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Traduit de l’hébreu par Rosie Pinhas-Delpuech.

Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard.

4
Superbe BD et excellent moment de lecture. Comme je suis déçue que cette BD n’ait pas reçu un coup de cœur ! Malheureusement, je ne l’avais pas encore lue et je n’ai pas pu la défendre.

Les personnages sont très proches de la réalité et si j’aime cette BD ou roman graphique, c’est que le dessin est indispensable à la qualité du récit. La grand-mère juive est drôle et tellement vraie ses expressions de visages en disent plus que de longues pages de romans. Dès les premiers instant, on comprend sa personnalité lorsqu’elle ne veut pas jeter sa bouteille d’eau au contrôle avant de prendre l’avion. Elle préfèrera boire un litre et demi d’eau plutôt que de la jeter, quand on connaît le confort des toilettes dans l’avion, c’est un acte de pur inconscience ou d’héroïsme. Sa petite fille est une jeune israélienne de son époque qui n’a pas l’habitude de se laisser dicter sa conduite. Avec sa grand-mère, elles sont venues voir s’il était possible de récupérer des biens en Pologne.

L’histoire aurait pu être tragique, elle est surprenante et dépeint très bien les mémoires des personnes très âgées. Les secrets de famille qui n’en sont pas vraiment ont pesé lourd dans le passé de cette vieille grand-mère. Son voyage n’avait pas le but que l’on croyait mais il était indispensable qu’elle revienne à Varsovie. La façon dont cette BD nous fait découvrir Varsovie est originale et très vivante. Les jeunesse juive doit se retrouver à 100 % dans l’œuvre de Rutu Modan.

Mieux qu’un long roman, cette BD nous dit beaucoup sur l’amour et le poids des souvenirs douloureux sans jamais tomber dans le pathos. Un superbe exemple de l’humour juif.

Citation

Je l’ai fait pour agacer Tzilla. La seule chose que les juifs aiment plus que l’argent, c’est la provocation.

On en parle

chez Keisha et Aifelle

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4
J’ai reçu beaucoup de livres pour mon anniversaire, celui-ci, je le dois à mon fils. C’est un livre étonnant, à la fois drôle et tragique comme doit l’être la vie des Africains à Paris. « Debout-payé » c’est le nom que l’on donne aux vigiles en africo-français. Quelle inventivité dans la langue ! un sens de la formule que j’avais déjà trouvé chez Alain Mabanckou. Le roman est divisé en deux parties. Une première partie constituée par les remarques et observations quasi scientifiques (au moins dans la forme !) des vigiles à l’entrée des magasins surtout de Sephora ; et une seconde par les récits de Ferdinand, Kassoum et Ossiri trois Ivoiriens qui nous font découvrir leur passé et leur façon de vivre en France.

Être vigile (donc noir dans 90 % des cas) développe un sens aiguë de l’observation, notre société vue à travers le regard des vigiles est pour le moins étonnante quand elle ne vous fait pas éclater de rire. Toutes les nationalités qui se pressent dans les enseignes des Champs Élysées ont leurs façons de se comporter dans les temples de la société de consommation. Toutes les femmes se pâment devant le « numéro 5 » de Chanel qu’il faut donc protéger des mains trop baladeuses et éviter que les flacons se retrouvent dans les endroits les plus insolites sans passer aux caisses. Un vigile voit tout mais pas particulièrement les vols contre lesquels il est très impuissant, il remarque donc : les modes vestimentaires, les inscriptions sur les tee-shirt, les types physiques selon les origines et les réactions de chacun face au bip bip du portail qui annonce que vous êtes sorti sans payer un article… Et quand il a de l’esprit, il nous fait souvent sourire. Il voit aussi comment est organisé le magasin, et malheureusement pour lui, il entend à longueur de journée une musique insipide. J’ai eu envie de noter toutes ses remarques tant elles étaient pleine d’humour.

Et puis l’autre partie du livre raconte la vie de ces vigiles africains dans ce qui reste des cités étudiantes ivoiriennes où on loue une place pour s’allonger une partie de la nuit à celui qui a sous-loué une partie de la chambre au locataire. On découvre des personnalités étonnantes au passé très divers. Et un mode de vie en marge de notre société que l’on peut deviner sans la connaître vraiment quand on passe dans certains quartiers de Paris. Rien n’est facile et la lutte pour faire sa place et survivre n’est pas simple. Le regard sur la population africaine à Paris est vraiment passionnante , un regard drôle et plein de moqueries.

