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Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard.
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Pour que le club de lecture fonctionne correctement, il faut que les livres soient lus en moins d’une semaine, les romans courts et incisifs sont donc largement avantagés par rapport aux romans de cinq cent pages où il faut prendre son temps. Et dans celui-ci, Eric Fottorino prend tout son temps pour nous raconter au moins quatre vies.

  • Celle de son enfance chez les Ardanuit à Bordeaux où, jusqu’à l’âge de 10 ans, il sera « le petit » confronté à l’aigreur d’une grand-mère destructrice qui fréquente beaucoup trop les églises, Notre-Dame-des Chartrons entre autre. Tout est mortifère chez elle, un peu comme dans la chanson de Brel « ces gens là »

Faut vous dire, Monsieur
Que chez ces gens-là
On ne pense pas, Monsieur
On ne pense pas, on prie

Frida serait Lina sa trop jeune maman du « petit François », elle est très belle et voudrait trouver un homme qui l’aime elle et son enfant.

  • Sa période heureuse, quand Lina se marie avec Marcel Signorelli, un ostréiculteur de la région de La Rochelle, les Signorelli, c’est le midi, le soleil qui chasse tous les miasmes de la bigoterie bordelaise.
  • La fin de sa vie, quand rongé par la maladie de Korsakov ,il s’approprie, au point de croire que c’est la sienne, la vie de Fosco Signorelli qui a dû partir de Tunis au moment de l’indépendance alors qu’il avait fait totalement sien ce fier et si beau pays du désert et de ses habitants.
  • Et par dessus tout cela, celle d’un certain MAMAN dont il est le fils naturel mais qui n’a pas pu ou pas voulu être son père.

Korasakov est une maladie étrange qui est le plus souvent le signe d’un alcoolisme sévère, elle ronge la mémoire à le manière d’un Alzheimer, mais en plus fait adopter au sujet qui en est atteint, une des personnalités qu’il a rencontrée. On peut se demander si tous les écrivains qui s’approprient la vie de leurs personnages ne sont pas, plus ou moins, passagèrement atteints de ce syndrome. En tout cas cela sert bien le roman d’Eric Fottorino. Il peut lui l’enfant sans père, s’approprier la vie de ce grand père d’adoption et nous la faire revivre.

Tout le long du roman, cet enfant qui n’a su dire le mot « papa » qu’à 10 ans découvre que son père biologique s’appelle « Maman » qu’il faut prononcer Mamane. On ne s’étonnera pas que cet enfant soit si attaché aux mots qu’il comprend parfois de travers, on se demande aussi si sa maladie ne vient pas du fait qu’il a dû assumer trois identités. J’ai lu récemment « Chevrotine » du même auteur et assez curieusement on retrouve le même thème dans une partie du roman. L’ostréiculteur au grand cœur, et surtout Carla la seconde femme du narrateur qui ne saura pas aimer Marco le fils pianiste, né du premier mariage, et comme dans « Chevrotine » le père un peu lâche laissera son fils s’éloigner de lui.

C’est donc un roman très dense où les vies se mêlent, j’avoue m’y être ennuyée car il veut brasser trop d’aspects qui n’ont rien à voir ensemble : la vie étriquée de Bordeaux dans un milieu aigri catholique, la vie d’un homme sorti de prison qui se pend , son oncle homosexuel qui se suicide , puis la mafia à Palerme, puis la Tunisie et les combats au moment de l’indépendance. Malgré les 500 pages on a l’impression de survoler et de n’entrer vraiment dans aucune histoire. Mais comme je l’ai dit en commençant , c’est peut-être un roman qu’il faut lire avec du temps mais alors, bon courage ! car le lecteur est souvent entrainé dans les sables mouvants d’une tristesse teintée de culpabilité. Évidemment, on pense à « Chevrotine » .

Citations

La bigoterie

– Il paraît que le père Castelain a le cancer, murmure la vieille je prie pour lui.
– Je priera aussi, renchérit Odette.

D’autres mots fusent à mi-voix. Méningite. Zona. Bile verte.

L’énumération des souffrance ragaillardit les deux vieilles.

Les Ardanuit oublient qu’ils ont passé leur vie à faillir. Failli réussir, failli s’en sortir, failli gagner à la loterie nationale, failli tout racheter, le Château-Gaillard, les terres de Sologne et les étangs à nénuphars, tout. Failli relever le nom et le blason, failli sauver l’honneur et les authentiques couverts en argent. Faili être heureux. Ils se tiennent chaud avec des presque et des peut-être, des demain si Dieu le veut. Dieu ne veut jamais.

8 Thoughts on “Korsakov – Eric FOTTORINO

  1. Si tu t’es ennuyée c’est embêtant et ça ne donne pas envie de le noter.

  2. Déjà que je ne suis pas fan des pavés, si en plus on s’y ennuie… Pourtant j’aime beaucoup cet auteur.

  3. Tristesse, ennui, culpabilité… Oups, je passe mon tour ;-)

  4. Un roman que j’avais abandonné, je l’avais trouvé très froid.

    • ah! cela fait donc deux blogueuses qui n’ont pas accroché à ce roman, j’avais très envie d’avoir l’avis de quelqu’un d’autre, j’avais peur d’être trop critique.

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