Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque, thème le voyage.
Traduit de l’italien par Carole Cavellera.

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Les hasards sont étranges, je lis ce livre et en même temps, j’entends une émission consacrée à Malaparte. 
Personnalité ambiguë , l’émission m’a donné envie de relire ses œuvres plus connues. Je ne peux pas dire que j’ai été conquise par ce court roman. Et je me demande bien pourquoi il a été choisi pour participer au club de lecture sous le thème « voyage ».

Il s’agit surtout de la guerre et de la désorganisation des troupes confrontées à la défaite. Voici l’histoire : un soldat ramène le cercueil de son capitaine à sa famille à travers une Italie en déroute. La quatrième de couverture parle « d’un portrait tout en finesse du peuple italien, capable des pires bassesses mais aussi plein de courage et de générosité. ».

Le roman ne fait qu’une centaine de pages donc très court et sans grand intérêt et il faut tout la bienveillance d’un éditeur pour dire que c’est « un de ces inédits dignes de figurer aux côtés des plus grandes œuvres de leur auteur ». Le soldat a promis à son capitaine de ramener son corps à Naples , il va le faire , on se demande bien pourquoi. Au lieu de se rendre , puisque le combat était perdu d’avance, ce capitaine a fait tuer dans des combats pour l’honneur la moitié de ses hommes.

On a du mal à comprendre que ce brave soldat soit si attaché à son officier. Mais, avec ce que j’ai entendu de Malaparte , j’ai pensé que cela correspondait à son idéologie : un brave paysan rustre mais honnête, qui se charge du corps de son capitaine appartenant à la vieille noblesse italienne. Sur son chemin, il rencontre d’abord une jeune orpheline éprise de liberté, mais qu’il sera incapable d’aider, puis une femme dont il va tomber amoureux.

On retrouve dans les descriptions des personnages , l’ambiance des films néoréalistes de l’après guerre en Italie. Ce sont souvent des femmes courageuses qui s’opposent aux truands mais elles doivent avant tout trouver du travail pour nourrir leur famille. Il y a un passage très cinématographique , où Mariagiulia administre une claque superbe à une mère maquerelle , et où les macs ne peuvent pas s’opposer à la fuite des jeunes femmes qu’ils avaient déjà recrutées pour leur sale trafic.

Je me demande bien ce qu’en penseront mes amis du club… (vous avez remarquez le masculin , et oui avec la nouvelle médiathèque , un homme a rejoint le club !).

Citations

Au début

Ce sont des hommes simples, honnêtes, et bien qu’ils pressentent que tout est perdu, inutile, qu’il n’y a plus rien à faire , ils ne renoncent pas à leur devoir .

À la fin

 Invoquant la Madonne et tous les Saints, avec cette forme de piété collective qui à Naples est le signe le plus noble, le plus spontané , de la solidarité chrétienne et sociale des pauvres.

On en parle

lecture addict où j’ai lu une remarque très intéressante, c’est une ébauche de roman, je pourrai rajouter ou un script de film.

 Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque (thème : littérature canadienne).

3
Je ne connaissais pas cette auteure, pourtant présentée comme un « grand classique » de la littérature canadienne. C’est un roman très agréable à lire , même si (ou parce que !)on a parfois l’impression d’être au pays des « bisounours » ! Tout le monde est gentil et même les méchants sont fréquentables. Ce roman correspond à l’idée que l’on se fait des Canadiens : des gens vivant dans des contrées très isolées dans une nature aussi belle que sauvage, parlant peu , rudes à la tâche et au cœur d’or.

Derrière le côté gentil, se dessine des vrais personnalités , et en lisant ce livre, je me disais que nous, lecteurs d’aujourd’hui,étions davantage attirés par la noirceur et la dureté des rapports humains. Par exemple, le personnage de Bessette qui exploite les trappeurs aurait pu être peint sous les traits d’un infâme avare, certes, il est odieux , mais comme tout le monde doit vivre avec lui , on a l’impression qu’il est préférable de l’accepter comme il est.

Et notre homme d’église qui se donne le rôle de justicier, et qui réussira à faire payer les fourrures à un prix plus juste, s’en voudra d’avoir précipité les hommes des bois dans un alcoolisme encore plus violent qu’auparavant (du temps où Bessette les exploitait outrageusement). J ai été émue par le passage où Luzina se rend compte que l’éducation qu’elle a tant voulu donner à ses enfants les a conduits à s’éloigner définitivement de son mode et de son lieu de vie.

Un roman sympathique , bien loin des difficultés de notre société actuelle, un bol de grands espaces peuplés de gens gentils.

 Citations

Portrait d’un taiseux

Dans un pays où on était souvent silencieux, faute d’avoir du nouveau à commenter, il détenait le record de la taciturnité. Il passait pour avoir mené ses affaires, accepté des commissions, rendu service, accompli son devoir de facteur, fait l’amour, procréé des enfants, tout cela sans avoir prononcé plus d’une dizaine de phrases.

 Un trait de caractère assez répandu

Telle était Miss O’Rorke. Sa préférence morne et accablante allait toujours à ce qu’elle avait perdu, et s’il y avait des coins du monde qu’elle vantait sans répit, c’étaient toujours ceux-là où elle était assurée de ne plus remettre les pieds.

