Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard. Et vous remarquerez son coup de cœur !

Pourquoi Dinard ? Car c’est la ville d’où vient cet auteur. Pourquoi ce coup de cœur ? Parce que cet auteur vient de notre ville. Cela ne veut pas dire que ce soit un mauvais roman, mais quand même, mes amies n’étaient peut-être pas entièrement objectives. Ce roman raconte l’adolescence d’un jeune garçon, ses émois sexuels, sa passion pour la musique et son quotidien marqué par un père directeur d’un grand hôpital psychiatrique. Il passera son enfance parmi des gens de cet hôpital. Son meilleur ami, Francis, celui qui l’appelle « Mon gamin » a été abandonné par ses parents dans la cour de cet hôpital. Thierry, le personnage principal a le malheur de perdre sa mère trop tôt et Francis qui vouait un culte à ce médecin psychiatre qui avait été simplement humaine avec lui, protégera toute sa vie cet enfant. Le père de Thierry se remarie avec Emelyne une trop jeune et jolie belle mère. Un meurtre est commis et sans être un roman policier on est pris par les suites logiques de cet acte. Mais comme souvent ces faits sont vus à travers les yeux et les raisonnements de malades mentaux, ce n’est pas si simple de démêler le vrai du faux.

Ce roman vaut surtout pour l’ambiance de ce petit village qui vit au rythme de l’institution psychiatrique. Comme mes co-lectrices, j’ai moins aimé le dénouement que le reste du roman. Les émois sexuels du jeune adolescent sont bien racontés, et l’histoire de Francis m’a beaucoup émue. Les rapports humains entre les malades et les « bien-portants » sont finement décrits. Bref il y a de très bons moments dans ce roman qui pourtant ne m’a pas entièrement enthousiasmée.

Citation

Une seule mais que j’aime beaucoup pour son humour et sa profondeur

 Là où les non-initiés pointaient du doigt un camp de concentration pour fous, Marc voyait une sorte de principauté où les malades mentaux étaient exonérés d’impôts sur la différence.



Roman que j’ai trouvé dans la blogosphère, je mettrai les liens si je retrouve qui m’a fait découvrir cette auteure. (Merci Kathel,  et Brize lui a attribué 4 parts de tarte ce qui est très rare). J’ai d’abord dévoré avec passion le début de ce roman puis je me suis lassée du procédé (romans par lettres) mais cela reste quand même un très bon moment de lecture. Anne Percin imagine la correspondance d’un personnage fictif : Hugo Boch qui suit Gauguin à Pont-Aven puis au Pouldu. Celui-ci héritier de la famille Villeroy et Boch, pense d’abord avoir des dons pour la peinture puis s’oriente vers la photographie cela m’a permis, d’ailleurs, de découvrir une bien étrange coutume les photos « post-mortem » . Au lieu de faire des portraits sur le lit de mort on remettait le défunt debout ou assis pour garder de lui une image plus vraie( ?).

Hugo correspond avec sa cousine Hazel personnage fictif lui aussi. Ces deux personnages nous permettent de découvrir à la fois le monde des arts à Paris et à Bruxelle et surtout cerner peu à peu la personnalité de Gauguin et de tous les peintres qui l’ont approché.

A Bruxelles nous suivons l’engagement artistique d’Anna Boch, artiste reconnue à l’époque et qui peut s’enorgueillir d’avoir acheté un tableau de Vincent Van Gogh, le seul qu’il ait vendu de son vivant.

À Paris nous vivons toutes les difficultés des artistes pour être exposés aux différents salons qui lancent les peintres dans la renommé ou les réduisent à la misère. Bien sûr pour les femmes c’est dix fois plus difficile de se faire reconnaître et bien sûr aussi les artistes qui avaient à l’époque les faveurs des critiques et du public sont pratiquement inconnus aujourd’hui.
Enfin à Pont-Aven et au Pouldu nous découvrons le caractère entier et fantasque de Gauguin. Ce n’est pas un personnage très sympathique, mais on le voit entraîner derrière lui un nombre important de peintres qui reconnaissent tous son génie : Emile Bernard, Paul Emile Colin, Paul Sérusier, Charles Filiger …. L’auteure à travers son personnage raconte de façon vivante et très précise la vie de ces artistes dans un petit village breton qui avait bien du mal à comprendre ces drôles de saltimbanques. Mes seules réserves à propos de ce roman viennent de la forme, les différentes lettres des uns et des autres ont rendu ma lecture un peu lente et parfois, un peu ennuyeuse. Mais pour tous ceux qui connaissent ou qui voudrait connaître cette période d’intense création artistique, je ne peux que chaudement recommander le roman d’Anne Percin.

Citations

Le « il » ici est un artiste très connu de l’époque Pascal Dagnan-Bouveret (bien oublié aujourd’hui)

Ils ne sont pas drôles, tes Naturalistes… Espérons au moins qu’il saura tirer parti de ce qu’il a vu ici ! Mais je crains qu’il n’y soit pas resté assez longtemps pour comprendre ce qui fait la saveur de ce pays. Il est de ces peintres qui, au lieu d’ouvrir des yeux neufs, trimbalent un regard préparé à l’avance comme on prépare une toile, un regard fait à l’atelier.

Trait de caractère de Gauguin

C’est ainsi que j’ai appris que Gauguin n’accepte jamais de cadeau : il préfère faire des dettes, ça lui paraît plus noble. À chacun sa morale.

