Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard.


Il s’agit de rhum et chez moi, certains ne plaisantent pas avec cette boisson, entre ceux qui parfument la pâte à crêpe et ceux qui le dégustent avec un petit carré de chocolat noir. Il y a même sur cette photo une bouteille de rhum de la même origine que cet auteur franco-vénézuélien. Miguel Bonnefoy part dans ce roman à la recherche du trésor d’un pirate des Caraïbes, et ils nous entraînent dans des contrées aussi fascinantes que dangereuses. Il ne s’agit pas d’un récit réaliste mais évocateurs des difficultés à vivre dans ces pays dominés par une nature luxuriante et des hommes facilement violents surtout s’ils sont en quête de trésors. C’est un auteur dont on parle sur les ondes radiophoniques et j’ai beaucoup entendu que Séréna, la femme et personnage principal, est du type « Emma Bovary » , et que Miguel Bonnefoy nous livrait là un conte philosophique épicé au merveilleux d’Amérique latine. Le roman flotte entre ses eaux là, et se lit très facilement.

Si aimer lire et connaître le monde grâce aux romans c’est faire du bovarysme alors je pense que nous sommes nombreuses à en faire ; si faire mourir sur un tas d’or une femme trop cupide c’est de la philosophie, cela m’étonne un peu ; si décrire un incendie qui mettra trois ans à s’éteindre c’est faire du merveilleux, pourquoi pas ? L’aspect que j’ai préféré c’est bien l’évocation de ces régions, la végétation luxuriante, les excès de pluies puis de sécheresse, le soleil trop violent puis la nuit trop sombres. Oui tout est « trop » dans ce pays des caraïbes . Et on ne peut survivre qu’en maîtrisant ses peurs et ses fièvres. Le rhum doit bien aider un peu, et vous saurez tout sur la façon d’en fabriquer un de grande qualité. Les personnages sont peu crédibles mais ce n’était visiblement pas le propos de cet auteur. Malheureusement, je fais partie des lecteurs qui aiment penser aux personnages et comprendre un peu leur choix de vie sans cet aspect je sais que je ne garderai pas en mémoire très longtemps ce roman. Je me souviendrai d’une odeur de rhum, d’une nature étonnante et de la cupidité des chercheurs d’or.

Citation

Portrait de femme soumise

Elle aimait recevoir des louanges sur l’entretien de sa vaisselle, sur le choix de ses meubles, sur la santé de son mari. Ses draps étaient toujours parfumés de fleurs glissées entre leurs plis. C’était une femme d’une patience minérale et, jusqu’à la fin de sa vie, prépara des soupes créoles, les yeux effacés au fond des marmites, dans sa cuisine où pendaient des jambons secs.

Jolie figure de style

L’heure n’avait pas d’ombre, la chaleur était forte, le soleil mordait la nuque, mais les deux hommes ne faiblissaient pas. 

Le pouvoir des livres

Ces livres enseignèrent à Séréna tout à la fois la servitude et la révolte, l’infidélité et le crime, la magie d’une description et la pertinence d’une métaphore. Ils lui firent découvrir les diverses aspects de la virilité, donc elle ignorait presque tout. Elle appris que la tour de Pise penchait, qu’une muraille entourait la Chine, que des langues étaient mortes, et que d’autres devaient naître.


J’ai rencontré ce roman à Combourg, je cherchais une carte postale avec le portrait de Chateaubriand, cela me semblait le lieu adapté, mais que nenni, le libraire m’a répondu : « on laisse ce genre d’achat au château » (fermé à cette époque de l’année) donc pas de carte de François-René mais un homme qui avait envie de me parler des livres qu’il vendait. En particulier donc de cette maison d’édition, « l’éveilleur » qui publie des textes oubliés. Il a su « éveiller » ma curiosité en me disant que ce livre avait à l’époque, été une sorte de best-seller, il a reçu le prix de l’Académie française. André Lafon était un ami de Mauriac et était promis à un bel avenir littéraire. Et puis, 1914, la guerre, il en mourra indirectement : de constitution faible il attrapera la scarlatine en 1915, cela lui fut fatal. Je pense que si, notre libraire fait aimer aux gens de Combourg ce livre c’est qu’ils ont adopté la campagne, les bois, le rythme lent des activités rurales et le style de François-René de Chateaubriand (et que donc ,il aurait dû vendre une carte de cet auteur ! non mais !).