 Un facteur qui a une vision personnelle du progrès

Quinze ans plus tôt , il était arrivé tout fin seul dans ce pays, et il avait pu croire qu’il y vivrait en paix. Personne ne savait écrire et lire dans ces bons temps , et personne n’en souffrait. Le progrès, la civilisation, comme ils appelaient les embêtements, avaient tout de même commencé à les rattraper, petit à petit dans le Nord. D’abord les gens s’étaient fourré dans la tête de recevoir des lettres, des catalogues de magasins. Les catalogues de magasin , voilà à peu près ce qu’il y avait de plus bête au monde ! C’était encombrant. Ça vous bourrait un sac en un rien de temps, et pourquoi, je vous le demande ! Rien que pour vous démontrer que vous auriez maintenant besoin d’un tas de choses dont vous vous étiez parfaitement passé…

On en parle

Livres de Malice que j’ai trouvé sur Babelio.

 Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque

4
Encore une fois, j’ai oublié sur quel blog j’avais acquis la certitude que je lirai ce livre. 
Mais lorsque la bibliothécaire, responsable de mon club de lecture (qui a enfin repris ses activités après un an d’absence),a proposé ce livre, je me suis précipitée. Pour moi, il s’agit plus d’un roman que d’une biographie du fils schizophrène d’Albert Einstein, Eduard.

Laurent Seksik a consulté toutes les sources disponibles pour essayer de cerner au plus près les relations dans la famille Einstein. Il est médecin et il a mis son savoir médical au service de la compréhension de la schizophrénie d’Eduard. Mais la relation entre le père et le fils demeure du domaine de l’intime , et aucun biographe ne pourra jamais la faire comprendre complètement. Je craignais avant la lecture que la phrase en quatrième de couverture : « Le fils d’Einstein finira ses jours parmi les fous, délaissés de tous, dans le plus total dénuement. » soit le fil conducteur du roman et qu’on assiste à un déboulonnage en règle de la célébrité d’Einstein.

Ce n’est absolument pas le cas. Eduard est le fils de la première femme d’Einstein, et l’éloignement de son père est, aussi, le résultat d’un divorce très douloureux et des violences de la guerre. Einstein a dû fuir l’Allemagne nazie en laissant tous ses biens derrière lui, il est arrivé en Amérique mais ses positions antiracistes lui ont valu la réprobation d’une grande partie des classes dirigeantes de ce pays.

L’auteur ne justifie rien, il expose des vies déchirées par l’horreur du temps et en particulier du nazisme, par le divorce et la maladie mentale. Bien avant d’être célèbre, le couple Einstein a connu l’horreur de perdre une petite fille qu’ils avaient mis en nourrice, évidemment son épouse s’en voudra beaucoup et lui, a caché et sans doute nié, ce fait toute sa vie. Liserl aurait-elle vécu si elle était restée près d’eux ? Comment soignait-on la scarlatine à cette époque ? J’avoue avoir été plus choquée par la mort du fils de leur fils aîné , Hans-Albert qui refusera au petit Klaus les soins pour une diphtérie au nom de sa foi dans l’église scientiste !

Ce livre pose cette question à tous ceux qui connaissent la maladie mentale : comment aider un schizophrène qui s’enferme dans un rejet violent de toute forme de compassion . La famille est souvent la plus mal placée pour aider le malade . Eduard semble haïr son père , alors que sans doute il aurait voulu que celui-ci s’occupe de lui. Je pense que seule une institution faisant preuve d’humanité peut réellement aider le malade qu’il soit fils d’Einstein ou du plus parfait inconnu.

Loin de tout voyeurisme ce livre m’a bouleversée , et je le trouve d’une honnêteté admirable !

Citations

Être le fils d’Einstein

 Peut-être que de nombreuses personnes se présentent en ce lieu en affirmant être le fils d’Einstein. Je ne leur jetterai pas la pierre. Porter un illustre patronyme peut être considéré comme une chance. On croit que la gloire rejaillira sur soi. On se trompe lourdement. Le nom d’Einstein est une charge pour le commun des mortels. Une seule personne possède les épaules assez solides pour supporter un tel fardeau : mon père. Ni mon frère ni moi n’avons la stature. Voilà la cause de mes tracas si c’est ce que vous cherchez.

 Le lourd secret

Liserl était le secret le mieux préservé de la légende Einstein, mieux gardé que celui des Templiers. Aucun registre n’attestera jamais de sa naissance. Nul ne se doute encore aujourd’hui, en 1930, trente ans après les faits qu’Albert et elle avaient eu et abandonné un enfant, que cette enfant était décédée. Liserl Einstein était effacée des mémoires.

Note d’humour (il y en a peu !)

La production a utilisé une doublure pour la fin. Finalement il n’y a pas que moi qui me dédouble. Mais moi, ce n’est jamais du cinéma.

 La neutralité Suisse

Nos coffres sont pleins et nous n’avons pas connu la guerre. Préférerais-tu l’inverse ? La Suisse n’a jamais été en guerre. Elle n’a souhaité la défaite de personne , la victoire de personne. Qui prétendra le contraire est un menteur. Soit il te ment maintenant à toi et à tes Alliers vainqueurs, soit il a menti aux Boches pendant six ans.

 Le courage d’Einstein et la faiblesse d’un père

Il a eu tous les courages. Braver la Gestapo,soutenir, un des premiers, la cause des Noirs, aider à la création d’un état juif , braver le FBI, ne pas baisser l’échine, ne jamais renoncer, écrire à Roosevelt pour construire la bombe contre l’Allemagne et écrire à Roosevelt pour arrêter la bombe destinée au Japon. Soutenir les juifs opprimés par le Reich. Pétitionner. Être en première ligne. Mais aller voir son fils est au-dessus de ses forces. Il a trouvé ses limites. Seul l’univers ne connaît pas de limites.