Pont-Aven et Gauguin

Filiger m’a juré qu’à Pont-Aven, sur le seuil d’une maison de pêcheur, il a vu une toile de Gauguin en guise de paillasson ! Il faut dire que, contrairement à Vincent, le bonhomme a abusé du système que tu décris, qui consiste à payer ses dettes avec des ébauches. Dans son dos, les gens s’en débarrassent plus ou moins discrètement… C’est même devenu une source de plaisanterie. Les Gauguin battent la campagne, colmatent les fissures dans les chambres de bonnes, cachent les passe-plats dans les auberges ou servent d’enseignes à deux sous. De Pont-Aven au Pouldu, il a semé à tous les vents ! Même la petite Mimi est à la tête d’une collection de figurine en bois signée PGo…

La création mais aussi une leçon de vie (Propos de Hugo personnage fictif du roman)

Je trouve curieux que la photographie m’ait mené là.
J’avais cru pourtant qu’elle me conduirait à sans cesse aller vers les autres, mais il n’en est rien. Ce que je sens en moi, c’est un recul, presqu’un refus. Je ne suis pas hostile – je crois que je ne le serai jamais, mais seulement indifférent à tout ce qui arrive aux autres et qui ne m’arrive pas, à moi. Gauguin était de venu comme ça avant qu’il parte. Il disait qu’il fallait se faire à l’idée de n’être pas aimé : c’est une habitude à prendre, pour ça, il faut cesser d’aimer aussi. Blinder son cœur. Se fermer. Il n’y a pas d’autre solution, sinon on devient fou.

Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard.


Encore un écrivain qui raconte d’où il vient et, comme par hasard, ce n’est pas très gai. Notre club a discuté avec passion d’un autre livre de souvenirs d’une écrivaine : Chantal Thomas et « ses souvenirs de la marée basse » que j’ai peu apprécié contrairement à d’autres lectrices qui voulaient lui attribuer un coup de cœur. Je me dois donc d’expliquer pourquoi ce livre me fait plaisir. Pour son humour d’abord, je me suis déjà resservie de la description de Guy et sa façon de ralentir « au feu vert de peur qu’il ne passe à l’orange ». Dans une soirée où vous êtes avec des conducteurs qui racontent leurs points de permis en moins vous êtres sûr de l’éclat de rire généralisé. J’apprécie aussi sa façon de faire revivre une époque, je reconnais très bien les lieux et les impressions de sa jeunesse, la maison de campagne aux tapisserie style Vasarély. Et surtout la galerie de portraits des gens qui ont peuplé son enfance est absolument extraordinaire. Commençons par celle qui est un personnage de roman à elle toute seule : sa mère, qui toute sa vie aura vécu pour rendre malheureux les gens qui l’entourent sans pour autant en avoir le moindre plaisir. Son couple avec Guy, le beau père de Hervé Le Tellier est terrible. C’est digne de Mauriac, et Bazin réunis. Le pauvre homme comment a-t-il pu supporter tout cela, le mystère est entier. Elle semble ne l’avoir jamais aimé, ni lui ni sa famille dont elle jalouse les titres de noblesse. Elle est tout entière dans la rancœur et dans la jalousie. le père biologique (dont elle a effacé même le nom !) est totalement absent et ne cherche pas du tout à connaître son fils.

Pourtant, cet auteur ne fait pas une peinture si sombre de son enfance, il y a des portes de sorties à cet univers aigri et amer, ses grands-parents, une tante plus libre que sa mère. Et surtout comme dit l’auteur lui même

« Je n’ai pas été un enfant malheureux, ni privé, ni battu, ni abusé. Mais très jeune, j’ai compris que quelque chose n’allait pas, très tôt j’ai voulu partir, et d’ailleurs très tôt je suis parti.
Mon père, mon beau-père sont morts, ma mère est folle. Ils ne liront pas ce livre, et je me sens le droit de l’écrire enfin. Cette étrange famille, j’espère la raconter sans colère, la décrire sans me plaindre, je voudrais même en faire rire, sans regrets. Les enfants n’ont parfois que le choix de la fuite, et doivent souvent à leur évasion, au risque de la fragilité, d’aimer plus encore la vie. »

Enfin ce livre tient surtout par la qualité de son style, cet humour en distance et un peu triste donne beaucoup de charme à ce récit.

Citations

Sa mère et les mensonges

 J’ai compris pourtant vite qu’il était difficile d’accorder le moindre crédit à ce que ma mère racontait. Ce n’était pas qu’elle aimât particulièrement mentir, mais accepter la vérité exigeait trop belle. Elle accumulait ainsi les mensonges, et elle les imposait à tous.

Ce que cache le dévouement

La maladie de mon grand-père fut l’occasion pour ma mère de se lancer dans une course au dévouement dont, pour plus de sûreté, elle posa les règles. Elle insista pour le conduire à l’hôpital pour chaque transfusion. C’était souvent très tôt le matin et Raphaëlle, qui habitait plus loin et devait déposer ses enfants à l’école, partait avec handicap. Et lorsqu’elle se libérait pour l’emmener, la cadette se joignait à eux, ne supportant ni d’être supplantée dans l’abnégation ni de laisser son père seul avec Raphaëlle. Cette dernière finit par se décourager. Ma mère ne cessait jamais de le lui reprocher, tout en signalant l’exemplarité de son propre sacrifice. Cas remarquable de désintéressement intéressé.

