Édition Flammarion . Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard 

 

C’est un roman léger et dont la lecture si agréable nous sort un peu du monde trop violent qui est le nôtre aujourd’hui. Tout en étant léger il n’est pas pour autant superficiel. Deux histoires se rassemblent autour d’un curieux phénomène : le passage de Venus devant le soleil .

Les transits de Vénus font partie des phénomènes astronomiques prévisibles les moins fréquents et se produisent actuellement suivant une séquence qui se répète tous les 243 ans, avec des paires de transits espacés de 8 ans séparées par 121,5 puis 105,5 ans. Avant 2004, la paire de transits précédente date de décembre 1874 et décembre 1882. Le premier de la paire de transits du début du xxie siècle a eu lieu le 8 juin 2004 et le suivant a eu lieu le 6 juin 2012 . Après 2012, les prochains transits auront lieu en 2117 et 2125. selon Wikipedia .

Vénus c’est ce petit point noir sur le soleil

Guillaume Joseph Hyacinthe Jean-Baptiste Le Gentil de la Galaisière en 1760 s’embarque pour aller voir ce phénomène extraordinaire à Pondichéry. Il doit y être le 6 juin 1761. Une terrible tempête l’empêchera d’arriver à temps, il décide alors de rester à l’île Maurice, Madagascar et la Réunion pendant 8 ans pour pouvoir voir le prochain passage. En attendant, il écrit pour raconter ce qu’il voit et constitue une superbe collection de coquillages. Pour ses observations , il possède un superbe télescope objet qui émerveillera les marins et les gens qu’il rencontrera dans ses voyages.
Et voici notre deuxième personnage, Xavier agent immobilier à Paris, il retrouve cet ancien télescope dans un appartement qu’il a vendu. Il le met sur sa terrasse et observe la lune, les étoiles et sur un autre balcon une jolie parisienne dont il va tomber amoureux. Xavier est un homme de notre époque divorcé , anxieux qui se relaxe grâce à des applications sur internet . Il ne voit son fils qu’un WE à deux et il cherche des activités extraordinaires pour être bien avec lui. La jolie Alice qui a rencontré Xavier car elle recherchait un appartement travaille au musée des jardins des plantes, est taxidermique et fait revivre des animaux en les redonnant un aspect vivant.
Leur histoire sera un peu compliquée, nous ne les quitterons que pour retrouver Guillaume dans ses diverses aventures et ses rencontres avec des humains, des animaux des plantes si loin de la cour du roi Louis XVI . Nous avons quelques belles tempêtes et malheureusement la belle collection de coquillages sera sacrifiée pour sauver le bateau du retour. A son retour en France tout le monde l’ayant cru mort, il a perdu sa place à l’académie des sciences et sa famille s’est partagée son héritage.

On est bien avec les différents personnages même si quand on sort du livre, on se dit que le monde n’est pas aussi gentil que celui que nous décrit Antoine Laurain. Il a su nous faire revivre un astronaute bien oublié et nous faire partager une romance à laquelle on a envie de croire.

 

Citations

Présentation de Xavier.

 Il semblait à Xavier que sa vie avait en quelque sorte dérapée à un moment et il avait du mal à situer précisément ce moment. Souvent, il se sentait comme un célibataire sans avenir, qui vendait aux autres, plein d’entrain et de ressources, des appartements pour y construire une vie -autant de projets qui ne lui paraissaient plus à sa portée. 
Rien est vraiment compliqué. Ce que vous percevez comme difficile sont le plus souvent des constructions mentales. Vous ajoutez une couche d’angoisse dont vous n’avez nul besoin et qui est improductive. 

Les plages de l’île Maurice par rapport à la manche.

 Du bleu et de la lumière. Tout était bleu, l’eau était aussi immobile que le ciel. Jamais il n’avait vu d’autre plage que celle de la Manche, où il se rendait enfants et adolescents avec la famille. Des dunes avec des mottes d’herbe éparses balayées par le vent puis l’immensité de la mer. Le plus souvent, sa couleur était bleu foncé teintée de kaki et des rouleaux menaçaient ceux qui s’approchait et n’étaient pas marin. L’eau se retirait sur des kilomètres, et il fallait marcher longtemps sur les bosses du sable humide et dans les petits étangs de vases avant d’arriver au bord de la mer qui était en général glacée sur les pieds.

Une idée du bonheur.

 Bruno devait vivre le rêve d’une nouvelle vie en Dordogne, passer de belles journée en famille, pleines de projets pour ses chambres d’hôtes, et échanger avec Charlotte, sa femme, sur les couleurs du papier peint d’une future pièce ou encore sur l’agencement d’une rocaille dans le par paysagé. Oui, Bruno avait fait le bon choix  : il avait quitté la ville, avec ses voitures qui se reproduisaient comme des cafards, selon son expression. Il devait vivre tous les jours comme dans ses publications familiales des années 1980 dans lesquels le père et la mère retrouvaient leurs enfants le matin au petit déjeuner, dans la cour d’une belle maison ensoleillée pour partager chocolat chaud et café brûlant en éclatant de rire. En général ces spots vantaient une marque de chicorée ou des assurances ;

J’adore la fin.

 Le prochain transit de Vénus aura lieu en 2117. Soit dans quatre vingt quinze années. Vous, qui lisez ces lignes, ne serez plus là. Et moi non plus. Comme guillaume nous rateront ce rendez-vous. Mais ce n’est pas grave. Nous sommes ici. Maintenant. J’écris. Vous lisez. 
Nous respirons. 
Nous sommes vivants. 
Tout va bien.

 

Édition Autrement.  Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard.

 

 

C’est un premier roman d’Alain Mascaro qui semble lui avoir été inspiré par un grand voyage qu’il a entrepris en décidant de quitter son emploi de professeur de lettres. Le titre en dit beaucoup sur le sujet du roman : le peu de liberté qui est laissé aux populations de nomades qui décident de ne respecter aucune frontière et de vivre de spectacles qu’ils donnent de ville en ville. Le coeur même du roman raconte l’extermination du peuple tzigane par les nazis. Cela on le sait bien sûr, mais on lit beaucoup moins souvent les récits de la « Porajmos » que ceux sur la Shoa. Le seul survivant d’un petit clan (kumpania) des Thorvath , Anton le dresseur de chevaux, va devoir sa survie dans le ghetto de Łódź en se faisant passer pour un juif.(Ils ne doivent pas être nombreux à avoir fait cela !)

Le livre est rempli de toute la poésie des êtres libres qui aimaient sentir le vent de la steppe dans leurs cheveux quand ils chevauchent des montures aussi libres qu’eux. Le début commence avant la montée du Nazisme et la petite troupe vit au rythme des spectacles et des contes racontés par le violoniste Jag que nous retrouverons à la fin du roman. Malheureusement la petite troupe est en Europe et sera entièrement massacrée par les nazis. Je ne le savais pas mais à Łódź à coté du célèbre ghetto tenu par des juifs et qui ont été les derniers à être déportés, il y a eu un camp de concentration pour les Tziganes, il n’y a eu aucun survivants. J’avais lu le récit de ce ghetto particulier « Un monstre et le chaos« . Nous rencontrons là le portrait d’un médecin juif qui va enrichir la personnalité d’Anton, très vite, face au génocide sa famille le charge de survivre pour honorer la mémoire des morts. Dans le dernier camp, Anton rencontrera un juif grec qui enrichira ses connaissances philosophiques. Cet être solaire ne pourra pas survivre aux tortures des camps : que d’êtres d’exception dont l’humanité aurait eu tant besoin et qui ont disparu à jamais dans les fosses communes des camps de concentration. Anton va survivre mais sera brisé par ces drames atroces, il retient tous les noms de ces disparus qui lui appartiennent et qu’il ne veut pas oublier. Que de tristesse !

Après la guerre, il sera sauvé par l’américain qui sera le premier à ouvrir le camp de Mauthausen, son passage aux USA lui permettra de retrouver la santé mais pas son âme. Il reconstituera une « kumpania » avec des personnalités au passé marqué par la guerre et donnera des spectacles où les chevaux auront une place particulière. Anton retrouvera Jag qui vit en Indes. Là aussi la guerre entre les Hindous et les Musulmans fera douter Anton de l’humanité. La fin du roman se passe là où tout a commencé dans les plaines de Mongolie.

Tout ce roman est un hymne à la liberté qui s’est hélas, fracassée sur le nazisme ou le communisme et aujourd’hui sur les frontières qui se ferment et la bétonisation de la nature.

Citations

 

Joli conte tzigane.

« Papu Jag, demandait par exemple Nanosh, y a-t-il des hommes sur la Lune ?
– Il n’y en a plus qu’un seul, hélas, répondait Jag. Mais autrefois, il y en avait beaucoup ! Ils menaient une vie facile, leur seul travail était d’entretenir le feu pour que la Lune brille. À cette époque-là, elle était toujours pleine. Mais un mauvais homme, un « gadjo »qui n’aimait pas ses semblables les bannit de la lune. Depuis, le mauvais homme doit entretenir le feu tout seul, et il n’y parvient pas, c’est pourquoi la lune s’éteint régulièrement. Quand elle commence à se rallumer, c’est que le « gadjo » est en train de souffler sur les cendres. Quant aux hommes qu’il a chassés, ils se sont dispersés très loin dans le ciel et le « Devel » leur a donné la mission d’allumer chaque jour les étoiles. Si vous regardez bien, vous les verrez qui portent des fagots… »

Jolie fable.

 « Dis-moi, mon garçon, demandait Jag qui aimait les fables, qu’est-ce qui est mieux pour un mouton, le berger ou le loup ? 
– Le berger. 
 – Et qui tond le mouton ?
 – Le berger. 
– Et qui le tue pour le manger ? 
– Le loup !
– Non, Anton. c’est encore le berger. Il est bien rare qu’un loup parvienne à tuer un mouton, parce que le berger veille et il a de gros chiens. Mais qui donc protège le mouton quand le berger vient l’immoler ? 
– Personne. 
– Et pourtant de qui a peur le mouton : du berger ou du loup ? 
– du loup ! 
– Oui mon garçon, voilà bien tu le drame des hommes : ils sont exactement comme les moutons. On leur fait croire à l’existence de loups et ceux qui sont censés les protéger sont en fait ce qui les tondent et les tuent.

