est qu’il ne m’a permis d’aller que jusqu’à Vitré.

Problème pour vous présenter ce roman sans le « divulgacher » car tout est dans le suspens, j’imagine vos cris d’horreur si je vous raconte un tant soit peu cette histoire. Le début : un certain William, promet à son meilleur ami qui va mourir de retrouver sa fille Mathilde, celle-ci a été en hôpital psychiatrique et a eu un enfant qu’elle n’a plus le droit de voir. J’ai donc pensé à un roman sur la misère sociale et sur le dévouement d’un homme fidèle à ses promesses. J’ai eu tout faux et je suis partie dans l’imaginaire de cet écrivain grinçant et irrespectueux en espérant que l’histoire se termine bien.

Voilà, je n’ai rien dévoilé, je vais utiliser les procédés de Krol : lisez-le, puisque je n’ai pas pu l’abandonner, si vous avez deux heures à passer dans les transports, vous oublierez tout.

Citations

Un indice donné au début du roman

Le nom du syndicat m’est revenu à l’esprit. J’avais aperçu une affiche dans le bureau du personnel lors de mon renvoi, pour faute grave et escroquerie, des établissements Vernerey

Une mère qui a du mal avec le principe de réalité

 C’est complètement idiot de voler une paire de lunettes de soleil. Imagine ! Mathilde ! Tu veux te retrouver au poste de police ? En train d’expliquer ton intention de revoir ton fils contre la décision du juge ! ? Mais Mathilde ne voyait pas le rapport entre ces lunettes et son fils.

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Traduit de l’Italien par Béatrice Vierne.

Citation qui donne tout son sens à cet essai

Ah la vérité historique… C’est une île imaginaire, elle ouvre des trous noirs qu’on ne peut remplacer qu’au conditionnel. 

3Toujours Dominique tentatrice pour les voyages insolites, mais j’ai été beaucoup moins convaincue que par « Aux frontières de l’Europe« , certes je suis séduite par l’érudition de cet auteur et aussi son talent à nous faire revivre Hannibal que l’on ne connaît qu’à travers ses ennemis qu’il a bien failli anéantir : les Romains. Mais ma progression dans ce voyage fut laborieux, je n’ai pas retrouvé l’allant de ma précédente lecture. Certes, le sujet passionne les érudits et ce chef de guerre est bien difficile à cerner. Il y a tant de légendes qui courent sur son compte. Où est donc la vérité ?

Surtout que l’on sait bien que Rome n’a eu de cesse que d’effacer toutes les traces de celui qui a les a presque fait disparaître de l’histoire de l’humanité. Les lieux sont bien difficiles à mettre sur une carte, car même les lits des rivières ont évolué depuis les guerres puniques. Alors où se trouve, donc, Cannes qui a vu l’extermination de 60 000 soldats ? Bataille mémorable, encore étudiée dans les écoles militaires mais dont on ne retrouve aucune trace à l’endroit où l’on a cru pendant longtemps qu’elle s’était déroulée. Toute l’Italie est là dans ce récit, la romaine comme la catholique, la fasciste comme celle d’aujourd’hui, mais tant d’érudition et d’hésitations sur ce qui s’est vraiment passé ont fini par épuiser ma réserve de bonne volonté.

Citations

Réflexion sur notre époque

Vingt-deux siècles, ce n’est qu’un souffle dans l’histoire humaine. Je repense à ce que me racontaient mes grands-parents et je m’aperçois qu’en effet il existe encore un fil rouge qui me relie à l’Antiquité. Je ne sais pas si mes fils pourront en dire autant, dans cette société qui tue le temps avec l’hypervélocité télématique.

Remarque sur les chaînes d’hôtels

Lorsque j’arrive à l’hôtel, un blockhaus glacial, affligé de la décoration funéraire propre aux chaînes hôtelières américaine…

Dégâts du béton

En Espagne vous dira-t-on , le béton « a fait plus de dégâts que la guerre civile ». Le béton des pots-de-vin, bien évidemment. Un assaut de spéculations immobilières, qui au cours de ces dernières années a donné lieu à des faillites spectaculaires et à des fuites rocambolesques avec le butin, parmi les délices de Marbella.

Tourisme fluvial

Je me dis : cette Europe fluviale somnolente est vraiment un continent inconnu, avec ses marins d’eau douce qui sont bien les seuls à célébrer les joies de la lenteur dans une ultime zone franche assiégée par le vacarme de la terre ferme.

L’Italie aujourd’hui

Au sortir des Alpes commence la plaine des Italiens moyens qui déambulent avec leur portable vissé à l’oreille. Mon peuple est en apnée sous des nuages de mousson, avançant à la queue leu leu dans le labyrinthe d’un réseau routier dément. Entrepôts, herbes folles et insulte à la mémoire sont visibles de partout dans cet espace qui paraît avoir perdu chacune de ses lignes directrices

 Pour réfléchir

Les provinces se prennent par la force, mais se gouvernent par le droit. Elles sont faciles à conquérir, difficiles à conserver. (Hérodote)

La modernité

la mort du mythe est le phénomène le plus obscène des temps modernes. C’est la fin de l’enchantement, de l’imagination , du désir.

Exploit de Jules César

Jules César qui déplaça ses hommes de la Toscane à l’Andalousie en vingt-huit jours à peine.