Roman traduit de l’islandais par Catherine Eyjólfsson

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Une fois n’est pas coutume je vais recopier la quatrième de couverture, je pense que cela suffira à vous donner envie de lire le roman de Bergsveinn Birgisson, cela prouve que les éditions Zulma font bien leur travail de mise en valeur d’un roman :

 « Mon neveu Marteinn est venu me chercher à la maison de retraite. Je vais passer le plus clair de l’été dans une chambre avec vue plongeante sur la ferme que vous habitiez jadis, Hallgrímur et toi. » Ainsi commence la réponse – combien tardive – de Bjarni Gíslason de Kolkustadir à sa chère Helga, la seule femme qu’il aima, aussi brièvement qu’ardemment, d’un amour impossible.

Et c’est tout un monde qui se ravive : entre son élevage de moutons, les pêches solitaires, et sa charge de contrôleur du fourrage, on découvre l’âpre existence qui fut la sienne tout au long d’un monologue saisissant de vigueur. Car Bjarni Gíslason de Kolkustadir est un homme simple, taillé dans la lave, pétri de poésie et d’attention émerveillée à la nature sauvage. Ce beau et puissant roman se lit d’une traite, tant on est troublé par l’étrange confession amoureuse d’un éleveur de brebis islandais, d’un homme qui s’est lui-même spolié de l’amour de sa vie.

Je n’ai qu’un goût modéré pour la nature mais ce livre n’existerait pas sans l’attachement à la terre que sait si bien raconter cet écrivain. Ces histoires sont totalement hors de mon quotidien , j’adore être dépaysée à ce point. L ‘histoire d’amour est très belle : on est bien avec toi Bjarni et on écoute tes histoires. J’ ai un petit faible pour le couple de vieux paysans qui ont vécu loin de tout et qui se sont aimés toute leur vie. Je ne vous raconte pas la solution qu’a imaginée le mari qui ne pouvait pas enterrer le corps de son épouse (le sol était gelé ) et qui ne voulait pas qu’elle soit laissée à l’abandon.

Mais je sais que vous n’oublierez pas l’odeur qui emplissait l’église le jour de son enterrement. Il y a dans ce roman des petites leçons de vie qui sont très agréablement distillées . Je suis moins sensible aux poèmes je les trouve un peu niais ,sans savoir si c’est voulu de la part de l’auteur où si leurs charmes ont du mal à passer en traduction.

 Citations

leçon de vie et exemple du charme du roman

Ah, je suis devenu un vieillard impossible qui prend plaisir à raviver de vieilles plaies. Mais on a tous une porte de sortie. Et nous aspirons tous à lâcher notre moi intérieur au grand air. Mon issue de secours à moi, c’est la vieille porte de la bergerie de feu mon père, celle que le soleil traverse par les fentes, en longs et fins rayons entre les planches disjointes. Si la vie est quelque part, ce doit être dans les fentes. Et ma porte à moi est désormais tellement faussée, branlante et déglinguée qu’elle ne sépare plus vraiment l’intérieur de l’extérieur. Devrais-je mettre au crédit du charpentier ce travail baclé ? Car toutes ces lézardes, ces interstices , laissent passer le soleil de la vie.

 Rudesse et avarice

Son grand-père fut longtemps célèbre pour l’amende d’une demi-couronne qu’il infligea à sa bonne pour avoir renversé le pot de chambre, gaspillant ainsi son contenu. C’est dire si, l’urine, qui servait à dessuinter la laine brute, était précieuse pour ces gens-là, et les rapports humains de peu de prix.

Et encore l’usage de l’urine

A son époque, à la campagne, le savon n’existait pas ; on lavait le linge et les vêtements à l’urine fermentée, comme de toute éternité….Dans sa jeunesse , disait-elle quand les femmes se shampouinaient à la pisse, leur chevelure longue et épaisse resplendissait.

 Reconnaissance

Et il n’y en a pas un qui m’a dit merci, alors que le foin de Tungunes, je l’ai mis en meule au moins dix-sept automne d’affilée.C’est comme ça. Celui qui en vient à mendier a le cœur qui saigne, et ces gars là ne voulaient sans-doute pas reconnaître leur dépendance.

 Proverbe campagnard

Il y a ceux qui allument le feu et ceux qui en profitent.

 Leçon de vie qui me rappelle une chanson de Brassens

Ainsi la règle m’a paru être que les gens prennent dans la vie le contre-pied de ce qu’ils prônent , quelle que soit l’image que revêt leur convicion. A croire que ceux qui parlent de maigrir sont toujours ceux qui sucrent le plus leurs crêpres et que ce sont les grosses brutes qui parlent de « précautions à prendre en présence d’une âme ». Les plus acharnés à condamner le crime sont généralement les criminels les plus endurcis ; le capitalisme qui est censé enrichir tout le monde, ne fait qu’appauvrir. Il faut s’attendre à ce que la liberté dont on parle tant à présent finisse par nous réduire tous en esclavage.

 On en parle

Lisez la réponse à la lettre à Helga du libraire de Lesneven à Bjarni je l’ai trouvée sur le site des éditions Zelma et merci à Jérome chez qui j’avais noté ce livre ainsi que chez Krol (qui a quelques réserves).

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