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Roman étonnant et que je n’aurais jamais lu sans le Club. J’ai vu que cette auteure a dédié son livre à Nelly Arcan, que je ne connaissais absolument pas. J’ai cherché à comprendre et je me suis rendu compte que ces deux auteures avaient en commun de s’être beaucoup exposées dans les Médias. Nelly Arcan s’est suicidée, et Camille Laurens a fait, subi et gagné un certain nombre de procès. Bref, c’est une adepte d’un genre qui me touche rarement « l’autofiction », à force de se dévoiler dans des romans, on en souffre mais cela peut être le moteur d’une écriture particulière et qui a trouvé son public. Ce roman est vraiment un roman moins auto-fictionnel que d’autres, et même si sa vie lui sert de trame de fond, il a l’avantage d’être également construit de façon littéraire intéressante. Il a pour sujet une manipulation sur Facebook, Claire un peu par vengeance d’un homme qui l’a repoussée parce qu’elle a vieilli (du moins, c’est ce qu’elle pense), décide de créer un profil d’une femme de 25 ans sur Facebook. Commence alors une correspondance, et un lien virtuel entre elle et le meilleur ami de cet homme, et une passion amoureuse partagée par les deux personnages.

Une grande partie du roman parle de ça : du désir, de celui qui disparaît chez l’homme quand la femme de son quotidien vieillit. C’est aussi un roman sur la création littéraire et la façon d’exister au monde à travers ce pouvoir que possède l’écrivain. Au cœur de la vie parisienne, Camille Laurens connaît bien la puissance des rumeurs, des ragots . Elle commence son livre en comparant deux couples célèbres du « Tout Paris » , celui de Moscovici qui a 30 de plus que sa dernière femme sans que cela ne choque personne et Macron qui a 20 ans de moins et dont le couple apparemment est souvent sujet de quolibets. Bien loin de toutes ses réalités qui ne m’intéressent pas vraiment, je partage son avis, le vieillissement de la femme est différent de celui de l’homme, l’âge se marque différemment chez les deux partenaires. Mais pour être entourée de gens très âgés, je vois aussi que passé 80 ans les femmes s’en sortent plutôt mieux côté séduction.

Ce livre m’a souvent agacée, et parfois intéressée, le genre « ragot » ce n’est vraiment pas ce qui peut me retenir, en revanche, la manipulation sur Facebook et le danger qu’il y a à entretenir une relation virtuelle est bien analysé. Comme je plains les personnes réelles qui entourent cette écrivaine, elles peuvent un jour se retrouver dans ses romans et les comptes qui se règlent par écritures interposées ressemblent plus à une guerre civile qu’à une œuvre artistique.

Citations

L’aide quand on va mal

Vous êtes médecin ou seulement psychologue ? Quelle différence, remarquez ? Ce que je n’aime pas dans votre discipline, votre prétendue science, c’est qu’elle ne change rien. Vous avez beau savoir ce qui se passe, ce qui s’est passé, vous n’êtes pas sauvé pour autant. Quand vous avez compris ce qui vous fait souffrir, vous souffrez toujours. Aucun bénéfice. On ne guérit pas de ce qu’on rate. On ne reprise pas les draps déchirés.

Internet et Facebook

Internet est à la fois le naufrage et le radeau : on se noie dans la traque, dans l’attente, on ne peut pas faire son deuil d’une histoire pourtant morte, et en même temps on surnage dans le virtuel, on s’accroche aux présences factices qui hantent la toile, ai lieu de se déliter on se relie . Ne serait-ce que la petite lumière verte qui indique que l’autre est en ligne ! ah la petite lumière verte, quel réconfort , je me souviens.

Humour

C’est comme cette épitaphe sur la tombe d’un Américain au Père-Lachaise. Sa femme a fait graver : « Henry, je sais enfin où tu dors ce soir. »

20 Thoughts on “Celle que vous croyez – Camille LAURENS

  1. Lu et aimé, surtout la construction; je ne partage pas 100% toutes ses idées, on dirait qu’elle ne connait pas de femmes plus âgées … et séduisantes (j’ai une copine comme ça, elle fait 10/15 ans de moins que son âge réel et attire encore des prétendants)
    Ensuite et ensuite seulement j’ai découvert le côté auto fictionnel de ses romans, bah oui.

    • La construction est interessante, mais ce qui pour moi sauve ce roman du marécage nauséabond de l’autofiction c’est la description de la séduction via Facebook de ses dangers. Elle écrit très bien mais ça ne suffit pas pour faire oublier qu’elle règle des comptes via son talent littéraire.