Le livre est présenté comme « un frère du grand Meaulnes » et un chef d’oeuvre qui mérite sa place dans notre GRANDE littérature. Je dis tout cela parce que mes trois coquillages montrent bien que cela n’a pas vraiment marché pour moi. J’ai eu l’impression de revivre mes dictées de primaires et les textes choisis de CM2 . Le style est aussi parfait que vieillot, plus personne n’écrit comme cela mais c’est aussi très agréable à lire car c’est un livre très court. Je sauve quand même ce roman à cause de la pudeur avec laquelle il raconte ses souffrances de jeune garçon. Son père traité de fou par ses camarades d’école est un grand dépressif qui se suicidera. L’enfant vit dans les non-dits de sa mère et de sa tante qui essaient de lui faire une vie la plus normale possible. Lui, se réfugie dans la contemplation de la nature qu’il décrit avec une grande minutie. J’aimerais bien ne pas être la seule à connaître ce texte et je suis presque certaine que certaines blogueuses vont adorer ce roman.

Je me suis demandé pourquoi la quatrième de couverture évoquait le grand Meaulnes, certes les deux auteurs sont morts à la guerre et n’ont écrit qu’un roman. Certes encore, on voit tout le charme d’une campagne belle et peu atteinte par le monde des villes, certes enfin, les relations entre enfants datent de cette époque. Mais rien d’une superbe histoire d’amour dans « l’élève Gilles », un enfant triste qui se console en s’émerveillant devant les beautés de la nature. Et un style récompensé par l’Académie française en 1913.

Citations

Pudeur d’un rapport douloureux père fils

Mon père ne parut pas au déjeuner ; j’appris qu’il se trouvait las et prenait du repos. J’osai m’en féliciter, car sa présence m’était une contrainte. Il demeurait, à l’ordinaire, absorbé dans ses pensées, et je respectais le plus possible son recueillement, mais le mot, le geste donc il m’arrivait de troubler le silence, provoquait sa colère ; j’en venais à jouer sans bruit , et à redouter et comme la foudre le heurt de quoique ce fût. Cette perpétuelle surveillance où j’étais de moi-même me gênait, à table surtout. Il suffisait de l’attention que j’apportais à me bien tenir pour m’amener aux pires maladresses, la veille même, à dîner, mon verre renversé s’était brisée en tachant largement la nappe. Le sursaut de mon père m’avait fait pâlir, et mon trouble fut plus grand encore à le voir nous laisser et reprendre, au salon, La sonate qu’il étudiait depuis le matin.

Un style vraiment désuet, j’ai impression de retrouver les dictées de mon enfance et les rédactions de primaires

Un doux matin se leva chaque jour sur ma vie qu’il beignait de clarté bleu et de saine fraîcheur.
Je ne savais de la saison triste que le visage ennuyé qu’elle montre à la ville, ses ciels lourds sur les toits et la boue des rues obscures. Je découvris la splendeur de l’hiver. Ma chambre située à l’extrémité de l’aile gauche, ouvrait sur les champs que les vignes dépouillées peuplaient de serpents noirs et de piquets, mais la pureté du ciel pâle s’étendait sur elle, jusqu’au loin lointain à peine brumeux ; un coteau se haussant portait un village où le clocher pointait ; des pas claquaient sur la route aperçue et des voix, parfois, en venaient.
Le jardin nu m’étonna : le paulownia y révélait une ossature tourmentée, les marronniers levaient des bras transis, les arbustes semblaient des balais de brande, la haie un treillis épineux. Les groseilliers se mouraient, près de la fontaine qui dégelait, goutte à goutte, au soleil rose…..

Traduit par André Fayot post face de Bertrand Fillaudreau.