Rencontre avec les nazis.

 Ils semblaient si certains de leur force et de leur bon droit qu’il aurait été vain de protester, même lorsque l’un d’entre-eux avait pissé sur le marchepied d’une roulotte. Étrange comme la certitude hautaine de leur propre humanité peut amener certains hommes à se conduire comme des bêtes.

Le ghetto de Łódź.

Chaim Rumkowski n ‘est qu’un pantin qui se prend pour un ventriloque ! Il croit que nous sommes ses marionnettes. Il se joue de nous. Nous sommes ses choses. Mais qu’est-il lui-même ? Ne voit-il pas les fils qui partent de ses membres ? Ne sait-il pas qu’il est un jouet entre les mains des bourreaux ? Il est aveuglé par le pouvoir, ivre parce que les marks qui circulent au ghetto sont signés de son nom. Monnaie de singe en vérité ! Ce n’est qu’un tragique simulacre, un théâtre sordide et ridicule ! Un jour, tout ça s’effondrera, alors peut-être se verra-t-il tel qu’il est ! Le roi est toujours nu, mon garçon, toujours, ne l’oublie jamais !

Les survivants.

 Ci et là encore, il avait croisé quelques survivants, de Łódź ou de « Lager », la plupart marqués dans leur âme et leur chair, tourmentés par le simple fait d’avoir survécu là où tant d’autres étaient morts. Il les reconnaissait presque du premier coup d’œil. Il lui arrivait de se retrouver en présence d’un parfait inconnu et de se dire que si l’autre relevait la manche de sa chemise, de son bleu de travail, de son costume, on verrait apparaître un numéro de matricule tatoué comme celui que lui-même avait sur le bras droit. 
Seuls les bourreaux dormaient du sommeil du juste, c’était une constante, les victimes, elles continuaient à souffrir leur vie durant, jamais leur plaies ne cicatrisaient entièrement.

Édition : petite Biblio Payot. Traduit de l’anglais (États-Unis) par Hélène Hinfray.

 

J’ai ri et même éclaté de rire. J’ai imposé à tous mes amis la lecture de certains passages de ce voyage de Bill Bryson à travers la Grande-Bretagne qu’il aime tant. Alors, cette fois (contrairement au livre précédent sur Luocine), un grand merci Keisha , je te rejoins dans un plaisir de lecture que j’ai savouré à petites doses. Je commence à avoir un petit rayon Bill Bryson dans ma bibliothèque :American rigolos, Motel Blues, Shakespeare une antibiographie, Une Histoire de tout ou presque, Une histoire du monde sans sortir de chez moi, Nos voisins du dessous. Si j’ai volontairement ralenti ma lecture, c’est parce que je freinais mon envie de cavaler dans un livre où c’est mieux de prendre son temps. Quel plaisir aussi de le lire avec une bonne connexion Internet ! Cela permet de vérifier les images suggérées par un Bill Bryson en grande forme. Comme le dit Keisha , le premier chapitre racontant son premier contact avec l’Angleterre et ses habitants est à mourir de rire. Je peux encore sourire en imaginant la scène. On y apprend que les habitants restent le plus souvent courtois en toute occasion. (À ce propos je recommande la série « Mom » sur Arte qui démontre très bien aussi ce fait). Ensuite nous partons dans un périple à travers la Grande -Bretagne avec un auteur dont l’humour me ravit toujours autant. C’est très agréable de lire ce livre en vérifiant sur Internet tous les petits détails qu’il raconte avec un sens aigue de l’observation. Comme tout adepte de l’humour, il est d’abord sa propre cible, il faut dire qu’il manie avec une constance rare l’art de se tromper dans le choix de son hôtel et qu’après avoir cherché, le plus souvent sous la pluie, le meilleur rapport qualité prix , cela se termine le plus souvent dans une chambre mal chauffée et tristounette. Bill Bryson réussit son pari, nous faire aimer son pays d’adoption ,

cet étrange pays qui a inventé « un sport comme le cricket, qui dure trois jours sans jamais donner l’impression de commencer. 

J’ai été un peu étonnée qu’il visite, l’Angleterre sans évoquer les compétitions sportives (foot ou rugby) et l’Écosse sans les golfs ni le Whisky. En revanche la bière et les pubs sont bien présents. J’ai bien aimé aussi le passage où il se rend compte qu’être trop longtemps tout seul à voyager le rend un peu bizarre. Ce livre, c’est aussi une découverte de la personnalité de Bill Bryson , cet écrivain fait partie de ceux qui me remontent le moral. Vous pourrez lire de nombreux extraits et je vous le dis, je suis loin d’avoir recopié tous ceux dont j’aimerais me souvenir.

 

Citations

 

Vision de Calais

Calais est une ville fascinante qui n’existe que pour fournir à des Anglais en survêtement un endroit où aller passer la journée . Ayant subi d’intenses bombardements pendant le conflit mondiale , elle est tombée au mains des humanistes d’après guerre et ressemble par conséquent au reste d’une exposition de 1957 sur le ciment. Un nombre alarmant d’édifices du centre-ville, notamment autour de la lugubre place d’armes, semblent avoir été copiés sur des emballages de supermarché. Certains enjambant même des rues – ce qui est toujours la marque des urbanistes des années 1950, entichés des nouvelles possibilités offertes par le béton.

 

L’humour de Bill Bryson

Pour moi, quand il y avait un L à l’arrière d’une voiture, cela pouvait très bien signifier que son conducteur était lépreux. Je ne savais pas du tout que GPO désignait le bureau de poste principal (General Post Office), LBW une obstruction passible d’élimination au cricket (Le Before Wicket), GLC le conseil du grand Ni.dres (Greater London Council) et OAP les retraités (Ils Age Pensioners). Je rayonnais littéralement d’ignorance.

Les habitudes

Après être resté assis une demi-heure dans un pub avant de me rendre compte qu’il fallait aller chercher soi-même sa commande, je voulus faire la même chose dans un salon de thé et l’on m’enjoignit de m’asseoir.

 

L’art de résumer une vie (depuis il y a eu une série TV sur la vie de cet homme)

Selfridge était un type singulier qui nous donna tous une leçon de morale salutaire. Cet Américain consacra ses années d’activité à faire de Selfridges le grand magasin le plus raffiné d’Europe, transformant du même coup Oxford Street en principale artère commerçante de Londres. Il menait une vie droite et austère, se couchait tôt et travaillait sans relâche. Il buvait beaucoup de lait et ne faisait jamais de bêtises. Mais en 1918 sa femme mourut, et le fait de se trouver soudain libéré des liens matrimoniaux lui monta quelque peu à la tête. Il se lia avec deux jolies américaines d’origine hongroise connues dans le milieu du music-hall sous le nom de Dolly Sisters, et se plongea dans la débauche. Une Dolly à chaque bras, il écuma les casinos d’Europe, où il joua et perdit avec prodigalité. Il se mit à dîner dehors tous les soirs, dépensa des sommes folles aux chevaux de course et en automobile, acheta Highliffe Castle et projeta de faire construire une demeure de 250 pièces à Hengistbury Head, une localité voisine. En dix ans il dilapida 8 millions de dollars, se vit retirer la direction de cette Selfridges perdit son château et sa résidence londonienne, ses chevaux de courses et ses Rolls-Royce, et se retrouva finalement à vivre tout seul dans un petit appartement de Putney et à prendre le bus, avant de mourir sans le sou et pour ainsi dire oublié le 8 mai 1947. Mais il avait eu le plaisir inestimable de s’envoyer en l’air avec des sœurs jumelles, c’est tout de même ça le principal.

Je me retrouve dans cette remarque :

Parmi des milliers de choses que je n’ai jamais réussi à comprendre, il en est une qui ressort particulièrement. C’est la question de savoir qui a dit le premier, alors qu’il se trouvait près d’un tas de sable :  » Je parie que si on prenait de ça, si on le mélangeait avec un peu de potasse et si on le faisait chauffer, on obtiendrait à matériaux solides mais transparent. On appellerait ça du verre. » Traitez-moi d’abruti si vous voulez, mais on aurait pu me mettre sur une plage de sable jusqu’à la fin des temps sans qu’ils me viennent à l’idée d’essayer d’en faire des vitres

Portraits d’ anglais

Je passais devant un alignement de cabines de plage disposées en arc de cercle, toutes de formes identiques mais peintes de différentes couleurs vives. La plupart étaient fermées pour l’hiver mais, au trois quarts de la rangée environ, il y en avait une d’ouverte, un peu à la manière d’un coffre de magicien, avec une petite terrasse ou un homme et une femme était assis sur des chaises de jardin, emmitouflés comme pour une expédition polaire, une couverture sur les genoux, souffleté par des bourrasques qui menaçaient à tout instant de les faire basculer à la renverse. L’homme essayait de lire le journal, mais le vent le lui rabattait sans cesse sur le visage. Ils avaient tous les deux l’air très heureux ou, sinon heureux à proprement parler, en tout cas extrêmement satisfaits comme s’ils étaient aux Seychelles en train de boire un gin-fizz sous des palmiers dodelinants, et non pas à moitié mort de froid sous des rafales anglaises.
Ils étaient satisfaits parce qu’ils possédaient un petit bout de terrain tellement prisé en bord de mer pour lequel il y avait sans doute une longue liste d’attente et que, là était le véritable secret de leur bonheur, ils pouvaient rentrer quand ils voulaient dans la cabine pour avoir un peu moins froid. Ils pouvaient se faire une tasse de thé et, s’ils étaient d’humeur à faire des folies, manger un sablé au chocolat. Après, ils pourraient passer une agréable demi-heure à ranger leurs affaires et à fermer les volets. Il ne leur fallait pas plus pour accéder à un état proche du ravissement.