 Le rapport père fils

Il est le père d’Eduard. Qu’est ce que cela signifie ?

Les pères engendrent les fils. Mais ce sont les fils qui rendent père leur géniteur, qui font d’eux des hommes.

On en parle

Dans Babelio

3
Roman chaudement recommandé par la blogosphère et à lire pour ne jamais oublier le poids négatif du racisme dans les sociétés. L’auteure est française et connaît visiblement bien la société américaine, comme à chaque fois qu’une étrangère pose son regard critique sur le fonctionnement d’une société , je suis toujours moins convaincue que lorsqu’un écrivain du pays le fait lui-même. Et sur le sujet les Américains décrivent fort bien ce qu’a été la condition des noirs et les retentissement sur les comportement actuels.

Je pense, par exemple, au livre incontournable « le temps où nous chantions » de Richard Powers. Tout va mieux depuis l’élection d’Obama qui rassure enfin cette communauté et a donné, en France,davantage confiance dans la société américaine. Le sujet du roman tourne autour d’une tragédie : des adolescents d’une même famille noire meurent parce qu’ils ne savent pas nager. S’ils ne savent pas nager, c’est que le fameux poids du racisme fait que les enfants noirs ont été si longtemps interdits de piscine , qu’ils en sont venus à penser qu’ils n’étaient pas faits pour la natation.

Tragédie qui permet d’en évoquer une autre, celle où un jour en 1949, des enfants noirs ont cru qu’ils pourraient eux aussi jouer dans les piscines. La vieille femme noire, enfermée dans ses propres souvenirs et dans ceux, encore plus horribles, de ses parents, ne peut pas comprendre la façon de vivre de sa fille , avec des enfants sans père et de son petit fils qui risque d’aller vers la délinquance.

C’est un roman très fort, mais un peu trop démonstratif.

Citations

La grand-mère à son petit fils

Tu ne comprends pas que tu ressembles à ce qu’ils pensent de toi, à ce qu’ils attendent de toi, que tu fais mal aux tiens, à ceux qui sont là, comme à ceux qui sont morts.

 La piscine et les noirs

– Que voulez-vous dire par là ? Que les jeunes Noirs ont eux mêmes intégrés ce mythe qui veut qu’ils ne puissent pas nager ?

– Absolument. Leurs parents n’avaient pas accès aux piscines et ils ne leur ont pas appris à nager.

 Les hommes

Mais le monde s’en fout des souvenirs des dames noires flétries, qui racontent que le long zizi de l’homme noir, ça n’existe pas, que nos homme s ont peur , qu’ils hurlent en silence comme Howard, qu’ils pleurent en secret comme henry, qu’ils frappent comme le fils de Madame King, qu’ils s’en vont comme les amours de Dana, qu’il n’y a pas d’hommes pour élever nos hommes.

 On en parle

Les fans des livres où j’avais noté ce roman.

 

4
Je suis ravie de retrouver mon blog avec ce roman qui m’a beaucoup plu. 
Il a été couronné par le Goncourt des lycéens, ce prix lui va très bien : je connais, en effet, peu d’adolescents insensibles à la détermination d’Antigone. Cette jeune femme qui reste inflexible à propos de la dignité des morts, est bouleversante , elle est le petit grain de sable qui empêche la tyrannie d’être satisfaite d’elle même.

Quelle idée merveilleuse (hélas, une idée de roman !) de vouloir monter la pièce de Jean Anouilh dans le Liban en guerre ! L’auteur qui est journaliste,a couvert les guerres de son époque et il sait rendre compte de l’horreur des morts dans les pays où l’humanité disparaît au profit de la force armée et souvent barbare. Il m’avait déjà convaincu en écrivant à propos de l’Irlande , « Retour à Killybegs » ?

Les premières pages du « quatrième mur » décrivent un tir de char, elles sont d’un réalisme incroyable , j’ai senti la mort beaucoup plus précisément que dans n’importe quelle image de film. Le narrateur reprend le projet de son ami Samuel qui est juif et qui se meurt d’un cancer , il essaie de monter Antigone avec de jeunes acteurs venant des différentes composantes religieuses libanaises. Présent lors des massacres de Sabra et Chatila, son projet théâtral est noyé dans le sang et sa raison vacille face à tant d’horreurs.

De retour en France , même l’amour de sa petite fille ne pourra le ramener aux joies simples de la vie. Plusieurs centres d’intérêts peuvent vous conduire à vous intéresser à ce grand roman :

  • le parcours d’un gauchiste de 68
  • la difficulté d’être juif , orphelin de parents morts en déportation.
  • la guerre du Liban
  • La difficulté de se situer au-delà des haines religieuses
  • la force d’un texte théâtral
  • mais surtout les horreurs des guerres civiles et les difficultés pour les témoins de croire de nouveau à la vie.

Un livre qui fait réfléchir et qui fait écouter autrement les informations internationales , celles qui viennent de pays où les hommes se tuent sans respecter la moindre humanité pour des raisons qui semblent si futiles lorsque les années passent .

