20160203_171252Du club de lecture de la médiathèque de Dinard.

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Dans la famille Fournier vous avez le père, alcoolique et médecin, le petit fils aîné handicapé mental, le second handicapé aussi, la petite fille vivante et religieuse, la belle fille aimée du fils mais décédée beaucoup trop tôt, vous allez découvrir la mère celle qui a engendré Jean-Louis un écrivain qui fait du bien car il sait raconter des choses tristes sans faire pleurer. Il fait revivre sa mère, par petites touches et donne corps à la photo de la couverture que le temps a blanchi. Sa mère avait tout pour être heureuse, une curiosité du monde, un intérêt pour les êtres humains, mais voilà, son mari était alcoolique , il a failli faire couler toute la famille. Alors la jeune fille bien élevée, qui aimait Chopin, le théâtre et la littérature a dû ramer sec pour que ses enfants surnagent et finalement traversent l’océan de la vie sans sombrer quelque soit la force des vents contraires et la hauteur de la houle. Elle a réussi et son fils écrivain sait lui rendre hommage.

C’est une femme du Nord de « bonne famille » donc digne et un peu froide, qui cache bien ses sentiments, elle a pris l’habitude de sauver les apparences, mais derrière ce courage se cachait un cœur sensible que son fils nous fait mieux connaitre à travers un livre placé tout entier sous le signe de la métaphore marine.

PS : il a reçu un coup de coeur sans aucune hésitation à notre club de lecture.

Citations

Je recopie un passage, j’aurais pu en prendre un autre ils ont tous cette saveur

Ma mère est montée dans la voiture, elle s’est assise, elle attend. Elle attend quelqu’un ?

ça dure. Elle n’a pas l’air impatient. Elle regarde les arbres, la rue, elle rêve.
Puis, soudain elle s’étonne de ne pas avancer.

Par distraction, elle s’était installée à la place du passager. Comme si elle attendait un chauffeur.

Notre mère n’a jamais eu de chauffeur. Elle a toujours été aux commandes. C’est elle toute seule qui a dû conduire sa vie, et la vie des autres. Elle n’a jamias pu compter sur son mari, il était irresponsable. C’est elle qui a tenu le volant pendant toute la route.

Elle a conduit prudemment. Elle devait faire attention, derrière il y avait quatre enfants et, dans le coffre un mari qui ronflait.

Elle nous a mené à bon port.

L’humour particulier face au malheur

Avec un capitaine Haddock comme notre père, le bateau Fournier aurait eu toutes les chances de sombrer. Heureusement, notre mère avait toujours été là, elle avait tenu la barre fermement.

20160131_130735_021Traduit de l’américain par Béatrice Vierne. Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard dans le thème découverte de l’Ouest américain.

J’adore la dédicace de ce livre :

Le livre que voici est dédié à Marguerite Cole Moomaw qui combattit à mes côtés dans la guerre des Gaules. Épaule contre épaule, nous avons lutté contre Jules César et les légions romaines à l’école de Whitefish, tout au long de l’année scolaire 1919-1920.

4Dans une préface très agréable à lire, car elle rend très présente Dorothy Johnson, Michel Le Bris m’a appris que cette écrivaine était, non seulement une journaliste respectée, une professeure admirée mais aussi l’auteure des nouvelles dont ont été tirés de très bons Western : « la colline des potences  » et « L’homme qui tua Liberty Valance ».

À travers de courts chapitres, l’auteure égrène ses souvenirs et peu à peu tous les aspects de la vie de ce village s’animent. Les temps sont rudes, et les distractions assez rares, mais cela n’empêche pas un vrai bonheur de transparaître à travers différentes anecdotes. Les enfants sont livrés à eux mêmes et trouvent dans la nature de quoi satisfaire leurs envies d’aventures.

