Édition Gallimard

Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard

 

J’hésite toujours à écrire un billet quand je n’aime pas un livre et puis je pense à tous vos billets qui m’ont permis d’éviter des romans qui me seraient tombés des mains alors ….

Il faut que je dise en préambule que je suis très exigeante quand il s’agit de lire la prose d’un écrivain ou d’une écrivaine qui nous raconte la création littéraire. Je trouve rarement intéressant de participer à la cuisine qui lui permet d’aboutir à une œuvre. Mais quand en plus on est dans le cliché absolu, je sens la colère monter en moi. Je suis juste ravie de n’avoir pas dépenser 18 euros pour lire cette prose affligeante.

Elsa Feuillet, l’héroïne, est une écrivaine peu connue et qui en admire une autre (Béatrice Blandy) . Celle-ci est morte et son mari va pousser Elsa à s’emparer de l’ébauche du roman de sa femme afin qu’il puisse être édité. L’auteure s’amuse (moi beaucoup moins) à faire des allusions à Rebecca de Daphné du Maurier.

Je n’arrive pas trop à rédiger mon billet et je me demande qui cela peut intéresser que j’explique pour quoi je n’arrive pas à l’écrire, Carole Fives croit donc nous intéresser aux affres de la plage blanche et du comment se mettre à l’écriture. Il faudrait donc une histoire d’amour compliquée, du suspens, des allusions littéraires, et la description d’un énorme succès littéraire quand le lecteur, lui, lit un pâle pastiche de Daphné du Maurrier.

Tout ce que j’écris dans ce billet sent trop ma déception, on verra si au club certaines se sont intéressées à la Miss Feuillet et ses feuilles blanches ! Je sais, c’est un mauvais jeu de mot mais quand je n’ai pas grand chose à dire, je fais ce que je peux !

PS. Personne dans le club n’a sauvé ce roman.

Une seule citation

 

 

Une mère toxique une fille peu compatissante.

 Sa mère à elle l’appelait tous les jours, de son hôpital, pour lui dire combien elle souffrait, et à quel point vivre était un calvaire. La plus part du temps, Elsa ne décrochait pas. Elle n’écoutait pas les longs messages laissés sur son répondeur. Elle se contentait d’envoyer de l’argent à sa mère quand elle le pouvait. De temps en temps, elle finissait par répondre et alors, une voix du fond des âges apathique l’appelait a l’aide. Elsa marmonnait qu’il ne fallait pas s’en faire comme ça, ni être aussi si négative. Elle ajoutait qu’elle était pressée, qu’elle rappellerait plus tard.

 

Édition Seuil . Traduit du finnois par Sébastien Cagnoli

A obtenu un coup de coeur au club de lecture de la médiathèque de Dinard

 

De la Finlande pendant la deuxième guerre mondiale , j’avais retenu peu de choses. Je savais que les Finlandais avaient repoussé les Russes en 1940 et que la fameuse « finlandisation » voulait dire qu’ils avaient cédé après la guerre une partie de leur territoire contre une paix avec les Soviétiques. Le roman de Petra Rautiainen nous plonge dans une autre réalité qui n’est pas sans rappeler « Purge » traduit aussi par Sébastien Cagnoli. entre les Nazis-racistes et les soviétiques-exterminateurs qui choisir pour rester en vie ?

Ici, se mêle deux moments assez proche 1944 et les camps de prisonniers tenus par les allemands et 1949 la quête d’une femme qui veut connaître le sort de son mari dont le dernier signe de vie se situe dans un de ces camps. Ce qui se passe en 1944 est décrit à travers un journal tenu par un gardien finnois qui décrit au jour le jour le sort réservé aux pauvres hommes sous la coupe de sadiques nazis allemands. Le récit de la femme se heure à une omerta : personne ne veut se souvenir de cette époque. Et cela pour une simple raison c’est qu’il n’y a pas de frontières entre les gentils et les méchants. Au delà du nazisme et des soviétiques il y a donc les Finnois qui ont lutté pour leur indépendance, mais ils ont été eux-mêmes gangrénés par l’idéologie raciale en vigueur et pour bâtir une Finlande de race pure il faut « contrôler » voire « supprimer ? » les Samis ceux que vous appeliez peut-être comme moi les Lapons. (J’ai appris en lisant ce roman que lapon est un terme raciste qui veut dire « couvert de haillons »)

Alors, dans ces camps on fait des recherches sur la forme des crânes et on prend en photos tous les prisonniers et on l’envoie dans un grand centre de recherche pour la race qui bien sûr sera supprimé après la guerre.
C’est cet aspect de la guerre qui rendra muets tous les témoins qui auraient pu expliquer à Inkeri Lindviste ce qui est arrivé à son mari Karloo.

L’atmosphère est pesante, l’angoisse de la mort toujours présente dans le journal du gardien et cela ne rend pas la lecture facile. J’aurais vraiment aimé avoir un petit résumé historique pour m’y retrouver et un détail m’a beaucoup déplu le traducteur ne traduit pas les dialogues quand ils sont dit en Sami. Je n’arrive pas à comprendre l’utilité d’un tel procédé. Autant pour des Finnois cela peut leur montrer qu’ils ne comprennent pas une langue parlée par des populations vivant dans le même pays qu’eux autant pour des français, ça n’a aucune utilité.

Les deux autres reproches que je fais à ce roman, c’est le côté très confus des différentes révélations et le peu de sympathie que l’on éprouve pour les personnages. Mais c’est un roman qui permet de découvrir une époque très importante pour la Finlande et rien que pour cela, je vous le conseille. Mais ayez à côté de vous Wikipédia pour vous éclairer sur ce moment si tragique de l’histoire de l’humanité.

 

 

Citations

Dans des camps prisonniers en Finlande en 1944.

 Lorsque le médecin est ici avec son assistante, les mesures sont de son ressort ; le reste du temps, elles nous incombent aussi. Je n’avais encore jamais fait ce travail, c’est répugnant. On a beau laver et astiquer les prisonniers russes, leur odeur est épouvantable. Nous mesurons la largeur de la tête et vérifions l’état des organes génitaux, en particulier la présence du prépuce.

Un pays aux multiples ethnies appelées en 1944 des races inférieures.

Quelqu’un m’a dit qu’elle est du fjord de Varanger, où de plus loin encore, vestige de temps reculés, apparenté aux Aïnous et aux nègres du Congo. Un autre, en revanche, est convaincu qu’elle ne vient pas du fjord de Varanger : ce serait une Same d’Inary ou d’Utsjoki, ou bien une Skoltec du pays de Petsamo, ou encore une Finnoise de la péninsule de Kola. Un troisième a déclaré que c’est une Kvène du Finnmark. Ou peut-être un peu tout ça, une bâtarde. De race inférieure, en tout cas, m’a-t-on certifié. « Elle est prisonnière, alors ? »ai-je demandé mais personne n’est sûr de rien. De mémoire d’homme, elle a toujours été là.

Les rapports des allemands avec des femmes de races inférieures.

 Pour les nazis, la trahison à la race, c’est encore plus grave que d’appartenir à une race inférieure. Les nazis qui se sont accouplés avec une dégénérée, ils sont exécutés le dimanche matin sur le coup de six heures.