La lecture de ce livre de mémoires me prouve que la blogosphère a permis à mes goûts littéraires d’évoluer. J’ai pris un grand plaisir à cette lecture que je dois à Dominique ( elle même remercie Keisha). Je voulais connaître cet homme qui est considéré comme le « père des parcs nationaux aux USA » . Mes enfants y font des balades extraordinaires chaque été et leurs photos donnent envie de s’y rendre. J’ai toujours cet étonnement face à ce paradoxe, le pays le plus pollueur de la planète est aussi celui qui semble adorer le plus la nature vierge. Plusieurs lectures récentes convergent pour me donner l’impression que l’homme agriculteur est devenu le plus grand prédateur des espèces végétales et animales. Faire pousser du blé ne peut se faire qu’aux prix de souffrances infinies pour l’homme et la nature.
John Muir, les souffrances, il connaît, élevé par un père d’une rigueur qui frise le tortionnaire, il a connu les pires brimades physiques dès son enfance : coups, engelures, travaux de forçat ; il a tout accepté au nom d’un respect filial qui lui vient, on se demande pourquoi ? et comment ?
Toute son enfance, surtout son émerveillement de la nature qui s’offre à lui quand il arrive dans le Wisconsin, est très agréable à lire et on suit avec attachement les péripéties de chaque découverte qu’offrent ces lieux souvent encore vierges. La fin est beaucoup moins passionnante, il est vrai qu’il ne s’agit plus de son enfance. Cet enfant à 10 ans est capable de comprendre la trigonométrie tout seul avec des livres, à 14 ans de construire des horloges sans plan préalable, il a vraiment une intelligence totalement hors norme. Il a appris à lire et à écrire seul ou presque à 4 ans. Il parle latin et allemand. J’aurais aimé qu’il raconte mieux son adaptation au monde des adultes quand il ne vit plus sous la férule de ce père que j’ai détesté tout au long du livre.

Citations

Éducation écossaise fin du XIXe

 Je ne vois rien qui puisse me pousser aujourd’hui à concentrer plus fort mon attention que quand j’étais enfant, ce que réussissait le fouet -une gigantesque raclée le plus souvent. Les instituteurs écossais de la vieille école ne passaient pas leur temps à tenter de trouver des chemin raccourcis vers la connaissance, ni d’expérimenter les dernières trouvailles en matière de méthode psychologique, tellement en vogue de nos jours. Il n’était pas question de rendre nos bancs confortables, ni nos leçons faciles. On nous collait seulement de but en blanc devant nos livres, comme des soldats face à l’ennemi, en nous ordonnant d’un ton sans réplique : « Allez au travail ! Apprenez vos leçons ». Et à la moindre erreur, si minime fût-elle, c’était le fouet, car avait été fait cette extraordinaire découverte, aussi simple que définitive, et tellement écossaise, qu’il existait une relation directe entre la peau et la mémoire, et qu’irriter celle-là stimulait celle-ci au degré souhaité quel qu’il fût.

 Les bagarres

Quand on avait la chance de finir un combat sans un œil au beurre noir, on échappait généralement à une dégelée à la maison et une autre le lendemain matin à l’école, car les autres traces de l’échauffourée pouvaient être lavées facilement au puits près de l’église, ou bien dissimulées, ou mise au compte des aspérités du terrain ; tandis qu’un œil poché ne pouvait trouver d’autre explication qu’une bagarre en règle. La double correction en était la sanction inéluctable mais sans aucun effet  : les bagarres se continuaient sans la moindre accalmie, comme les ouragans, car aucune autre punition que la mort n’aurait pu supprimer la vieille agressivité atavique qui brûlait dans nos veines de païens, pas plus qu’on arrivait à nous faire admettre que père et maître pouvaient légitimement nous étriller aussi laborieusement pour notre bien, tout en refusant le plaisir de nous castagner les uns les autres pour le même bien.

Genre de livres où Wikipédia rend bien des services ….

Et il en allait tout de même avec les calopogons, les pogonies, les spiranthes et quantité d’autres populations végétales. Le magnifique turban de Turc ( Lilium superbum), qui croît sur les berges des cours d’eau, était rare chez nous, alors que le lis orangé poussait en abondance en terrain sec sous les chênes à gros fruits et nous rappelait bien souvent la plate-bande de tante Ray en Écosse. Grâce à ses fleurs rouge écarlate, l’asclépiade tubéreuse ou herbe à ouate attirait des volées de papillons et produisait de superbes masses de couleur.

Une éducation à la dure

 Mes aventures me remettent en mémoire l’histoire de ce garçon qui, en escaladant un arbre pour voler un nid de corbeau, tomba et se cassa la jambe, mais qui, sitôt guéri, se força à grimper jusqu’au sommet de l’arbre du haut duquel il avait culbuté.

La prégnance de la morale

 Comme à l’ensemble des petits écossais, on nous enseignait la plus stricte abnégation, à propos et hors de propos, à faire fi de la chair et à la mortifier, à veiller à garder nos corps soumis aux préceptes de la Bible et à nous punir sans merci pour toute faute commise ou simplement imaginée. Lorsque, en aidant sa sœur à ramener les vaches, un gamin usa un beau jour d’un terme défendu : « faudra que je l’dise à papa, fit la jeune fille horrifiée. J’le lui dirai, qu’t’as dit un vilain mot…
-J’ai pas pu l’empêcher d’me v’nir répondit l’enfant par manière d’excuse. C’est pas pire de le dire tout haut que de l’ penser tout bas ! »

Après avoir décrit le Wisconsin comme le paradis des oiseaux , il décrit cette scène horrible (cette espèce de pigeons a complètement disparu, on comprend pourquoi !)