Pour gagner quelques subsides, ils mèneront une chasse acharnée aux boites de conserves qui serviront à reboucher les trous dans les routes défoncées du village. Ils suivent avec passion le policier qui est aussi l’homme qui manie la dynamite pour enlever les souches. Ils apprennent à nager tout seuls dans des lacs superbes mais glacés. Ils courent le long des voies ferrées. Ils chassent et mangent le produit de leur chasse. Ils se méfient des étrangers surtout quand ils parlent mal l’anglais (comme ces Français qui ne savent pas prononcer le nom de leur capitale qu’ils appellent « Paree »). Cette auteure sait mettre de l’humour dans ses récits, son dialogue avec les poules est inoubliable, ainsi que ses différentes expéditions de camping. C’est un livre revigorant d’une époque révolue qu’elle sait ne pas trop regretter mais qui lui a forgé un satané caractère. Celui dont elle a eu besoin pour se battre dans la vie.

Citations

L’argent de poche

Il n’y avait aucune source fiable de revenus pour le jeunesse, voilà tout. Les commissions (les gens n’avaient pas besoin de téléphone – ils avaient des gosses) se faisaient gratis pour la famille et moyennement finances, à l’extrême rigueur pour les voisins, – à raison de cinq cents s’ils étaient économes et dix s’ils étaient prodigues.

Les distractions

À l’époque où je grandissais , les distractions de plein air avaient deux avantages : on les avait sous la main et elles ne coûtaient pas cher. On manquait de tas de choses à Whitefish, mais du grand air, on en avait autant qu’on voulait, et à deux pas de chez soi.

Les airelles

La raison d’être de ce petit voyage, selon les souvenirs d’Ella, était la cueillette des airelles. ce qui paraît logique. Il y en avait à foison, elles ne coutaient rien et elles faisaient de délicieux desserts. D’ailleurs, il fallait avoir une bonne raison de se lancer dans une pareille expédition ; à cette époque, les gens n’aimaient guère reconnaître qu’ils faisaient quelque chose uniquement pour s’amuser.

La période P.P

On pourrait appeler cette période P;P. – pré- plastique. Il n’ y avait pas de ces petits sacs ou pots transparents si commode pour empaqueter vos affaires. Pas de sachets en plastique pour ranger vos maillots de bain mouillés , vos torchons mouillés, vos tout ce que vous voulez mouillés. Pas de détergents. Ce n’était pas seulement avant le plastique ; c’était avant le Nylon, les postes à transistors, les briquets, les bombes aérosols, le papier collant, les stylos à bille et les livres de poche. Quand vous vouliez remballer vos affaires après un repas, les ustensiles étaient trop gras, trop noirs de fumée et trop chauds.

Jouir du confort

Il va sans dire qu’en tant que campeuse, je n’avais pas le feu sacré, autrement je ne repenserais pas à toutes mes expériences dans ce domaine avec un si profond soulagement à l’idée qu’elles sont définitivement révolues. D’un autre côté, si je n’avais pas de tels souvenirs, je ne pourrais pas à l’heure actuelle, jouir aussi voluptueusement des hôtels de luxe. Comment apprécier véritablement l’élégance des cocktails ou des escargots au beurre d’ail si l’on n’a jamais été au bord de la nausée en essayant de faire descendre un déjeuner de lard et de crêpes froides.

L’adolescence

D’ailleurs dans les années 1920, les adolescents n’avaient pas encore été inventés. Il y avait seulement, des grands enfants, des petits enfants et des bébés.

La belle mère

Ce n’était pas que ma mère eût une passion pour sa belle mère, une vieille dame dépourvue de tact, qui l’avait un jour remerciée de lui avoir envoyé une photographie de moi en écrivant :  » Elle vous ressemble, mais elle est néanmoins très mignonne ».

SONY DSCTraduit de l’anglais (États-Unis) par François Dupuigrenet Desroussilles (c’est très bizarre cette indication « États-Unis » car la romancière est bien typiquement britannique et son roman aussi !)