Ce livre est important pour comprendre la présence africaine en France, ce n’est pas le sujet mais on se demande pourquoi les Ivoiriens se donnent tant de mal pour venir en France alors qu’ils y vivent dans des conditions si difficiles. On a l’impression que rien ne peut les empêcher de venir alors que pour certains, ils avaient plutôt une bonne profession dans leur pays. Et le plus important, après avoir lu « Debout-payé » on regarde, enfin, les vigiles comme des êtres humains.

Citations

Difficulté de devenir vigile

Nom, prénom, sexe, daté et lieu de naissance, situation matrimoniale, numéro de sécurité sociale. Etc. Ce sera l’épreuve la plus exigeante de la matinée.

Sens de l’observation

En Chine, il paraît que le mot « fesse  » n’existe pas. Là – bas, on dit « bas du dos » . On ne peut inventer un mot pour une partie du corps qui n’existe pas.

Remarque pertinente

CHINOIS. Avec la quantité énorme d’habits fabriqués au pays de Mao, on peut dire qu’un Chinois dans un magasin de fringues, c’est un retour à l’envoyeur

Présence du voile

En trois heures de vacation, le vigile a compté plus de femmes voilées dans Sephora qu’en six mois dans tout Belleville.

La religion qui unit toutes les femmes

Sephora est la Mecque et le stand de Christian Dior, la Kaaba autour de laquelle tournent les femmes , arabes ou non, voilées ou pas, au nom du saint parfum.

Le petit clin d’œil au « fessologue » d’Alain Mabanckou

Bien qu’on puisse en dégager quelques grands groupes, la forme des fesses est aussi unique qu’une empreinte digitale. Quand le vigile se met à penser à ce qui se passerait dans les commissariat si c’était ce système d’identification qui avait été choisi par les pouvoirs publics.

La militante africaine, fière de son continent

Comprenez bien les enfants, on ne peut pas être indépendants quand même ce qu’on mange vient de qui nous aliènent.Une grande partie de la richesse nationale retourne en occident par l’achat des tonnes de blé dont nous avons besoin pour satisfaire le caprice du pain. Comprenez bien les enfants, le pain est un caprice alimentaire, un complexe alimentaire, un mimétisme alimentaire, un traumatisme alimentaire. Le pain est tout ce que vous voulez sauf une denrée de subsistance pour nous . On n’est pas au Sahara. ici si tu jettes n’importe quelle graine par terre et sans même te baisser une seule fois dessus, elle devient un baobab en six mois ! Imaginez tout ce qu’on pourrait faire avec tout l’argent du blé qu’on donne à des paysans blancs.

On en parle

Deux blogs trouvés chez Babelio : Fils de lecture et Ollie. Et Jérôme

les supremes

Traduit de l’américain par Cloé Tralci avec la collaboration d’Emmanuel et de Philippe Aronson.

4

En bateau, lire n’est pas toujours facile, entre les manœuvres et le mal de mer, le temps de la navigation est plus propice aux beaux paysages qu’à la lecture. Heureusement, en octobre , les jours sont courts et les escales assez longues pour profiter d’un bon roman. J’avais choisi celui-ci à la médiathèque, car j’avais lu sur mes blogs amis des critiques positives. Le moins que je puisse dire, c’est que je ne regrette pas mon choix.

Le début est déroutant, car on passe de l’une à l’autre des trois amies et l’on doit faire un effort pour savoir qui est « je ». Odette qui comme sa mère converse avec les fantômes et qui devra lutter contre le cancer ou Barbara-Jean qui noie dans l’alcool ses drames trop violents pour une femme , même si elle est la plus belle de la ville ou Clarice mariée au trop beau Richmond. Mais peu à peu se dessine la vie de ces femmes . Plus que l’intrigue quelque peu romanesque, c’est la description de l’amitié de ces trois femmes qui m’a fait adorer ce roman, et puis, j’ai souri souvent et ri parfois.