Enfin(page 171)une explication sur ce qu’est une boule de « komsio » car aucune note n’explique ce genre de mots.

 Ensuite, elle a arraché la trachée et l’a mise à sécher pendant deux jours. Elles avait ramassé un bout d’os quelque part, je ne sais pas, s’il venait aussi du cygne. Sans doute. Peut-être. Le dernier soir, elle l’a glissé dans la trachée, puis elle a tordu le tout pour former une petite boule qui tinte lorsqu’on la secoue. 
 C’est un jouet traditionnel same : une boule de « komsio » qui chasse les mauvais esprits. En général, on l’offre au nouveau-né. Selon la légende, un hochet fabriqué à partir d’un os de cygne fait pousser les ailes aux pieds de l’enfant. Ainsi, il pourra s’envoler en cas de danger.

Les recherches pour créer une race pure .

Juin 1944
 On voit encore circuler des brochures sur l’avancement des recherches en vue de la création d’une race aryenne parfaite. Ces écrits ont pour objectif de stimuler l’esprit de groupe, tout particulièrement par les temps qui courent. Un exemplaire à faire tourner passe de gardien à l’autre. Le docteur Mengele a réussi à produire un enfant aux iris parfaitement bleus en lui injectant un produit chimique dans les yeux.
 Il y a une dizaine de globe oculaire juifs qui traînent en ce moment même à l’institut Kaiser-Wilhem, dans des bocaux en verre, dans une petite vitrine blanche.

L’horreur des camps tenus par les nazis .

Le commandant lui avait ordonné, avec l’aide d’un collègues, de ligoter le prisonnier aux barbelés. Nu. Insectes, morve, mouches et moustiques n’avaient pas tardé à recouvrir son corps. Olavi avec cru voir des mouches du renne, un parasites qu’il n’aurait pas cru susceptible de s’intéresser à l’humain. Les animaux dévoraient des yeux, le sang coulait chaque fois que le prisonnier essayait zde les chasser, car au moindre mouvement les barbelés s’enfonçaient davantage dans sa chair. Les détenus et les gardiens, et même le commandant suprême, durent assister à ce spectacle pendant un certain temps avant d’être autorisés à se retirer. 
Le type avait survécu jusqu’au lendemain. le matin on l’avait décroché. Il puait la merde et la pisse, les œufs pondus par les moustiques commençaient à éclore. Sa peau était couverte de bosses, de sang, rongée, sucée. Sa bouche ruisselante d’un rouges brillant était le seul élément encore identifiables sur son visage défiguré. Il fut envoyé aux chantiers à pied, à vingt kilomètres de là. Il avait beaucoup de difficultés à marcher et, avant d’avoir parcouru péniblement une vingtaine de mètres, il s’était affaissé définitivement. L’un des gardiens avait poussé le corps du bout de sa botte. Pas de mouvement. Il avait pris le pouls. Mort.

 

 

Édition Albin Michel

Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard 

 

 

Est-ce qu’un éclat de rire vaut cinq coquillages, j’ai décidé que oui car franchement quand j’écris cet article il n’y a pas grand chose qui me porte à rire.
Alors surtout que tous ceux et toutes celles qui ne veulent lire que des œuvres qui passeront à la postérité, évitent cette lecture. Les autres chercheront dans leur bibliothèque préférée s’il ne trouve pas ce roman de Marion Michau. Elle y conte la vie de Pilar Mouclade, oui c’est vrai son prénom aurait été plus facile à porter avec un nom de famille espagnol et puis Mouclade ce n’est pas terrible non plus. Tout va bien dans sa vie : son mari, ses enfants, son métier.
Elle sait nous raconter le métier d’agent immobilier et nous le rendre très sympathique. Je me souviens à quel point une femmes m’avait aidée à acheter ma maison à Dinard, je la retrouve dans le portrait de Pilar, donc je peux en témoigner il existe des agents immobiliers (désolée je ne connais pas le féminin du nom « agent ») agréables et qui vous aident vraiment à choisir un bien où vous pourrez vivre confortablement.

Pilar est originaire de Limoge, ville souvent choisie pour décrire l’ennuie de la vie en province, cela vient de loin puisque le mot limogeage vient de l’envoie, dans cette ville, des hauts gradés militaires dont on voulait se débarrasser en les faisant « mourir » d’ennuie à Limoges. Elle est élevée par une mère compliquée qui change d’amants et de boulots très souvent, elle est aussi l’amie de Stella un fille dont la beauté éblouit les garçons et attire les filles. Pilar va avoir quarante ans et son anniversaire la perturbe beaucoup, elle veut retrouver Stella avec qui elle s’est fâchée à l’adolescence. Cette quête vers son passé va permettre aux lecteurs de comprendre qui est Pilar : une femme formidable que l’on a très envie de connaître pour partager un moment de sa vie.
Rien que pour ça j’irai bien dans son agence immobilière : mais oui, je le sais, ce n’est qu’un roman, plus exactement un éclat de rire et cela je le garde en moi, en pensant à Pilar Mouclade.

 

Citations

Le choix du prénom Pilar.

 Dans toutes les familles normalement constituées, le père aurait mis son veto (pourquoi pas Dolores tant qu’on y est ? ?), mais mon père n’a pas eu son mot à dire puisqu’il se résume à « un homme qui dansait très bien » au Calypso Club de Limoges en juillet 1979.

Le portrait de sa mère .

Je vivais dans le désordre de ma mère. On passait de studio en appartement et d’appartement en chambre de bonne au gré de ses licenciements ou de ses ruptures amoureuses (les deux affaires étaient souvent liées). J’ai eu un nombre parfaitement traumatisant de beau-père. aujourd’hui, je les confonds tous. Il faut dire que ma mère s’est longtemps spécialisée dans le tocard à moustache. 
– Qu’est-ce que tu veux, Pilar, je ne supporte pas d’être seule. 
J’ai mis des années à comprendre cette phrase. elle n’était pas seule, puisque j’étais là…
 Toute mon enfance je l’ai entendu parler de valises et d’aller simple pour le bout du monde.
-Qu’est-ce qui nous retient ? 
J’ai grandi avec cette idée dans un coin de ma tête, et un grand sac en toile rose et bleu dans un coin de ma chambre. Les années ont passé, et on ne s’est jamais éloigné a plus de vingt kilomètres de Limoges, ou elle vit encore. Ma mère m’a toujours fait penser à une mouche contre une vitre : elle dépense une énergie folle à se cogner.

Les rapports avec sa mère .