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L’enthousiasme de mes amies blogueuses a fini par gagner, j’ai commencé ma fréquentation de Barbara Pym et je me dis que ce n’est pas le dernier roman que je lis de cette auteure parce que cet essai m’a bien plu. Alors merci Keisha, Dominique, Aifelle et j’en oublie car un moment , j’ai cru voir le nom de cette auteure partout. J’ai beaucoup aimé les trois quart du récit mais la fin est décevante. Ce qui est absolument « délicieux » ce sont les descriptions des rapports des personnages de cette toute petite ville. Tout le monde se connaît, et autour d’une tasse de thé, ces dames et ces messieurs passent leur temps à faire des commentaires sur la vie des voisins. Dans cette douce ambiance, mettez un bellâtre hongrois qui ne sait rien des us et coutumes britanniques mais qui s’y connaît en femme, et voilà notre petite communauté qui s’agite se déchire et .. se réconcilie à la fin. Le personnage principal, est une femme entièrement dévouée à l’épanouissement de son écrivain de mari en panne d’inspiration. Les observations de Barbara Pym sentent le vécu.

Ce roman me fait penser à un épisode de »Dawnton Abbey au village », mais où il ne se passerait rien et sans les propos acides de Violette : ça manque un peu de méchanceté. En ce moment, c’est la littérature que je recherche , mais j’aimerais quand même un peu plus de mordant.

Citations

Sourire dès la première page

Elle se pencha pour effleurer de ses lèvres la joue de Cassandra qui lui rendit son baiser un peu gauchement, car l’embonpoint de Mrs Gower rendait sa joue presque inaccessible.

Un charme indéfinissable si britannique, j’adore ce genre de passage

Dans sa jeunesse il n’avait jamais réussi à s’engager dans une carrière, car il avait résolu très tôt de faire un beau mariage, convaincu que sa bonne mine et son allure martiale suffiraient à lui gagner le cœur de toutes les femmes. Malheureusement ses efforts n’avaient pas été couronnés de succès. On peut penser que ses avances avaient manqué de la chaleur, de la dévotion empressée, que toute jeune femme s’attend à rencontrer à cette époque de sa vie. Mr Gay, étant de tempérament naturellement froid, n’avait jamais été amoureux.

Les couples en sortie

En des lieux tels que Up Callow les épouses devaient toujours prendre au sérieux leurs maris. Au moins en public.

20160113_110627Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard, thème : roman épistolaire.

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Quoi de plus agréable qu’une petite virée dans les beaux paysages du vignoble français ? Un bon roman pour se distraire, s’amuser, sourire, s’émouvoir et même être prise par le suspens. Un roman écrit à deux et qui réussit ce tour de force d’annoncer dès la troisième ligne l’objet qui résoudrait l’énigme du roman :

Rentrant de voyage ce samedi, je trouve dans ma boîte aux lettres cette volumineuse enveloppe, portant votre adresse au dos. »

Bien sûr, je ne vais rien divulgâcher, une fois n’est pas coutume ce serait vraiment dommage, mais vous l’avez deviné, Pierre Marie Sotto à qui est destiné cette enveloppe n’ouvrira pas cette lettre et correspondra avec Adeline Parmelan. Tous deux vont peu à peu apprendre à se connaître et dévoiler une partie de leur intimité. C’est souvent très drôle et j’imagine bien le plaisir des deux écrivains à écrire un tel roman. On voit aussi notre société prendre vie tout au long de ce roman : les familles recomposées, la célébrité, les rencontres d’un soir, le deuil mais pour une fois ce n’est pas tragique.

J’ai aimé la lectrice qui veut absolument avoir une relation sexuelle avec notre écrivain, il aurait aimé nous faire croire qu’il a été pratiquement violé, heureusement, il a l’honnêteté de nous faire lire le mail de la meilleure amie de cette lectrice au fort tempérament , disons que si l’alcool a égaré son jugement, il a quand même été plus que consentant. J’ai adoré aussi le point de vue masculin (le copain de toujours de notre écrivain) sur cette femme. Bref comme je ne veux pas encourir la colère des anti-divulgâcheurs, je ne vous fais part que des anecdotes qui m’ont beaucoup amusée…

PS. : lisez la citation, vous comprendrez pourquoi je termine par ces trois points de suspension,(totalement incongrus) ! – on a le droit aux parenthèses et au point d’exclamation-

lire le billet de Krol (qui à mon avis divulgâche plus que moi)

Citations

Citation dédiée à ceux et celles qui détestent qu’on les appelle « minou »

Ma seconde femme. Je ne me rappelle plus pourquoi je l’ai épousée, mais je sais très bien pourquoi je l’ai quittée. Partout où je me sentais bien (librairies, soirées avec des amis) elle me disait : « on y va ,Minou ? » J’ai tenu 8 ans.