Portrait de Guy

 Guy, ainsi, portait la cravate. A priori – ceci posé pour rassurer tout lecteur cravaté-, on n’en saurait rien déduire. D’autant que c’était une cravate simple en soie , passe-partout, ni slim, trop décontracté, ni en tricot, trop risquée car il n’eût su avec quoi la porter. Elle était presque toujours unie, dans les bleus profonds, mais il arrivait qu’une très fines rayures l’égayât. Je lui avais offert des cravates d’autres coloris, ou aux motifs fantaisie, en vain. Elles avaient échoué au fond d’un tiroir, au mieux. Les autres, une cinquantaine, étaient suspendues à une longue double tringle métallique dans son placard et j’aurais été bien incapable de les distinguer entre elles.
Il était trop court de buste et pas assez fort de col, et il choisissait ces cravate trop longues. Il avait beau en coincer l’extrémité dans le pantalon, elle finissait toujours par s’échapper, pour flotter de manière incontrôlée sur la boucle de ceinture.
J’ignore d’où lui venait son goût pour cette bande d’étoffe décorative. Enseigner l’anglais dans le secondaire n’exigeait guerre qu’il en portât une. J’imagine qu’inconsciemment il s’agissait pour lui d’établir avec ses élèves une ligne Maginot vestimentaire infranchissable. A moins que la tradition anglaise, « Tie », qui signifie aussi, « lien », « attache », ne soit une clef d’analyse. Quoi qu’il en soit, une fois rentré chez nous il ne la retirait pas, ne desserrait même pas le col. Longtemps je mis cela sur le compte de la fatigue. Arriva l’âge de la retraite. Il ne l’abandonna pas. Il nouait son nœud tous les matins, par tous temps, en toutes circonstances. Il la portait indifféremment sous une veste, sous un pull, un blouson, un anorak, tout cela convergeant pour lui conférer l’allure d’un vigile d’une société de gardiennage. Au sport d’hiver, ses mauvais genoux l’empêchaient de skier mais il y emmenait parfois mon fils, il portait la cravate jusqu’au bas des pistes de ski, et il pouvait même manger une fondue, cravaté, dans les restaurants d’altitude. J’ai la photo. L’ôter pour dormir où se baigner devait être un déchirement.
Son conformisme était si extrême qu’il confinait à l’originalité.

Toujours Guy qui devait énerver plus d’une personne sur la route

 Nous démarrions alors, mais seulement après que le siège eut été réglé au millimètre, et les rétroviseurs repositionnés. Sortir en créneau de sa place lui prenait plus de temps qu’il en eut fallu à quiconque pour y entrer. Au premier feu tricolore, il ralentissait malgré le vert pour éviter de passer à l’orange. Et lorsque le feu quittait le rouge, il n’arriva jamais que la voiture qui nous suivait ne klaxonnât pas au moins une fois.

Quand son humour rejoint celui de Jean Louis Fournier

Une église sur le fronton de laquelle était écrit : « Ah qu’il est bon le bon Dieu ! » Ce n’était pas de l’humour, d’autant qu’à tout prendre, un « Ah qu’elle est vierge la Vierge Marie ! » eut été plus amusant.


J’ai rencontré ce roman à Combourg, je cherchais une carte postale avec le portrait de Chateaubriand, cela me semblait le lieu adapté, mais que nenni, le libraire m’a répondu : « on laisse ce genre d’achat au château » (fermé à cette époque de l’année) donc pas de carte de François-René mais un homme qui avait envie de me parler des livres qu’il vendait. En particulier donc de cette maison d’édition, « l’éveilleur » qui publie des textes oubliés. Il a su « éveiller » ma curiosité en me disant que ce livre avait à l’époque, été une sorte de best-seller, il a reçu le prix de l’Académie française. André Lafon était un ami de Mauriac et était promis à un bel avenir littéraire. Et puis, 1914, la guerre, il en mourra indirectement : de constitution faible il attrapera la scarlatine en 1915, cela lui fut fatal. Je pense que si, notre libraire fait aimer aux gens de Combourg ce livre c’est qu’ils ont adopté la campagne, les bois, le rythme lent des activités rurales et le style de François-René de Chateaubriand (et que donc ,il aurait dû vendre une carte de cet auteur ! non mais !).

Le livre est présenté comme « un frère du grand Meaulnes » et un chef d’oeuvre qui mérite sa place dans notre GRANDE littérature. Je dis tout cela parce que mes trois coquillages montrent bien que cela n’a pas vraiment marché pour moi. J’ai eu l’impression de revivre mes dictées de primaires et les textes choisis de CM2 . Le style est aussi parfait que vieillot, plus personne n’écrit comme cela mais c’est aussi très agréable à lire car c’est un livre très court. Je sauve quand même ce roman à cause de la pudeur avec laquelle il raconte ses souffrances de jeune garçon. Son père traité de fou par ses camarades d’école est un grand dépressif qui se suicidera. L’enfant vit dans les non-dits de sa mère et de sa tante qui essaient de lui faire une vie la plus normale possible. Lui, se réfugie dans la contemplation de la nature qu’il décrit avec une grande minutie. J’aimerais bien ne pas être la seule à connaître ce texte et je suis presque certaine que certaines blogueuses vont adorer ce roman.

Je me suis demandé pourquoi la quatrième de couverture évoquait le grand Meaulnes, certes les deux auteurs sont morts à la guerre et n’ont écrit qu’un roman. Certes encore, on voit tout le charme d’une campagne belle et peu atteinte par le monde des villes, certes enfin, les relations entre enfants datent de cette époque. Mais rien d’une superbe histoire d’amour dans « l’élève Gilles », un enfant triste qui se console en s’émerveillant devant les beautés de la nature. Et un style récompensé par l’Académie française en 1913.