Les pigeons, à ce moment-là, étaient rares un grand nombre de personnes, équipées de chevaux et de chariot, et armées de fusil, de longues perches, de pots à soufre, torches de poix, etc, avaient déjà planté leur camp sur le pourtour deux fermiers installés à plus de cent milles de là avaient amené quelques trois cents porcs pour les faire engraisser sur les pigeons massacrés. Un peu partout, des gens employés à plumer et à saler ce qui avait déjà été mis de côté étaient assis au milieu de monceaux d’oiseaux. La terre était couverte d’une couche de fiente de plusieurs pouces d’épaisseur. Quantité d’arbre de deux pieds de diamètre étaient brisés guère au-dessus du sol, et les branches de beaucoup d’autres parmi les plus hauts et les plus étendus avaient cédé, comme si un ouragan avait balayé la forêt.
Au coucher de soleil, pas un pigeon n’était encore arrivé. Mais un cri général s’éleva tout à coup :  » Les voilà ! ». Ils étaient encore loin, mais le bruit qu’ils faisaient me rappelait, en mer, un violent coup de vent qui passe à travers les gréements d’un navire dont on a serré les voiles. Des milliers furent bientôt abattus à coups de perche, mais les oiseaux ne cessaient pas pour autant d’affluer. Puis les feux s’allumèrent et un tableau aussi terrifiant que superbe se mit en place. Les pigeons qui se déversaient à flots se posaient partout, les uns sur les autres, si bien qu’il se formait des masses compactes sur toutes les branches. Ça et là des perchoirs roulaient avec fracas, et, dans leur chute en abattaient des centaines d’autres, précipitant les groupes extrêmement serrés d’oiseaux dont étaient chargé le moindre rameau, spectacle de conflit et de tumulte. Je m’aperçus qu’il était parfaitement inutile de parler ou même de crier au gens qui m’entouraient. Les coups de fusil, on les entendait rarement, et ce n’est qu’en voyant les hommes recharger leurs armes que je comprenais qu’ils avaient tiré. Personne n’osait s’aventurer à l’intérieur du périmètre du carnage. On avait parqué les cochons en temps utile, le ramassage des morts et de blessés étant remis au lendemain matin. Les pigeons affluaient toujours, et ce ne fut qu’après minuit que je perçus une diminution du nombre des arrivants. Le vacarme dura toute la nuit.
Vers les premières lueurs du jour, le bruit s’atténua quelque peu ; longtemps avant qu’on pût distinguer les formes, les pigeons commencèrent à s’en aller dans une direction différente de celle où ils étaient venus la veille, de sorte que quand le soleil se leva tout ce qui était capable de voler avait disparu. Ce fut alors le hurlement des loups qui se fit entendre, et l’on vit arriver furtivement renards, lynx, couguar, ours,raton laveur, opossum et putois, tandis que des aigles des éperviers de différentes espèces, accompagnés d’une armée de vautour, approchaient pour tenter de les évincer et d’avoir leur part de butin.
Les auteurs du carnage se mirent alors à avancer parmi les morts, les mourants et les mutilés et à ramasser les pigeons et aller mettre en tas, ce jusqu’à ce que chacun ait autant qu’il voulait, après quoi les cochons furent laisser libres de dévorer les restants.

L’inconfort total

 Dans toute la maison, il n’y avait en fait de feu que le fourneau de la cuisine, avec son foyer de cinquante centimètres de long sur vingt cinq de large et autant de haut – à peine de quoi y mettre trois ou quatre petites bûches-, autour duquel, lorsqu’il faisait – 20 dehors, les dix personnes que nous étions dans la famille grelottaient, et sous lequel nous trouvions, le matin, nos chaussettes et nos grosses bottes imprégnées d’eau gelée en bloc. Et nous n’avions pas même le droit de ranimer ce misérable petit feu dans sa boîte noire pour les dégeler. Non, nous devions y comprimer nos pieds endoloris et tout palpitant d’engelures, au prix de douleurs pires qu’une rage de dent, et filer au travail.