Les prospectus publicitaires

Presque tous ces dépliant regorgeait tellement de fautes que c’en était déprimant, et ils avaient si peu à offrir que c’en était pitoyable. La plupart étoffait leur liste d’attractions grâce à des indications telles que « parking gratuit » ou « Boutique cadeaux et salon de thé », sans compter l’inévitable « terrain d’aventure », et ensuite, ils étaient assez bêtes pour montrer sur la photo que c’était juste un portique et deux animaux en plastique sur ressort. Qui peut bien aller dans des endroits pareils ? Je me le demande.

Logique britannique

Je priais l’employé du guichet de me donner un aller simple pour Barnstable. Il m’informa que l’aller simple coûtait 8,80 livre mais qu’il pouvait me faire un aller-retour pour 4,40 livres.
– Vous ne voudriez pas m’expliquer en quoi c’est logique ? lui demandai-je.
– Je voudrais bien si je pouvais monsieur, me répondit-il avec une louable franchise.

Autodérision

Et les voilà tous partis à me bombarder de questions. « Elle consomme beaucoup ? Combien de litres au 100 ? C’est quoi comme couple ? Tu as un double arbre à cames en tête ou un alternateur carburateur à deux canons avec baïonnette et sortie les pieds devant ? » Ça me dépasse que quelqu’un veuille savoir toutes ces conneries sur une machine. Aucun autre appareil ne suscite un tel intérêt. J’ai toujours envie de leur demander. « Alors comme ça il paraît que tu as un nouveau réfrigérateur ? Et elle contient combien de litres de fréon, cette petite merveille ? C’est quoi son IEE ? Et comment il réfrigére, hein ? »
 Cette voiture possédait l’assortiment habituel de touches et de boutons, tous ornée d’un symbole destiné à vous embrouiller (…)
 Au milieu de ce tableau de bord se trouvaient deux cadrans circulaires de la même taille. L’un d’eux indiquait clairement la vitesse, mais l’autre me laissait totalement perplexe. Il avait deux aiguilles, une qui avançait très lentement et une qui n’avait pas l’air de bouger du tout. Je la regardai pendant une éternité avant de m’apercevoir ( je vous jure que c’est vrai,) que c’était une pendule.

Les lords anglais

Je me rappelle avoir lu un jour que le dixième duc de Marlborough, alors qu’il séjournait dans l’un des châteaux de sa fille, était apparu consterné en haut de l’escalier pour déclarer que sa brosse à dents ne moussait pas convenablement. Il s’avéra que, son valet ayant toujours mis le dentifrice à sa place, le duc ignorait que ces instruments ne fabriquait pas spontanément de la mousse.

Bradford.

La mission de Bradford, dans la vie, c’est de faire paraître toutes les autres villes de la planète plus belles en comparaison, et elle remplit très bien ce rôle.

 Liverpool

J’ai pris le train pour Liverpool, où j’arrivais en plein Festival du détritus. Les habitants avaient pris le temps, malgré leurs nombreuses activités, de parsemer le décor, par ailleurs terne et mal entretenu, de sachets de chips, de paquets de cigarettes vides et de sacs en plastique. Ils voletaient gaiement dans des buissons, apportant couleur et relief aux trottoirs et au caniveaux. Et dire qu’ailleurs on met tout cela dans des sacs-poubelle.

Engager une conversation

Je ne sais pas moi, engager la conversation avec des inconnus en Grande-Bretagne. En Amérique, évidemment, c’est facile. Il suffit de tendre la main en disant : « Moi c’est Bryson. Vous avez gagné combien l’année dernière ? » Et ensuite le dialogue ne tarit plus.

La correspondance train/autocar

Bien que le dernier train eût effectué sa desserte depuis quelques temps, un homme se tenait toujours au guichet. J’allais donc le voir et l’interrogeait calmement sur le manque de coordination entre le train et les services d’autocar à Blaenau. Je ne sais pourquoi, vu que je fus l’amabilité même, mais il fut visiblement vexé, comme si je critiquais sa femme, et répondit d’un ton irrité.
– « Si la société Gwynned Transport veut que les gens prennent le train de la mi-journée à Blaenau, elle n’a qu’à faire partir les cartes plutôt.
– Mais vous aussi, insistai-je, vous pourriez faire partir le train quelques minutes plus tard. »
Il me regarda comme si j’étais outrageusement impertinent et riposta.
– » Mais pourquoi nous ? »

Les animaux , les enfants, les ouvriers.

Savez-vous que la Société nationale de prévention de la cruauté envers les enfants a été fondé soixante ans après la Société royale de prévention de la cruauté envers les animaux dont elle n’était qu’une émanation ? Savez-vous qu’en 1994 la Grande-Bretagne a voté pour une directive européenne exigeant des périodes de repos statutaire pour les animaux transportés, mais contre des périodes de repos statutaires pour les ouvriers d’usine ?

Bryson a beaucoup utilisé les trains en Angleterre donc en 1994 on pouvait dire ceci

Voici pour vous quelques chiffres singuliers, qui sont un peu barbants mais qu’il faut connaître. En Europe, les frais affectés par personne et par an aux infrastructures ferroviaires sont de 20 livre en Belgique et en Allemagne, 31 livre en France, plus de 50 livre en Suisse, et en Grande-Bretagne elles atteignent royalement 5 livres. La Grande-Bretagne débourse moins par tête de pipe pour améliorer les voies ferrées que n’importe quel autre pays de l’Union européenne à part la Grèce et l’Irlande. Même le Portugal dépense plus. Et, malgré ce manque de soutien financier, le pays possède vraiment un excellent service de chemin de fer, tout compte fait. Aujourd’hui les trains sont beaucoup plus propres qu’autre fois, le personnel globalement plus patient et plus serviable. Les gentils guichetiers disent toujours s’il vous plaît et merci, et la nourriture est mangeable.

Une différence entre le Middle West et le Yorkshire

Là d’où je viens, dans le Middle West, lorsqu’on est emménage dans un village ou une petite ville, tout le monde passe vous voir pour vous souhaiter la bienvenue comme si c’était le plus beau jour du quartier, et tout le monde vous apporte une tarte. Vous vous retrouvez avec des tartes aux pommes, des tartes aux cerises et des tartes au chocolat. Dans le de Middle West, il y a des gens qui déménagent tous les six mois rien que pour les tartes.
Dans le Yorkshire, cela ne risque pas d’arriver. Mais progressivement, petit à petit, les autochtones vous font une place dans leur cœur et se mettre, lorsqu’il passe en voiture, à vous faire un signe de reconnaissance que j’appelle le salut de Malhamdale. C’est un jour mémorable dans la vie de tout nouvel arrivant. Pour effectuer le salut de Malhamdale, faites d’abord semblant de tenir un volant de voiture. Puis, très lentement, tendez l’index de votre main droite comme si vous aviez un petit spasme involontaire. Voilà. Ça n’a l’air de rien, mais ça en dit long, croyez-moi et cela va beaucoup me manquer.

L’amour de l’Angleterre

Tout à coup, en un éclair, je compris ce que j’aimais en Grande-Bretagne, tout. Absolument tout, le bon et le mauvais, la pâte à tartiner Marmite, les fêtes de village, les chemins de campagne, les gens qui disent :  » Faut pas se plaindre », et « Je vous demande pardon, mais », ceux qui me présentent leurs excuses, à moi quand je leur donne un grand coup de coude sans faire exprès, le lait en bouteille, les haricots sur du pain grillé, les foins au mois de juin, les orties qui piquent, les jetées-promenades en bord de mer, les cartes d’état-major, les crumpets, le fait d’avoir toujours besoin d’une bouillotte, les dimanches pluvieux – tout, je vous dis.

 

Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard. Édition Seuil

Un essai ? un roman ? ce qui est sûr c’est que cette lecture a été un peu difficile dans le cadre du club de lecture parce qu’il faut l’avaler en quelques jours et que cette oeuvre ne s’y prête guère elle conviendrait mieux à la flânerie littéraire qui permettrait au lecteur de réaliser le vœu de Bernard Chambaz :

Aux morts pour qu’ils vivent. Aux vivants pour qu’ils aiment

Cette citation extraite de l’oeuvre de Joseph Delteil « les poilus », est le fil conducteur de ce roman, les vivants, dans le texte, ils sont deux, les parents de Martin né en 1976 et on peut aussi y rajouter nous, lecteurs et lectrices. Les morts ils sont très nombreux en dehors des deux principaux Jack London mort en 1916 et Martin mort à 16 ans en 1992, il y a aussi la famille quelque peu compliquée de Jack London et tous les écrivains que Bernard Chambaz convoque dans ce voyage qui retrace un itinéraire possible pour mieux connaître l’auteur, entre autre, de Martin Eden . Le livre se divise en chapitres qui sont autant de lieux évoquant la vie du grand écrivain qui, parfois, dialogue avec Martin, et que l’auteur visite avec son épouse. Je pense que si on ne connaît pas l’œuvre de cet auteur extraordinaire qui s’est battu contre tant d’injustices et qui a produit un nombre d’écrits incroyables, on ne peut pas apprécier ce livre. Beaucoup de gens se sont emparés de sa vie car elle se prête aux scandales et aux révélations sulfureuses même sa propre famille y est allée de différentes versions, comme souvent dans ce cas le plus intéressant et sans doute le plus proche de lui est dans ses livres. Je me souviens bien de ma lecture de Martin Eden, c’est un livre que j’ai lu et relu je crois qu’une grande part de lui est dans ce roman. Cela m’a donné envie de relire les livres qui ont enchanté mon enfance comme « l’appel de la forêt » et « Croc blanc » je ne sais pas si les jeunes d’aujourd’hui pourraient être sensibles à ces histoires, eux qui peuvent regarder de si nombreux documentaires animaliers de si grande qualité. Jack London est un écrivain de qualité et un homme privé médiocre, comme le prouve les lettres à ses filles dont l’auteur dit qu’il aurait aimé en faire un grand feu de joie tellement il y apparaît comme mesquin. J’ai retrouvé dans ce livre l’engagement de l’auteur face à la misère du monde capitaliste et la fluctuation de sa pensée politique. C’est souvent le cas lorsqu’un homme connaît la misère populaire, il sait souvent très bien décrire d’où il vient mais quand lui-même atteint un niveau de vie très confortable grâce à ses écrits sa mauvaise conscience le taraude et peut le conduire à des positions paradoxales.