  2. J’ai été de mon côté totalement conquise par ce roman qui parle vraiment bien je trouve de la condition des femmes. De plus, je l’ai trouvé virtuose en terme de construction narrative (comme Keisha).
    En ce qui concerne le côté « autofiction », en effet, on ne peut que plaindre ceux qui en font les frais ! Heureusement, je ne fais pas partie de ses proches ;-)

  3. je ne retrouve pas trop les femmes que je connais à travers son personnage, mais c’est vrai que la construction de ce roman est bien faite et la première partie m’a plu. Celle qui concerne Facebook

  4. Il m’attend… J’espère être plus enthousiaste que toi…!

  5. Je l’ai lu récemment et apprécié.
    Tout d’abord, l’écriture est vraiment jolie, maîtrisée.
    Ensuite, je trouve qu’elle aborde très bien la difficulté d’une femme de plus de près de 50 à rester désirable (même si je ne partage pas complètement son analyse). De plus, en donnant la parole à 3 protagonistes distincts, elle nous manipule en entremêlant le réel et la fiction.
    Seul bémol : 1 mois après l’avoir lu, j’ai l’impression de l’avoir déjà passablement oublié…

    • je suis donc la seule à avoir des réserves, mais je n’aime pas la partie psy , et elle ne me touche pas quand elle parle de la séduction, je trouve un côté manipulateur . Mais je répète j’ai apprécié son aventure avec Facebook .

  6. J’ai assisté à une rencontre avec elle la semaine dernière, mais je ne suis toujours pas décidée à la lire ; il y a quelque chose chez elle qui ne me convainc pas. Alors que je viens de lire Annie Ernaux, où là, le côté auto-fiction ne me dérange pas tellement il est mis au diapason du collectif.

    • J’ai lu ton commentaire ce matin, et je me dis que les catégories sont des poisons , oui, tu as entièrement raison, l’autofiction si on la comprend comme une mise en scène de sa propre vie au service de l a nôtre, ne nous dérange pas . Depuis Montaigne on sait qu’un auteur peur porter en lui « l’humaine condition » . Cette écrivaine a donc mêlé sa vie à la création littéraire, avec talent et succès. Mais, je me sens manipulée et non pas associée, elle tire toutes les ficelles et je n’ai pas envie de cela. La question que je me pose, c’est de savoir si lire son livre sans rien savoir de sa vie me permettrait d’éprouver plus d’empathie pour ses personnages. A cette question, je peux alors répondre, que je ne me retrouve pas du tout dans ce qu’elle dit sur la séduction féminine (ni aucune de mes amies). La volonté de ne pas accepter les transformations du corps avec l’âge ne fait pas partie de mes préoccupations.

  7. J’ai beaucoup de mal avec les autofictions,et encore moins le mode « ragot ». je passe

    • Le mot ragot(que j’ai utilisé) ne convient pas pour l’ensemble de ce roman, elle règle des comptes à travers son oeuvre , c’est un peu différent.

  8. Camille Laurens ne m’a jamais tentée, justement à cause de ce côté autofiction et médias. Mais ce que tu écris de ce roman m’intéresse : comment on se montre et on se fait vivre sur les réseaux sociaux, la façon de se mettre en scène. Nous sommes tous en représentation aujourd’hui à travers les réseaux sociaux…

    • C’est la partie de son roman qui est la plus intéressante et de loin. Et c’est vrai que j’ai l’impression de converser sur la blogosphère avec de vraies personnes, parfois, même connaître les gens , pourtant je ne fais que rarement l’effort de les connaître en chair et en os. Même quand l’occasion se présente, j’aime bien l’anonymat relatif de la toile . Je ne sais pas expliquer pourquoi.

  9. roh zut! Je m’apprête à le lire (enfin dans quelques jours), je me réjouissais… zut zut zut!

    • Tu peux voir dans les commentaires que c’est une auteure qui plaît à beaucoup de gens dont on apprécie le jugement, c’est donc que je suis trop sensible à des détails qui ne gênent pas d’autres lecteurs. Donc, lis le vite pour que je lise ton avis.

  10. Camille Laurens, un bon souvenir « Dans ces bras-là » en 2000 (le livre, veux-je dire). Depuis je l’ai perdue de vue, mais vos extraits l’y remettent.

    • C’est sûr qu’il est préférable d’être dans ses bars dans un roman que dans la vie, du moins c’est l’impression que j’ai ou qu’elle veut donner.

  11. Pas vraiment tenté. Le genre de l’autofiction ne m’attire pas trop…

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