Citations

Pudeur d’un rapport douloureux père fils

Mon père ne parut pas au déjeuner ; j’appris qu’il se trouvait las et prenait du repos. J’osai m’en féliciter, car sa présence m’était une contrainte. Il demeurait, à l’ordinaire, absorbé dans ses pensées, et je respectais le plus possible son recueillement, mais le mot, le geste donc il m’arrivait de troubler le silence, provoquait sa colère ; j’en venais à jouer sans bruit , et à redouter et comme la foudre le heurt de quoique ce fût. Cette perpétuelle surveillance où j’étais de moi-même me gênait, à table surtout. Il suffisait de l’attention que j’apportais à me bien tenir pour m’amener aux pires maladresses, la veille même, à dîner, mon verre renversé s’était brisée en tachant largement la nappe. Le sursaut de mon père m’avait fait pâlir, et mon trouble fut plus grand encore à le voir nous laisser et reprendre, au salon, La sonate qu’il étudiait depuis le matin.

Un style vraiment désuet, j’ai impression de retrouver les dictées de mon enfance et les rédactions de primaires

Un doux matin se leva chaque jour sur ma vie qu’il beignait de clarté bleu et de saine fraîcheur.
Je ne savais de la saison triste que le visage ennuyé qu’elle montre à la ville, ses ciels lourds sur les toits et la boue des rues obscures. Je découvris la splendeur de l’hiver. Ma chambre située à l’extrémité de l’aile gauche, ouvrait sur les champs que les vignes dépouillées peuplaient de serpents noirs et de piquets, mais la pureté du ciel pâle s’étendait sur elle, jusqu’au loin lointain à peine brumeux ; un coteau se haussant portait un village où le clocher pointait ; des pas claquaient sur la route aperçue et des voix, parfois, en venaient.
Le jardin nu m’étonna : le paulownia y révélait une ossature tourmentée, les marronniers levaient des bras transis, les arbustes semblaient des balais de brande, la haie un treillis épineux. Les groseilliers se mouraient, près de la fontaine qui dégelait, goutte à goutte, au soleil rose…..

Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard.


J’ai beaucoup aimé de cette auteure deux de ses romans historique « L’adieu à la reine » que j’ai lu avant Luocine et « Le testament d’Olympe« . Son livre de souvenirs était proposé à notre club de la rentrée, je l’ai donc commencé avec un a priori favorable. De plus les jeux d’enfant sur les plages me sont familiers ainsi que les ambiances de ville balnéaires en saison comme hors saison. Mais malgré ma bonne volonté, je n’ai rien reçu en lisant ce livre, qui n’est ni déplaisant ni plaisant. Je me disais sans cesse que si cette auteure n’était pas connue, peu de gens liraient ce livre qui est, je le reconnais, élégant et délicat. Chantal Thomas,( pour moi c’est une qualité), n’est pas de la veine des femmes qui aiment avec courage mais souvent trop d’impudeur étaler la moindre de leurs souffrances, elle reste mesurée et par touches très fines nous fait vivre une enfance bercée par les embruns et les odeurs d’estran et une mère fantasque. Elle raconte ses châteaux sur le sable, ses pêches miraculeuses dans les rochers, des grands parents qui pallient l’absence d’une mère plus intéressée par son propre bonheur que celui de ses proches. Je sais que j’oublierai ce livre aussi vite que la marée défait les œuvres éphémères des enfants sur la plage.

Citations

Parce que je connais des amoureux du tandem

Si aimer ce n’est pas se regarder l’un l’autre c’est regarder ensemble dans la même direction, alors le tandem et le véhicule par excellence de l’amour. L’un derrière l’autre, pédalant de concert dans la même direction, ils avaleront des kilomètres.

Les châteaux de sable

Le château continue de crouler. Vous auriez dû le construire dans le sable sec, là où la marée ne monte pas, pontifie un père qui ignore l’attrait des causes perdues et l’empire des ruines. C’est parce que le château s’écroule, c’est dans l’intervalle où, quoique délabré, il garde des traces de sa gloire passée, que soudain il s’anime et devient habité. Il est traversé de voix, on entend des appels au secours, des histoires se nouent, et une grande tristesse nous abat.

La maladie d’Alzheimer

Ma mère a tellement travaillé dans le sens de l’oubli, tellement voulu oublier, que maintenant que l’oubli lui arrive de l’extérieur, en forme de pathologie, elle a une supériorité sur ceux qui ne s’étaient pas entraînés, ceux que l’oubli frappent de plein fouet. Elle est étrangement à l’aise avec le processus mystérieux et actif en train d’effacer certaines de ses données existentielles. Elle est à l’aise, elle n’est pas complice. Elle sent que quelque chose la dépasse, qui ne s’agit plus d’une amnésie sous contrôle des noms de personnes et de lieu rayés de son monde comme porteur de mauvaises ondes, d’images désagréables et douloureuses. Un enfouissement réussi. Chez-elle les gens, les lieux, les noms, bétonnés sous une couche de silence, n’émergent plus jamais dans un espace vivant de conversation, de rires, de larmes, ni même par une allusion, une soudaine tristesse où se fige l’expression. Le nom de mon père n’a aucune chance de franchir la barrière de ses lèvres, pas plus que celui d’Arcachon.