Les points de suspensions

Ces obsédés des points de suspension semblent vous dire : ah,si on me laissait faire, vous verriez cette superbe description que je vous brosserais là, et ce dialogue percutant, et cette analyse brillante. J’ai tout ça au bout des doigts, mais bon je me retiens. Pour cette fois ! On a envie de leur suggérer à l’oreille : laissez-vous donc aller,mon vieux ,ne muselez plus ainsi ce génie qu’on devine en vous et qui demande qu’à nous exploser à la gueule. Lâchez -vous et le monde de la littérature en sera sous le choc , je vous le garantis.

Calmer une correspondante qui prend trop vite la mouche

SONY DSCTraduit de l’anglais par Patrick Marcel.

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Avis à tous ceux et celles qui possèdent une liseuse, ce petit texte est gratuit ! Votre seul désespoir sera de ne pas pouvoir le prêter à tous ceux et à toutes celles avec qui vous aimeriez le partager. Quand je pense que Flaubert voulait nous faire croire qu’il existait de mauvaises lectures et que si Emma rate sa vie c’est parce qu’elle s’est réfugiée dans des lectures trop romantiques ! On sent qu’il n’avait pas lu Neil Gaiman !

Un peu comme Pennac, il nous dit qu’il n’y a pas de mauvaises lectures , lire est en soi un geste salvateur et comme tous les grands lecteurs, il se retrouve chez lui dans les bibliothèques. Il pense que lire des fictions oblige le lecteur à s’intéresser à d’autres destins et permet de comprendre l’humanité. Je pourrai bien vous recopier entièrement sa conférence tellement tout ce que je lisais me faisait plaisir

Citations

J’ai assisté un jour à New-York à une conférence sur la construction de prisons privées, – une énorme industrie en développement en Amérique. Cette industrie des prisons a besoin de planifier sa croissance future : de combien de cellules va-t-elle avoir besoin ? Combien de détenus y aura-t-il dans quinze ans ? Et il sont découvert qu’on pouvait le prédire très facilement, en utilisant un algorithme assez simple, basé sur la recherche du pourcentage d’enfants de dix et onze ans qui ne savaient pas lire.et qui, à coup sûr ne lisaient pas pour le plaisir.

L’importance de la science fiction

Je me trouvais en Chine en 2007, lors de la première convention de Science-fiction et de Fantasy de l’histoire chinoise à être approuvée par le Parti. Et, à un moment, j’ai pris à part un officiel de haut rang, et je lui ai demandé : « Pourquoi ? » la SF faisait depuis longtemps l’objet d’une désapprobation. Qu’est ce qui avait changé ?

« C’est simple », m’a-t-il répondu. Les Chinois excellaient à créer des choses si d’autres leur en apportaient les plans. Mais ils n’innovaient pas, ils n’inventaient pas. ils n’imaginaient pas. Aussi ont-ils envoyé une délégation aux USA, chez Apple, Microsoft, Google, et ils ont posé là-bas aux gens des questions sur eux-mêmes. Et ils ont découvert que tous avaient lu de la science-fiction quand ils étaient enfants.

L’obligation de rêver

Nous tous- adultes et enfants, écrivains et lecteurs-, nous avons l’obligation de rêver. Une obligation d’imaginer. Il est facile de se conduire comme si personne ne pouvait rien changer, comme si nous étions dans un monde où la société est énorme et l’individu moins que rien….Mais la vérité, c’est que les individus changent sans cesse leur monde, les individus fabriquent l’avenir, et ils le font en imaginant que les choses peuvent être différente…Tout ce que vous pouvez voir murs compris, a, un moment donné, été, imaginé. Quelqu’un a décidé qu’il était plus facile de s’asseoir sur une chaise que par terre et a imaginé la chaise.