 Ma mère m’appelle alors que je remonte en voiture la rue Sadi-Carnot. En voyant son nom s’afficher, je me gare sur une livraison. Quelques secondes, j’espère qu’elle appelle pour s’excuser d’avoir oublié mon anniversaire… Décidément, rien ne me sert de leçon.
– Pilar ! Ah quand même ! Tu aurais pu m’appeler ! Tu as bien vu que j’étais en train d’oublier ton anniversaire ! T’aurais pu me passer un petit coup de fil au lieu de prendre un malin plaisir à me mettre le nez dans le caca ! 
– Bonjour, maman. 
– Je vais même te dire vu ce que j’ai souffert le jour de ta naissance, c’est toi qui devrais m’appeler chaque année ! 
Parfois je me demande pourquoi je descends rarement la voir, et parfois je ne me le demande plus du tout. 
-De toutes façon, je ne sais pas pourquoi je m’étonne encore ! Tu n’appelles jamais, tu ne descends jamais !
 Bah non , maman, parce que chaque fois que je viens, dans les deux minutes qui suivent mon arrivée, j’apprends que j’ai grossi et qu’on ne va pas passer la soirée ensemble parce qu’un « ami » t’a invitée à dîner et tu n’as pas osé dire non. C’est drôle comme avec moi tu oses.

 

 

Edition pocket

J’avais remarqué ce roman sur de nombreux blogs dont celui de Géraldine , et il m’attendait dans sa pile, bien sagement … Le succès au début de la campagne présidentielle des idées du candidat du mouvement « Reconquête » auprès des catholiques traditionalistes m’ont poussée à sortir ce livre de sa pile.
Quand on lit ce roman, on peut se dire que l’auteure pousse le trait critique un peu loin, et puis on se souvient des propos de certains membres de ce tout nouveau parti et on se dit que non, ces gens sont persuadés qu’ils ont une croisade à mener et qu’ils doivent ramener les Français vers leurs valeurs. Ils vivent tellement entre eux qu’ils sont incapables de s’ouvrir aux autres.
La pauvre Sixtine est victime de son milieu et épouse un polytechnicien membre actif des milices chrétiennes des Frères de La Croix. On retrouve dans cette première partie toutes les valeurs que ces différentes sectes catholiques veulent inculquer aux enfants . Sixtine est très vite enceinte et ce qui aurait dû être la plus grande joie de sa vie s’avère être un véritable calvaire. Elle est malade tout le temps et n’a pas le droit de se plaindre. De petites failles entre elle et l’idéologie extrémiste de son mari commencent à s’installer, le choix du prénom pour commencer, tout le monde appelle ce bébé qui n’est pas encore né Foucault sans lui demander son avis. Et puis, un soir, son mari meurt en allant attaquer un concert punk. Sixtine aimerait savoir si, avant lui-même de mourir son Pierre-Louis n’est pas responsable de la mort d’un participant au concert.
De cette différentes failles et du détestable caractère de sa belle mère naîtra sa révolte et sa fuite vers l’Aveyron, où elle rencontrera des gens vivant dans des valeurs opposées à celle de sa belle famille. Peu à peu Sixtine sortira de sa coquille et de l’influence négative de l’emprise de la secte religieuse. Cela ne se fera pas du jour au lendemain et la fin du roman relève plus de l’imaginaire que du possible. Sa mère lui avait caché le secret de sa naissance et c’est grâce aux liens retrouvés avec sa famille maternelle que Sixtine et Adam, son fils, vont pouvoir enfin vivre leur vie.

C’est un beau roman, facile à lire et qui permet de comprendre les excès d’une si petite partie des catholiques. Ce qui me semble absolument incroyable c’est comment ils peuvent imaginer rallier la majorité des Français à leur cause. En particulier les femmes ! En revanche lorsque l’on a été élevé dans ce genre de communautés, il est presqu’impossible d’aller vers d’autres idées. Du moins c’est ce que dit ce roman et ce que nous voyons autour de nous (de loin pour moi), dans les familles élevées dans ce genre de sectes qui ont en commun d’avoir refusé les réformes prônées par Vatican II .

 

Citation

Quel programme !

Mes enfants sur vos épaules repose une lourde tâche, celle d’être des époux catholiques dans un monde païen, celle d’être des parents de nouveaux petits croisés qui devront vivre au milieu de ce peuple de renégats. Pierre-Louis et Sixtine, tous les enfants que Dieu vous donnera seront une grâce et une bénédiction. Comme disait notre fondateur, le frère André,  » en ces temps de décadence et d’apostasie, cela devient même un devoir ». Chers Pierre-Louis et Sixtine, et vous, peuple des fidèles, inculquer la foi catholique et romaine à ces enfants que nous espérons nombreux. Je ne peux que vous inviter à suivre les commandements édictées dans la Genèse :  » Soyez féconds, multipliez-vous, remplissez la terre et soumettez-la ! »

 

 


Édition Zulma . Traduit de l’islandais par Éric Boury.

Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard 

 

Appelés en 2013 à élire le plus beau mot de leur langue, les Islandais ont choisi un substantif de neuf lettres désignant une profession médicale : Ijósmóðirin, sage femme. Dans son argumentaire, le jury souligne qu’il unit deux mots magnifiques : móðir qui signifie mère et Ijós, lumière.

Ce roman m’a fait du bien dans des moments où le monde devenait fou . Partir dans les réflexions d’une sage-femme elle même petite fille et arrière petite fille de sage-femme et découvrir l’Islande ancienne et actuelle m’a permis d’oublier la guerre et toutes ses conséquences. J’ai eu envie de noter beaucoup de phrases qui me plaisaient, ma préférée est sans doute celle que prononçait sa grand-tante à chaque naissance

Bonjour petit être. Tu es le premier et le dernier toi en ce monde.

Le reste du livre est constitué par une recherche pour comprendre ce que la grand-tante a voulu léguer à sa petite nièce. Dans son appartement que l’héroïne devra rénover, elle trouve une correspondance avec une amie Galloise et surtout des textes qui pourraient être publiés. Mais que voulait vraiment dire Frida ? Tout ce que l’on comprend c’est que sa recherche associait la naissance à la lumière. Ce n’est pas très facile de comprendre ce que sa tante voulait dire, d’ailleurs sa petite nièce renoncera à vouloir le faire publier.
Les moments que nous passons dans l’Islande actuelle, nous vivons des accouchements, une tempête d’hiver et une belle ballade vers les aurores boréales . Ce n’est sans doute pas un grand roman car il est trop décousu à l’image de la tentative de sa grand-tante de comprendre l’humanité mais on y est bien, je l’ai lu avec grand plaisir et j’espère retenir ma phrase préférée.

 

 

Citations

Naissance

Le thermomètre sur le rebord extérieur de la fenêtre affiche moins quatre degrés et l’animal le plus vulnérable de la terre repose sur la balance, nu et démuni, il n’a ni plume ni fourrure pour se protéger, ni carapace, ni poils, rien qu’un fin duvet sur le sommet de la tête, un duvet que la clarté bleu du néon traverse. 
Il ouvre les yeux pour la première fois. 
Et voit la lumière. 
Il ignore qu’il vient de naître.
 Je lui dis, bienvenue, mon petit.
 Je lui essuie la tête, je l’enveloppe dans une serviette puis je le donne à son père qui porte un t-shirt avec l’inscription « le meilleur papa du monde ».
Bouleversé, l’homme pleure. c’est terminé. La mère épuisée sanglote aussi.
 Le père se penche avec son bébé dans les bras et l’allonge prudemment sur le lit à côté de la femme. L’enfant tourne la tête vers la mère, il la regarde, les yeux encore emplis de ténèbres venus des profondeurs de la terre.
 Il ne sait pas encore qu’elle est sa mère.
Elle le regarde et lui caressé la joue d’un doigt. Il ouvre la bouche. Il ignore pourquoi il est ici plutôt qu’ailleurs. 
– Il a du roux dans les cheveux comme maman, remarque la parturiente. 
C’est leur troisièmes fils. 
– Ils sont tous nés en décembre, commente le père. 
J’accueille l’enfant à sa naissance, je le soulève de terre et le présente au monde. je suis la mère de la lumière. de tous les mots de notre langue, je suis le plus beau- « Ljómodir » (mère de lumière)

Des phrases que j’aimerais retenir.