Citations

 Une phrase sur l’amitié qui m’a fait réfléchir

La vie s’était chargée de nous disperser. Sam m’avait donné son adresse à Beyrouth, son numéro de téléphone aussi, mais je ne l’avais jamais appelé. Il existait. Pour moi, c’était suffisant. Je pensais que notre amitié se nourrissait de distance et je m’étais trompé. J’avais perdu trois ans de lui.

Antigone revisitée

– Je n’ai pas lu votre pièce mais Nabil , mon aîné l’a fait pour moi. Il m’a dit , au contraire, qu’elle était exempte de médisance. Qu’elle ne représentait ni le Prophète -prière et salut de Dieu sur lui- ni ses messagers. Qu’elle ne manquait pas de respect à ses grands compagnons. Et aussi qu’elle n’insultait pas l’islam. Qu’elle ne cachait ni nudité , ni insulte, ni autre souillure.
– Mes fils m’ont dit que leur rôle de gardes serait d’entourer leur chef, de le protéger comme un père et de faire respecter son autorité. Ils m’ont expliqué qu’une jeune femme le défiait. Qu’à travers lui, elle narguait la loi divine et que ce calife bien guidé mettait un terme à cette arrogance.

La tragédie

– Et moi, j’aime la leçon de tragédie que donne cette pièce, cette distance prise avec la banalité du drame. Souvenez-vous de ce que le Choeur nous apprend de la tragédie. Il dit que la tragédie, c’est propre, c’est reposant,c’est commode. Dans le drame, avec ces innocents , ces traites, ces vengeurs, cela devient compliqué de mourir. On se débat parce qu’on espère s’en sortir, c’est utilitaire, c’est ignoble . Et si l’on s’en sort pas, c’est presque un accident. Tandis c ela tragédie, c’est gratuit. C’est sans espoir. Ce sale espoir qui gâche tout . Enfin il n’y a plus rien à tenter . C’est pour les rois la tragédie.

 On en parle

Dans le blog de Krol (Je lui avais dit que je lirai ce livre et son avis a compté dans ma détermination.). Et tous les 54, plus un (le mien !), avis de Babelio.

 

 1
Voilà ! Mes coquillages parlent pour moi, ce livre est une grande déception. J ai quelques difficultés à exprimer ce que j’ai ressenti pour plusieurs raisons
 :

  •  Ce livre est un cadeau que j’ai demandé, dans le cadre de l’opération match de la rentrée littéraire organisée par Price.Minister.
  • Un cadeau, on a toujours envie que cela plaise, c’est toujours plus compliqué à évaluer, mais c’est le jeu on doit même noter ce livre .

  • Mais pourquoi donc, suis-je allée vers ce roman ? J’avais lu des critiques élogieuses du premier livre de Maria Pourchet : « Avancer » sur des blogs que je lis régulièrement . (Comme celui de Keisha). Et, souvent, j’aime ce genre de regard acide sur notre société

  • Et enfin,cette écrivaine a l’art de la formule, c’est absolument certain.

    Alors ?

Tout ce livre m’a rendu triste et très perplexe. Pourquoi mettre son talent à décrire des gens qui n’en ont aucun ? Cela se passe dans le milieu « bobo » branché parisien. Tous ses personnages n’ont comme sujet de conversation que la critique acerbe des gens qu’ils connaissent et si possible de se faire les dents sur les plus faibles qu’eux. Le départ c’est une fête d’anniversaire surprise. Ressort souvent utilisé au cinéma , avec une petite variante, l’homme ne veut pas sortir et sa compagne ne pourra pas l’extraire de son canapé face à sa télé. Les invités, sur une terrasse en plein Paris, se morfondent en les attendant, et, l’alcool aidant ils dressent des portraits peu flatteurs des uns et des autres.

On est dans un monde du paraitre et de la formule qui fait mouche. L’auteure semble promener sa caméra dans un monde qui la dégoûte quelque peu, elle prend le lecteur à partie et raconte ses personnages comme si elle les disséquait plutôt que de leur donner vie. Son lecteur, peu à peu, s’attriste et se se demande , pourquoi Maria Pourchet s’intéresse à ces gens là , et si, elle même s’ennuie à les fréquenter , elle nous amène à éprouver le même sentiment. On a envie de fuir, la vie est ailleurs, ces bobos parisiens qui peuvent en une soirée dépenser en boisson un mois d’un bon salaire, ce n’est qu’une toute petite partie de notre société, vaut-elle un roman ?

Ma réponse est : en tout cas pas celui-là !

Citations

Scène avec l’homme du cinéma (Ariel) qui embrasse et tutoie tout le monde et qui attire ceux que la notoriété fascine

Toujours à propos d’Ariel, elle songea mufle, connard, frimeur, mais le garda pour elle.

On commençait à trouver curieuses ces démonstrations répétées d’affection de quelqu’un qui n’avait a priori besoin de personne, vis à vis d’un autre qui, en plus d’être anonyme, semblait se complaire dans le service.

 Portrait de Paul-chômeur (celui qui aurait dû être le héros de la fête) vu par sa femme

Commentant les liens, pas toujours clairs, qu’elle ne pouvait s’empêcher d’établir entre l’accès de Paul à l’emploi, leur accès à la propriété et son accès à la maternité, elle avait un peu insisté sur ce travail que Paul n’avait pas su conserver . Et ensuite sur tous ceux qu’il n’avait su prendre. Elle les avait évoqués un à un , rappelé les excuses que Paul avait trouvées, innovant chaque fois pour échapper au salariat, ou simplement à la rémunération . C’était trop loin, c’était trop peu, tel employeur avait mauvaise réputation , tel autre était sous alerte financière, untel avait la poignée de main humide. Les occasions que Paul ne voyait pas arriver, les offres qu’il ne sentait pas , les gens dont il se méfait, les gens dont il était sûr qu’ils se méfiaient. Toutes les proies lâchées pour autant d’ombres, pas même des ombres, des fantasmes.