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C’est un de mes cadeaux de Noël 2015. Je suis fan absolue de cette Mamette. Je relis cette BD, dès que j’ai moral qui flanche. Elle est drôle, toujours tournée vers la vie, même quand ça devient compliqué de vieillir. Les personnages qui l’entourent sont bien imaginés et je me retrouve dans leurs réactions . Ils sont juste un peu plus vieux que moi, cela me permet de me sentir plus jeune et plus à la page.
Son fils « Choupinet » a bien du mal à retrouver sa place dans une société où il ne fait pas bon être chômeur mais il y arrivera.

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Cliquer sur l’image pour lire la citation que j’aime !

Cette phrase dite très fort dans la bibliothèque a dû mettre à l’aise « Choupinet »

« Choupinet la jolie dame est célibataire, comme toi

Tu attends quoi ?

Que je fasse les présentations »

Mais le plus délicieux c’est sa bande de copines, je vous présente l’hypocondriaque, râleuse :

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et sa meilleure amie

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C’est quand même vrai que Jésus n’a jamais fait ses courses. Bref un concentré d’optimisme et de joie de vivre pour ce Noël 2015 c’était exactement ce qu’il me fallait.

20151215_112915Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard.

3Je dédie ce livre à mon fils heureux papa d’une petite fille qui a un an aujourd’hui. S’il lit ce roman, il y retrouvera toutes les angoisses de sa mère lorsqu’il était adolescent. Il s’agit, en effet d’un roman sur l’addiction au monde connecté. Isabelle Jarry nous plonge dans un futur pas très éloigné du nôtre. L’homme a réussi à créer des androïdes capables d’une certaine forme d’intelligence donc, d’autonomie. Pour lutter contre les méfaits d’un temps trop long passé devant des écrans, la société impose des cures de désintoxication d’une semaine à tous ceux qui ne savent pas se déconnecter du monde virtuel. C’est ainsi que commence le roman : Tim se retrouve brutalement dans un de ces centres pour une semaine sans possibilité de prévenir Today, son androïde, qui, à force d’interactions, est devenu pour lui beaucoup plus qu’un robot, il est son véritable assistant et son compagnon de vie.

Le roman permet de suivre deux survies, celle de Tim qui se retrouve confronté à la nature et qui s’inquiète sans cesse pour son androïde qu’il voudrait au moins prévenir de son absence. Or il ne le peut pas puisque le principe de la cure est de priver brutalement le patient de tous ses liens avec le monde virtuel. L’autre personnage en errance, c’est Today (l’androïde) dont l’existence est sans cesse menacée par des rencontres plus au moins hostiles.

Le roman ne décrit pas un monde déshumanisé et la relation de Tim et de Today n’a rien d’impossible. À travers leurs deux expériences, l’auteure nous fait revivre notre société dans des aspects à la fois tragiques et amusants. Les recherches de Tim portent sur la survie après une catastrophe nucléaire, et il rentre donc en contact avec un sage japonais qui est resté vivre à 40 kilomètres de Fukushima, ça c’est pour l’aspect tragique mais pas désespéré puisque ce Japonais a réussi à survivre dans une nature délaissée par l’homme donc de plus en plus belle. Le côté léger et drôle vient des personnages rencontrés par Tim et Today, le chef de cuisine, parodie de ceux présentés à la Télévision, la cantatrice quelque peu décatie, le clochard lubrique…

Bien sûr, on retrouve dans ce roman une opposition entre la vie dans la nature et le monde moderne connecté mais ce n’est pas pour autant un roman moralisateur ni trop simpliste. Et une fois n’est pas coutume, le mot de la fin est donné à l’androïde pas à l’humain. J’ai quelques réserves, encore une fois – ça devient de plus en plus fréquent- les passages en anglais ne sont pas traduits. Mais surtout, j’aurais aimé en savoir plus sur Tim et sur ce qu’il va devenir enfin l’histoire de plusieurs personnages ne me semble pas finie. l’auteure laisse à notre imaginaire le destin de plusieurs personnages : je me suis sentie abandonnée par l’écrivain , que deviendra Mme Hauvelle la chercheuse aigrie, et Mirène la cantatrice clochardisée et surtout Tim, c’est un peu dur de ne pas savoir où va le personnage principal , je suis désolée pour toutes celles qui détestent qu’on « divulgache » les intrigues mais voici la dernière phrase concernant Tim

Il ne savait pas où il allait….