 L’homme doit d’abord naître pour pouvoir mourir.
 Il n’y a pas grand chose sous le Soleil 
qui puisse surprendre une femme ayant une si longue expérience du métier. 
Si ce n’est de l’être humain lui-même.
En réalité, l’animal le plus précaire de la terre ne se remet jamais d’être né.

 Présentation de ses parents (je me demande ce que sont des cercueils qui ne sont pas à usage unique ? ? ?.)

 Nos parents dirigeaient et dirigent encore aujourd’hui une modeste entreprise de pompes funèbres avec mon beau-frère, le mari de ma sœur. Comme le dit ma mère, les affaires sont « florissantes » puisque tout le monde doit mourir un jour. C’est mon grand-père paternel qui a fondé cette entreprise, il fabriquait lui-même les cercueils, solides et soignés, avec du bois de qualité. Mais c’est une épopée révolue, désormais les cercueils sont « à usage unique et importés », comme le regrette mon père. C’est donc une longue tradition familiale que de s’occuper de l’être humain aussi bien au tout début de sa vie que lorsqu’il arrive à sa destination finale, ce que souligne très justement ma mère.

Repas en famille.

 Au dernier repas de familles, ma mère a passé toute la soirée à parler de la mort. Papa hochait régulièrement la tête et mon beau-frère l’écoutait avec attention. Après, il est allé dans la cuisine pour remplir le lave-vaisselle et mes parents ont continué à discuter du prix des cercueils, de leur qualité et des commandes en cours.

Les journées d’hiver en Islande.

 Je tente de lui expliquer que le jour se lève et prend fin très vite après, finalement j’exprime les choses d’une autre manière : le Soleil apparaît à l’horizon peu avant midi et disparait vers trois heures. L’aube s’étire en longueur toute la matinée et trois heures après la parution de la lumière, l’air s’assombrit à nouveau et le soleil s’enfonce dans la mer.

La philosophie de sa grand-tante sage femme comme elle.

 Même si elle ne croyait pas en l’homme, ma grand-tante avait foi en l’enfant. Ou disons plutôt : elle ne croyait en l’homme qu’en deçà de 50 cm. Cela correspond également aux récits de ses collègues de la maternité. selon elle, il y avait d’une part l’être humain et d’autre part, l’enfant. tout ce qui était petit, et de préférence plus petit que petit, vulnérable et faible, suscitait son intérêt et éveillait sa tendresse, que ce soit dans le monde des hommes, dans le règne animal ou végétal.

Point final.

 Là où les manuscrits se contredisaient, c’est que même si ma grand-tante prévoyait la disparition de l’être humain, elle supposait qu’il y aurait dans le monde du futur une place non seulement pour les animaux et les plantes, mais aussi pour les enfants. Et pas uniquement eux puisque deux autres catégories y seraient également représentées . D’une part les gens qui avaient conservé leur âme d’enfant, « qui s’amusaient à souffler sur les graines de pissenlits et savaient s’étonner », et d’autre part – ce qui n’a rien de surprenant, a souligné ma sœur- les poètes.
Voici les listes des mots qui veulent dire brouillard et neige en islandais je les ai pris en photo car c’est trop compliqué à écrire.

(PS je suis désolée pour la qualité de mes photos, elles sont très bonnes sur mon téléphone mais sont dégradées sur ma boite mail sans que je sache pourquoi.)

Édition Gallimard . Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard 

 

Pour le thème du mois de mars à mon club de lecture , « les écrivains et leur père », ce livre était parfaitement à sa place, en effet, Marc Dugain se penche sur le passé de son père, personnage étonnant de volonté (d’où le titre). En effet, alors qu’il est encore enfant, l’année où il devait quitter l’école primaire pour aller au lycée, en 1941, il a été atteint de la poliomyélite, il a eu la chance incroyable de pouvoir être soigné à Paris et de n’avoir qu’une jambe paralysée. Toute sa vie il marchera sur une seule jambe et une canne sans jamais renoncer à mener la vie aventureuse dont il rêvait. Ce roman, l’auteur tient à cette appellation l’épigraphe du roman, (Marc Dugain l’a écrite lui-même) dit ceci :

La plus belle des fictions est celle qu’on entretient sur ses proches dans des souvenirs qui jalonnent une mémoire flottante. Ce n’est pas la biographie d’inconnus, c’est un roman.

Ce roman nous vaut une belle balade dans le XX° siècle avec un regard très particulier, celui d’un homme du XXI° siècle qui connaît la réponse à des questions que l’on ne se posait pas à l’époque. Comme par exemple le problème des déchets nucléaires, apporté par l’indépendance énergétique voulue par de Gaulle.

L’histoire de la famille de son père est marqué par l’alcoolisme des gens simples en Bretagne et aussi la volonté de ces mêmes gens de tout faire pour que leurs enfants réussissent leur études. Il réussira mais eux se sentiront exclus de la famille bourgeoise que son fils va constituer avec une femme parisienne qui va se battre pour exister sur le plan professionnel alors que tout la poussait à devenir une bonne mère et une épouse tenant sa maison. Leurs deux fils auront du mal à se sentir aimés par des parents qui seront aussi pris par leurs destin, mais cela n’apparaît qu’épisodiquement dans le récit.

La famille de sa mère est marquée par son père qui est une « gueule cassée » qui a inspiré Marc Dugain le roman qui l’a rendu célèbre : « la Chambre des Officiers » que je n’ai pas encore lu contrairement à « l’insomnie des étoiles« . La présentation de ce futur gendre qui a perdu une jambe sera difficile à accepter pour sa future belle mère qui sait ce que cela veut dire de consacrer sa vie à aider un handicapé. Mais finalement la vie familiale se reconstruira grâce à l’énergie de cet homme que rien n’arrête et qui respectera la volonté de sa femme de s’imposer dans le monde de l’industrie. Après quelques années en Nouvelle Calédonie ils partiront en Afrique, puis reviendront en France. Son père prendra des responsabilités importantes dans l’énergie nucléaire et sera lié à un général responsable du contre espionnage français. Cela permet à l’auteur d’avoir un regard personnel sur ce siècle un peu décalé par rapport à ce que l’on lit habituellement.