Je ne suis pas enthousiaste pour ce livre, parce que je me suis souvent perdue dans les différents point de vue des chapitres : étions nous avec l’auteur et son amoureuse ? avec leur fils, avec Jack London ? et surtout je n’ai pas compris le dialogue entre Martin et Jack . Est-ce-que cela a enrichi pour l’auteur la connaissance de son fils ? et j’avoue que les constantes allusions aux signes astrologiques me laissent perplexe.

Toutes ces réserves viennent aussi, sans doute, du fait que j’ai lu trop rapidement ce livre pour le rendre au club et avoir l’avis des autres lectrices. et pourtant dans ce livre j’ai lu cette phrase qui me touche beaucoup :

Nous sommes aussi, un peu, les livres que nous avons lus.

 

Citations

 

Une mère au caractère sans tendresse.

Toute sa vie, il restera animé par des sentiments contradictoires, partagé entre l’affection naturelle qu’il porte à sa mère et l’irritation instinctive que ses réactions provoquent (…… )
On garde au fond du cœur des épisodes cuisants auxquels nous donnons, quelquefois, trop de relief. Le plus lancinant quand il y repense n’est pas que sa mère ne lui ait dispensé aucune tendresse, c’est son comportement lors de l’épidémie de diphtérie ou une fièvre carabinée faillit les emporter, sa demi-sœur et lui. Ce jour-là, Flora demanda au médecin si elle pouvait les enterrer dans le même cercueil.

L’enfance de Jack London

Il n’y a pas que les livres dans la vie. Dès ses huit ans, Jack doit gagner sa vie ou plutôt contribuer au budget familial, débitant des pains de glace l’été, balayant les pistes d’un bowling le weekend, livreur de journaux, à pied d’ œuvre pour l’édition du matin et pour l’édition du soir, la nuit noire l’hiver, avant et après la journée d’école où il s’est davantage ennuyé qu’il n’a appris.

Ce qui rend difficile le livre : mélange des époques et des lieux

Icefields Parkway -ou la promenade des Glaciers- longe depuis Jasper la rivière Athabasca. En langue crie, on entend tantôt l’herbe éparse tantôt les roseaux que les champs de glace prodiguent à la saison estivale.

Défense de l’assassin du président Garfield

À son procès, l’assassin ne plaida pas la folie mais la volonté de Dieu dont il était l’instrument, convaincu qu’il serait à ce titre innocenté, assurant sa défense avec des arguments spécieux :  » Ce sont les médecins qui l’ont tué. J’ai seulement tiré . »

Londres en 1900…

Avant même d’arriver au cœur des ténèbres, sa première impression de la capitale mondiale et d’une « abjecte pauvreté » bientôt « sans limite ». Jack est saisie par la vision des vieux et des enfants fouillant les ordures dans la boue. …. 
 Dormir est un méchant casse-tête, que ce soit dans une pièce insalubre où s’entassent plusieurs familles, chez des marchands de sommeil qui louent très cher des lits occupés par roulement, dans des logements exigus, sordides des taudis, des galetas, des tanières, parfois sans fenêtre, presque toujours sans lumière.

Une histoire qui lui servira dans ses nouvelles

Un vieux marin lui rapporte son histoire et le hasard une fois encore fait que c’est une histoire pour Jack. Le vieux avait donc frappé un lieutenant qu’il avait insulté, le lieutenant était tombé à la mer, il avait sauté dans l’eau par réflexe, mais j’aurais mieux fait de nous noyer tous les deux, crois-moi, un canot les avais repêchés, on l’avait traduit devant un tribunal, on lui avait enlevé la Victoria Cross gagnée sur les champs de bataille au bord de la mer Noire pour les beaux yeux de la reine, et il conclut d’une voix ferme, laissant Jack sans voix. : « Ne te laisse pas vieillir, mon petit ! Meurs quand tu es encore jeune ! »

Jack en époux

Alors que Bess est enceinte, qu’elle se coltine les tâches ménagères et tape à la machine ses manuscrits, il continue de faire du vélo, boxer, nager, sortir au club avec ses copains, animer des réunions publiques où il retrouve Anna.

 

 

Traduit de l’anglais (États-Unis) par Nathalie Peronny Édition Globe 

 

Je dois à Keisha (encore elle ! -encore ?… comme si je me plaignais !) ce livre merveilleux et instructif à tant de point de vue. Je l’ai lu depuis un moment mais je n’ai rien oublié de mon intérêt pour cette fabuleuse enquête. Il est sur mon sur Kindle et le gros avantage c’est de pouvoir faire des notes très facilement et de les récupérer tout aussi facilement comme vous pourrez le voir. Peut-être, en ai-je mis un peu trop mais c’est pour moi une bonne façon de retenir précisément le contenu d’un livre.

Jessica Bruder a suivi pendant deux ans des Américains qui ont tout perdu suite à la crise des « subprimes » , toutes leurs économies ont fondu dans des malversations bancaires. Ils n’ont plus rien mais n’ont pas perdu les traits de caractère de la culture américaine. Ils essaient par tous les moyens de s’en sortir. Ceux et celles qui intéressent cette journaliste ont choisi de s’acheter un camping-car et de partir sur les routes, à la recherche des petits boulots. Vous ne serez pas étonnés d’apprendre qu’Amazon a vu là une main d’oeuvre facile à capter. Donc avant Thanksgiving et Noël leurs terrain de camping se remplissent de caravanes venant des quatre coins du pays. Cela nous vaut des pages passionnantes sur ceux et celles qui travaillent dans les énormes hangars d’Amazon . La principale difficulté de ses nouveaux migrants de l’intérieur, c’est de trouver des endroits où laisser leur camping, en effet aux États-unis tous les stationnement sont privés et peuvent coûter très cher. Amazon propose donc des parking gratuits pour que ces gens viennent travailler chez eux. Le livre fourmille de petites astuces pour s’en sortir ? Ces gens forment une communauté et se refilent les adresses des supermarché qui ne vous chasseront pas de leur parking, des terrain de camping où vous pourrez laisser votre véhicule à condition de faire du gardiennage. En réalité, l’Amérique offre une foule de petits boulots peu payés, qui conviennent assez bien à des jeunes , mais qui sont très fatigants pour des personnes âgées et qui surtout supposent un logement.

Les personnes que suit Jessica Bruder sont souvent très intéressantes et différentes des unes et des autres mais sa préférée et la nôtre évidemment c’est Linda qui veut absolument se construire une maison avec des matériaux recyclés. J’espère qu’elle vit bien maintenant Linda au grand cœur, elle le mérite pour oublier toutes ses galères. Je l’imagine bien dans une maison comme ça, pour faire un joli pied de nez à l’alcool qui a tellement perturbée sa vie.

 

Cela fait longtemps qu’une partie de la population américaine vit dans des terrains de camping où on retrouve des « homes » pas du tout mobiles. La nouveauté de ce phénomène , c’est qu’il s’agit ici de gens qui voyagent, qui ne veulent pas vivre parqués et qui veulent retrouver un travail stable. On voit aussi à quel point cette crise a été violente pour une partie importante de la population, si la maladie, un divorce ou l’alcool s’en mêlent alors, ces gens perdent tout en très peu de temps. Mais ils sont Américains et gardent malgré tout une envie de s’en sortir assez étonnante et un esprit communautaire qui brise leur solitude .

 

Citations

Le début

Les mensonges et la folle cupidité des banquiers (autrement nommé « crise des subprimes ») les ont
jetés à la rue. En, 2008, ils ont perdu leur travail, leur maison, tout l’argent patiemment mis de côté pour leur retraite. Ils auraient pu rester sur place, à tourner en rond, en attendant des jours meilleurs. Ils ont préféré investir leurs derniers dollars et toute leur énergie dans l’aménagement d’un van, et les voilà partis ;

Survivre en Amérique

Les workampers sont des travailleurs mobiles modernes qui acceptent des jobs temporaires aux quatre coins des États-Unis en échange d’une place de stationnement gratuite (généralement avec accès à l’électricité, à l’eau courante et évacuation des eaux usées), voire parfois d’une obole. On pourrait penser que le travailleur-campeur est une figure contemporaine, mais nous appartenons en réalité à une tradition très ancienne. Nous avons suivi les légions romaines, aiguisé leurs épées et réparé leurs armes. Nous avons sillonné les villes nouvelles des États-Unis, réparé les horloges et les machines, les batteries de cuisine, bâti des murs en pierre en échange d’un penny les trente centimètres et de tout le cidre qu’on pouvait avaler.
Nous avons suivi les vagues d’émigration vers l’ouest à bord de nos chariots, munis de nos outils et de nos savoir-faire, aiguisé des couteaux, réparé tout ce qui pouvait l’être, aidé à défricher la terre, à construire des cabanes, à labourer les champs et à rentrer les récoltes en échange d’un repas et d’un peu d’argent de poche, avant de repartir vers le prochain boulot. Nos ancêtres sont les romanichels. Nous avons troqué leurs roulottes contre de confortables autocars et autres camping-cars semi-remorques. À la retraite pour la plupart, nous avons complété notre éventail de compétences d’une carrière dans l’entreprise. Nous pouvons vous aider à gérer un business, assurer la vente en magasin ou la logistique dans l’arrière-boutique, conduire vos camions et vos grues, sélectionner et emballer vos produits à expédier, réparer vos machines, bichonner vos ordinateurs et vos réseaux informatiques, optimiser votre récolte, remodeler vos jardins ou récurer vos toilettes. Nous sommes les technoromanichels.