Je crois relire homo sapiens : le malheur de la révolution agricole

Dans ces temps reculés, longtemps avant l’arrivée des machines qui nous épargnent tant de peine, tout (ou presque) ce qui touchait à la culture du blé imposait des travaux éreintant – faucher sous la chaleur des longues journées de la canicule, râteler et lier des gerbes, faire les meules et battre le grain -, et je me disais bien souvent que la façon brutale, frénétique, que nous avions de faire sortir le grain de terre ressemblait trop à une excavation de tombes.

Traduit de l’anglais (Australie) par Françoise Rose.

Ce roman a le grand mérite de tenir la distance Saint-Malo/Paris. Il a, de plus, beaucoup plu à la petite souris jaune. Moins à moi, mais je suis toujours réticente aux histoires d’animaux et celle-là même si elle est très belle est particulièrement invraisemblable. On peut aimer pour le dépaysement africain , pour l’amour des lions, et la beauté de notre planète qui est de moins en moins sauvage et de plus en plus tristement humaine. J’apprécie tous ces thèmes mais qu’une lionne veuille et sache sauver la vie d’une petite fille de 7 ans cela me semble totalement invraisemblable. Autant que l’attachement subit et fort de la chercheuse quadragénaire pour cette enfant. Le happy end n’est pas de trop, il est à l’image du livre « à l’eau de rose » de la savane. Et pourtant, malgré tous ces défauts, l’auteure a su m’emporter dans l’Afrique dure et superbe des grands espaces. Dans le genre « le lion » de Kessel est plus réaliste, peut être démodé, je ne sais pas, je ne l’ai relu depuis si longtemps. La souris jaune vous promettait une lecture d’été et je rajouterai si vous aimez les lectures d’adolescents défenseurs de la planète.

Citations

Genre d’images qui créent un ailleurs

Quand le soleil atteignit l’horizon, il se répandit sur la plaine. Angel retint son souffle. Majestueusement et immobile, la lionne se découpait sur le ciel nimbée d’une lumière dorée, telle une créature de feu.

La psychologie de magazine féminin

Et si cela n’avait rien à voir avec son apparence ou son caractère ? Si c’était plutôt elle qui avait toujours choisi de vivre avec des gens qui l’abandonnaient constamment ? Si elle avait inconsciemment cherché à reproduire la relation qu’elle avait eue avec sa mère, traînant ce schéma derrière elle depuis des années, comme une malédiction ?

Metin Arditi est un auteur que j’aime bien et qui est très facile à lire. Il y a toujours de l’élégance dans ses romans. Je n’ai pas encore créé cette catégorie, sinon il ferait partie des auteurs « bien élevés », certes on peut lui reprocher un manque de profondeur mais j’apprécie sa délicatesse. Dans ce roman, il a dû se faire très plaisir car il a pu mettre en scène ses chères mathématiques. Je comprends bien que pour un amoureux de cette science ce soit un peu compliqué de ne jamais en parler, ici il a trouvé un biais pour nous raconter tous ses bonheurs, celui de rêver aux suites des nombres. Deux personnages se retrouvent dans une île grecque Kalamaki. Un ancien architecte dévasté par la mort de sa fille sur cette île et le garçon autiste d’une femme énergique qui vit de la pêche et qui élève seule ou presque cet enfant. Yannis est autiste Asperger, il ne peut pas communiquer mais passe sa vie à calculer. Les habitants de l’île savent lui faire une place et sa vie est heureuse même si elle est compliquée et que sa mère est terrorisée par son avenir. Dans ce cadre idyllique, un projet hôtelier risque de détruire ce petit paradis.

 

Arditi parle aussi des problèmes de la Grèce actuelle et ce n’est pas une peinture idyllique. La fin est mesurée, j’ai eu peur que « le contre projet à l’hôtel de l’horrible promoteur » soit vaincu par »l’idyllique le projet d’une école philosophique du gentil écologiste architecte ». Comme nous sommes avec Arditi, la fin est plus mesurée et plus réaliste. Je suis un peu gênée par l’intérêt actuel des personnes autistes, je trouve, évidemment, très important de savoir en parler. Cela fait de très beaux sujets de romans, le plus souvent, ils sont Asperger, c’est à dire qu’ils ont un don étonnant par rapport à « la normalité », ils sont doués d’une mémoire hors norme. Cela donne un bon ressort romanesque mais c’est autrement plus compliqué dans la vie réelle.

Citations

Propos du Pope, j’aime beaucoup ces trois ancres

Pour ma part, je m’accroche à trois pensées du Christ. Aux trois ancres qu’il nous a léguées pour nous aider à surmonter la tempête.

