Édition Plon

Un roman historique absolument superbe , je l’avais déjà repéré chez « Aleslire » et Keisha sans pour autant me motiver, et puis, j’ai reçu ce livre en cadeau (et … il fait partie de la sélection de mon club de lecture). Pour moi aussi, c’est un coup de cœur absolu. Tout vient du talent de cet écrivain, Camille Pascal et je me laisserai tenter par ses autres livres tellement celui-ci m’a séduite et embarquée dans une autre époque. Je ne suis pas du tout spécialiste de cette période et si, comme moi les livres d’histoire ont tendance à vous ennuyer, ne soyez pas effrayé par les 646 pages décrivant cet instant où le roi Charle X a dû renoncer à la couronne par pur aveuglement, il faut dire que le prince de Polignac, son ministre l’a bien aidé à tenir fermer des yeux qui ne voulaient pas voir que la monarchie absolue n’était pas possible à restaurer. Pourquoi quatre rois ? Car en quelques jours, la France a vu Charles X abdiquer au profit de son petit fils Le Duc de Bordeaux, mais avant cela, quelques heures seulement son fils, le duc d’Angoulème, aura été le Roi de France le temps de signer son abdication . Et puis, finalement, soutenu par la chambre que Charles X voulait dissoudre, Louis-Philippe deviendra le « roi des français » et acceptera le drapeau tricolore.

Voilà le cadre, mais à l’intérieur de ce décor, on suit pas à pas, les hésitations de Charles X et son départ pour Cherbourg où l’attend le bateau qui l’emmènera en Angleterre. Cet homme est hanté par la mort de son frère Louis XVI. Il est persuadé que ce sont les faiblesses de ce roi qui ont causé sa perte. Hanté par l’image de l’échafaud, il se raidit dans des attitudes qui ne peuvent que l’entraîner vers sa perte. En contre point, à cette cour que rien ne peut éclairer, on voit les très riches bourgeois parisiens manœuvrer pour garder le pouvoir parlementaire même si pour cela il faut libérer les instincts révolutionnaires d’une population miséreuse. À la fin de cet été 1830, Louis Philippe est donc sur le trône de France, grâce à la grande bourgeoisie d’affaires qui effectivement est bien partie pour se développer mais qu’en est-il du peuple ? L’histoire montrera qu’il est plus facile de se débarrasser d’un roi que de la bourgeoisie d’affaires et que des révoltes peuvent être mater plus violemment par les forces de la république que par une armée royale surtout quand celle-ci est composée de mercenaires. Ces journées sont superbement évoquées et il fallait bien 646 pages pour en comprendre toute la portée et sentir l’avenir de la France.

 

Citations

Les odeurs …

 Le roi profita de l’instant pour demander à l’huissier du Conseil d’ouvrir l’une des fenêtres. Aussitôt, l’odeur des orangers vint éteindre celles des parfums de cours, trop musqués.

Motivation de Charles X

L’esprit de la Révolution n’a jamais abandonné une partie de la population. C’est à la monarchie qu’on en veut. Si je cédais, ils me traiteraient comme ils ont traité mon malheureux frère. Sa première reculade a été le signal de sa perte… Ils lui faisaient aussi des protestations d’amour et de fidélité ; ils lui demandaient seulement le renvoi de ses ministres. Il céda, et tout fut perdu … Si je cédais cette fois à leur exigence. Il finirait par nous traiter comme ils ont traité mon frère.

Jolie formule et portrait intéressant

Lui-même n’avait pas été insensible à cette intelligence et à cette vivacité de conversation qui voilait maintenant d’esprit l’affaissement de ses charmes. Cette femme du monde savait être d’excellents conseils et une source inépuisable de renseignements obtenus de première main, qu’elle avait experte. En partageant de temps à autre le lit du duc de Fitz-James, elle tenait la rampe du côté des ultras et des soutiens du ministère Polignac, mais son amitié ancienne avec la duchesse d’Orléans lui ouvrait aussi les portes du Palais-Royal où l’on respire est un air plus libéral. Enfin, sa tendre complicité avec le conseiller Pasquier la plaçait au cœur du juste milieu. Ainsi cette femme de 50 ans, en se tenant à cheval sur les deux Faubourgs, était-elle devenue l’une des plus recherchées et des mieux informées de Paris.