Bismark inventeur de la retraite

Les Américains l’ignorèrent largement, et il s’écoula plus d’un siècle avant qu’Otto von Bismarck instaure en
Allemagne la toute première assurance vieillesse au monde. Adopté en 1889, le plan de Bismarck récompensait les travailleurs atteignant leur soixante-dixième anniversaire par le versement d’une pension. L’idée était surtout de contrer l’agitation marxiste – et de le faire à peu de frais, puisque les Allemands vivaient rarement au-delà de cet âge canonique. Bismarck, bâtisseur d’empire et homme de droite surnommé le Chancelier de fer, se retrouva aussitôt dans le collimateur des conservateurs qui l’accusèrent de mollesse. Mais il repoussait déjà leurs critiques depuis des années.
Appelez cela socialisme, ou tout autre terme qui vous plaira : pour moi, c’est la même chose », avait-il déclaré au Reichstag en 1881, lors d’un débat préliminaire sur l’assurance sociale.

Travail peu valorisant

Dans le chariot, il pouvait y avoir quatorze paniers de cochonneries fabriquées en Chine. L’un des trucs qui me déprimaient le plus, c’était de savoir que tous ces machins finiraient à la benne. » Cet aspect-là des choses la démoralisait particulièrement. « Quand on pense à toutes les ressources mobilisées pour en arriver là ! On nous incite à utiliser ces trucs, puis à les jeter. » Le travail était éreintant. Non seulement elle parcourait des kilomètres dans des allées de rayonnages sans fin, mais elle devait se pencher, soulever, s’accroupir, tendre le bras, grimper et descendre des marches, le tout en traversant un hangar dont la superficie faisait grosso modo la taille de treize stades de football.

L’alcool

Linda décida d’arrêter de boire avec une détermination nouvelle. Et cette fois, elle y parvint. Lorsqu’elle avait peur de replonger, entre deux réunions, elle appelait sa marraine des Alcooliques anonymes. Étrangement, c’est là qu’elle apprit les techniques qui lui permettraient plus tard de survivre aux cadences infernales d’Amazon. Elle devint experte dans l’art de se concentrer sur les difficultés immédiates et de subdiviser les gros problèmes en petites bouchées plus faciles à digérer jusqu’à ce que la situation paraisse sous contrôle. « Tu as fait la vaisselle ? OK. Va d’abord faire la vaisselle, et rappelle-moi après », lui ordonnait sa marraine. Linda allait récurer les verres et les assiettes jusqu’à ce qu’ils soient propres, puis elle rappelait. « Tu as fait ton lit ? » lui demandait alors son amie. Linda s’exécutait. Et ainsi de suite, jusqu’à ce que l’envie de boire passe. * * *

Trucs bizarres chez Amazon

Elle notait dans sa liste de souhaits Amazon « tous les trucs les plus dingues qu’on voyait passer » : des vers de cire, un ourson en gélatine de deux kilos et demi, un fusil de plongée sous-marine, un livre intitulé Vénus aux biceps. Une histoire illustrée des femmes musclées, un plug anal en forme de queue de renard, un stock d’anciennes pièces de monnaie américaines, un assortiment de sous-vêtements en coton avec quatre trous pour les jambes baptisé « petites culottes pour deux », et un godemiché Batman.

Personnage haut en couleur

Le propriétaire, Paul Winer, un nudiste septuagénaire au cuir tanné comme un vieux livre, arpente les allées de sa librairie vêtu en tout et pour tout d’un cache-sexe en laine tricotée. Par temps froid, il enfile quand même un pull. Si Paul a pu garder sa librairie, c’est parce que, techniquement, c’est un commerce temporaire et qu’il a donc droit à des réductions d’impôt. La boutique n’a pas vraiment de murs, c’est juste une pergola dressée audessus d’une dalle en béton. Des bâches relient les deux. Des containers et un mobile home font office d’annexes. 

Il y a aussi un rayon de livres chrétiens, mais il est installé tout au fond et Paul doit le montrer aux clients qui le cherchent. « Ils suivent mes fesses nues pour aller voir la Bible », s’amuse-t-il.

 

Humour les musées américains

Le lieu fut ensuite reconverti en un relais de diligences, Tyson’s Wells, dont les ruines abritent aujourd’hui un tout petit musée situé à côté de la pizzeria Silly Al’s. (La ville comprend deux autres musées : l’un expose une collection de chewing-gums du monde entier, et l’autre des accessoires militaires. Mais ils semblent moins attirer les foules que leur minuscule rival.) En 1875, l’écrivaine Martha Summerhayes passa une nuit à Tyson’s Wells et décrivit l’endroit comme « particulièrement mélancolique et inhospitalier. Tout y refoule la saleté, tant sur le plan moral que physique ». Quand le relais finit par être abandonné, le site devint une ville fantôme. En 1897, il fut ressuscité par un boom minier ; le bureau de poste rouvrit, et la municipalité choisit un nouveau nom : Quartzsite. (À l’origine, ce devait être « Quartzite », en hommage au minéral, mais le « s » s’invita par erreur et resta définitivement.) L’unique figure historique de la ville est un chamelier syrien, Hadji Ali, enterré
sur place en 1902 et plus connu sous le surnom « Hi Jolly », version américanisée de son nom. Ali avait été recruté en 1856 au sein du tout nouveau corps de chameliers de l’US Army : l’expérience, de courte durée, visait à utiliser ces animaux notoirement irascibles pour transporter du matériel vers le sud-est des États-Unis.

 

Honte

Mike m’explique que les personnes âgées et en situation de précarité affluent à Quartzsite parce que c’est une « ville idéale pour les retraités peu fortunés » et « un endroit pas cher où se planquer ». Mais se planquer de quoi, au juste ?
Réponse : de la honte, de pauvreté et du froid. « Dans le désert, dit-il, ils n’ont pas peur de crever de froid. Ils disent à leurs enfants que tout va bien. »

Optimisme américain

Comme l’a souligné Rebecca Solnit dans son ouvrage Un paradis construit en enfer. Ces formidables
communautés qui naissent au milieu du désastre, les gens ne se contentent pas de relever la tête dans les
moments de crise ; ils le font avec une « joie vive et surprenante ». Il est possible de traverser des épreuves tout en ressentant de la joie dans les moments de partage, comme quand on se retrouve autour d’un feu de camp avec ses compagnons d’infortune sous un immense ciel étoilé.

Pourquoi si peu d’afro-américains ?

 À ce stade, j’avais rencontré des centaines de personnes qui avaient adopté ce mode de vie :
travailleurs itinérants, vagabonds de l’asphalte et camping-caristes, de la côte Est à la côte Ouest du pays. Certes, il y avait parmi eux des gens de couleur, mais ils représentaient une exception au sein de cette communauté.
Pourquoi la sous-culture nomade était-elle majoritairement blanche ? Certains de ses membres se sont posé la même question. Sur la page Facebook officielle du programme CamperForce, un camping-cariste noir a eu ces mots devant la succession de photos montrant surtout des ouvriers blancs : « Je suis sûr que des Afro-Américains ont postulé à ces emplois, faisait-il observer. Pourtant, je n’en vois au postées par Amazon. »

Imaginez-vous coincé en pleine forêt sans électricité, sans eau courante ou sans voiture : vous aurez tendance à décrire cette situation comme un « cauchemar » ou le « pire scénario possible après un crash aérien ou une catastrophe dans le genre ». Les Blancs, eux, appellent ça « camper ».

 

Le trafic de drogue

Au fil de ses lectures, Linda a tout appris sur le plus célèbre coup de filet antidrogue du coin, dans les années 1990, quand des policiers ont découvert l’existence d’une galerie de neuf kilomètres de long sous la frontière. Utilisé par le cartel de Sinaloa pour la contrebande de cocaïne, le large tunnel, renforcé par des parois en ciment, reposait à une dizaine de mètres au-dessous du sol, avait pour point de départ une maison anodine d’Agua Prieta ; son entrée était savamment cachée. En ouvrant un robinet, on actionnait un monte-charge hydraulique qui faisait remonter une table de billard – et la dalle du sol sur laquelle elle reposait – pour révéler un trou équipé d’une échelle. À l’intérieur, le tunnel mesurait un mètre cinquante de haut ; il était climatisé, éclairé et protégé des risques d’inondation grâce à une pompe et un puisard. Des rails métalliques permettaient de déplacer un chariot jusqu’à Douglas, sous un grand hangar camouflé en station de lavage pour camions. Là, une poulie faisait remonter les cargaisons de cocaïne à la surface, où elles étaient réceptionnées par des manutentionnaires
pour être chargées dans des semi-remorques. Stupéfaits, les policiers avaient comparé le tunnel, surnommé « Chemin de la cocaïne », à un truc « digne d’un film de James Bond ». Le pilier du cartel de Sinaloa, El Chapo, Joaquin Guzman de son vrai nom, était carrément allé plus loin dans le superlatif en affirmant que son équipe avait construit un « putain de tunnel super-cool ».

Tout ce qu’a lu Linda concernant le trafic de drogue local est vrai. Les mules peuvent gagner davantage en une nuit qu’un ouvrier de maquiladora en un mois. Il n’est donc guère étonnant que la police des frontières de Douglas retrouve souvent des paquets de marijuana dissimulés dans les jantes et les pneus de rechange des véhicules en provenance du Mexique. (On y trouve aussi de la meth, de l’héroïne ou de la cocaïne, mais plus rarement.) Lors d’un récent coup de filet, ils ont surpris un jeune de seize ans en train de descendre eb rappel le long de la clôture à l’aide d’une ceinture de sécurité ….Pour ce travail on lui avait promis 400 dolars. Chez lui, il fabriquait des courroies de distribution dans une « maquiladora » pour 42 dolars la semaine.