La première est notre part de libre arbitre…. Moi, lorsque je me sens à deux doigts d’être emporté par la colère, je fais la promenade qui, du monastère, mène jusqu’au phare…. À toi de chercher ce qui, dans ta vie, dépendra de de ta seule volonté. Ne serait-ce qu’une promenade le long de la mer.

Le deuxième ancrage que nous offre le Christ est sa résurrection. À chaque instant, l’être recommence. La vie reprend ses droits… la Résurrection du Christ n’est pas à chercher dans les circonstances. Elle est partout. Il en est de même pour celle des hommes. À chaque instant la vie recommence

Voici enfin la troisième ancre. La vie renaît par le travail. Souviens-toi. Trois fois avant le chant du coq, tu me trahiras, dis-le Christ à Pierre. Pourtant, c’est à lui, le traître, qu’il confiera la construction de son Église. Et cette tâche sauvera Pierre… Nous le savons, aucun travail ne pourra effacer ton immense douleur. Mais il t’aidera à l’adoucir. Mets-toi au travail. Où tu le voudras, en faisant ce que tu jugeras opportun. Ne reste pas désœuvré. Ici commence ton libre arbitre.

Traduit de l’anglais (États-Unis) par Sarah Gurcel

 Je dois la lecture de ce livre à Philippe Meyer (avec un « e » à Philippe) il anime une émission que j’écoute tous les dimanches matin, « L’esprit public » , elle se termine par une séquence que j’attends avec impatience celle des « brèves » où chaque participant recommande une lecture, un spectacle, un CD. Un jour Philippe Meyer a recommandé ce roman et ses mots ont su me convaincre. Je profite de billet pour dire que la direction de France-Culture, après avoir censuré Jean-Louis Bourlanges, évince Philippe Meyer en septembre. Je ne sais pas si des lettres de protestations suffiront à faire revenir cette curieuse direction sur cette décision, mais j’engage tous ceux et toutes celles qui ont apprécié « L’esprit public » à écrire à la direction de France-Culture.
J’ai rarement lu un roman aussi éprouvant. J’ai plus d’une fois pensé à Jérôme qui, souvent s’enthousiasme pour des écritures sèches décrivant les horreurs les plus absolues. C’est exactement ce que j’ai ressenti lors de cette lecture. Les massacres de la famille du colonel McCullough par les Comanches, celui de la famille Garcia par les rangers américains sont à peu près insoutenables parce qu’il n’y a aucun pathos mais une précision qui donne envie de vomir. Ce grand pays est construit sur des monceaux de cadavres. Je suis restée une quinzaine de jours avec les trois personnages qui, à des époques différentes, finissent par décrire exactement d’où viennent les États-Unis. L’ancêtre Elie McCullogh est né en 1836, il vivra cent ans et établira la fortune de la famille. Son passage chez les Comanches fera de lui un redoutable prédateur mais aussi un homme d’une intelligence remarquable. Son fils Peter né en 1870 ne se remettra jamais de l’assassinat par son père et ses amis de la famille Garcia des Mexicains qui avaient 300 années de présence à côté du ranch de son père, eux-mêmes avait, évidemment auparavant, chassés les Indiens. Enfin, la petite fille de Peter Jeanne-Anne McCullogh née en 1926, enrichie par le pétrole et qui sera la dernière voix des McCullogh.
La vie chez les Comanches est d’une dureté incroyable et n’a rien à voir avec les visions romantiques que l’on s’en fait actuellement. Mais ce qui est vrai, c’est que leur mode de vie respectait la nature. La civilisation nord-américaine est bien la plus grande destructrice d’un cadre naturel à l’équilibre très fragile. Entre les vaches ou le pétrole on se demande ce qui a été le pire pour le Texas. Lire ce roman c’est avoir en main toutes les clés pour comprendre la nation américaine. Tous les thèmes qui hantent notre actualité sont posés : la guerre, la pollution des sols, le racisme, le vol des terres par les colons, la place des femmes.. mais au delà de cela par bien des égards c’est de l’humanité qu’il s’agit en lisant ce roman je pensais au livre de Yuval Noah HARARI. C’est une illustration parfaite de ce que l’homme cueilleur chasseur était plus adapté à son environnement que l’agriculteur.

Citations

PREMIÈRE PHRASE

On a prophétisé que je vivrai jusqu’à cent ans et maintenant que je suis parvenu à cet âge je ne vois pas de raisons d’en douter.

