Je dois le dire tout de suite je ne suis pas très adepte des romans historiques et pourtant celui-là m’a vraiment passionnée. En réalité, pour que je me sente bien dans la lecture, le genre littéraire a tellement moins d’importance que le style de l’auteur et Bruno d’Halluin n’en manque pas. Pour vous en convaincre, j’aurais pu recopier les premières pages de son roman, il y décrit une tempête terrible au large de l’Afrique qui décimera l’armada des 11 caravelles envoyées par le roi du Portugal en 1500, pour confirmer la route des épices vers les Indes.
Cette tempête, à vous rendre malade, est décrite avec un tel réalisme que l’on ne doute pas un instant que Bruno d’Halluin sait de quoi il parle. En effet, il est lui même navigateur et il a dû essuyer quelques coups de tabac, sans doute s’est-il alors demandé comment faisaient les marins du XIVe et XVe Siècle sans carte ni moyen très efficace pour se positionner sur l’immensité des flots. C’est grâce à leur courage, à leur volonté de dominer le monde, et surtout à leur insatiable envie de s’enrichir que les Portugais ont donné au monde occidental des cartes fiables et des possibilités de commerce vers des contrées lointaines.
Bien sûr, le chapitre des grandes découvertes a fait partie de nos programmes scolaires, mais pouvions-nous nous rendre compte de ce que cela voulait dire de partir ainsi vers les Indes sans savoir comment y arriver ? L’horreur du voyage est telle que le personnage principal en restera marqué toute sa vie. Les tempêtes, la vague scélérate qui a failli les engloutir, l’absence de vent et le risque de mourir de faim et de soif, le mal de mer dans des bateaux qui roulent et tanguent sans cesse, les accostages dans des pays hostiles où la population locale peut vous assassiner pour vous dévorer, les maladies dont le terrible scorbut qui attaquent tous les survivants. Il reviendra pourtant mais pour retrouver Lisbonne en proie aux pogromes contre les juifs même ceux qui comme notre héros s’étaient convertis au catholicisme, et en plus des misères humaines un tremblement de terre et évidemment la peste !
Alors, les grandes découvertes un moment de gloire pour le Portugal ? Oui assurément, mais que la vie était rude pour ceux qui ont fabriqué cette gloire au prix de leur souffrance et de leur vie.Le roman raconte également l’histoire de cette planisphère qui a été dessinée au Portugal mais qui est conservée en Italie, Bruno d’Halluin résout cette énigme et là encore il nous permet de mieux comprendre la valeur des cartes maritimes.
Un grand roman que j ai découvert grâce à Electra’s amazing, blog que je connais depuis peu, et depuis, j’ai vu que Yspadden l’avait également repéré.
Citations
Des phrases fortes pour des émotions qui le sont tout autant
« Si tu veux apprendre à prier, prends la mer » dit le proverbe.Les vagues étaient si hautes que nous avions l’impression d’être envoyés vers les cieux, puis sitôt après d’être précipités dans l’abîme. Comme si l’humain n’avait pas sa place entre les deux.
Expression de marin
Les mâts et vergues nus, seulement parés de cordages sifflants, suffisaient d’ailleurs au vent d’ouest pour nous faire avancer.Nous allions ainsi, « l’arbre sec » comme disent les gens de mer, qui pour une fois utilisaient un vocabulaire facile à comprendre.
Sentiments pendant la tempête
Les vagues s’élevaient si haut que c’était merveille. Je doutais que la mer pût obéir au Seigneur. Elle semblait vivre sa propre vie , sauvage , indifférente aux hommes et aux dieux. Les gens de la mer disait qu’il fallait la respecter, mais elle ne nous respectait pas . Pour elle , nous n’étions rien. Peu lui importait qu’on vécût ou mourût . Je me remémorais les mots du philosophe athénien Anacharsis , à qui l’on demandait si les vivants étaient plus nombreux que les mors. » Dans quelle catégorie, répondait-il , placez vous ceux qui vont en mer ? «
Lisbonne
Quelle ville que Lisbonne ! À la fois capitale du royaume et grand port maritime, elle n’avait pas d’équivalent. On pouvait y admirer de prestigieux monuments , et l’instant d’après, en tournant simplement le regard , observer des caravelles en partance pour l’Afrique…. On pouvait facilement se procurer du drap de Flandres que des masques d’Éthiopie, et maintenant du poivre ou de la cannelle des Indes
Le traité de Tordesillas
Le pape avait d’abord donné à l’Espagne les îles et terres fermes nouvellement découvertes, ou à découvrir, à l’ouest d’un méridien fixé à cent lieues à l’ouest des Acores et des îles du Cap vert. Puis le fameux traité avait déplacé cette limite à trous cent soixante dix lieues à l’ouest des îles du Cap-vert. À l’est de ce méridien, les terres revenaient au Portugal. Je trouvais ahurissant qu’un homme, fût-il souverain pontife, pût couper la terre en deux pour la partager entre deux nations.