 On en parle

Un blog que je ne connaissais pas, tenu par quelqu’un qui l’a lu dans le même cadre que moi : Stendhal syndrome

Roman traduit de l’islandais par Catherine Eyjólfsson

5
Une fois n’est pas coutume je vais recopier la quatrième de couverture, je pense que cela suffira à vous donner envie de lire le roman de Bergsveinn Birgisson, cela prouve que les éditions Zulma font bien leur travail de mise en valeur d’un roman :

 « Mon neveu Marteinn est venu me chercher à la maison de retraite. Je vais passer le plus clair de l’été dans une chambre avec vue plongeante sur la ferme que vous habitiez jadis, Hallgrímur et toi. » Ainsi commence la réponse – combien tardive – de Bjarni Gíslason de Kolkustadir à sa chère Helga, la seule femme qu’il aima, aussi brièvement qu’ardemment, d’un amour impossible.

Et c’est tout un monde qui se ravive : entre son élevage de moutons, les pêches solitaires, et sa charge de contrôleur du fourrage, on découvre l’âpre existence qui fut la sienne tout au long d’un monologue saisissant de vigueur. Car Bjarni Gíslason de Kolkustadir est un homme simple, taillé dans la lave, pétri de poésie et d’attention émerveillée à la nature sauvage. Ce beau et puissant roman se lit d’une traite, tant on est troublé par l’étrange confession amoureuse d’un éleveur de brebis islandais, d’un homme qui s’est lui-même spolié de l’amour de sa vie.

Je n’ai qu’un goût modéré pour la nature mais ce livre n’existerait pas sans l’attachement à la terre que sait si bien raconter cet écrivain. Ces histoires sont totalement hors de mon quotidien , j’adore être dépaysée à ce point. L ‘histoire d’amour est très belle : on est bien avec toi Bjarni et on écoute tes histoires. J’ ai un petit faible pour le couple de vieux paysans qui ont vécu loin de tout et qui se sont aimés toute leur vie. Je ne vous raconte pas la solution qu’a imaginée le mari qui ne pouvait pas enterrer le corps de son épouse (le sol était gelé ) et qui ne voulait pas qu’elle soit laissée à l’abandon.

Mais je sais que vous n’oublierez pas l’odeur qui emplissait l’église le jour de son enterrement. Il y a dans ce roman des petites leçons de vie qui sont très agréablement distillées . Je suis moins sensible aux poèmes je les trouve un peu niais ,sans savoir si c’est voulu de la part de l’auteur où si leurs charmes ont du mal à passer en traduction.

 Citations

leçon de vie et exemple du charme du roman

Ah, je suis devenu un vieillard impossible qui prend plaisir à raviver de vieilles plaies. Mais on a tous une porte de sortie. Et nous aspirons tous à lâcher notre moi intérieur au grand air. Mon issue de secours à moi, c’est la vieille porte de la bergerie de feu mon père, celle que le soleil traverse par les fentes, en longs et fins rayons entre les planches disjointes. Si la vie est quelque part, ce doit être dans les fentes. Et ma porte à moi est désormais tellement faussée, branlante et déglinguée qu’elle ne sépare plus vraiment l’intérieur de l’extérieur. Devrais-je mettre au crédit du charpentier ce travail baclé ? Car toutes ces lézardes, ces interstices , laissent passer le soleil de la vie.

 Rudesse et avarice

Son grand-père fut longtemps célèbre pour l’amende d’une demi-couronne qu’il infligea à sa bonne pour avoir renversé le pot de chambre, gaspillant ainsi son contenu. C’est dire si, l’urine, qui servait à dessuinter la laine brute, était précieuse pour ces gens-là, et les rapports humains de peu de prix.

Et encore l’usage de l’urine

A son époque, à la campagne, le savon n’existait pas ; on lavait le linge et les vêtements à l’urine fermentée, comme de toute éternité….Dans sa jeunesse , disait-elle quand les femmes se shampouinaient à la pisse, leur chevelure longue et épaisse resplendissait.

 Reconnaissance

Et il n’y en a pas un qui m’a dit merci, alors que le foin de Tungunes, je l’ai mis en meule au moins dix-sept automne d’affilée.C’est comme ça. Celui qui en vient à mendier a le cœur qui saigne, et ces gars là ne voulaient sans-doute pas reconnaître leur dépendance.

 Proverbe campagnard

Il y a ceux qui allument le feu et ceux qui en profitent.

 Leçon de vie qui me rappelle une chanson de Brassens

Ainsi la règle m’a paru être que les gens prennent dans la vie le contre-pied de ce qu’ils prônent , quelle que soit l’image que revêt leur convicion. A croire que ceux qui parlent de maigrir sont toujours ceux qui sucrent le plus leurs crêpres et que ce sont les grosses brutes qui parlent de « précautions à prendre en présence d’une âme ». Les plus acharnés à condamner le crime sont généralement les criminels les plus endurcis ; le capitalisme qui est censé enrichir tout le monde, ne fait qu’appauvrir. Il faut s’attendre à ce que la liberté dont on parle tant à présent finisse par nous réduire tous en esclavage.