Je n’en dis pas plus pour garder mes lecteurs et lectrices, mais moi je trouve ça frustrant. C’est la raison pour laquelle je n’ai mis que 3 coquillages alors que, jusqu’à l’avant dernier chapitre, je pensais en mettre quatre. L’auteure prépare peut-être une suite ?

Citations

La place de l’homme dans la nature

L’être humain lui-même était si faible… La nature dans son exubérance, sa force insurmontable, son inépuisable énergie, sa faculté à essaimer et à se reproduire, la nature l’avait nargué dès le début. Pourquoi, à l’instar des autres espèces, n’avait-il pas accepté la place qu’il occupait , prédateur des uns, proie des autres, maillon dans la chaîne de la vie ? Pourquoi avait-il voulu échapper à cette condition, imposer sa loi ?

Le Haïku qui donne son titre au roman

La voix du rossignol s’éloigne
La lumière s’éteint
Magique aujourd’hui

20151109_162509Traduit de l’anglais israélien par Jean-Pierre Carasso et Jacqueline Huet.

Présentation de son éditeur

Si une roquette peut nous tomber dessus à tout moment, à quoi bon faire la vaisselle ?

Mais je citerais volontiers également Jérôme qui m’a fait découvrir cet auteur

C’est simple, si je devais un jour devenir écrivain (ce qui n’arrivera jamais, je vous rassure), j’aimerais pouvoir écrire comme Etgar Keret !

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Comme je le comprends, depuis son article, datant du 4 septembre 2015, ce petit recueil m’accompagne partout, il est sur ma liseuse ce qui est très pratique, je peux même lire au golf en attendant que mes amis terminent leur partie. Il m’accompagne également dans ma réflexion après le 13 novembre 2015. Les Israéliens savent mieux que quiconque ce que cela veut dire de vivre avec des bombes qui explosent, et d’être entourés de pays qui sont prêts à vous rayer de la carte à la moindre faiblesse. Ils ont, donc, parmi eux des écrivains comme Etgar Keret qui avec un humour à la Woddy Allen sait se moquer des travers juifs et surtout de lui-même sans pour autant renier qui il est et d’où il vient.

Je sais que nous sommes nombreuses à préférer les romans aux nouvelles, mais ici on n’a pas l’effet habituel de ce genre littéraire, en général ce que l’on redoute c’est un passage d’une histoire différente à une autre qui empêche de se sentir bien dans ce que l’on vient de lire car cela change trop vite. Ici, on accompagne la vie d’Etgar Keret , celle de son fils Lev et de son épouse, à la fois dans leurs souvenirs et leurs difficultés quotidiennes . Le lecteur va du sourire, à l’éclat de rire , le tout teinté d’une très grande émotion. Pour savoir écrire de cette façon, à la fois détachée mais très sensible, sur tous les petits aspects de la vie avec un enfant, les tragédies de la vie et du monde , il faut un talent qui force mon admiration. se dessine, alors, une personnalité d’écrivain qui n’a rien d’un super héros, mais qu’on a envie d’aimer très fort car il donne un sens à la vie.

Citations

Vue sur mer en Sicile

Parce que, enfin, je la connais très bien cette mer : c’est la même Méditerranée qui est à deux pas de chez moi à Tel-Aviv, mais la paix et la tranquillité que respirent les gens du coin sont des choses que je n’avais jamais rencontrées. La même mer mais débarrassée du lourd nuage existentiel, noir de peur que j’ai l’habitude de voir peser sur elle.

Son père

« En réalité, la situation est idéale, me dit-il très sérieusement tout en me caressant la main. J’adore prendre les décisions quand les choses sont au plus bas. la situation est une telle drek(merde) pour l’instant que ça ne peut que s’arranger : avec la chimio, je meurs très vite ; avec les rayons je me tape une gangrène de la mâchoire ; quant à l’opération, tout le monde est sûr que je ne survivrai pas parce que j’ai quatre-vingt-quatre ans. Tu sais combien de terrains j’ai acheté comme ça ? Quand le propriétaire ne veut pas vendre et que je n’ai pas un sou en poche ? »

Moment d’émotion

– Mais pourquoi ? insista Lev. Pourquoi un père doit protéger son fils ?