Le mariage de la fille de Veronica qui devait être l’événement le plus sensationnel de l’année restera dans tous le souvenirs mais sans doute pas pour les raisons qui ont fait dépenser des fortunes aux parents de la mariée.Les différences entre les différentes églises m’ont amusée et l’épisode de la prostituée qui croit avoir entendu le seigneur lui parler est un bon moment .La vie à Plainvieuw tourne autour des églises et du café restaurant de Little Earl où se retrouvent les trois suprêmes avec leur mari. Et inénarrable Minnie qui prédit l’avenir se trompe tout le temps et d’un égoïsme à toute épreuve. La façon dont elle annonce la mort de son mari aux enfants de celui-ci est absolument inoubliable. Les langues vont bon train dans ce café et les scènes souvent cocasses se suivent , le rire n’est jamais très loin des larmes. C’est une peinture réconfortante pleine d’humanisme , peut être trop de bons sentiments, mais ça ne m’a pas gêné.

J’ai aimé lire que si Edward Kesley Moore avait écrit ce roman c’est qu’il ne retrouvait pas dans la littérature Nord-américaine le caractère des femmes qui l’avaient élevé. Si les femmes qu’il a connues ressemblent à celles de ce roman , je trouve qu’il a bien de la chance , et qu’être noir aux USA , n’est donc pas synonyme de malheur.Depuis la présidence d’Obama on s’en doutait un peu.

Citation

Un portrait de Jésus à vous faire aimer les églises

Ce qui est frappant dans cette fresque, c’est le portrait de Jésus – le plus sexy que j’ai jamais vu. Il a les pommettes saillantes, et des cheveux de jais bouclés. Ses bras bronzés et musclés se tendent vers vous, et il a le ventre aussi ferme que celui des mannequins brésiliens qui posent en sous – vêtements dans les publicités. Sa bouche semble souffler des baisers vers l’assemblée, et sa couronne d’épines légèrement penchées sur le côté Lui donne un air décontracté à la Frank Sinatra.

L’humour et l’amitié

Clarice farfouillait dans la commode de sa meilleure amie à la recherche d’un truc pour embellir, voire dissimuler la robe hideuse qu Odette ne manquerait pas de porter ce soir – là. La grand – mère aveugle qui avait confectionne tous ses vêtements quand elle était petite avait beau être morte , son sens du style perdurait dans les tristes placards de sa petite fille.

Un sourire qui m’a rappelé celui de Madame Verdurin

Florence souriait également, même si avec elle il était toujours difficile d’en avoir la certitude. Depuis des années, elle arborait une expression grimaçante qui relevait d’avantage du dégoût que de la joie . Chez elle, les zygomatiques étaient atrophiés depuis longtemps. Quoi qu’il en soit, son rictus habituel paraissant moins agonisant ce jour là.

On en parle

Les fanas de livres (qui a plus de réserves que moi) Audouchoc qui n’a pas aimé, Cathulu qui a aimé autant que moi.

Écoutez « Les Suprêmes »

https://www.youtube.com/watch?v=izzKUoxL11E

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Je n’ai pas de mots assez forts pour te dire merci Dominique. 

5
J’ai adoré ce livre, c’est drôle, insolent, rempli de trouvailles qui m’ont enchantée. J’avais lu dans les commentaires d’une de tes lectrices que Michel Volkovitch était beaucoup plus intéressant. Encore une fois, la comparaison m’exaspère : ce sont deux auteurs totalement différents réunis par l’amour des langues, je comprends qu’on les associe, mais pas qu’on cherche à les évaluer l’un par rapport à l’autre. Cependant, je n’en veux pas trop à l’auteure de ce commentaire puisqu’elle m’a permis de découvrir Michel Volkovitch.

Il est rare qu’un livre me fasse éclater de rire mais j’ai pouffé plusieurs fois. J’espère que comme moi, vous serez sensible aux charmes et au dangers de la langue Najavo :

En navajo qui n’a jamais chipé un seul verbe à aucune langue étrangère, le refus de principe de l’emprunt aboutit à des résultats certes décoratifs, mais discutables du point de vue de l’efficacité communicationnelle : ainsi « tank » se dit chidinaa’na’ibee’eldoohtsohbikàà’dahnaazniligii, littéralement « voiture qui glisse sur le sol avec de gros fusils dessus. Il est probable que dans la pratique, les Navajos recourent à l’anglais pour le genre de conversations où l’on a à mentionner un tank – c’est une bête question de sélection naturelle : le temps de s’écrier « gare le tank arrive » , l’obstiné navajophone est déjà réduit à l’état de crêpe Suzette, dans l’indifférence de ses compagnons d’armes plongés dans leur dictionnaire.