 

Cet auteur fait partie de ceux que je lis avec grand plaisir. Brize était enthousiaste, mais Aifelle avait un peu refroidi mon envie, pas assez tout de même pour que je ne le réserve pas à ma médiathèque. Tous les lecteurs de ce roman constatent que le récit de la catastrophe de Liévin en 1974 rend parfaitement compte de l’horreur de cette accident qui aurait pu être évité, et raconte très bien la vie des mineurs et les terribles conséquences de la silicose. J’ai relu quelques archives de l’époque, qui permettent de se rendre compte que Sorj Chalandon n’a pas exagéré. Oui, cette catastrophe était évitable et oui, ces hommes sont morts au nom du rendement du charbon, alors que les mines avaient déjà perdu leur rentabilité, elles allaient bientôt fermer les unes après les autres. Sorj Chalendon, en ancien journaliste, a sûrement vérifié la véracité des détails révoltants comme le fait que les houillères retiennent sur le salaire du mineur mort au fond de la mine, les deux jours qu’il n’a pas pu faire pour finir son mois, et encore plus sordide le prix de la tenue qu’il n’a pas pu rendre….

L’autre centre d’intérêt c’est le destin personnel de Michel, le petit frère survivant et totalement hanté par cette catastrophe. On ne peut sans divulgâcher l’intrigue, en dire trop sur ce personnage. Pour Aifelle il n’est pas crédible et cela enlève du poids au roman. Je dois être une véritable inconditionnelle de cet auteur, car si comme elle j’ai des doutes sur la vraisemblance du personnage, j’ai trouvé que grâce à lui, Sorj Chalendon avait réussi à nous rendre présent l’horreur des accidents dans les mines. Et puis cela permet de tenir en haleine le lecteur jusqu’à la dernière page. Lors du procès final, j’ai beaucoup apprécié le réquisitoire et la plaidoirie de la défense. Tout est dit dans ces quelques pages. À la fois un pays qui, en 2014, ne comprend plus la vie des mineurs, l’absurdité des destins qui finissent dans des râles de respirations étouffées par les poussières de charbon, ou dans des accidents d’une violence inimaginable, et les gens qui eux sont restés à Lens ou à Liévin et qui se sentent marqués à jamais par les tragédies du charbon.

C’est donc une quatrième fois que Luocine accueille un roman de cet auteur et même si j’ai un peu plus de réserves que pour « Retour à Killyberg » , « le quatrième mur » prix Goncourt lycéen 2013,et « Profession du père » il m’a quand même beaucoup plu.

 

Citations

Tous les bricoleurs de mobylettes se reconnaîtront

À vingt sept ans, mon frère avait aussi abandonné son vieux vélo pour le cyclomoteur.

– La Rolls des gens honnête, disait-il aussi.

Une tragédie évitable

La presse l’avais compris, le juge Pascal l’avait découvert. Rien n’avait été dégazé. Le système pour mesurer le grisou n’était pas achevé. La machine qui servait à dissiper les poches de méthane fonctionnait dans un autre quartier. Les gaziers n’avaient pas mal travaillé. Pas leur faute, les pauvres gars. Ils n’étaient que deux mineurs à effectuer des mesures manuelles .Un seul, pour inspecter des kilomètres de galeries. Par mesure d’économie, les Houillères avaient pris le risque de l’accident.

 

Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard.

Prix Renaudot 2017 . Félicitations !


Quel livre ! La bibliothécaire nous avait prévenu, ce roman est intéressant à plus d’un titre, ce n’est pas seulement un livre de plus sur l’horreur d’Auschwitz. Olivier Guez commence son récit lorsque Josef Mengele débarque en Argentine sous le nom d’Helmut Gregor, après avoir passé trois ans à se cacher dans une ferme en Bavière non loin de Günzburg sa ville natale où son père occupe des fonctions très importantes à la fois, industriel prospère, et maire de sa ville. Toute sa vie de fuyard, Mengele sera soutenu financièrement par sa famille. Deux périodes très distinctes partagent sa vie d’après Auschwitz, d’abord une vie d’exilé très confortable en Argentine. Sous le régime des Peron, les anciens dignitaires Nazis sont les bienvenus et il devient un industriel reconnu et vend aussi les machines agricoles « Mengele » que sa famille produit à Günzburg.

Tout le monde tire profit de la situation, l’industrie allemande prend pied en Amérique latine et Josef s’enrichit. Son père lui fait épouser la veuve de son frère pour que l’argent ne sorte pas de la famille. Et la petite famille vit une période très heureuse dans un domaine agréable, ils participent à la vie des Argentins et se sentent à l’abri de quelconques représailles.

Tout s’effondre en 1960, quand le Mossad s’empare d’Eichmann et le juge à Jérusalem. Mengele ne connaîtra plus alors de repos, toujours en fuite, de plus en plus seul et traqué par les justices du monde entier. Mais jusqu’en février 1979, date de sa mort, sa famille allemande lui a envoyé de l’argent. On aurait donc pu le retrouver, pour information l’entreprise familiale Mengele n’a disparu qu’en 1991 et le nom de la marque en 2011.

La personnalité de ce médecin tortionnaire tel que Olivier Guez l’imagine, est assez crédible, jusqu’à la fin de sa vie, il se considérera comme un grand savant incompris et il deviendra au fil des années d’exil un homme insupportable rejeté de tous ceux qui se faisaient grassement payer pour le cacher. La plongée dans cette personnalité est supportable car Mengele n’a plus aucun pouvoir et même si on aurait aimé qu’il soit jugé on peut se réjouir qu’il ait fini seul et sans aucun réconfort. Ce qui n’est pas le cas de beaucoup d’industriels allemands qui ont établi leur fortune sous le régime Nazi. L’aspect le plus étonnant de ce roman, c’est la complaisance de l’Argentine de l’Uruguay vis à vis des Nazis. Cette communauté de fuyards Nazis a d’abord eu pignon sur rue et a contribué au développement économique de ces pays, puis ces hommes ont peu peu à peu perdu de leur superbe et se sont avérés de bien piètres entrepreneurs.

