Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard.
Par grande tempête, ce qui n’était pas le cas le jour où j’ai pris cette photo, les côtes de la manche rappellent les tourments dans lesquels ont été pris l’équipage du Toroa : le capitaine Rongo Walker, le second Tamatoa et le narrateur le Frenchie dont on ne connaîtra que ce surnom.
C’est l’un des sujets de ce roman, les lois impitoyables de la mer. Pour les avoir une seule fois oubliées, Rongo Walker a failli perdre la vie, celle de ses deux équipiers et son bateau. Cela a commencé par une mauvaise pêche, puis par une panne de radio, enfin par un soleil couchant trop rouge annonciateur de tempêtes. Mais l’appât d’une pêche miraculeuse à la langouste, a fait perdre au capitaine sa légendaire prudence. Les descriptions de la mer en furie sont à vous donner le mal de mer et à vous empêcher de dormir. Mais sur un bateau aux conditions de vie si rudes se tissent aussi des liens d’amitié très forts qui nous permettent de comprendre pourquoi et comment les hommes ont de tout temps réussi à vaincre la peur de la mer déchaînée.
Le deuxième thème du roman, ce sont les traditions Mahori, dans des sortes de contes qui s’insèrent dans le roman, elles sont racontées et permettent de comprendre une autre civilisation qui avait une toute autre connaissance de la mer que celle qui permet de naviguer aujourd’hui. Ce sont de très beaux textes qui permettent de réfléchir, encore une fois, à la disparition de civilisations orales qui valaient largement la notre et qu’on n’a ni su comprendre et encore moins respecter.
Si j’étais par moment complètement séduite par ce livre, j’ai, aussi, été moins prise par la répétition des récits traditionnels qui veulent trop démontrer les charmes et les valeurs de ces civilisations. J’ai trouvé les propos répétitifs, ces anciens qui savaient naviguer sans aucune carte ni boussole seulement avec les étoiles, les courants et le sens de la houle, c’est absolument magique mais j’ai eu du mal à m’y intéresser plusieurs fois de suite. Je vois pourtant que ces récits à leur façon accompagnent le roman et que le dernier évoque la fin d’un ancien navigateur mais cela n’a pas suffi à capter toute mon attention. Alors que les récits de la pêche et de la vie sur le bateau m’ont saisie d’effroi et d’admiration. Malgré mes réserves, je ne peux que conseiller la lecture de ce roman j’aimerais tant partager avec vous ce plaisir de lecture. Ne serait-ce que pour vous dépayser (par beau temps) dans des paysages absolument magnifiques et peu connus
Citations
Une de mes réserves : la difficulté de lire des noms étrangers
Mon nom est Temarii à Teriipaia, je suis né le 1er décembre 1919 à Iripau,le village dans le nord de Tahaa. Les Polynésiens, trois choses nous importent, un lopin de terre ou bâtir son Fare, un coin de lagon pour la pêche, une montagne à cultiver. Moi c’est Murifenua dans la baie de Vaiore et ma plantation là-haut, sur la colline de Mahamene.
Un dicton qui fait réfléchir
Dans nos îles on a ce principe : Ha’amata Hape, Ha’aoti Hape.Ce qui commence faux finit faux.
Climat du Sud de la nouvelle Zélande
Fiordland – ce nom avait acquis au fil des mois l’éclat mystérieux des légendes. Les gens d’ici évoquaient cette région sauvage, aux confins sud de la Nouvelle-Zélande, avec un émerveillement souvent teinté d’effroi. Rien que d’immenses forêts, des lacs et des montagnes, une poignée d’habitants à peine sur des centaines de kilomètres, un climat effroyable, – pluie, vent et froid prenaient dans la région des proportions d’apocalypse. Il n’y avait que les pêcheurs pour naviguer dans ces parages. Les tempêtes en mer de Tasman étaient violentes, imprévisibles, on entendait parler de navire en perdition drossés sur les récifs, de chavirage brutaux, d’hommes perdus en mer. Les abris et étaient rares sur ces côtes, très éloignés les uns des autres, inaccessibles par vent fort.
La poésie
C’est un poète, il a l’amour des mots… Aimer les mots, c’est aimer les hommes surtout. On ne peut pas se parler à soi-même comme si on était seul !… Tout le monde aime les mots, nous les Maoris plus encore. On a perdu cela, mais nos anciens pouvaient se disputer trois jours et trois nuits sans repos pour décider du sens d’un verbe…
La vie sur un bateau
En mer ce n’est pas chacun dans son coin, il faut savoir à tout moment sur qui on peut compter. Par ses contraintes et sa monotonie, la solitude qu’elle impose, toujours sous le regard des autres, la vie au large et un révélateur. On dit qu’aller sur un bateau c’est comme être en prison avec, en prime, le risque de périr noyé. Les faux-semblants se dissolvent dans l’eau salée, on ne peut pas mentir longtemps.
Navigation traditionnelle
Je suis pas perdu, comprenez. Je sais me retrouver sur le grand océan. Je sais où, car je l’ai appris, je sais sous quel astre se trouve tout les terres connus. Je connais les chemins d’étoiles, les oiseaux, tous les signes… Sans voir le ciel pendant trois jours, je trouve une place étroite entre de roche. C’est la houle qui me guide. Te Lapa m’aide aussi, les éclairs sous l’eau qui dansent en profondeur. On voit toutes sortes de lumière la nuit quand on est seul en mer. Les reflets de la lune et des constellations, ça tremble en surface. L’éclat jaune vert qui brille là où l’eau brasse dans le sillage du Vaka, ou quand les poissons jouent avec les vagues. Les feux des hommes qu’on aperçoit très loin, les objets enflammées qui traversent le ciel…