C’est une roman et l’histoire d’une vie qui ne se lit pas toujours facilement car il y a beaucoup d’ellipses et il faut faire des sauts dans le temps qui m’ont souvent déroutés . Les personnages sont assez variés, j’ai un faible pour le cousin communiste qui joue à la bourse et roule en Mercédès. Je n’ai pas trop accroché à la personnalité de ses parents . On sent qu’il a voulu rendre un hommage à son père qui est resté debout malgré son handicap mais à part cela (et ce n’est pas rien) on ne sent pas la vie à travers ce qu’il nous dit de lui. Sa mère entièrement tournée vers son ambition féministe de lutter pour être employée à son niveau d’étude est de la même façon un peu glacée dans ce combat. En revanche je trouve que ses quatre grand-parents sont plus riches même si du côté breton c’est une misère terrible. L’auteur sait faire vivre sa grand-mère plus que son grand-père qui vit surtout à l’extérieur de la famille.

Un très bon livre, pour le regard sur ce siècle passé. J’y ai retrouvé des évènements que j’ai vécu moi ou ma famille, mais j’ai quelques réserves car je n’ai pas ressenti assez d’empathie avec ses parents ce qui était, je le pense, le but de l’auteur . J’avais oublié que j’avais déjà chroniqué l’insomnie des étoiles du même auteur en lui attribuant encore une fois 3 coquillages. (Je suis sévère avec cet auteur car je trouve ses romans bien écrits, il ne soulève pas mon enthousiasme.)

 

Citations

Construction du couple de ses parents.

L’attitude de l’a mère l’a blessé, mais il comprend cette réticence : le retour de l’infirmité pourrait se voir comme une malédiction. Elle a ressenti une nouvelle fois à quel point l’amour de sa mère pouvait être pesant. Lui n’a pas l’intention qu’elle interfère dans leur relation, jamais et il le dit sans ambiguïté, il n’a pas fait tous ses efforts pour perdre sa liberté retrouvée sous la coupe d’une belle mère. Les choses seront limpides, d’un côté comme de l’autre, : si fortes que soient leur affection pour leurs parents ils ne les laisseront pas guider leurs pas. C’est là le fondement de leur alliance, de l’égoïsme de leur couple qui va sceller leur comportement pour toujours.

Repas de famille.

 Les anciens de 14 ont dégainé les liqueurs en fin de repas, dans la tradition de ces déjeuners interminables qui commencent par la dispute politique pour finir dans la concorde des vapeurs d’alcool.

La nouvelle Calédonie .

Les Kanaks vouent leur circulation restreinte, doivent se soumettre à une autorisation afin de quitter leur arrondissement et, pour couronner le tout, ils doivent effectuer plusieurs jours de travaux forcés par an, au profit des colons ou de l’administration. Le code de l’indigénat, code du déshonneur qui organise la privation de droits, enferme ce peuple réputé pour son génie agricole et son culte de la terre sur la portion congrue de territoires livré à une population de repris de justice et de paysans faillis. Les prisonniers politiques, retournent systématiquement en métropole. Entre la révolte de 1878 qui tue près de trois mille Kanaks et le reste, tout le reste, y compris les maladies importées, la population indigène chute de 90 % après l’arrivée l’arrivée de la civilisation sur sa terre. C’est ce qu’on pourrait appeler une colonisation réussie.

Remarque intéressante .

Ce soir là, aidé par le vin de qualité, il se laisse aller à de sombre prévisions au sujet de la politique coloniale de la France. Il prédit qu’au tournant de la décennie l’indépendance sera la règle et la colonie l’exception. Son directeur hausse les sourcils en adressant au gouverneur un sourire apaisant, mais à la surprise générale le gouverneur avoue qu’il craint qu’il n’ait raison. Il aura d’autres occasions dans sa vie de constater que les hauts responsables ont souvent conscience individuellement des désastres auxquels conduit leur action, mais qu’ils sont submergés par la force du système et liés par leurs intérêts de carrière.

Je trouve ça très vrai.

De tous les moteurs de l’existence sociale, la revanche, parce qu’elle possède un carburant inépuisable, est le plus performant.

L’Afrique et de Gaulle.

Ils ne savent rien de la future formation d’une cellule spéciale de la présidence de la république, instaurée par de Gaulle, dont l’objectif sera de reprendre le contrôle de ce qui a été abandonné, pour éviter à ces nouvelles nations de sombrer dans la spoliation américaine où le collectivisme soviétique qui rêve de proliférer dans la chaleur africaine. On met en place des dirigeants fantoches qui recycleront l’argent détourné dans leurs pays avec notre appui, en remerciement de leur fidélité à la France, pour l’investir dans les beaux quartiers de Paris et dans nos banques. C’est ce qu’on appelle en langage politique fleuri « créer de la stabilité ». 

L’alcoolisme de ses grand-parents bretons.

 Elle boit du vin, du vin de table qu’elle cache parmi les produits de vaisselle. Son alcoolisme de pauvres la ravagera de l’intérieur au cours des dix années qui lui restent à vivre. Le bosco boit, lui aussi, mais pas comme elle. Il petit-déjeune au calva, arrose l’en-cas de dix heures, puis s’accorde une pause à midi avant de reprendre, l’après-midi, la tournée des fermes des cousins pour enfin s’accorder un dernier verre au bar du village avant de dîner, à l’eau, pour rincer tout ça. Il lui reste trente ans à vivre à ce rythme.

Est-ce vrai ?

 Il faut préciser que la CIA, craignant que les hippies ne ruinent la jeunesse américaine par son pacifisme contagieux en pleine guerre du Viêtnam, a délibérément inondé de LSD une génération qui espérait atteindre u. monde rendu inaccessible par la déraison ordinaire. Ceux qui ne meurent pas à la guerre meurent d’overdose, la boucle est une nouvelle fois bouclée.

 

 

 

 

Jorj Chalandon est un habitué sur Luocine avec parfois d’excellent romans et parfois des déceptions.

Retour à Killiberg, le Quatrième Mur, Profession du père, sont pour moi de grands romans , un peu déçue par Le jour d’avant, et un petit flop par La Légende de nos pères, celui-ci rejoint mes préférences . Le sujet était particulièrement compliqué, Sorj Chalendon est journaliste et doit couvrir le procès Barbie en 1987 à Lyon où habite son père qui lui demande un passe droit pour suivre ce procès. C’est aussi l’occasion de rouvrir le dossier de son père qui a passé son temps à mentir à son fils sur son passé pendant la deuxième guerre . A-t-il été résistant ? Soldat SS ? Engagé dans la division Charlemagne ? a-t-il suivi les divisions allemandes pour lutter contre le communisme ? Son attitude lors du procès de Barbie est tellement désagréable, que son fils part à la recherche du procès pendant lequel son père a été condamné à un an de prison et à cinq ans d’indignité nationale.

Le roman débute par la visite du journaliste à Izieu, il visite cette colonie de vacances où des enfants juifs étaient cachés et semblaient en sécurité, ces pages sont d’une intensité rare et l’écrivain sait rendre ces enfants présents dans nos mémoires. Ce sera aussi un des moments les plus émouvants du procès.

Son père se comporte comme à son habitude, méprisant et bernant toutes les autorités : il se fait passer pour un héros de la résistance et obtient une place au procès car il veut absolument voir Barbie. Il méprise tous les témoignages des gens qui selon lui, ne sont bons qu’à pleurnicher. En revanche Barbie et Vergès lui plaisent bien ainsi que Klarsfeld car ces hommes lui semblent être d’une autre trempe. Son fils est excédé par son attitude et essaie de le confronter à son passé car il a pu obtenir le dossier judiciaire de son père grâce auquel il espère enfin le confronter à la réalité.