Humour

On sait bien qu’Alexandre le Grand lors de sa dernière nuit parmi les vivants, a quitté son palais en rampant pour tenter de se noyer dans l’Euphrate, sachant quand l’absence de corps son peuple le croirait monter au ciel parmi les dieux. Sa femme l’a rattrapé sur la berge ; elle l’a ramené de force chez lui où il s’est éteint en mortel. Et après on me demande pourquoi je ne me suis jamais remarié.

La dure loi du Texas

 » C’est comme ça que les Garcia ont eu leur terre, en se débarrassant des Indiens et c’est comme ça qu’il fallait qu’on les prenne. Et c’est comme ça qu’un jour quelqu’un nous les prendra. Ce que je t’engage à ne pas oublier ».
Au final mon père n’est pas pire que nos voisins : eux sont simplement plus modernes dans leur façon de penser. Ils ont besoin d’une justification raciale à leurs vols et leurs meurtres. Et mon frère Phinéas est bien le plus avancé d’entre eux : il n’a rien contre les Mexicains ou contre toute autre race , mais c’est une question économique. La science plutôt que l’émotion. On doit soutenir les forts et laisser périr les faibles. Ce qu’aucun d’eux ne voit, ou ne veut voir, c’est qu’on a le choix.

les différences de comportement selon les origines

L’Allemand de base n’était pas allergique au travail : il suffisait de voir leurs propriétés pour s’en convaincre. Si, en longeant un champ, vous remarquez que la terre était plane et les sillons droits, c’est qu’il appartenait à un Allemand. S’il était plein de pierres et qu’on aurait dit les sillons tracés par un Indien aveugle, ou si on était en décembre et que le coton n’était toujours pas cueilli, alors vous saviez que c’était le domaine d’un blanc du coin qui avait dérivé jusqu’ici depuis le Tennessee dans l’espoir que, par quelque sorcellerie, Dame Nature, dans sa largesse lui pondrait un esclave.

Le charme des noms Comanches

Bien des noms Comanches étaient trop vulgaires pour être consignés par écrit, aussi, quand la situation l’exigeait, les Bancs les modifiaient. Le chef qui emmena le fameux raid contre Luneville en 1840 (au cours duquel cinq cents guerriers pillèrent un entrepôt de vêtements raffinés et s’enfuirent en haut de forme, robe de mariée et chemise de soie) s’appelait Po-cha-na-quar-hip ce qui signifiait Bite-Qui-Reste-Toujours-Dure. Mais pas plus cette version que la traduction plus délicate d’Érection- Permanente ne pouvait paraître dans les journaux,aussi décida-t-on de l’appeler Bosse-de-Bison.

Après 15 pages inoubliables pour expliquer l’utilisation de la moindre partie du corps du bison pour les Comanches, voici la dernière phrase

 On laissait toujours le cœur la même où le bison était tombé : lorsque l’herbe pousserait entre les côtes restantes, le Créateur verrait que son peuple ne prenait que ce dont il avait besoin et veillerait à ce que les troupeaux se renouvellent et reviennent encore et encore
 

Les richesses dues au pétrole

La provision pour reconstitution des gisements et quelque chose de totalement différent. Chaque année, un puits qui produit du pétrole te fait gagner de l’argent tout en te permettant de réduire des impôts.
– Tu fais un bénéfice mais tu appelles ça une perte ».
Elle voyait bien qu’il était satisfait.
– » Ça paraît malhonnête.
– » Au contraire. C’est la loi aux États-Unis.
-Quand même.
– Quand même rien du tout. Cette loi a une bonne raison d’être. Il y a des gens pour élever du bétail, même à perte : pas besoin de mesures incitatives. Alors que le pétrole, lui, coûte cher à trouver, et encore plus cher à extraire. C’est une entreprise infiniment plus risquée. Alors si le gouvernement veut que nous trouvions du pétrole, il doit nous encourager.

Le fils (d’où le titre)

Être un homme signifiait n’être tenu par aucune règle. Vous pouviez dire une chose à l’église, son contraire au bar, et d’une certaine façon dire vrai dans les deux cas. Vous pouviez être un bon mari, un bon père, un bon chrétien, et coucher avec toutes les secrétaires, les serveuses, les prostituées qui vous chantaient.

La guerre de Sécession

À la fin de l’été, la plupart des Texans étaient persuadés que si l’esclavage été aboli, le sud tout entier s’africaniserait, que les honnêtes femmes seraient toutes en danger et que le mot d’ordre serait au grand mélange. Et puis, dans le même souffle, ils vous disaient que la guerre n’avait rien à voir avec l’esclavage, que ce qui était en jeu, c’était la dignité humaine, la souveraineté, la Liberté elle-même, les droits des états : c’était une guerre de légitime défense contre les ingérences de Washington. Peu importait que Washington ait protégé le Texas des visées mexicaines. Peu importait qui le protège encore de la menace indienne.