J’ai retrouvé en le lisant l’ambiance iconoclaste des séminaires de linguistique générale de mon université. Enfin, quelqu’un qui explique le plaisir de la langue, bien loin des stériles discussions sur ce qu’il faut dire ou ne pas dire, qui font tellement plaisir au tout petit monde des gens « comme il faut », qui pensent qu’être bon en grammaire française c’est savoir dire « déjeuner » ou « dîner » et non pas le si vulgaire « manger ». Tout à coup le monde entier est là dans toutes sa diversité, on ne peut plus se hausser du col avec notre si belle langue française, si difficile à apprendre que le monde entier nous envie. D’ailleurs, allez-y, essayez donc de gagner la chaussette mise en jeu au concours de la langue la plus difficile à prononcer :

 Voici comment on dit « J’ai vu un animal de ce type » en kalam, une langue papoue de Nouvelle-Guinée orientale : Knm nb ngnk. Toute personne capable de prononcer cette phrase gagnera une chaussette d’archiduchesse séchée sur une souche sèche.

Il existe donc, des langues tellement plus redoutables à apprendre que le français, à commencer par le basque si proche et si loin de nous, l’esprit humain est également réparti dans le monde entier, divers et si riche que j’en suis restée baba.

De l’esprit, Jean-Pierre Minaudier n’en manque pas mais je ne crois pas que cela me conduise à lire toutes les belles grammaires dont il nous a parlé. Et il est vrai que pour ceux qui ne se posent aucune question sur la langue, ce livre aura quelques passages difficiles, au milieu de moments vraiment joyeux accessibles pour tout le monde grammairien ou non.

Citations

Règlement de compte du linguiste amoureux des langues existantes

Je trouve l’espéranto hideux et grotesque avec son look de patois latin dégénéré, une langue prétendument mondiale moins parlée que le lituanien ou le danois après plus d’un siècle d’existence me semble avoir complètement er sans doute définitivement manqué son objectif.

Les Français du XVIIe ont simplifié certains noms indiens, on peut les comprendre !

Chief Joseph était tout simplement Hinmahtooyahlatkekht en nez -percé. 

Les genres, réflexion d’un Estonien qui n’a pas de genre dans sa langue

Pourquoi diable « un laideron » est-il toujours une femme, et une sentinelle presque toujours un homme.

Difficulté du travail de l’ethno-linguiste

 Frauke Sachse partie étudier le xinka, une langue moribonde du Guatemala, s’est heurtée à une mauvaise volonté générale doublée d’un mercantilisme déchaîné : l’un de ses informateurs potentiels prétendait lui soutirer 10 $ par mot ! Parmi la poignée de derniers locuteurs, certains ont refusé de travailler ensemble, c’est à dire de se parler, suite à des conflits : la zone sortait d’une guerre civile

 Enfin, grâce à ce livre, j’ai trouvé ma langue idéale (il faut dire que je suis un peu fâchée avec la droite et la gauche !)

 L’étude des grammaires nous apprend encore que les concepts de droite et gauche, qui sont relatifs (on est toujours à droite ou à gauche de quelque chose et n’ont rien d’universel : certaines langues possèdent des systèmes d’orientation absolus , comme le taba, langue austronésienne parlée au large d’Almahera, en Indonésie, où l’on distingue « le côté mer » et le « côté de la terre » (les locuteurs du taba habitent les côtes d’une île , laquelle est ronde -il ne s’agit donc pas de points cardinaux). On ne dit pas « Les cigarettes sont à gauche (ou à droite) de la chaise  » mais Tabako adia kurusi ni lewe lema, « les cigarettes sont du côté de la terre par rapport à chaise ; ou Tabako adiia kurusi ni laema pope, « les cigarettes sont du côté de la mer par rapport à la chaise : chacune de ces deux phrases veut dire « à droite  » ou » à gauche » selon la position du locuteur.

 

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U9782330051228Traduit du chinois par Angel PINO et Shao BAOQING.
Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard.