Traduit de l’allemand par Rose Labourie ; édition Acte Sud

Encore une fois un livre que je dois à la blogosphère mais en ayant oublié de noter précisément l’auteur du blog heureusement Keisha s’est rappelée à mon bon souvenir !. Je dois dire que j’ai failli passer à côté de cet essai, parce que cet homme m’a énervée au début de son récit. Il a de tels moyens financiers et ceci grâce aux prébendes que l’ONU distribue de façon écœurante à tous les membres de cette administration, et de voir les participants recevoir en plus de leur très confortable salaire de grosses enveloppes de liquides pour aller aux quatre coins du monde parler du sous-développement ou de l’écologie est absolument révoltant. Que ce soit de cette façon là que Wolf Küper ait réussi à mettre assez d’argent de côté pour passer deux années à ne rien faire d’autre que s’occuper de sa petite fille atteinte d’une maladie mentale qui l’empêche de se développer normalement a failli me faire refermer le livre. Et puis, le charme incroyable de cette petite fille m’a conquise moi aussi et j’ai donc suivi le parcours en camping car de cette famille à travers les plus beaux endroits de la planète.

Aucune famille avec un enfant handicapé ne peut prendre exemple sur cette famille, mais eux ont réussi à donner deux années de bonheur à leur petite fille qui est peut être plus armée maintenant pour affronter la vie qui, sans doute, ne sera pas très facile.

Citations

Un père face au handicap de sa fille

Je m’en souviens comme si c’était hier, peu avant notre départ, Nina avait fait la course avec d’autres enfants sur une grande pelouse. Évidemment, ils ne pouvaient pas se contenter de jouer tranquillement. Les enfants, en particulier les garçons, ont la compétition dans le sang. Ils ont besoin de se mesurer pour savoir qui court le plus vite, grimpe le plus haut, plonge le plus profond, saute le plus loin, et ainsi de suite. Et au milieu : Nina qui voulait absolument participer. Mrs. Lonte en en personne, qui m’avait fait blackbouler de toutes les courses de ma vie. Je n’arrivais pas à comprendre. Pourquoi s’obstinait-elle ? Pourquoi se mettait-elle sans arrêt en position de perdre contre les autres ? J’ai dit : « Y en a marre de toujours faire la course, venez, on va jouer à un autre jeu », et ce genre de choses. Dans le feu de l’action, les enfants ne m’ont même pas entendu, mais ce sont tous plus ou moins alignés, non sans que les garçons échangent quelques insultes – forcément. Mon cœur battait la chamade, ils se sont élancés en poussant des cris perçants.
En moins de trois secondes, Nina était déjà la dernière, alors qu’il y avait aussi des enfants bien plus petits qu’elle. À la moitié du trajet, elle était loin derrière. On aurait dit qu’elle allait disputer cette course tout seul. Presque en solitaire. Elle chancelait sur la pelouse, penchée en avant, les bras tendus sur les côtés, et elle tanguait tellement que je n’arrêtais pas de me dire : Cette fois, elle va tomber. J’arrivais à peine à la regarder. Quand elle est arrivée au bout, les autres avaient déjà repris leur jeu. J’ai vu Nina zigzaguer entre eux, hors d’haleine. Si je me souviens aussi précisément de cette scène, une parmi les centaines d’autres, c’est parce que ce moment-là, j’ai eu terriblement mal pour elle, mal pour un autre que moi.

Un bel endroit le lac Tepako et un beau moment dans les étoiles

L’illumination était donc venu lors de notre première nuit ici, au lac Tekapo, trois décennies plus tard, en montant sur un rocher, je m’étais rendu compte que les étoiles ne se trouvaient pas « au-dessus » mais tout autour de moi. Il y en avait même qui scintillaient en dessous de moi à l’horizon, et alors que mon vertige semblait se dissiper j’avais aperçu l’éblouissante Voie Lactée, tellement gigantesque que j’en avais eu le souffle coupé, brillant de milliards de feu, des centaines de milliers d’années lumière d’un horizon à l’autre, toute la folie de l’univers en 3D. Et en couleur. Et oui, il y a des étoiles bleues et vertes et rouges, et violette aussi, certaines clignotent frénétiquement, d’autres pulsent lentement, partout, des étoiles filantes zébraient le ciel tandis que les satellites traçaient paresseusement leur route. En Nouvelle-Zélande, il est impossible de croire que la terre est au centre de quoique ce soit, parce que rien qu’à l’oeil nu, on voit bien que nous ne sommes qu’une poussière perdue dans un coin de l’univers.

Je me demande si c’est vrai

Et avec les gens importants, il faut toujours garder son sérieux, ne jamais être de meilleure humeur que le client, c’est la règle numéro 1 quand on fait du conseil, surtout auprès d’hommes politiques.

Là où, ce livre m’a tellement écœuré que j’ai failli le laisser tomber.

Depuis que j’avais commencé à travailler régulièrement comme expert pour les Nations Unies, j’ai gagné pour la première fois beaucoup d’argent. Vraiment beaucoup. Rien que les indemnités de défraiement qu’on vous verse chaque semaine correspondent au revenu mensuel net d’un post doc avec douze années de formation universitaire en Allemagne. Le tout non imposable. Au Nations Unies, on vous remet sans ciller d’épaisses enveloppe marron avec des liasses de billets de cinquante dollars, presque comme dans un film de mafieux. Ça ne rentre même pas dans le porte-monnaie. Les billets sont soigneusement attachés par vingt à l’aide d’un trombone. Officiellement, ces indemnités exorbitantes servent à voyager dans des conditions « appropriées et représentatives ». Soudain, j’avais, ce qu’on appelle un niveau de vie élevé, accès aux lounges VIP et vol en première classe. Programme grand voyageur et ainsi de suite…..

Jusqu’à l’écœurement des réunions à l’ONU des ONG sur l’environnement

Le genre de chose qui ne mérite pas qu’on s’y attarde une seconde, sans même parler d’enfer débattre plusieurs milliers de délégués sur payer venu du monde entier.
Une civilisation qui se prend pour le fleuron de la création célèbre ici sa propre déchéance. Je fais un rapide calcul : le paragraphe comporte environ 70 mots. Au cours des 95 minutes que dure ce cirque, il y a 22 objections et 19 correction. Ça doit être incroyablement difficile de formuler le rien.

Lu dans le cadre du Club de Lecture de la médiathèque de Dinard

Sur Michel Hoellebeck , on lit tellement d’avis et en particulier sur ce roman qui semble avoir prévu les attentats de Bali de 2002, que je n’ai pas hésité à le choisir quand la bibliothécaire l’a mis au programme de notre club dans le thème « tourisme » . Il a tellement sa place, dans ce thème ! (Pour justifier ma photo, oui, il parle de Dinard et même de ma plage – une ou deux phrases, mais elle y est !) Depuis « les Particules Élémentaires », je continue à le lire régulièrement, sans être déçue, même si parfois il me rend très triste. J’avais bien aimé « La carte et le territoire » et depuis longtemps, je voulais lire « Plateforme ». C’est, comme toujours chez lui , une analyse assez froide des comportements de nos contemporains, il s’agit ici du tourisme, mais pas seulement. Aussi de la façon dont notre société adule l’argent pour l’argent. il s’amuse à nous décrire certains excès des installations d’art contemporain. Il montre à quel point la violence peut devenir incontrôlable dans les banlieues. Il se fait une piètre idée de l’Islam et n’hésite pas à l’écrire. Et surtout, il fait une description très détaillée du plaisir sexuel sous toute ses formes. Le héros tombe amoureux d’une Valérie plus jeune que lui lors d’un voyage en Thaïlande, il travaille au ministère de la culture, où il organise des expositions toutes plus bizarres les unes que les autres, son père meurt, il a donc quelques dispositions financières. Valérie travaille pour le tour-opérateur qu’ils avaient choisi et il va l’aider à monter des concepts de voyages plus rentables. Le héros et les deux autres personnages importants Valérie et son chef Jean-Yves se rendent compte que lors des voyages organisés la seule chose que désirent les touristes c’est avoir des relations sexuelles , autant les prévoir par le Tour-Opérateur qui se nommera « Aphrodite ».

Tout le talent de cet écrivain , c’est d’aller juste un peu plus loin, et parfois pas tant que ça de nos comportements et donc ces occidentaux qui viennent « baiser » loin de chez eux trouveront tout ce qu’ils veulent sauf que …. un terrible attentat en 2002 en tuera plus de deux cents d’entre eux. Ne cherchez pas de condamnations morales ou des jugements de valeur, on a l’impression que rien ne le choque ; Michel Houellebeck décrit ce que tout le monde peut voir ou connaître. Dans un style particulier qui peut sembler assez plat, il accroche son lecteur, (en tout cas moi) sans aucun autre effet qu’une histoire très bien racontée et un point de vue d’une honnêteté absolue, mais comme toujours assez triste car très désabusé sur la nature humaine.

Citations

Le bonheur et les voyages

J’ai passé ma dernière journée de congé dans différentes agences de voyages. J’aimais les catalogues de vacances, leur abstraction, leur manière de réduire les lieux du monde à une séquence limitée de bonheurs possibles et de tarifs, j’appréciais particulièrement le système d’étoiles pour indiquer l’intensité du bonheur qu’on était en droit d’espérer. Je n’étais pas heureux, mais j’estimais le bonheur, et je continuais à y aspirer.