Je réfléchis un instant avant de répondre « Écoute, dis-je en lui caressant la joue, le monde dans lequel nous vivons est parfois très dur. Alors la moindre des choses c’est que tous ceux qui naissent dans ce monde aient au moins une personne pour les protéger.

– Alors et toi ? demanda Lev. Qui te protégera, maintenant que ton père est mort ? »

Je n’ai pas fondu en larmes devant lui mais plus tard ce soir-là, dans l’avion de Los Angeles, j’ai pleuré.

Difficulté d’être chauffeur de taxi

Le taxi est un mode de transport dans lequel toit est fait pour la seule satisfaction du client. Les malheureux chauffeurs conduisent toute la journée et n’ont pas de toilettes à bord, où aurait-elle voulu qu’il se soulage dans le coffre ?

Sa femme qui a « un mauvais fond »

« je vais sûrement pas aller au mariage d’un type qui sent le bouc que tu as connu dans une salle de gym où tu as mis les pieds même pas deux semaines, a déclaré ma femme avec beaucoup de détermination.

SONY DSCLu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard dans le thème « mère fille ».

5Je me demande qui d’entre les participantes du club découvrira à cette occasion Annie Ernaux, je dois avouer que, s’il y en a une, je l’envie un peu. Je me souviens du choc que fut pour moi ses premiers romans. J’ai commencé par « la Place » et je n’ai jamais quitté cette auteure. En relisant « Une femme » pour notre future rencontre, je me suis demandée si j’allais découvrir des aspects que j’avais oubliés. Et bien oui, je ne me souvenais pas à quel point, elle réfléchissait sur sa façon d’écrire :

Mon projet est de nature littéraire, puisqu’il s’agit de chercher une vérité sur ma mère qui ne peut être atteinte que par des mots. ( C’est-à-dire que ni les photos, ni mes souvenirs, ni les témoignages de la famille ne peuvent me donner cette vérité). Mais je souhaite rester, d’une façon, au-dessous de la littérature.

À part cet aspect que j’ai trouvé très intéressant, j’ai tout retrouvé : cette mère qui parle trop fort qui aime sa fille mais qui sait si mal le lui dire. Cette façon dont elle a poussé sa fille vers les études et la réussite mais qui était aussi le chemin vers la séparation avec le monde de son enfance.

À l’église, elle chantait à pleine voix le cantique de la vierge, « J’irai la voir, un jour, au ciel, au ciel ». Cela me donnait envie de pleurer et je la détestait.

Elle avait avait des robes vives et un tailleur noir en « grain de poudre », elle lisait « Confidences » et « La mode du jour » ; Elle mettait ses serviettes avec du sang dans un coin du grenier, jusqu’au mardi de la lessive.

Quand je la regardais trop, elle s’énervait, « tu veux m’acheter ». 

Je trouvais ma mère voyante. Je détournais les yeux quand elle débouchait une bouteille en la maintenant entre ses jambes. J’avais honte de sa manière brusque de parler et de se comporter, d’autant plus vivement que je sentais combien je lui ressemblais.

À chaque fois que je lis ce livre, je suis saisie par la justesse de cette analyse, je crois qu’Annie Ernaux explique mieux que quiconque que changer de culture : passer de « Nous deux » à « Proust » , c’est une rupture absolue, un exil définitif et comme tout exil c’est très douloureux. Cela passe par des moments qui peuvent être violents :

À certains moments, elle avait dans sa fille en face d’elle, une ennemie de classe.

Pour celles et ceux qui n’ont pas encore lu cette auteure, j’enfonce des portes ouvertes en rappelant que, ce que l’on remarque tout de suite, c’est son style, tout en retenu et pourtant dévoilant tout ce qui peut être su par l’autre même ce qui d’habitude est caché. Dans ce « roman » ce qui me touche le plus c’est ce cri d’amour, cette fille a su écrire son amour à sa mère, Annie Ernaux est maintenant une grande dame de la littérature de notre époque et celle qui l’a mise au monde, cette femme un peu rude, un peu trop voyante peut être fière de sa fille.