4Très joli roman qui permet un voyage dans la Chine d’aujourd’hui et d’autrefois et dans l’âme d’une femme d’une belle et riche personnalité. Mingli, 40 ans, n’a plus de nouvelles de sa fille Rongrong, et elle sait, elle le ressent au plus profond d’elle même que ce n’est pas normal. C’est une femme consciencieuse chercheuse dans un laboratoire médical, appréciée de tous. Elle n’a pas l’habitude d’imposer sa volonté, mais pourtant rien ne la fera reculer, elle doit savoir ce qui est arrivé à Ronrong. Elle le doit au nom de ses engagements du passé : son amitié avec la mère de Rongrong qui a sombré dans la démence.

Elle va donc être confrontée à la Chine « communo-capitaliste », et refait un parcours sur ce qui a été sa vie. « Les Sentinelles des blés », c’est un hybride de blé , découvert par son père un grand savant dont la mort est tout un symbole : il était parti chercher des livres importants pour lui, à son retour il est tombé dans les égouts dont un voleur avait, entre temps, volé la plaque qui les obturait.. Les souvenirs des Sentinelles des blés reviennent dans le roman, comme des moments de pureté dans un pays où la corruption atteint à peu près toutes les couches de la société. Même son mari qui l’aime bien, et qui ne pensait pas qu’elle puisse avoir une volonté autre que la sienne touche des petits pots de vin en utilisant les qualités de chercheuse de sa femme.

Un beau voyage , d’une rare émotion.

Citations

Une femme qui ne sait pas s’imposer

Or Yu Shijie refuse de m’entendre. Il voudrait que je sois une femme ouverte. Certes, mais ne le suis – je pas déjà ? Petit à petit, entre nous deux, un pli a été pris, qui fait que, depuis des années, chaque fois que je m’exprime ou que j’agis selon mes sentiments, il s’empare du problème et le dissèque en deux temps trois mouvements, comme un boucher qui manipule une carcasse de porc. L’animal est suspendu à un croc, et la moindre partie de son corps s’offre à la vue:la viande, les os, les tripes, tout est clair et net. Mais moi , je ne ressens plus rien, j’en oublie même ce que j’avais voulu dire au départ.

 

 

4 J’ai passé une excellente soirée au cinéma grâce à Jean Becker. Les acteurs sont excellents, Gérard Lanvin joue un rôle de grincheux qui lui va comme un gant. Si vous voulez vous détendre n’hésitez pas un instant , cela m’étonnerait que vous soyez déçus. Bien sûr ce n’est pas le chef d’œuvre du siècle, mais c’est un film sympathique qui fait du bien.

Je n’ai qu’une réserve, le personnage du kiné me semble trop caricatural. C’est bien l’esprit, mais pas la manière , du moins à ma connaissance. Je trouve que dans une époque morose, sourire et parfois rire ça fait un bien fou. Peut-être, certains reprocheront-ils les « Happy-end », mais il y a des moments où on souhaite de toutes ses forces que les rapports entre les gens fonctionnent un peu comme ça !

Bande annonce

Si vous êtes comme moi ne la regardez pas : je préfère ne pas regarder les bandes annonces, elles dévoilent trop de choses sur le film :

 

Photo prise sur son site que je vous recommande même s’il est très fouilli http://www.volkovitch.com/

5
Après avoir lu les blabla de Michel Volkovitch, plus jamais vous n’oublierez de mettre le nom du traducteur quand vous présenterez un livre étranger. Je suis arrivée vers ce livre grâce à un commentaire après le billet de Dominique à propos du livre « Poésie du Gérondif » de Jean-Pierre Minaudier , un des commentaires disait que dans le genre , les livres de Michel Volkovitch était bien meilleur. Comme je possède la liseuse Kindle, j’ai pu pour une somme modique acheter cet ouvrage et le moins que je puisse dire c’est que je me suis régalée. Toutes les réflexions à propos de son métier sont passionnantes. Traduire, c’est à la fois se mettre au service d’une œuvre , se l’approprier et la retranscrire dans une autre langue.

Commençons par son auto portrait

« Pour le traducteur disons plutôt : sans humilité on ne va nulle part. Sans orgueil on ne va pas loin. Certains écrivains ne sont présents qu’à eux mêmes . Le traducteur un écrivain qui écoute. Peut-on bien traduire sans être généreux ? »

Je n’avais jamais pensé à quel point le rythme et les sonorités pouvaient avoir une telle importance. Bien sûr Michel Volkovitch traduit souvent de la poésie, mais cela est vrai aussi pour la prose, il en donne des exemples très parlants. Son livre est rempli de détails amusants . Comment par exemple utiliser l’image d’une femme mante religieuse en portugais , quand on sait que dans cette langue l’animal est surtout symbole de fragilité et de l’éphémère ?