Citations

L’Allemagne nazie

Tout le monde a profité du système, jusqu’aux destructions des dernières années de guerre. Personne ne protestait quand les Juifs agenouillés nettoyaient m les trottoirs et personne n’a rien dit quand ils ont disparu du jour au lendemain. Si la planète ne s’était pas liguée contre l’Allemagne, le nazisme serait toujours au pouvoir.

L’Allemagne d’après guerre

À la nostalgie nazi les Allemands préfèrent les vacances en Italie. Le même opportunisme qui les a incités à servir le Reich les pousse à embrasser la démocratie, les Allemands ont l’échine souple et aux élections de 1953, le Parti impérial est balayé.

Les industriels allemands

À Auschwitz, les cartels allemand s’en sont mis plein les poches en exploitant la main d’oeuvre servile à leur disposition jusqu’à l’épuisement. Auschwitz, une entreprise fructueuse : avant son arrivée au camp, les déportés produisait déjà du caoutchouc synthétique pour IG Farben et les armes pour Krupp. L’usine de feutre Alex Zink achetait des cheveux de femmes par sacs entiers à la Kommandantur et en faisait des chaussettes pour les équipages de sous-marins ou des tuyaux pour les chemins de fer. Les laboratoire Scherring rémunéraient un de ses confrères pour qu’il procède à des expérimentations sur la fécondation in vitro et Bayer testait de nouveaux médicaments contre le typhus sur les détenus du camp. Vingt ans plus tard, bougonne Mengele, les dirigeants de ces entreprises ont retourné leur veste. Ils fument le cigare entourés de leur famille en sirotant de bon vin dans leur villa de Munich ou de Francfort pendant que lui patauge dans la bouse de vache ! Traites ! Planqués ! Pourritures ! En travaillant main dans la main à Auschwitz, industries, banques et organismes gouvernementaux en ont tiré des profits exorbitant, lui qui ne s’est pas enrichis d’un pfennig doit payer seul l’addition.

Description de Mengele à Auschwit par son adjoint

Mengele est infatigable dans l’exercice de ses fonctions. Il passe des heures entières plongé dans le travail, debout une demi-journée devant la rampe juive ou arrive déjà quatre ou cinq trains par jour chargés de déportés de Hongrie. Son bras s’élance invariablement dans la même direction, à gauche. Des trains entiers sont envoyés au chambre à gaz et au bûcher. Il considère l’expédition de centaines de milliers de Juifs à la chambre à gaz comme un devoir patriotique. Dans la baraque d’expérimentation du camp tsigane on effectue sur les nains et les jumeaux tous les examens médicaux que le corps humain est capable de supporter. Des prises de sang, des ponctions lombaires, des échanges de sang entre jumeaux d’innombrables examens fatigants déprimants, in-vivo. Pour l’étude comparative des organes, les jumeaux doivent mourir en même temps. Aussi meurent-ils dans des baraques du camp d’Auschwitz dans le quartier B, par la main du docteur Mengele.

Je suis mort. C’est pas le pire qui pouvait m’arriver.


J’ai besoin de cet auteur, j’ai besoin de son humour, il me fait tellement de bien depuis sa « Grammaire impertinente » jusqu’à « Mon autopsie ». Il me fait éclater de rire même si je suis seule, et dans mon blog, peu de livres ont eu ce pouvoir. Evidemment, après, je partage les extraits de son livre avec tous ceux et toutes celles qui ont ri avec Pierre Desproges, un exemple des grands amis de cet auteur.

Dans « Mon autopsie », Jean-Louis Fournier répond à la critique qu’on lui a sans doute faite de s’être moqué de toute sa famille sauf de lui. Dans ce livre, il se passe donc lui-même sur le grill de son esprit caustique, il ne s’épargne guère, après son père alcoolique, sa mère du Nord , ses deux enfants handicapés, sa fille religieuse, sa femme qu’il a tant aimé, le voilà, lui l’écrivain. Lisez ce roman vous saurez tout sur Jean-Louis Fournier, disséqué par une jeune étudiante en médecine. Évidemment, l’auteur a besoin que cette jeune femme soit belle et émouvante. Au fur et à mesure qu’elle s’arrête sur telle ou telle partie de son corps, des souvenirs lui reviennent. Il cherche aussi à comprendre cette jeune femme et sa vie amoureuse. Les dialogues sont savoureux. Le livre ne se raconte pas vraiment, j’ai recopié quelques passages pour vous donner envie de l’ouvrir. Il réussit même à nous faire accepter que lui aussi va mourir et que ce n’est peut-être pas si triste (personnellement son humour me manquera).