Du Houellebeck tout pur

« Je n’ai rien à attendre de ma famille, poursuivit-elle avec une colère rentrée. Non seulement ils sont pauvres, mais en plus ils sont cons. Il y a deux ans, mon père a fait le pèlerinage de la Mecque ; depuis, il n’y a plus rien à en tirer. Mes frères, c’est encore pire : ils s’entretiennent mutuellement dans leur connerie, ils se bourrent la gueule au pastis tout en se prétendant les dépositaires de la vraie foi, ils se permettent de me traiter de salope parce que j’ai envie de travailler plutôt que d’épouser un connard dans leur genre. »

Je partage cet avis sauf pour l’alcool et les cigarettes

Prendre l’avion aujourd’hui, quelle que soit la compagnie, quelle que soit la destination, équivaut à être traité comme une merde pendant toute la durée du vol. Recroquevillé dans un espace insuffisant et même ridicule, dont il sera impossible de se lever sans déranger l’ensemble de ses voisins de rangée , on est d’emblée accueilli par une série d’interdictions énoncées par des hôtesses arborant un sourire faux. Une fois à bord, leur premier geste et de s’emparer de vos affaires personnelles afin de les enfermer dans les coffres à bagages -auxquels vous n’aurez plus jamais accès, sous aucun prétexte, jusqu’à l’atterrissage. Pendant toute la durée du voyage, elles s’ingénient ensuite à multiplier les brimades, tout en vous rendant impossible tout déplacement, et plus généralement toute action, hormis celles appartenant à un catalogue restreint, dégustation de soda, vidéos américaines, achat de produits duty free. La sensation constante de danger, alimentée par des images mentales de crash aérien, l’immobilité forcée dans un espace limité provoquent un stress si violent qu’on a parfois observé des décès de passagers par crise cardiaque sur certains vols long-courriers. Ce stress, l’équipage s’ingénie à le porter à son plus haut niveau en vous interdisant de le combattre par les moyens usuels. Privé de cigarettes et de lecture, on est également de plus en plus souvent, privé d’alcool.

Et vlan pour les profs de français

J’avais appris qu’elle était prof de lettres « dans le civil », comme disait plaisamment René ; ça ne m’avait pas du tout étonné. C’était exactement le genre de salopes qui m’avaient fait renoncer à mes études littéraires, bien des années auparavant.

 

Qui d’autre que Houellebecq à le droit d’écrire cela

Il y avait également deux Arabes isolés, à la nationalité indéfinissable -leur crâne était entouré de cette espèce de torchon de cuisine auquel on reconnaît Yasser Arafat dans ses apparitions télévisée.

Intéressant

Les seules femmes dont je parvenais à me souvenir, c’était quand même celles avec qui j’avais baisé.Ce n’est pas rien, ça non plus ; on constitue des souvenirs pour être moins seul au moment de la mort.

L’évolution de la société

Nous vivions en résumé dans une économie mixte , qui évoluait lentement vers un libéralisme plus prononcé, qui surmontait peu les préventions contre le prêt à usure – et , plus généralement , contre l’argent- encore présentes dans les pays d’anciennes traditions catholiques. Certains jeunes diplômés d’HEC, beaucoup plus jeunes que Jean-Yves, voire encore étudiant, se lançaient dans la spéculation boursière, sans même envisager la recherche d’un emploi salarié. Ils disposaient d’ un ordinateur relié à Internet, de logiciels sophistiqués de suivi des de suivi des marchés. Assez souvent, ils se réunissaient en club pour pouvoir décider de nous de mises de fonds plus importants. Ils vivaient sur leur ordinateur, se relayaient vingt-quatre heures sur vingt-quatre, ne prenaient jamais de vacances. Leur objectif à tous était extrêmement simple : devenir milliardaire avant trente ans.

L’art contemporain

Je travaillais alors sur le dossier d’une exposition itinérante dans laquelle il s’agissait de lâcher des grenouilles sur des jeux de cartes étalés dans un enclos pavé de mosaïques -sur certains des carreaux étaient gravés des noms de grands hommes de l’histoire tels que Dürer, Einstein,Michel-Ange. Le budget principal était constitué par l’achat des jeux de cartes, il fallait les changer assez souvent, il fallait également de temps en temps, changer les grenouilles. L’artiste souhaitait, au moins pour l’exposition l’exposition inaugurale à Paris, disposer de jeu de tarots, il était prêt, pour la province, à se contenter de jeux de cartes ordinaires

 

 

Édition le Seuil

Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard

 

Après « la villa des femmes » et « l’empereur à pied« , voici ma troisième lecture de ce grand écrivain libanais. Ce texte est très court et les chapitres qui le composent font parfois moins d’une demi-page. Le titre dit beaucoup sur cette biographie : Raphaël Arbensis aurait pu, en effet mener des vies bien différentes. L’auteur sent que sa destinée tient plus du hasard et de la chance que de sa propre volonté. Ce sont des idées bien banales aujourd’hui mais qui, au début du XVII° siècle, sentent l’hérésie pour une élite catholique toute puissante et peu éclairée. Elle vient de condamner Galilée et donc, regarder, comme le fait le personnage, le ciel à travers une lunette grossissante relève de l’audace. L’auteur ne connaît pas tout de la vie de cet aventurier du pays des cèdres comme lui, mais malgré ces périodes d’ombre qu’il s’empêche de remplir par trop de romanesque, il sait nous rendre vivant ce personnage . Le plus agréable pour moi, reste son talent d’écrivain : grâce à son écriture, on se promène dans le monde si foisonnant d’un siècle où celui qui voyage prend bien des risques, mais aussi, est tellement plus riche que l’homme lettré qui ne sort pas de sa zone de confort. Chaque chapitre fonctionne comme une fenêtre que le lecteur ouvrirait sur la société de l’époque, ses grands personnages, ses peintres, sa pauvreté, ses paysages. Un livre enchanteur dont les questionnements sont encore les nôtres : qu’est ce qui relève de notre décision ou de la chance que nous avons su plus ou moins bien saisir ?

 

Citations

De courts chapitres comme autant de cartes postales du XVII° siècle

Chapitre 6
Il fréquente aussi les lavandières qui lavent le linge dans le Tibre . Il fait rire et les trousse à l’occasion. À cette époque , les rives bourbeuses du fleuve sont envahies par les bateliers , et les teinturiers y diluent leurs couleurs. Nous sommes dans les premières années du pontificat d’Urbain VIII. La colonnade du Vatican n’est même pas encore dans les projets du Bernin, Borromini n’a pas encore construit la Sapienza, le palais des Barberini s’appelle encore palais Sforza et la mode des villas vénitienne intra-muros commence à peine. Mais il y a des chantiers et l’on creuse des allées et des voies. Des peintres et des sculpteurs habitent en ville. Le Trastevere et un village séparé de la cité, cette dernière n’a pas la taille de Naples, mais depuis le bord du fleuve on voit les dômes de Saint-Pierre et le palais Saint-Ange. Les grands murs du temps de l’Empire sont toujours debout, roses et briques parmi les cyprès et les pins, et sous la terre dorment encore bien des merveilles. Un jour de 1625, sur la place du Panthéon, un larron interpelle Raphaël pour lui vendre quelque chose en l’appelant Monsignore. Ardentis s’arrête, méfiant, le larron rit en découvrant une horrible rangée de dents abîmées et lui indique sa brouette sur laquelle il soulève une petite bâche. Avensis se détourne du spectacle de l’affreuse grimace du mendiant pour regarder ce qu’il lui montre et là, au milieu d’un bric-à-brac fait de clous, de chiffons, de morceaux de plâtre et de divers outils abîmés, il voit une tête en marbre, une grande tête d’empereur ou de dieu, le front ceint d’un bandeau, les lèvres pulpeuses, le nez grec et le cou coupé, posé sur le côté, comme lorsqu’on dort sur un oreiller.
Chapitre 27 un des plus courts
Dans le ciel, il y a toujours ces grands nuages blancs qui se contorsionnent tels des monuments en apesanteur, qui prennent des postures fabuleuses et lentement changeantes comme les anges et les êtres séraphiques improbables de Véronèse.

Á travers une longue vue les personnages regardent Venise et le lecteur croit reconnaître des tableaux

Une autre fois, il voit un homme buvant du vin à une table sur laquelle, en face de lui, une femme nue est accoudée qui le regarde pensivement, le menton dans la main. Il voit un maître de musique près de sa jeune élève devant un clavecin, il voit une table un globe terrestre dans une bibliothèque déserte et un jour, dans ce qui semble une chambre à coucher, il voit une femme en bleu, peut-être enceinte, debout et absorbée dans la lecture d’une lettre.

Le hasard ou le destin

Nos vies, écrit-il, ne sont que la somme, totalisable et dotée de sens après coup, des petits incidents, des hasards minuscules, des accidents insignifiants, des divers tournants qui font dévier une trajectoire vers une autre, qui font aller une vie tout à fait ailleurs que là où elle s’apprêtait à aller, peut-être vers un bonheur plus grand si c’était possible, qui sait ?, mais sans doute souvent plutôt vers quelque chose de moins heureux, tant le bonheur est une probabilité toujours très faible en comparaison des possibilités du malheur ou simplement de l’insignifiance finale d’une vie ou de son échec.

 

 

 

 

Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard

Un livre étonnant qui commence une série que je ne connaissais pas l « Égo-histoire », qui se définit ainsi :

une forme d’approche historiographique et de courant d’écriture historique à travers laquelle l’historien est censé analyser son propre parcours et ses méthodes de manière réflexive et distanciée. (Wikipédia) . 

Il peut très bien se glisser dans une de vos valise pour accompagner vos vacances. Même si il n’est pas qu’un livre léger et plaisant de souvenirs d’une famille intellectuelle parisienne, ceci n’est, en effet, qu’un tout petit aspect de ce livre, qui cherche à atteindre des buts beaucoup plus larges, plus « scientifiques » trouver en quoi les vacances organisées par ses parents s’inscrivent dans une conduite sociologique ne correspondant pas exactement à l’originalité à laquelle elle semblait à l’époque répondre. C’est certainement l’aspect qui lui a enlevé un ou deux coquillages sur Luocine, car j’ai trouvé ces explication très répétitives, on comprend assez vite mais l’auteur a besoin d’y revenir plusieurs fois sans rien ajouter au propos. Le second aspect m’a beaucoup touchée : que se cache-t-il derrière cette injonction paternelle « Soyez heureux !«  ? Toutes les difficultés des rescapés de la Shoah sont dans ces deux mots et la façon dont son père a rendu ses enfants « heureux » est extraordinaire à la fois de simplicité mais aussi de courage . Enfin le dernier aspect, ce sont les souvenirs de cet enfant qui a comme tous les enfants préfèrent jouer avec ses amis plutôt qu’écouter les explications savantes à propos des ruines grecques et romaines.