 On en parle

Lisez la réponse à la lettre à Helga du libraire de Lesneven à Bjarni je l’ai trouvée sur le site des éditions Zelma et merci à Jérome chez qui j’avais noté ce livre ainsi que chez Krol (qui a quelques réserves).

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J’ai lu plusieurs articles à propos du deuxième roman de Raphaël Jerusalmy : « La Confrérie des Chasseurs de livres » , et vous souligniez combien vous aviez aimé son premier roman « Sauver Mozart ». Puisque vous m’avez tentée, autant commencer par le premier !

Quel livre ! Ça fait longtemps que je n’ai pas mis 5 coquillages aussi facilement. C’est un roman étonnant et que j’ai lu d’une traite, je vais le relire avec plaisir pour le savourer. Nous lisons les lettres à son fils et le journal de Otto J Steiner, mélomane « un peu juif » qui dit de lui :

Je suis autrichien de confession phtisique . Et fier de l’être.

Il est malade,mal soigné et très malheureux d’être dans ce sanatorium au milieu de gens encore plus malades que lui . Il va mourir et a souvent envie d’avancer l’heure de sa mort. Il n’a personne à qui se confier, sauf ce journal qui pourrait bien être une source de graves problèmes. Si bien que le lecteur est le seul à savoir la vérité sur des sentiments qu’il ne peut que cacher s’il ne veut pas être immédiatement dénoncé et fusillé. C’est peut-être pour cela ,qu’il est a un aussi mauvais caractère, et puis franchement cela devait être difficile d’avoir le sourire en Allemagne en 1939 ! Il rouspète sur tout :

– le cabillaud bouilli du vendredi, et puis l’absence de cabillaud quand les temps seront encore plus durs.

– Le malade qui chantonne des airs obsédants , mais c’est de ce détail que lui viendra une idée extraordinaire !


Il rumine sa vengeance contre ce régime et tous ceux qui assassinent sa si belle musique , je ne peux, hélas ! sans dévoiler les effets du roman, vous dire comment il va s’y prendre. On est pris par ce texte du début à la fin et tout s’enchâsse de façon implacable , l’auteur nous plonge dans l’ambiance hitlérienne et dans la maladie , il le fait avec un tel talent que la lecture transporte son lecteur , par exemple le jour où Mussolini a rencontré Hitler en 1939 sur un quai de gare est grand moment de littérature.

On est bouleversé, également, quand la Gestapo descend dans le sanatorium et que l’on voit ces grands malades parfois grabataires traités comme du bétail. C’est tragique ! Et tout cela à cause du fils du concierge qui paiera de sa vie un geste d’humanité.

Mais ce livre est aussi un hommage à la musique et ravira tous les passionnés de Mozart. Il pose cette question jamais résolue comment se fait-il que les nazis pouvaient écouter cette musique sublime et aller tuer de façon abominable de pauvres ères sans défense ?

Citations

 L’importance de la musique

Je n’ai jamais aussi bien compris la musique que depuis que je n’en écoute plus . Depuis que j’en suis privée par la force des choses. Mais elle a d’autres moyens de se faire entendre . Pas besoin de gramophone. Ni de partition. Le génie musical, c’est le souffle qui traverse « la Flûte enchantée » avant même qu’elle n’émette un seul son. L ‘attente qui précède l’entente . C’est le geste, l’attitude, l’émotion. Rien à voir avec les notes.

Un peu de vocabulaire

J ai l’impression de vendre mon âme. Et de trahir Mozart. Servir de « nègre » à Hans .. « Nègre »?C’est l’expression consacrée. Négritude. Servitude.

Nous sommes tous esclaves des mots.

 La musique et les Allemands

Étrange que les Allemands soient mélomanes. La musique est éternelle approximation.

Et voici la postface, qui pose bien les problèmes de la place de la musique

 Salzbourg fut le haut lieu de la vie culturelle des nazis et le symbole du « rayonnement du Reich » .

Aucun des musiciens et chefs d’orchestre mentionnés dans le journal d’Otto ne prit jamais la défense de la liberté d’expression ni ne prêta la moindre assistance à ses collègues persécutés.

Après la guerre , tous jouirent de l’admiration sans réserve des mélomanes du monde entier.
Aujourd’hui, Salzbourg demeure l’une des capitales de la musique et de l’art. Et le « Festspiel » continue d’avoir lieu, chaque été.

 On en parle

À sauts et à gambades où j’ai pris l’idée de ce livre et lettre express

 Traduit de l’anglais par Céline LEROY

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Roman autobiographique, Jeanette Winterson raconte, dans un style percutant et souvent drôle, sa vie d’enfant adoptée, donc abandonnée et mal aimée par une mère à moitié folle. La famille Winterson se compose d’un père qui fuit tous les conflits, d’une mère qui est à la recherche d’un Dieu vengeur et qui déteste par-dessus tout le plaisir, et de cette petite Janette qui réagit par la colère aux souffrances qu’on lui impose.