J ai beaucoup aimé, également la façon dont il se moque des débats des universitaires à propos des différentes théories de la traduction. J ‘y ai retrouvé tous les travers que je connais trop bien des enseignants intolérants et enragés dès qu’il s’agit de prétentions intellectuelles. Comme lui, j’ai souvent pensé que : « S’il n’est pas un peu théoricien le praticien n’ira pas loin. Mais s’il n’est pas un un peu praticien , le théoricien n’ira nulle part. »

Hélas ! ces théoriciens remplissent les discussions entre universitaires français. La langue qui lui semble le plus difficile à traduire c’est l’anglais. Le français semblent souvent fade et plat à côté des formules rapides et incisives anglaises. Il dit que « sur le plan de la nervosité et du swing, l’anglais est la reine des langues et le français traîne derrière en s’essoufflant. »

A propos des différentes versions et de la censure voici le genre de détails qui me font éclater de rire

« La véritable apologie de Socrate de Costas Varnalis, dans une version anglaise de 1955 le grec dit « Ils s’enivrent et se roulent dans leur vomi ». L ‘anglais :« ..ils se roulent dans la boue ». Le grec : « ils se curent le nez et collent la morve sous leur siège ». L’anglais : « Ils se raclent la gorge ».

Traduit de l’anglais (Canada)par Jacqueline Huet et Jean-Pierre Carasso

PS. : Je suis un peu étonnée par certaines formulations un peu relâchées, sont elles voulues par l’auteur ou un effet de traduction ?

4Je ne suis visiblement pas la seule à n’avoir pas entendu parler d’Alice Munro avant l’attribution de son prix Nobel. Mais quelle écrivaine, comment puis-je lire très régulièrement et passer à côté d’une telle auteure. Je ne suis pas une adepte des nouvelles mais je ne peux que vous recommander : « Fugitives » , ces huit femmes ne sont pas prêtes de vous quitter. Je suis mal à l’aise avec les nouvelles car je n’aime pas passer de l’une à l’autre. Je reste imprégnée par l’atmosphère de la précédente quand je lis la suivante et dans ce recueil ,il ne le faut pas. Chaque destin est différent, ils n’ont en commun que d’être celui de femmes qui fuient, ou, parfois, n’ont qu’envie de fuir un destin qui n’est pas tout à fait le leur.

Tout est dit avec beaucoup de pudeur, sans drames inutiles, à la manière de la vie ordinaire. Ça fait mal, parfois, mais ça passe , tout passe n’est ce pas ? Même la séparation brutale avec un enfant adulte ; comme cette Pénélope qui a rompu complètement avec une mère folle de douleur et d’incompréhension et qui en vieillissant « continue à espérer un mot de Pénélope, mais sans aucun acharnement. Elle espère comme les gens espèrent sans se faire d’illusion des aubaines imméritées, des rémissions spontanées , des choses comme ça. ».

J’ai lu et relu « Passion » le personnage de Grace m’a complètement bouleversée. Cette jeune femme aurait pu devenir une réplique de la jeune américaine classique , un homme passe, dangereux et alcoolique , mais elle franchit grâce à lui le pas nécessaire pour sortir de la voie toute tracée du destin , on peut penser qu’ensuite elle vivra pour elle et non pas pour l’image qu’elle veut donner d’elle.

J’ai évidemment été très émue par le destin de Robin qui a raté de si peu sa véritable histoire d’amour.
Tout cela est important mais dit si peu du talent de cette auteure qui sait mettre en scène des ambiances, des personnalités , aucun personnage n’est bâclé, tous retiennent notre attention et nous rappellent des gens que nous rencontrons dans la vie.

La dernière nouvelle « Pouvoir » m’a légèrement déçue. Mais justement ,c’est cela qui m’agace si fort dans les nouvelles : on a du mal à ne pas les comparer les unes aux autres .