Un livre que j’ai beaucoup aimé malgré les bémols que j’ai évoqués.

 

Citations

Ambiance familiale marquée par la Shoah

Dans ma famille, le bonheur représentait un tel enjeu qu’il en devenait non seulement inaccessible, mais vicié, légèrement putréfié, pas si désirable que cela. C’est une perversion dont je ne me suis jamais tout à fait remis. Le seul remède à cette maladie de l’âme consistait à rompre le soupçon et a décidé immédiatement, toutes affaires cessantes, que je pouvais être heureux, pour aucune autre raison que j’en avais le droit. 

 

Le camping -car

Si les moquerie de mes camarades me mettaient mal à l’aise , c’est parce que je sentais qu’elles visaient bien plus que des vacances : notre identité familiale , notre mode de vie , notre « style » , la personnalité de mes parents , donc l’éducation que je recevais d’eux. Partir en camping-car révélait un certain niveau de revenu, mais aussi l’absence de traditions familiales et de racine ; un certain capital culturel, et aussi un manque de savoir-vivre ; une inclination au ridicule, mais aussi une liberté d’esprit, une capacité de détachement, par fierté ou indifférence au qu’en-dira-t-on.

Liberté

j’étais libre parce qu’il n’y avait pas de ceinture à l’arrière et que nous nous déplacions dans l’habitacle pendant les trajets
 parce que je pouvais flâner dans les musées sans les visiter
 parce que je pouvais rester des heures à jouer dans les vagues
 j’étais libre parce qu’on campait n’importe où, sur les plages, les débarcadère, les parkings, au bout des jetées , dans les clairières
parce que mon sac de couchage était un vaisseau spatial, avec des manettes et des cadrans intégrés
j’étais libre parce que aucun cahier de vacances ne venait prolonger le travail scolaire de l’année
parce qu’une pression se relâchait
l’urgence était suspendue
parce qu’on changeait de destination tous les ans
parce que nos spots ne figuraient sur aucun guide de voyage
et que cela ne coûtait rien de se perdre, l’égarement n’étant qu’un autre chemin
j’étais libre de m’éprouver Juif errant, tout en étant protégé par un État 

 

Je sais que je dois cette lecture à la blogosphère en particulier à Jérôme mais à d’autres aussi. J’ai d’abord dégusté et beaucoup souri à la lecture de ce petit livre et puis je me suis sentie si triste devant tant de destructions, à la fois humaines et écologiques. Le regard de cet auteur est implacable, il sait nous faire partager ses révoltes. Comme lui, j’ai été indignée par le comportement de Philippe Boulet qui refuse de donner un simple coup de fil pour sauver de pauvres Malgaches partis en pirogues. Un de ses adjoint finira par l’y contraindre , mais trop tard si bien que seuls 2 sur 8 de ces malheureux ont été sauvés et vous savez quoi ?

 

En tant que chef de mission, Philippe Boulet a été décoré d’une belle médaille par le gouvernement malgache pour son rôle émérite dans le sauvetage des pêcheurs. un article de presse en atteste. Il sourit sur la photo.

 

La vision de la Chine est particulièrement gratinée, entre les ambiances de façades et la réalité il y a comme un hiatus. Comme souvent dans les pays à fort contrastes « le gringo » ou le »blanc » est considéré comme un porte monnaie ambulant. L’auteur se moque autant de ses propres comportements que ceux des touristes qui veulent absolument voir de « l’authentique ». Mais souvent la charge est lourde et quelque peu caricaturale. C’est peut être mon âme bretonne qui m’a fait être agacée aux portraits de bretons alcooliques. Ceci dit, pour voyager comme il le fait, il vaut mieux résister à l’alcool car on est souvent obligé de partager le verre de l’amitié qui est rarement un verre de jus de fruit quand on veut absolument vivre avec et comme les autochtones.

Enfin, le pire c’est le traitement de la nature par l’homme, c’est vraiment angoissant de voir les destructions s’accumuler sous le regard des gens qui se baladent de lieux en lieux sans réaliser que, par leur simple présence, (dont celle de l’auteur !) ils contribuent à détruire ce qu’ils trouvent, si « jolis », si « authentiques », si « typiques »….

 

Citations

 

Humour

J’ai passé des journées à marcher dans les rues, fouiner chez les disquaires de Soho, contempler l’agitation de Notting Hill ou des puces de Camden. Tout cela était très intéressant, je rencontrais d’autres possibles, mais ça ne m’aidait pas réellement à savoir qui j’étais. Le déclic eut lieu une nuit que j’étais à me morfondre dans quelque pub anglais au cœur de Londres. Accoudé sur un comptoir, je noircissais des page de cahier à spirale, dans une navrantes tentative postadolescente de devenir Arthur Morrison. Je zonais depuis une semaine, le groupe du pub reprenait Walk Of Life et j’en étais à écrire des sonnets sous Kronenbourg quand quelqu’un a renversé son verre de Guinness sur mes vers de détresse. Une vision, féminine, chevelure fatal et hormones au vent. Note pour les jeunes poètes maudits : écrire la nuit dans les bars, pour pathétique que ce soit, peut attirer la gourgandine. C’était une vieille, elle avait au moins 25 ans. Elle portait une robe noire sophistiquée et des talons arrogants ; elle travaillait dans la mode. Ses yeux brillaient d’une assurance alcoolisée. Volubile et pleins d’histoires.

Très drôle

Il existe, à l’est de Leeds, localité dont peu de gens soupçonne l’existence. Un port où le soleil n’est qu’un concept lointain, une cité prolétaire ou Margaret Thatcher est Satan et Tony Blair, Judas. Une riante bourgade ravagée par la crise postindustrielle, où l’on repère les étrangers à leur absence de tatouages et de cirrhose. Liverpool sans groupe de rock mythique, Manchester sans le foot. Hull est un sujet de moquerie pour le reste de l’Angleterre. Sa page Wikipédia se résume à 5 lignes, c’est que pour une ville de 250000 habitants.
PS  : Vérification Hull a plus que 5 lignes sur Wikipedia

Cette envie de recopier le livre !

Toutes ses économies dilapidées dans un voyage à pile ou face, des mafias engraissées, le cache cache avec la police de deux continents, la peur et le froid. Tout cela pour devenir esclave à Hull, qui concourt au titre de la ville la plus pourrie d’Europe. Khalid n’exprimait aucun regret : « Il vaut mieux être ouvrier à Hul que mort à Kaboul. » Une évidence contre laquelle aucune loi ne peut lutter.
… Dix kilomètres jusqu’à la maison. Des cités décaties où descendaient les rouquins à capuche, un immense supermarché Tesco, qui était une des raisons pour lesquelles Azad, Mohamed et Khalid, victimes de la géographie politique avez tenté la vie en Europe. Je travaille à l’usine pour pouvoir voyager. Ils avaient beaucoup, beaucoup voyagé pour venir travailler à l’usine.

Bombay

J’ai entendu quelques histoires de jeunes Anglais venus faire de l’humanitaire en Inde en sortant de chez leurs parents, et repartant au bout de trois jours, traumatisés par la réalité de la misères. Impossible de faire abstraction, dans cette ville où il faut prendre garde à ne pas marcher sur les nouveaux nés qui dorment sur le goudron.

Portrait de surfeurs

Tous ces garçons vivent entre eux dans une colonie de vacances perpétuelle, voyageant d’un spot à l’autre autour du monde, mangeant des corn flakes et des sandwichs à la mayonnaise dans des maisons de location, torse nu, pendant que le coach les dorlote. Le soir, ils boivent des bières autour d’un barbecue. Chaque année, à date fixe, il retrouve Hawaï, la Gold Coast australienne, le Brésil, l’Afrique du Sud ou Lacanau, sans avoir le temps de connaître les endroits qu’ils traversent. Ils ne se préoccupent pas de descendre sous la surface, leur fonction est de rester à flot. Ils gagnent très bien leur vie, ce sont des stars. Leurs performances sportives leur permettent de postuler au Statut de surhomme. Musclés et bronzés, ça va sans dire. Pas très grands, pour des histoires de centre de gravité. Leurs copines sont des splendeurs, rayonnantes de santé et de jeunesse, tout cela est très logique. On pourrait moquer la spiritualité de pacotille qui entoure le monde du surf, bric-à-brac de panthéisme cool où l’homme fusionne avec la nature dans l’action, mais ce n’est pas nécessaire. Ces types consacrent leur vie à la beauté du geste, dans un dépassement de soi photogénique. Ils tracent des sillons parfaits, en équilibre constant entre la perfection et la mort. Ce n’est pas rien.

La Chine

À Chongqing, je je trouve ce que j’aime dans lex tiers-monde. Le chaos organisé, la vie dans la rue, les gens qui vendent n’importe quoi à même le sol, les cireurs de chaussures,( l’un deux a voulu s’occuper de mes tongs), les vieux porteurs voûtés qui charrient le double de leur poids, les bars qui appartiennent à la mafia et les chiens qui n’appartiennent à personne.

À Pékin, on a posé une Chine en plastique sur la Chine. Et ça fonctionne très bien. Ils ont réussi à cacher les pauvres et les crasseux. À Chongqing, il n’y a pas de jeux olympiques. Les pauvres et les crasseux côtoient les costards cravates. Des ouvriers cassent les vieux immeubles à la masse, torse et pieds nus, à 15 mètres du sol. Les normes de sécurité ne sont pas optimales. Mais un centre commercial doit ouvrir dans 20 minutes à cet emplacement , alors il faut faire le boulot.

Portrait féroce et réducteur de l’autre….

Elle est prof. De maths. Allemande. Un sacré boute-en-train. Elle passe son temps à détailler de A à Z, tous les points de désaccord avec la culture chinoise. Je ne comprendrai jamais les gens qui, sortant de chez eux, ne supportent pas qu’on ne se comporte pas comme chez eux. De son côté, elle ne comprend pas que les Françaises s’épilent les jambes régulièrement. C’est pour l’instant, le plus gros choc culturel de mon séjour.