Autre temps autres mœurs

Comment rester un patron digne et respecté aux yeux de ses employés sans droit de vote qui leur permettait de consentir l’impôt et de participer à la vie de la nation ? C’était une honte, un défi au bon sens, un retour à l’ancien régime et à la société d’ordres.

Le luxe en 1830

Casimir Périer salua très aimablement Thiers et Rémuzat qu’il connaissait un peu et fut avec les quatre électeurs d’une amabilité d’homme d’affaires ; il dissimula avec talent le déplaisir qu’il avait à recevoir chez lui des fauteurs de trouble et leur parla comme un livre d’escompte. Ces manières de patricien, le luxe assourdi dont il s’entourait, la coupe parfaite de son habit, l’éclat d’une chemise qui n’avait pu être blanchie qu’à Londres, des souliers glacés au champagne, tout cela émerveillait Thiers et ses amis.

La misère

Jamais le grand référendaire n’avait vu la misère d’aussi près, et elle lui parut bien effrayante. Toute une population d’ouvriers, de gagne deniers, de crève-la-faim, de femmes dépoitraillées , d’enfants morveux, de vieillards édentés toute une gueusaille l’entourait, l’apostrophait, l’agrippait, touchait son beau manteau de velours pourtant taché par la pommade de sa perruque qui n’avait pas résisté à la chaleur et perlait de sa queue de rat sur son col brodé.

Bien dit

À l’hôtel de ville, le marquis de La Fayette s’enivrait de cette popularité qui est à la politique ce que l’encens est au culte des dieux.

18 Thoughts on “L’été des quatre rois – Camille PASCAL

  1. keisha on 30 septembre 2019 at 08:13 said:

    Ha là oui, 5 coquillages, rien d’étonnant;

  2. Ça me semble passionnant…

  3. Pas noté jusqu’alors, mais tu me fais flancher !

  4. Ce n’est pas un thème qui m’attire, a priori, mais vous êtes tellement enthousiastes que je le retiens.

  5. je le note une seconde fois, la période m’intéresse car depuis quelques mois (c’est très très long à lire) je suis avec Chateaubriand, donc la période a tout pour me plaire
    la lecture sera dans ….un peu de temps car ça s’accumule un peu en ce moment

  6. Bonjour Luocine, je n’ai lu que du bien à propos de ce « pavé » que je lirais bien un jour. L’époque traitée est relativement peu connue. Je ne connais pas grand-chose du règne de Charles X par exemple. Bonne journée

    • Je suis comme toi . Ce n’est pas la période que je connais le mieux, cet ouvrage m’a remis la chronologie en tête mais aussi fait comprendre l’état de la France a cette époque.

  7. Malgré ton coup de coeur le sujet ne m’attire pas du tout et les 600 pages me refroidissent totalement. Je passe sans doute à coté d’une lecture très marquante, tant pis pour moi.

    • La règle à laquelle aucun lecteur ne peut échapper,est : on ne peut pas tout lire. Cela peut être ressenti comme une frustration ou bien comme une merveilleuse réserve de livres passionnants qui attendent un autre moment de notre vie. Depuis que je suis à la retraite, j’ai accéléré mon rythme de lectures mais je ne peux tout lire non plus.

  8. Et pourtant, c’est long, et pourtant, la période historique n’est vraiment pas glamour, et pourtant, il est vraiment excellent ce titre ! Et c’est drôle en plus …. La fuite de Charles X, notamment, grâce à la subtilité ironique de l’auteur.

  9. J’avais déjà un avis extrêmement positif sur ce livre, je l’avais noté bien sûr. C’est une période vraiment intéressante, je trouve, avec beaucoup de mouvements de balancier. Révolution – Empire – Restauration puis cette Monarchie de Juillet avant la tentative de République. L’extrait sur Charles X est très clair sur la façon dont il entendait régner. Merci pour ce beau billet

    • Sympa, ce commentaire. J’ai adoré ce roman de grandes qualités littéraires alliées à une étude historique fouillée. Je suis certaine que tu apprécierais Si tes lectures te mènent jusqu’à cet ouvrage.

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