 Citations

Vision de la femme, vision de l’homme :

Mme Travers avait fait un premier mariage avec un homme qui était mort. Elle avait gagné sa vie et entretenu son enfant , en enseignant l’anglais commercial dans une école de secrétariat . M Travers quand il évoquait cette période de la vie de sa femme avant leur rencontre en parlait comme d’une épreuve presque comparable au bagne, que pourrait à peine compenser une vie entière d’un confort qu’il était heureux de procurer. Mme Travers elle-même n’en parlait pas du tout de cette façon.

Réaction de Grace après avoir vu Elizabeth Taylor dans « Le père de la mariée » :

Grace ne pouvait expliquer ni tout à fait comprendre que ce n’était pas de la jalousie qu’elle éprouvait , en définitive, c’était de la rage. Et pas parce qu’il lui était impossible de courir les magasins ou de s’habiller comme ça. C’était parce que les filles étaient censées ressembler à ça. C’était ainsi que les hommes -les gens , tout le monde- pensaient qu’elles devaient être. Belles, adorables, gâtées, égoïstes , avec un pois chiche à la place du cerveau. C’était ainsi qu’une fille devait être pour qu’on en tombe amoureux . Ensuite elle deviendrait une mère et se consacrerait tout entière à ses enfants avec une affection baveuse. Elle cesserait d’être égoïste mais garderait son pois chiche à la place du cerveau. À tout jamais.

Fragilité masculine :

Les femmes ont toujours quelque chose à quoi se raccrocher pour continuer. Quelque chose que les hommes n’ont pas.

Toujours vrai :

« Petite » Ginny est au moins aussi grande que lui et l’envie m’a démangée de le lui dire. Mais c’est extrêmement rosse de parler de taille avec un homme tant soit peu déficient dans ce domaine et je suis donc restée coite.

 On en parle

« Les fanas de livres  » blog que je lis régulièrement.

Traduit de l’italien par Danièle VALIN
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Les raisons pour lesquelles le billet de Dominique m’a fait lire ce livre, deviendront peut-être les vôtres et vous vous précipiterez vers ce roman. Allez, une fois n’est pas coutume, je commence par le seul point faible, selon moi, de ce ce merveilleux récit. Je n’arrive pas trop à adhérer à un aspect des deux personnages féminins, d’une beauté telle que tous les hommes chavirent devant elles ! Leur beauté extraordinaire et leur côté femme fatale ne m’ont pas convaincue.

Mais peu importe, le roman vous emportera comme tous ceux ,et toutes celles, qui l’ont plébiscité vers le Haut-Adige ou Tyrol du sud. Comme beaucoup, je ne savais rien de cette région offerte à l’Italie en 1918 , en compensation de la guerre 14/18, cette province autrichienne n’avait jamais été italienne. On imagine la stupeur des habitants- de pauvres paysans montagnards- qui se trouvent confronter à un monde italien qui, hélas pour eux, devient fasciste peu de temps après ! Le choix pour les habitants devient une véritable horreur : devenir fasciste italien ou revendiquer son appartenance à l’Allemagne nazi ! !

Là, je me suis dit, mais comment faire pour rester humains, simplement humain ! Le roman raconte cela et toutes les conséquences, jusqu’à l’assassinat d’Aldo Moro. Oui, toute l’histoire de l’Italie est là devant nos yeux mais vu de cette petite région qui n’avait rien demandé à personne. Les fils de la grand histoire se tressent avec la petite histoire de Gerda et de sa fille Eva, élevée sans père puisque l’auteur de ses jours n’a pas daigné la reconnaître, Eva est une femme libre qui mène sa vie sans rien devoir à personne sauf à sa mère qui s’est battue pour elle. Fille mère, c’est encore un scandale en Italie dans l’Italie des années 60. Eva traverse en train toute la botte italienne pour rejoindre celui qui aurait pu être un père pour elle : Vito , le carabinier italien qui a aimé Gerda la cuisinière tyrolienne. Aucun personnage n’est caricatural et le bien et le mal ne sont pas toujours faciles à reconnaître.

Que de personnages torturés, que de violence cachée et que de souffrances, tout cela parce que cette partie du Tyrol a été offerte à une Italie qui ne la demandait pas !