Les deux histoires se développent au rythme du procès officiel de Klaus Barbie, celui de son père est plus embrouillé mais implacable contre les mensonges de celui qui a gâché son enfance. Le procès de Barbie, ne permet pas d’obtenir la moindre repentance du bourreau de Lyon, mais la succession des témoignages de ceux qui ont eu à souffrir des conséquences de ses actes est à peu près insoutenables. Cela fait sourire son père , il ne voit le plus souvent qu’une machination d’une justice qui de toute façon condamnera Barbie. Son fils est écœuré, les bravades et rodomontades de son père ne l’ont jamais fait rire quand il était enfant, mais la différence c’est qu’il n’en a plus peur. La dernière scène est terrible laisser ce vieil homme face à toutes ses lâchetés lui qui s’est toujours présenté comme un héros sent la catastrophe possible. Le roman se termine là face à la Saône que son père veut traverser à la nage mais l’auteur tient à nous préciser que finalement son père est mort en 2014, Barbie en 1991 et que lui même a obtenu le dossier de son père en 2020. Donc ce livre est bien une fiction et pas une autobiographie, ce qui ne lui enlève aucune valeur à mes yeux, je dirai bien au contraire.

 

Citations

 

Conversation avec son grand-père qui donnera le titre à ce livre.

– Ton père, je l’ai même vu habillé en Allemand, place Bellecour.
À l’école primaire, pendant un trimestre, mon père m’avait obligé à porter la Lederhose la culotte de peau bavaroise, avec des chaussettes brunes montées jusqu’à la saignée des genoux. C’était peut-être ça, habillé en Allemands ? 
-Arrête donc avec ça ! a coupé ma marraine. 
Mon grand-père a haussé les épaules et rangé la pelle le long de la cuisinière. 
-Et quoi ? il faudra bien qu’il apprenne à jour ! 
– Mais qu’il apprenne quoi, mon Dieu, c’est un enfant ! 
– Justement C’est un enfant de salaud, et il faut qu’il le sache ! 
C’était en 1962, et j’avais dix ans.

Petite Remarque sur la personnalité de son père.

 Il a regardé autour de lui. Toujours, il cherchait à savoir si on le remarquait, entre la crainte d’être écouté et l’espoir secret d’être entendu.

Le personnage son père

 -Mon père a été SS. 
J’ai revu mon père, celui de mon enfance, son ombre menaçante qui n’avait jamais eu pour moi d’autres mains que ses poings. Depuis toujours mon père me frappait. Il avait soumis son enfant comme on dresse un chien. Lorsqu’il me battait, il hurlait en allemand, comme s’il ne voulait pas mêler notre langue à ça. Il frappait bouche tordue, en hurlant des mots de soldat. Quand mon père me battait, il n’était plus mon père, mais un Minotaure prisonnier de cauchemars que j’ignorais. Il était celui qui humiliait. Celui qui savait tout, qui avait tous vécu, qui avait fait cette guerre mais aussi toutes les autres. Qui racontait l’Indochine, l’Algérie. Qui se moquait de ceux qui n était pas lui. Qui les cassait par ces mêmes mots :
– Je suis bien placé pour le savoir !

La repentance qui ne vient pas.

 Il n’avait pas payé et je lui en voulais. Payer, ce n’était pas connaître la prison, mais devoir se regarder en face. Et me dire la vérité. Il a comparu devant des juges, pas devant son fils. Face à eux, il a hurlé à l’injustice. Face à moi, il a maquillé la réalité. Comme s’il n’avait rien compris, rien regretté jamais.

Édition Albin Michel Traduit de l’anglais (Canada) par Sarah Gurcel

Je dois cette lecture passionnante à Krol et je la remercie du fond du coeur. Je pense que toutes celles et tous ceux qui liront ce livre en resteront marqués pour un certain temps. À la manière des cernes concentriques d’une coupe transversale d’un arbre, le roman commence en 2038 avec Jacke Greenwood, guide dans une île préservée du Nord Canadien qui a gardé quelques beaux spécimens de forêts primitives. Puis nous remontons dans les cernes du bois avec son père Liam Greenwood, en 2008 charpentier, lui même fils de Willow Greenwood militante activiste écologique de la cause des arbres, élevée par un certain Harris Greennwood un puissant exploitant de bois en 1974, nous voyons la misère causée par la crise de 29 en 1934 et la naissance de Willow puis le début du récit en 1908. Ensuite nous remonterons le temps pour comprendre les décisions que devra prendre Jacke Greenwood en 2038.

Ne croyez pas vous perdre dans ce récit aussi dense qu’une forêt profonde. L’auteur a besoin de tout ce temps pour nous faire comprendre les catastrophes écologiques qui se sont passées dans son pays dont la nature semblait résister à tous les prédateurs, l’homme aura raison de ses résistances. On suit avec passion l’histoire de la filiation de Jacke Grennwood, mais ce n’est vraiment pas aussi important que l’histoire des arbres canadiens que Michael Christie raconte sur plus d’un siècle. Les récents incendies de forêts et les inondations de la région de Vancouver prouvent que l’écrivain n’écrit pas tant un roman du futur mais plutôt ce qui se passe aujourd’hui. Dans un article de Wikipédia voilà ce que vous pourrez trouver :

Facteurs aggravants

Les scientifiques sont d’avis que les coupes à blanc et les feux de forêts des dernières années ont joué un rôle dans les inondations dans l’intérieur de la Colombie-Britannique. La coupe à blanc a tendance à faire augmenter le niveau de la nappe phréatique et la perte des arbres par les deux phénomènes conduit à un plus grand ruissellement. Une étude par l’université de la Colombie-Britannique constate que la suppression de seulement 11 % des arbres d’un bassin versant double la fréquence des inondations et en augmente l’ampleur de 9 à 14 %93.

 

Tout commence donc par l’installation des colons au Canada qui chassent sans aucune pitié les habitants de cette région boisée. Dans cet univers très violent certains (très peu) font fortune et exploitent la misère de ceux qui ont cru trouver dans ce nouveau monde un pays accueillant. Puis nous voyons l’argent que l’on peut se faire en exploitant des arbres qui semblent fournir une ressource inépuisable, c’est vraiment le coeur du roman et qui peut s’appliquer à toutes les ressources que la terre a fournies aux hommes. Bien sûr, au début tout semble possible, il s’agit seulement d’être plus malin que les autres pour exploiter et vendre le bois dont les hommes sont si friands. Et puis un jour, des pans entiers de régions aussi grandes que des départements français sont rasés et rien ne repousse. La fiction peut s’installer : et si les arbres qui restent étaient tous en même temps atteint d’un virus mortel ? Alors comme dans le roman nous serions amenées à ne respirer qu’à travers un nuage de poussière de plus en plus dense ? Tous les personnages acteurs de ce grand roman, ont des personnalités complexes même si parfois, ils enfouissent au plus profond d’eux-mêmes leur part d’humanité.
Avec Keisha et Kathel je vous le dis : lisez et faites lire ce roman je n’ai vraiment aucun autre conseil à vous donner.
Et si, encore un conseil, je me permets de faire de la publicité pour une petite entreprise bretonne (Ecotree) qui vous permettra d’offrir un arbre comme cadeau. L’idée est originale et a plu à tous les parents à qui j’ai fait ce cadeau pour la naissance d’un bébé qui sera donc propriétaire d’un arbre dans des forêts françaises.