Voici le moment télévisé où je l’ai découverte, le lendemain j’allais acheter son livre. Que de souvenirs !

SONY DSCTraduit de l’anglais (États-Unis) par Martine Béquié et Anne-Marie Augustyniak.
Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard , thème « relation mère fille »

4Cela fait longtemps que je n’ai pas ressenti un tel plaisir de lecture, je voulais absolument ne plus quitter, Taylor le personnage principal qui n’a pas sa langue dans sa poche, Lou-Ann qui n’est que gentillesse, Mattie qui aide les malheureux candestins, Estevan qui parle si bien l’anglais…. Je trouve que dans le thème « mère fille » ce roman est parfaitement choisi par notre bibliothécaire préférée. Pour plusieurs raisons, car c’est d’abord le récit de la naissance du sentiment maternel. Marietta-Missy-Taylor est une jeune fille qui a décidé de sortir de son Kentucky natal pour vivre une vie indépendante, or dès les premiers jours , une vieille indienne lui met dans les bras une toute petite fille qui visiblement a vécu un très lourd traumatisme. Taylor va apprendre à aimer Turtle-Avril et devenir sa mère. Il faut dire que sa propre mère, femme de ménage a eu cette qualité incroyable, d’aimer sa fille et de trouver tout ce qu’elle fait absolument formidable.

C’est la deuxième raison pour laquelle je trouve ce livre bien choisi, l’amour admiratif d’une mère est un cadeau précieux qui donne des forces pour toute la vie. Je dois dire que je ne résiste pas aux romans qui mettent en scène des « cabossés de la vie » qui au lieu de continuer à se détruire, joignent leurs forces pour franchir les obstacles et aller vers le bonheur. J’ai à propos de ce roman , relu ce qui s’est passé au Guatemala, encore une tragédie maintenant oubliée, elle est ici évoquée à travers le coupe d’Estevan et Esperanza à qui on a arraché leur petite fille.

Le roman situe tous les personnages au moment de leur survie, pour leur adaptation à la vie quotidienne c’est une autre histoire, on espère qu’ayant vécu le pire, ils vont y arriver. Ce roman est servi par des effets de langue, qui doivent être encore plus délicieux en américain, l’arrivée dans le langage de la petite Turtle sont drôles et inattendus, et l’adoption par Taylor dans sa langue rugueuse de jeune fille peu éduquée de l’anglais raffiné d’Estevan, professeur d’anglais au Guatemala sont savoureux mais sonnent un peu plats en français. Grâce à Keisha (je me doutais bien qu’elle avait lu cette auteure !). J’ai vu qu’il y avait une suite que je vais m’empresser de lire, j’aime bien son expression que je me permets de citer : c’est un livre « doudou ».

Citations

Le caractère de Taylor Greer

J’avais décidé depuis longtemps que, si j’avais pas les moyens de m’habiller chic, je m’habillerais mémorable.

La description de Lou-Ann

Elle était du genre à aller chercher les ennuis juste pour montrer qu’on n’avait pas besoin d’être une « pompon girl  » pour se faire sauter . Le problème c’est que ça ne vous rapporte rien. C’est comme un gosse qui fait des tours de vélo en se lâchant des pieds et des mains et s’ époumone pour attirer l’attention de sa mère. Eh bien, la mère en question ne lèvera pas les yeux tant qu’il ne se sera pas fracassé la tête contre un arbre.

Avoir un enfant

Elle ne cachait pas que son désir le plus cher était d’être grand-mère. Dès que la grosse Irène prenait le bébé, ce qui n’était pas fréquent, Mrs Hoge déclarait : « Irène, ça te va à ravir ». Comme si vous deviez faire un enfant parce que ça vous va bien.

L’Oklahoma

Ces étendues désespérément plates de l’Oklahoma avaient fini par me donner mal aux yeux croyez moi . J’avais l’impression qu’il fallait toujours regarder trop loin pour distinguer l’horizon.