Citations

Aujourd’hui, un pays aux deux cultures

Après Sterzing/Vitipendo, un peu avant de sortir à Franzensfeste/Fortezza, Carlo s’est arrêté à l’Autobahnraststätte/Autogrill et nous avons mangé un belegtes Brötchen/sandwich.Puis nous avons quitté l’Autobahn/autoroute et nous avons payé au Mautstelle/péage Dans sa Volvo qui heureusement est suédoise et ne se traduit donc ni en allemand ni en italien . Bienvenue dans le Südtirol/Alto Adige, royaume du bilinguisme.

L’après guerre

Nazi, collabo, délateur, criminel de guerre, konzentrationslagerführe : ce n’étaient pas des mots mais des grenades qui n’avaient pas explosé, que l’on contournait sur la pointe des pieds , pour ne pas déclencher une détonation plus terrible, celle de la vérité.

La civilisation de l’argent

Italiens, Allemands ou Autrichiens étaient tous égaux pour Paul Staggl, du moment qu’ils laissaient leur argent dans les caisses des hôtels. Il avait compris bien avant la plupart de ses compatriotes que l’argent, non seulement n’a pas d’odeur, mais n’a pas d’ethnie non plus.

On en parle

chez Mango et Dominique

Traduit de l’anglais (des États-Unis) par Hélène Hinfray.
Avant propos de Mario Pasa.

3Si je cite l’auteur de l’avant propos , c’est qu’il raconte si bien à la fois ce livre et la personnalité de son auteur. C’est suffisamment rare pour être souligné. Il a bien de la chance , Mario Pasa de connaître Bill Bryson, on sent, en effet, sa sympathie pour un auteur hors du commun. Bill Bryson est un boulimique de connaissance et il sait les transmettre. Le projet de ce livre, c’est donc à partir de sa maison , un ancien presbytère britannique, retrouver l’histoire du monde.

On apprend donc beaucoup, sinon tout, sur les briques, le fer, l’acier,le téléphone, les toilettes, la propreté , les maladies, la condition ouvrière… On y croise des noms très connus : Eiffel, Darwin, Thomas More , Jefferson… et des noms beaucoup moins connus fort injustement. J’ai été , encore une fois, très étonnée de voir combien il est difficile de faire accepter les progrès en médecine. Deux exemples :

  • le scorbut , plusieurs personnes avaient fait la relation avec l’alimentation privée de produit frais sur les navires partant pour de longs mois. Mais il y avait toujours quelqu’un pour nier l’évidence et les pauvres marins continuaient à mourir, alors qu’il suffisait de les nourrir différemment.
  • La fièvre puerpérale , très vite on s’est rendu compte que la propreté des mains et des instruments des chirurgiens avait un rapport avec la mortalité des femmes , mais avant que ces messieurs acceptent de se laver les mains avant de s’occuper d’une parturiente , il a fallu tant de morts.

Évidemment avec Bryson on ne s’ennuie jamais et on s’amuse beaucoup quand on ne se révolte pas. Encore une fois, on voit que a condition ouvrière du début de l’ère industrielle est particulièrement horrible surtout pour les plus faibles : les femmes et les enfants.

J’ai deux petites réticences , mais qui n’ont absolument pas entaché mon plaisir.

  • J’ai eu parfois une impression de redite , avec son livre , « une histoire de tout ou presque » et d’autres livres que j’ai lus , en particulier sur la condition ouvrière du XIX° siècle .
  • Le rapport de ce qu’il raconte avec les pièces de la maison est, le plus souvent, tiré par les cheveux.

Citations

Je pourrai recopier tant de passages…. je n’en choisis qu’un

De toutes façon, le christianisme a toujours été curieusement mal à l’aise avec la propreté, et la tradition a très tôt assimilé sainteté et saleté. Quand Saint Thomas Becket rendit l’âme en 1170, ceux qui firent sa toilette notèrent en termes approbateurs que ses sous-vêtements « grouillaient de vermine ». Au Moyen Age, faire le vœu de ne jamais se laver était un moyen quasi infaillible de s’assurer une gloire éternelle . Beaucoup de gens, par exemple, faisaient à pied le pèlerinage d’Angleterre en Terre sainte, mais un certain moine Godric, qui l’effectua sans se débarbouiller une seule fois, ne pouvait que devenir saint Godric- c’était couru d’avance.

On en parle

Je n’ai pas encore lu de billets sur ce livre mais cela ne saurait tarder, je mettrai alors un lien