Le récit n’est absolument pas larmoyant, même quand il décrit les nuits passées dehors, par la petite fille de 8 ans, assise sur les marches de la maison. Elle est sauvée par la colère qui l’habite et ensuite par les livres, ceux qu’elle lira et ceux qu’elle écrira. J ai beaucoup apprécié la peinture des milieux ouvriers de Manchester, les dures réalités de la pauvreté mais également les formes d’entraides qui existaient et qui n’existent sans doute plus. Janette, préfèrera les femmes aux hommes et sa folle dingue de mère lui fera subir un exorcisme pour ramener la brebis galeuse dans le droit chemin, le jour où elle surprendra sa fille dans les bras d’une amie.

Il y a des moments où j ai beaucoup ri, comme, lorsque adulte elle vient à Noël voir sa famille avec une amie noire , Madame Winterson en bonne missionnaire chrétienne s’efforce d’accueillir cette jeune femme à qui elle fait manger des ananas à tous les repas car elle pense que c’est la nourriture préférée des noirs… La fin du roman décrit la rencontre avec sa famille biologique. Ce n’est pas le happy-end , mais cela fera du bien à l’écrivaine narratrice d’enfin savoir qui est sa mère . Elle nous décrit une dispute avec sa mère qui critique sa mère adoptive .

Elle répond ce qui me semble très juste, que Madame Winterson était là et que si elle était un monstre, c’est son monstre à elle et qu’elle seule a le droit d’en dire du mal. Durant la quête de sa famille biologique elle traversera une dépression terrible dont elle ne sortira que grâce à l’écriture.

Beau texte, on a vraiment envie de lui dire : « Bravo » Jeanette Winterson de vous en être si bien sortie ! »

Citations

Portrait de sa mère Madame Winterson

Ma mère elle-même était une dépressive truculente ; une femme qui cachait un revolver dans le tiroir à chiffons et les balles dans une boîte de produit nettoyant Pledge. Une femme qui passait ses nuits à faire des gâteaux pour ne pas avoir à dormir dans le même lit que mon père. Une femme qui avait une descente d’organes, une thyroïde déficiente, un cœur hypertrophié, une jambe ulcéreuse jamais guérie, et deux dentiers – un mat pour tous les jours et un perlé pour les « grands jours ».

 Scène de son enfance

Chez nous, la lumière est allumée. Comme papa travaille la nuit, elle peut aller se coucher, mais elle ne dormira pas. Elle lira la Bible jusqu’au matin et quand papa sera de retour, il me fera entrer, ne dira rien, et elle non plus ne dira rien et nous ferons comme s’il était normal de laisser son enfant dehors toute la nuit, normal de ne jamais dormir avec son mari.

 Le pouvoir des mots

J’ai eu besoin des mots parce que les familles malheureuses sont des conspirations du silence. On ne pardonne jamais à celui qui brise l’omerta. Lui ou elle doit apprendre à se pardonner.

 L enfance malheureuse

Je suis contrariée qu’il y ait autant d’enfants dont on ne s’occupe jamais et qu’on empêche donc de grandir . Ils vieillissent mais ne grandissent pas. Pour ça il faut de l’amour. Si vous avez de la chance, l’amour viendra plus tard. Si vous avez de la chance, vous ne frapperez pas l’amour au visage.

 L’éducation sexuelle de ses parents

J’ai bien trouvé un livre…. Il s’agissait d’un manuel de sexualité des années 50 intitulé : « Comment combler votre mari »….

En réfléchissant aux horreurs de l’hétérosexualité, j’ai compris que cela ne servait à rien que je plaigne mes parents ; ma mère n’avait pas lu le livre – peut-être l’avait-elle ouvert une fois et l’avait-elle aussitôt écarté en mesurant l’ampleur de la tâche . Le livre n’était pas corné en parfait état, intact. Conclusion, mon père a dû faire sans, et comme je doute fort qu’ils aient jamais couché ensemble, il n’a donc pas eu besoin de passer ses nuits avec Madame Winterson, pénis dans une main et manuel dans l’autre, pendant que sa femme suivait les instructions.

 J ai souri

Madame Winterson marchait à l’obsession et tricotait pour Jésus depuis un an environ. L’arbre de Noël arborait des décorations en tricot, et le chien était harnaché dans un manteau de Noël en laine rouge constellé de flocons blancs. La crèche non plus n’avait pas échappé au tricot et tous les bergers portaient des écharpes parce que Bethléem était sur le trajet de bus qui allait à Accrington.
Quand il a ouvert la porte, mon père portait un nouveau pull et une cravate assortie. La maison avait été retricotée de fond en comble.

 La Bible revisitée

 Je supporte déjà tellement de choses, m’a-t-elle répondu en me lançant un regard lourd de sens. Je sais que la Bible nous dit de tendre l’autre joue, mais on n’a que deux joues pour toute une journée.

On en parle

chez Aifelle un des blogs que je lis régulièrement ainsi que lecturissime

 

 Traduit de l’anglais par Claude et Jean DEMANUELLI

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J’ai passé beaucoup de temps à lire ce roman , tout simplement parce que ce qu’il décrit est à peine supportable. La guerre en Afghanistan vu du côté pakistanais est une horreur et quand un écrivain sait très bien écrire et captive son lecteur, cela devient tragique et trop lourd à supporter parfois. Je n’ai pas renoncé ,d’abord parce que cet écrivain mérite d’être lu mais aussi parce que je me dis que, vivant dans un milieu tellement épargné ,je n’ai pas le droit de fermer les yeux sur les horreurs des guerres qui secouent la planète. Nadeem Aslman met son talent d’écrivain au service de la connaissance des civilisations entre elles. J ai lu dans un des interviews de l’auteur que ce livre apparaît comme un roman d’amour pour les Indiens et les Pakistanais, et un roman sur l’horreur de la guerre pour les Anglais, les Américains et les Européens. Pas de doute je fais partie des Européennes ! Et en plus , je me dis que, si les Pakistanais et les Indiens voient dans ce roman ,une belle histoire d’amour, ils ont une conception étonnante de ce sentiment.