 

 

Citations

La catastrophe planétaire sujet de ce roman.

Dans l’absolu, Jake est libre de mentionner les orages de poussières endémiques, mais la politique de la Cathédrale est de ne jamais en évoquer la cause : le Grand Dépérissement – la vague d’épidémies fongiques et d’invasions d’insectes qui s’est abattue sur les forêts du monde entier dix ans plutôt, ravageant hectare après hectare.

Formule percutante.

Il n’y a rien de tel que la pauvreté pour vous faire comprendre à quel point l’intégrité est un luxe

Je pense souvent à ce paradoxe lorsque je vois la jeunesse écologique partir en vacances en avion aux quatre coins de la planète.

 Y en a-t-il seulement un parmi vous, poursuit Knut, pour apprécier « l’indicible ironie » de voir les membres de l’élite dirigeante est des célébrités venir jusqu’ici se revigorer spirituellement avant de pouvoir retourner, ragaillardis, à des vies qui, directement ou indirectement, portent notre planète à ébullition, condamnant un peu plus encore les merveilles de la nature auxquelles appartiennent les arbres sacrés qu’ils prétendent vénérer ?

Époque où on pense la ressource en bois éternelle.

Le papier lui-même a la couleur des amandes grillées. Il s’en dégage une robustesse qui date d’un temps où les arbres, en nombre illimité, étaient une ressource inépuisable. Un temps où l’on épongeait ce qu’on venait de renverser avec un rouleau entier d’essuie-tout et où l’on imprimait l’entièreté de sa thèse (ce fut son cas à elle) sur les seuls rectos d’une grosse pile de papier blanc comme neige.

1934.

Au cours de sa carrière, Harris Greenwood a présidé à l’abattage de plus de deux cent cinquante millions d’hectares de forêts primaires. certains arbres parmi les plus larges, les plus beaux, que la planète ait jamais portées sont tombés sur son ordre.
Sans les journaux et le papier, Greenwood Timber aurait déjà sombré. Harris fournit tous les périodiques canadien et la moitié de l’édition américaine. Il sera bientôt obligé de réduire en pâte à papier des arbres qui, jadis, auraient servi de colonne vertébrale à des palais, ce qui pour un homme du métier, revient à faire des saucisses avec un filet de choix. Tout ça pour que les gens puissent faire leurs mots croisés idiots et lire des romans de gare.

L’installation des colons en 1908.

 Quand le couple arriva au « Pays des Arbres », ils découvrirent que les trente arpents densément boisés qu’ils avaient demandés au Bureau du cadastre canadiens étaient déjà occupés par une bande d’Iroquois nomades, chassés des territoires où ils posaient d’ordinaires leurs pièges par une entreprise locale exploitation forestière. Malgré ses façons charitables James Craig acheta un fusil et monta une milice de gens du coin pour chasser les Indiens de sa propriété un acte brutal mais nécessaire auquel beaucoup d’entre nous avaient déjà été contraints. Certains ont refusé de partir, montrant tant d’arrogance qu’il n’y eût eu d’autre choix que de les exécuter pour l’exemple et de brûler leurs femmes et leurs enfants.

En 1934 des Américains vendent du bois aux Japonais.

Je ne suis toujours pas convaincu qu’il soit dans notre intérêt de conclure ce contrat. le Japon a envahi la Mandchourie et s’est retiré de la Ligue des Nations. Kes gens parlent de cette Hirohito comme si c’était le frère aîné de Jésus et on ne pourrait pas jeter une balle de baseball dans le port sans toucher un navire de guerre. À mon avis ils n’ont qu’une envie c’est se battre. Et devinez avec qui ?

Réflexions sur le Canada

S’il est vrai que les États-Unis se sont construits sur l’esclavage et la violence révolutionnaire, songe-t-elle en regardant les hommes travailler, alors assurément son propre pays, le Canada, est né d’une indifférence cruelle, vorace, envers la nature et les peuples autochtones. « Nous sommes ceux qui arrachent à la terre ses ressources les plus irremplaçables et les vendent pour pas cher à quiconque a trois sous en poche, et nous sommes prêts à recommencer le lendemain » telle pourrait être la vie la devise de Greenwood et peut-être même du pays tout entier.

 

 

Édition Philippe Picquier . Traduit du japonais par Elisabeth Suetsugu. 

Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard.

 

 

 

Du charme, de l’ennuie, et une petite dose de bizarrerie , tout cela soupoudré de l’étrangeté des mœurs japonais et vous avez l’essentiel de ce roman.

Je vous en dis plus ? Cela se passe dans une brocante tenue par Monsieur Nakano qui emploie deux étudiants Hitomi et Takeo. Ces deux personnages finiront par se rendre compte qu’ils s’aiment mais cela sera bien compliqué. Il y a aussi la sœur de Monsieur Nakano qui est artiste, toutes les maitresses de son frère et les clients les plus remarquables.

Le roman se divise en chapitres qui portent le nom d’un objet le plus souvent en vente dans la boutique (le bol), ou en rapport avec le récit (le presse-papier) . Ce n’est pas un magasin d’antiquité mais bien une brocante et les objets n’ont pas de grande valeur. La patron monsieur Nakano, est souvent mesquin et j’ai eu bien du mal à m’intéresser à ses réactions. Aucun des personnages n’est vraiment très attachant, le charme du roman vient sans doute( « sans doute » car j’y ai été peu sensible) de tous les petits gestes de la vie ordinaire ; tant dans les objets que dans les relations entre les individus.

J’étais très contente d’entrer dans l’univers de cette auteure, mais au deux tiers du livre, je m’y suis beaucoup ennuyée.

Citations

L’amour

 Takeo est arrivé en apportant de nouveau avec lui une odeur de savonnettes. L’espace d’une seconde, j’ai pensé que j’aurais dû prendre une douche, mais l’instant d’après, je me suis félicitée d’avoir renoncé, car il aurait pu avoir l’impression que je l’attendais de pied ferme. C’est bien pour ça que c’est difficile, l’amour. Ou plutôt, ce qui est difficile en amour c’est de savoir d’abord discerner si on veut être amoureux ou non.

Le tabac

 « En ce moment, mes poumons, c’est pas ça ! » C’est le tic de langage du patron depuis quelque temps. « Toi, Takeo, et vous aussi, ma petite Hitomi, je vous assure que c’est dans votre intérêt de ne pas fumer, dans la mesure du possible. Moi d’ailleurs, si je voulais, je pourrais m’arrêter n’importe quand. Seulement voilà, je préfére respecter la raison pour laquelle je ne m’arrête pas. Hé oui, c’est comme ça que les choses se passent quand on arrive à l’âge que j’ai. »

La tonalité du roman

 Il y avait dans le monde une foule de gens que je ne détestais pas, parmi eux, quelques-uns faisaient partie de la catégorie de ceux que je n’étais pas loin d’aimer ; il y avait aussi le contraire ceux que je détestais presque. Mais alors, qu’elle était la proportion des gens que j’aimais vraiment ?

