Livre à recommander pour tous ceux qui, comme moi, se demandent comment l’auteur du chef d’œuvre Le Voyage au bout de la nuit, a pu être « antisémite militant ». David Alliot ne cherche pas à excuser Céline, tout l’accable : il publie en 1941, Beaux draps troisième pamphlet antisémite alors que les mesures de Vichy sont déjà en vigueur. Il réclame haut et fort, lors de l’exposition antisémite organisée par Vichy que ses deux précédents pamphlets rédigés avant l’occupation allemande, Bagatelle pour un massacre et L’école des cadavres fassent partie de la dite exposition.
La façon dont il s’est opposé à Robert Desnos, décriant son physique et faisant croire qu’il était juif, est absolument dégoutante, mais pour autant il n’est responsable ni de son arrestation ni de sa mort. La seule chose qui nuance le tableau peu ragoutant du personnage, c’est qu’il détestait autant Pétain que les juifs. Il n’a pas franchement collaboré avec les Allemands qui le trouvaient un peu outrancier ! ! !
En analysant un à un les principaux reproches que l’on fait à Céline, David Alliot permet au lecteur de se faire une opinion plus exacte. C’est aussi toute une période qu’on voit revivre et évidemment la vérité n’est pas que d’un côté. Le recul historique fait du bien, car on a le droit, aujourd’hui, de ne plus admirer Jean Paul Sartre pour ses qualités de résistant et que reste-t-il de son œuvre romanesque ?
J’ai été également très intéressée par son parcours en tant que médecin, on le présente souvent comme quelqu’un de désintéressé et altruiste, enfin un côté sympathique !
Un petit bémol, il a fait des études de médecine « allégées » parce qu’il revenait des tranchées, il n’était pas un très bon médecin, et s’il aimait mieux les pauvres, c’est qu’il pouvait les dominer. David Alliot qui connaît bien son Céline, place Mort à Crédit au dessus du Voyage. Il en explique la raison : le style célinien est plus abouti. Or, pour moi Céline restera l’auteur du Voyage, cela veut dire sans doute qu’il me reste des œuvres à découvrir, et cette idée me fait bien plaisir. Enfin, David Alliot souligne le rôle positif de Luccini à propos du regain d’intérêt pour Céline, je suis bien d’accord avec lui (Merci Mathieu de m’avoir offert ce livre pour mon anniversaire).
Citations
Dans ce pamphlet, tout y passe, et Céline aligne tous les poncifs de son époque. Si l’antisémitisme n’est pas une rareté dans la société de son temps, il est le seul écrivain d’envergure à avoir mis son talent au service d’une cause aussi contestable.
Quand parait « Mort à crédit » en 1936, l’évolution stylistique est importante. Encore classique dans « Voyage au bout de la nuit », la structure du roman est désormais complètement chamboulée. La grammaire et la syntaxe volent en éclat pour mettre en valeur le « rendu émotif ».