Citations

Un chapitre entier pour vous

Laissez moi rire
 
Égoïne a découvert sur mon torse un tatouage au niveau du cœur,  » S’il vous plaît ne me ranimer pas do not disturb ».
 Il était destiné à mon dernier médecin, il a compris le message. Elle a ri. Toute ma vie j’ai voulu faire rire. Le faire encore, après ma mort, m’est délicieux.
 Petit, je me déguisais, j’improvisais des sketchs. À l’école, mon goût de faire rire m’a coûté cher. En retenue tous les dimanches, j’étais le mauvais exemple de la classe. Pour me faire remarquer je n’étais jamais à cours d’idées, jusqu’à mettre une statue de la Sainte Vierge plus grande que moi dans les chiottes. Là, je fus mis à la porte. Mais j’avais fait rire ma mère.
Pour un bon mot, j’étais prêt à tout. Pour éviter des poursuites judiciaires, j’ai même utiliser l’humour. Poursuivi pour avoir stationné dans la cour des départs de la gare du Nord, j’ai reçu un courrier m’enjoignant de payer pour arrêter les poursuites. J’ai écrit à Madame la SNCF que je refusais l’arrêt des poursuites, je tenais à être châtier pour expier. Je lui demandais une dernière faveur, être déchiqueté par le Paris Lille en gare d’Arras.
Les poursuites se sont arrêtées.
 Pour moi l’humour était un dérapage contrôlé, un antalgique, une parade à l’insupportable, une écriture au second degré, une arme à double tranchant, un détergent. Il nettoie, comme la pyrolyse, brûle les saletés, efface les tâches, les préjugés, les rancœurs et les rancunes.
Plus tard, dans mes livres, j’ai essayé de rire de tout.
De la grammaire, de l’alcoolisme de mon père, de l’hypocondrie de ma mère, de mes enfants handicapés, de ma vieillesse et j’ai voulu rire de ma mort…

J’en connais d’autres, tous élevés chez les curés

 Quand j’étais petit, un curé, à la confession, avant de me donner l’absolution, m’avait dit que la nuit il fallait prier avec ses mains, ça évitait de tripoter ses « parties honteuses ».
 Ça ne m’a pas empêché de continuer.
Je me sortirais. Les pensées impures étaient-elles des péchés mortels ? Évidemment, je n’osais le demander à personne.
Ma jeunesse a été empoisonnée par le péché mortel, et la peur d’aller en enfer.

Si drôle

Plus de mille fois j’ai récité  » Ne nous laissez pas succomber à la tentation ».

 Heureusement, Dieu ne m’a jamais exaucé

On pleure quand on arrive sur terre, pourquoi on râle quand on doit partir ?

Jamais content.

J’appelais pour donner des nouvelles, rarement pour en demander, et il ne fallait pas que ça dure longtemps.

 » Ce qui m’intéresse le plus chez les autres c’est moi » a écrit Francis Picabia.
Cette phrase me va comme un gant.

Et pour vous faire « mourir » de rire son ami si drôle

Plongée dans des œuvres très longues et trop sérieuses, j’ai eu besoin de lire un livre qui me fasse sourire. Ce pauvre petit Icare, qui préfère (et de loin) qu’on l’appelle Courgette, a réussi à me faire passer une excellente soirée. J’ai recopié le début du livre pour donner l’idée du ton et de la façon de raconter. Derrière ce qui n’est qu’une fable autour de l’enfance malheureuse, apparaissent aussi tous les récits des enfants qui sont broyés par des parents injustes et violents. J’ai quand même été un peu agacée par le côté « tout finira bien » pour notre petite « Courgette » qui voulait voir la vie en couleurs. La vie de cet enfant avait tout pour finir en tragédie, une mère alcoolique et violente, un père totalement absent. Le roman commence alors que, par malheur, il tue sa mère croyant « tuer » le ciel que sa mère invoque sans cesse pour expliquer tous ses malheurs. Un gendarme au grand cœur, va être touché par ce petit bonhomme et va faire de son mieux pour l’aider à sortir de ce marasme.

Le charme du roman vient du style, l’enfant ne comprend aucune image ni cliché, si son père est parti avec une poule, c’est pour lui une poule comme celle qui sont dans la cour de ses voisins paysans. Le procédé est assez répétitif et j’ai du mal à croire qu’un enfant de 9 ans soit aussi peu capable de compréhension au deuxième degré de sa propre langue. Ensuite, sa naïveté est trop totale et trop pure. J’ai donc des réserves sur ce roman, mais cela ne m’a absolument pas empêché de le lire avec grand intérêt. Comme je l’ai dit, c’est une fable et je souhaite qu’elle vous fasse autant de bien qu’elle m’en a fait et je souhaite aussi que les enfants mal-aimés trouvent tous un homme ou une femme qui les aimera assez fort pour les remettre sur le chemin de l’espoir et de la vie.

Le début

Depuis tout petit, je veux tuer le ciel à cause de maman qui me dit souvent :

– Le ciel, ma courgettes, c’est grand pour nous rappeler qu’on est pas grand-chose dessous.
– La vie, ça ressemble en pire à tout ce gris du ciel avec ces saloperies de nuages qui pissent que du malheur.
-Tous les hommes ont la tête dans les nuages. Qu’ils y restent donc, comme ton abruti de père qui est parti faire le tour du monde avec une poule.
Des fois, maman dit n’importe quoi.
J’étais trop petit quand mon papa est parti, mais je vois pas pourquoi il aurait emmené une poule au voisin pour faire le tour du monde avec. C’est bête une poule : ça boit la bière que je mélange aux graines et après ça titube jusqu’au mur avant de s’écrouler par terre.
Et c’est pas sa faute si maman raconte des bêtises pareilles. C’est à cause de toutes ces bières qu’elle boit en regardant la télé.
 Et elle râle après le ciel et elle me tape dessus alors que j’ai même pas fait de bêtises.
Et je finis par me dire que le ciel et les coups ça va ensemble.
 Si je tue le ciel, ça va calmer maman je pourrais regarder tranquille la télé sans me prendre la raclée du ciel.

L’amour

La petite fille s’appelle Camille.
Je pense à elle, même quand elle est là.