Le téléphone portable et les amours d’Hitomi

 Le portable, objet haïssable. Qui a bien pu inventer cette chose incommode entre toute ? Quelque soit la perfection du message reçu, le téléphone portable est pour l’amour -aussi bien l’amour réussi que l’amour raté- la pire des calamités. Pour commencer, depuis quand est-ce que je suis amoureuse de Takeo pour de bon ? Et pourquoi je m’obstine à lui téléphoner ?

Édition Harper Collins Traversée . Lu dans le cadre de Masse Critique Babelio

 

Le sujet m’intéressait et je n’ai pas hésité à participer à cette édition de Masse Critique. Je ne suis pas déçue ! Tout ce qui tourne autour de la notoriété des œuvres d’art m’interroge. Et c’est bien le sujet du roman. Soutenue par une enquête plus ou moins policière, l’écrivaine décrit avec un regard acéré les rapports entre les artiste, les galeristes, les directeurs de musée , les critiques … tous ceux qui construisent ou détruisent la réputation d’un artiste et qui lui créent une côte financière. C’est un monde de menteurs, d’affabulateurs, de personnalités cruelles avides d’argent de reconnaissance et de pouvoir.

Tout le roman est sous tendu par la recherche de qui est vraiment Peter Wolf , de lui on ne connaît que des tableaux qui font l’unanimité et qui sont défendus par sa femme Petra Wolf. Lui, Peter a disparu de la scène publique et ne répond plus à aucun journaliste. Le directeur du Moma qui a prévu une rétrospective de l’oeuvre de Peter Wolf veut absolument que celui-ci soit présent au vernissage, il lance une enquête avec des moyens financiers énormes, il est, peu à peu, persuadé que Petra Wolf a fait disparaitre son mari et est devenu l’unique bénéficiaire de la valeur des œuvres de son mari. D’un autre côté, un écrivain français cherche à faire la biographie du couple Wolf et enfin une journaliste américaine cherche à son tour à en savoir plus.

L’autre aspect de ce roman, c’est la différence des côtes financières entre une oeuvre signée par une femme ou par un homme . Enfin le dernier thème c’est la censure et la surveillance policière de la Stasi .

Tout cela fait un excellent roman, dont on devine assez vite une partie du dénouement, à savoir qui aurait dû signer ces tableaux que le monde entier admire. J’ai beaucoup aimé l’ambiance sans aucune concession du monde des critiques d’art. Cela va du travail des jeunes stagiaires qui n’ont comme salaire de recherches épuisantes utilisées par leur mentors que la joie de côtoyer des artistes célèbres, jusqu’aux réunions où les petites phrases assassines tuent les réputations les mieux établies . Et puis tous ces gens qui s’approprient les petites anecdotes qu’ils ont entendues ailleurs, sont criants de vérité (hélas !).

Et au-dessus de tout ce petit monde qui grouille pour se faire reconnaître, il y a l’art mais est-ce autre chose que la reconnaissance de tous ces gens là ? et donc de la côte financière que ces mêmes gens attribuent à la création. Ce roman ne cesse pas de nous ouvrir sur des questions intéressantes, par exemple est-ce que nous ne sommes pas tous influencés par la renommée pour apprécier une oeuvre ?

Ce n’est pas une vision très réjouissante à propos de l’art mais cela donne un très bon roman dont j’ai parfois eu du mal à apprécier l’écriture qui utilise des expressions un peu trop « branchées » pour moi.

 

Citations

Les artiste de l’ex-Allemagne de l’Est.

 Ce n’était pas cet aspect sombre de l’usine qui avait causé la perte de Rüdigere, non. Cette image réaliste de l’environnement ouvrier serait passée. La peinture a été qualifiée de hautement subversive pour d’autres raisons. Le parti n’était pas dupe et avait intercepté le message caché : le manque de fenêtres symbolisait une dénonciation de l’enfermement de la Nation. L’élan dans les cheveux des ouvrières était un appel au soulèvement. Comme nombre de ses collègues, Rüdiger s’était retrouvé du jour au lendemain démis de ses fonctions. L’ensemble de sa production fut passée au crible et le jugement fut sans appel : il était un ennemi de l’état.
 – Heureusement pour moi ! À l’époque, j’ai cru que je ne m’en remettrais jamais, mais une fois le Mur tombé c’est ce qui m’a sauvé la vie. J’ai des amis artistes, peintres, des personnes incroyables qui se font traîner dans la boue par des petits connards de l’Ouest qui ne connaissaient rien à rien. Sous prétexte qu’ils étaient au VBK c’était des vendus. Mais c’était des artistes, de vrais artistes, des gens complexes avec une vision.

L’utilisation des stagiaires.

Juste avant de s’envoler pour les États-Unis Hilary avait recruté Aminata et Justin deux stagiaires qu’elle avait réussi à débaucher respectivement des pages « Modes » et « Accessoires ». Elle pouvait enfin leur refiler le bébé du supplément « Design en RDA » Aminata et Justin avait trouvé une mine d’information en français, dans un site dédié à l’Ostalgie, véritable encyclopédie, concernant les produits du quotidien des Allemands de clic en clic, ils avaient débarqué à pieds joints dans l’histoire d’un pays dont ils avaient vaguement entendu parler. Ils n’en revenaient pas. « C’est dingue, avaient-il raconté à la rédaction, on est fait pour ce boulot, on est nés tous les deux en 89 ! »
Pour motiver ses troupes, Hilary leur avait promis un voyage à Berlin avec Éloïse, une photographe pigiste qui jouissait d’une petite notoriété rock. Cette nouvelle avait accru leur intérêt pour le projet et enflammé leur envies d’ailleurs, de rencontres nocturnes et de lieux atypiques.

Le critique sur de lui.

Sven Sön s’emporta avec justesse. Tout sonnait juste en lui, même lorsque ses phrases étaient dénuées de sens. Il maîtrisait l’exercice. Tant et si bien qu’il pouvait dire tout et son contraire, et même n’importe quoi, avec un tel aplomb que c’était son interlocuteur qui se remettait en cause quand il n’avait pas tout compris.

Description d’une rédaction d’un journal de mode.

Devant les couloirs de « Vanité Fair » les gens allaient et venaient avec autant de détermination que d’habitude. L’étage était divisé en deux. Dans le couloir de droite se trouvaient les bureaux des journalistes chargés des sujets de société, la direction artistique et la rédaction. Dans celui de gauche, c’étaient les assistants de mode, les filles de la beauté, la boutique et la pub. Un réceptionniste organisait la vie frontalière entre ces deux monde : ceux qui pouvaient écrire à droite ; et ceux qui savaient s’habiller à gauche. C’était comme ça. 

Le scandale et le succès .

Mais au fond, qu’importe la façon dont cette affaire allait se terminer, l’onde de choc qu’il avait provoquée allait à coup sûr garantir un succès sans précédent à son projet : le scandale attise bien plus la curiosité que le seul amour des arts plastiques. Ça, il le savait bien.