Naheed et Mikal s’aiment mais ils sont davantage unis par la mort que par la vie. Un des aspects les plus intéressants de ce roman , c’est de montrer à quel point les Pakistanais n’ont absolument aucune idée des valeurs de l’occident, et comment les Américains ne connaissent pas mieux les motivations des combattants Afghans ou Pakistanais. Ce roman permet d’avancer dans la compréhension de ce qui s’est passé pendant cette guerre qui n’est pas encore terminée.

Aucun manichéisme dans les personnages , j’ai été bouleversée par le personnage de l’aveugle(Rohan) qui est un musulman sincère et sans être fanatique commet les pires horreurs au nom de sa foi. Il laisse mourir sa femme pour l’aider à retrouver la foi ! Il renvoie un enfant de son école dont la mère se prostitue pour payer les études de son fils….

Je résume rapidement l’histoire ; deux jeunes Pakistanais partent aider les Afghans qui, après le 11 septembre 2001, voient les Américains envahir leur pays. L’un d’entre eux Jeo meurt victime des seigneurs de guerre , l’autre Mikal sera pris et torturé par les Américains. Ces deux jeunes élevés ensemble par le père de Jeo, Rohan, directeur d’une école « L’esprit Ardent » sont liés par un sentiment d’amitié très fort. Hélas ! Ils aiment la même femme, Naheed qui n’est évidemment pas libre de choisir son destin. Finalement seules les femmes et le vieux Rohan survivront au carnage annoncé dès les premières pages. La fuite de Mikal, à travers l’Afghanistan et le Pakistan, permet de décrire les rouages de cette guerre religieuse où tous les coups sont permis, les êtres humains sont de simples pions dans les mains de bandits dont le seul intérêt est de satisfaire leurs plus bas instincts : appât du gain, viol des femmes , et surtout écraser tous les gens un peu différents .

La religion est un arme facile à brandir car personne n’ose s’y opposer et fabriquent des victimes consentantes. La description des paysages rajoute beaucoup, je n’ose dire aux charmes du roman, mais au plaisir de lecture. Ce n’est certainement pas ce livre qui fera aimer l’Islam , on le sait, tous les fanatismes religieux sont dangereux, mais aujourd’hui celui de l’Islam se gère les armes à la main et il faut remonter aux guerres de religions pour en retrouver l’équivalent en France . Il faut espérer que les musulmans sauront interdire que ces violences là soient perpétrées au nom de leur foi car seuls les musulmans ont le pouvoir de faire apprécier leur religion et de montrer au monde que les horreurs qu’on commet au nom de l’Islam n’ont aucun rapport avec leur foi.

Citations

Une belle émotion au début du livre

Au bout de quelques instants , il avait avoué que son angoisse était due à l’apparition du méchant dans l’histoire que son père lui racontait .

« Mais as-tu jamais entendu une histoire dans laquelle les méchants finissent par gagner ? » lui avait demandé Rohan, en riant doucement pour le réconforter.

L’enfant avait réfléchi un moment avant de répondre.

« Non, mais avant de perdre, ils font mal aux gentils. C’est ça qui me fait peur. »

L ‘utilisation des enfants au combat

– La moitié de gamins ne sont pas des soldats, dit Mikal à un chef taliban. Il serait bon qu’ils restent cachés.

– Ce serait bon pour eux, peut-être, mais pas pour notre cause, répond l’autre. Tout le monde doit se battre. Cela aussi, ajoute-t-il d’un ton sans réplique , fait partie des plans d’Allah. »

 Le drame de Rohan

J’ai fait des erreurs quand mon fils était encore enfant , dit Rohan. Sa mère est morte apostat , et, en conséquence , je nous suis imposé , à moi-même et à mes enfants , une forme extrême de piété , les obligeant à prier et à jeûner , leur révélant des choses qu’ils étaient trop jeunes pour concevoir . L’impermanence de ce monde , les tourments de l’enfer et , avant cela, la tombe . J’ai fini par comprendre mon erreur , mais ils ont dû en rester marqués . Je me demande si c’est pour cette raison que mon fils est parti en Afghanistan.

la peur et la haine des Américains

« Je ne tiens pas à être vu en train de soigner un Américain, comme ça en plein vent. On m’abattrait moi aussi. Je connais des gens qui refusent ne serait-ce que de regarder des photos d’Américains. »

L incompréhension

– On ne peut jamais deviner ce qu’ils veulent les Occidentaux. Pour le savoir , il faudrait manger ce qu’ils mangent, porter ce qu’ils portent, respirer l’air qu’ils respirent . Être né là où ils sont nés.

– Pas forcément . Tu as parlé des livres . On peut apprendre dans les livres.

– Personne d’ici ne peut savoir ce que savent les Occidentaux, dit l’homme. On ne les connaîtra jamais. Le fossé est trop profond, trop définitif. C’est comme si on demandait ce que savent les morts ou ceux qui sont à naître.

On en parle

Au bonheur de lire que je ne connaissais pas et voici l’opinion de KROL que je connais bien.