Vous avez été nombreux à parler en bien de ce roman, je vous ai donc suivis et je l’ai trouvé très instructif. Il fait réfléchir sur le trafic de drogue en France et le fonctionnement de la justice. J’ai moins aimé le côté roman policier mais je ne suis pas adepte du genre. L’auteure est avocate et connaît bien son sujet, on peut supposer qu’à part les exagérations imposées par le genre, ce qu’elle nous décrit est assez proche de la réalité. Je ne sais pas pourquoi elle fait un portrait aussi terrible de ses parents, qui engraissent leur jardin à coups de cadavres, et ce n’est certainement pas cette partie qui m’a fait mettre quatre coquillages. Cette auteure a un style enlevé et souvent drôle, voire très drôle. Quand son personnage principal devient interprète pour la justice, l’auteure qui en sait long sur la question nous fait découvrir le monde de la drogue en France qu’elle décrit ainsi :

Quatorze millions d’expérimentateurs de cannabis en France et huit cent mille cultivateurs qui vivent de cette culture au Maroc. Les deux pays sont amis et pourtant ces gamins dont j’écoutais à longueur de journée les marchandages purgeaient de lourdes peines de prison pour avoir vendu leur shit aux grosses des flics qui les poursuivent, à ceux des magistrats qui les jugent ainsi qu’à tous les avocats qui les défendent.

Je me suis fait ma philosophie personnelle à la lecture de ce roman, pour lutter contre la drogue et les mafias qui en vivent, il n’y a que deux solutions :

  • légaliser toutes les drogues, et voir immédiatement toute une partie de la jeunesse mourir devant nos yeux.
  • Où comme en Thaïlande ou au Maroc (où elle est cultivée !) punir de 20 ans de prison tous les consommateur et de mort tous les trafiquants.

Sinon, toutes les autres solutions apporteront des situations bancales laissant place à la création littéraire de bons romans policiers !

Citations

Le nerf de la guerre et depuis si longtemps !

L’argent est « le Tout » ; le condensé de tout ce qui s’achète dans un monde où tout est à vendre. Il est là réponse à toutes les questions. Il est la langue d’avant Babel qui réunit tous les hommes.

Humour

 À l’époque on parlait beaucoup du créationnisme aux États-Unis et on pouvait lire des conneries du genre : les dinosaures ont disparu parce qu’ils étaient trop lourds pour monter sur l’arche de Noé.

Regard sur les années 70

Dans les années 70 ça se disait PDG . Ça allait avec le canard à l’orange, les cols roulés jaunes sur des jupes-culottes et les protège-téléphones fixes en tissu galonné.

Ses parents

En couvrant sa femme des yeux avec fierté, mon père, qu’au passage toutes les prostituées du quartier de la Madeleine appelaient par son prénom, disait d’elle qu’elle était comme une oeuvre d’art : très belle, mais d’une valeur d’usage absolument nulle.

Vision réaliste du trafic de drogue en France. Point de vue de la traductrice

Quoi qu’il en soit le trafic de stups m’a fait vivre pendant pratiquement vingt cinq ans au même titre que les milliers de fonctionnaires chargés de son éradication ainsi que les nombreuses familles qui sans cet argent n’auraient que les prestations sociales pour se nourrir.

Les dealers la plupart Marocains en France

En semaine, leurs journées commencent vers quatorze heures et se terminent à trois heures du matin. Elles se résument à des va-et-vient en scooter ou en Smart entre leur point de réapprovisionnement et de deal et leur bureau sis au kebab du coin ou à la salle de sport.
Si j’avais à les filmer dans leurs activités, je mettrais en fond sonore « What a wonderful world » de Louis Armstrong.
Toutes leurs conversations tournent autour de l’argent : celui qu’on leur doit, celui qu’ils auraient dû toucher, celui qu’ils rêvent d’avoir… Cet argent, ils le claquent le weekend en boîte de nuit -les mêmes que les cadres de la Défense… Qui sont aussi leurs clients – sauf que eux, la bouteille de champagne à mille euros, lorsqu’elle arrive sur leur table, ils la vident en la retournant dans son seau car ils ne boivent pas d’alcool. Souvent, à la sortie de la boîte, ils se battent et sont systématiquement arrêtés et condamnés sans que l’on cherche même à savoir si ce sont où les cadres de la Défense qui ont commencé.
 Leur hiver, ils le passent comme leurs clients en Thaïlande, notamment à Phuket mais dans un autre quartier : à Patong, rebaptisé « Les 4000 » du nom de la cité de La Courneuve en Seine-Saint-Denis. Les Thaïlandais les appellent les « French Arabics ».
 Là-bas, c’est les vacances, ils ne dealent pas parce que le simple usage de stups est puni de vingt ans. L’été, ils se tapent le bled avec la famille. Là non plus il ne dealent pas pour les mêmes raisons.
Leurs films préférés sont « Fast and Furious » 1, 2, 3 … 8 et « Scarface ». Ils sont tout sur les réseaux sociaux – libres ou en taule, c’est selon ou ils s’affichent comme travaillant chez Louis Vuitton et fréquentant Harvard University. Ils y échangent de grandes vérités où l’islam sunnite (la partie qui a trait à la polygamie, principalement), se mele aux répliques cultes de Tony Montana et aux textes des rappeurs qui dépassent les cinq cents millions de vues sur YouTube.
Ils sont en matière d’introspection comme tous les mes commerçants du monde… D’une pauvreté crasse.
….And I think tout myself Whatsap à Wonder full world ..
Je sais, ça n’a pas l’air, mais j’ai pour certains d’entre eux comme de l’affection car ils me rappellent l’anarchisme de droite pratiqué par mon père et ils parlent comme lui la langue universelle : « l’argent ».