La Californie

Une fois la sécession votée, l’ État du Texas se vida……
Des tas de sécessionnistes partirent aussi. Sur les nombreux train qui s’en allaient vers l’ouest, loin des combats, on voyait souvent flotter haut et fier le drapeau de la Confédération. Ces gens-là était bien favorables à la guerre, tant qu’ils n’avaient pas à la faire. J’ai toujours pensé que ça expliquait ce que la Californie est devenue.

Principe si étrange et malheureusement pas si faux !

Mon père a raison. Les hommes sont faits pour être dirigés. Les pauvres préfèrent moralement, sinon physiquement, se rallier aux riches et aux puissants. Ils s’autorisent rarement à voir que leur pauvreté et la fortune de leurs voisins sont inextricablement liés car cela nécessiterait qu’ils passent à l’action, or il leur est plus facile de ne voir que ce qui les rend supérieurs à leurs autres voisins simplement plus pauvres qu’eux. 

Ce livre est dans mes listes depuis …… longtemps ! j’apprécie cette auteure qui fait partie des gens qui me font du bien. D’abord parce que Katarina Mazetti aime raconter des histoires et que j’adore que l’on m’en raconte. Ensuite, parce qu’elle a un sens de l’humour avec lequel je suis bien : jamais méchant mais tellement pertinent. La fin est peut-être trop gentille, mais elle ne fait que deux pages et il fallait bien finir ! C’est pourtant pour cette raison et l’aspect un peu caricatural de certains personnages que ce roman n’a pas eu ses cinq coquillages que j’ai parfois eu très envie de lui mettre. Nous sommes embarqués sur un bateau de croisière vers l’Antarctique avec des Suédois sans soucis financiers mais avec parfois des difficultés bien plus graves. Les deux personnages centraux sont un journaliste et une certaine Wilma. Le journaliste se noie dans un divorce qui le prive de ses enfants. Tous les torts sont évidemment, selon lui, du côté de son épouse, mais peu à peu on se rendra compte que ce n’est peut être pas si simple. Et surtout, comme dit mon beau-frère préféré « il y a malheur plus grand » : que cache, en effet, la raideur et la maladresse de Wilma ? Il prend le risque à force de ne s’intéresser qu’à sa petite personne et profiter sans vergogne de la gentillesse et de l’optimisme de celle qui ne veut pas étaler ses problèmes de passer à côté d’une véritable difficulté de la vie. Et puis, il y a, Alba qui compare chaque type humain à des comportements des animaux mais préfère ces derniers au hommes car  : l’expression « les hommes sont des animaux » est une offense aussi bien envers les manchots que les autres espèces animales. C’est vrai que ce n’est pas un roman qui va rester à vie dans ma mémoire mais il m’a fait sourire et j’ai bien aimé les observations sur les comportements des mammifères dits supérieurs, un peu caricaturaux, peut-être comme ces deux sœurs : l’une, la riche exploite sans pitié la gentillesse de l’autre, la plus pauvre. Ces petits bémols ne doivent pas faire oublier que c’est avant tout un roman léger et agréable et pas l’étude du siècle sur les mœurs de la société suédoise.

Citations

Préface

Tous les personnage de ce roman ont été tirés d’un compost d’observation diverses et de fragments de souvenirs qui a mûri dans la tête de l’auteur durant un laps de temps indéfini.

C’est indiqué « bagages » avec une flèche à droite et une autre à gauche. Sur le même panneau ! J’ai un faible pour les Français, mais Charles-de-Gaulle est un concentré de leurs pires défauts.

Des noms qui font rêver (ou pas)

Thiruvananthapuram 

C’est vrai en France aussi

Regardez le public au théâtre ou dans les vernissages ! Quatre-vingt-dix pour cent sont des femmes, la plupart ayant dépassé la cinquantaine, les dix pour cent restants y ont été traînés par une femme. Interdisez l’accès aux femmes de plus de quarante-cinq ans et vous pouvez annuler toute vie culturelle suédoise !

Le résultat d’une enquête journalistique

Le conseiller d’éducation s’est pendu avant le procès laissant une épouse et trois enfants dont deux fréquentaient son école. La réputation de la remplaçante a été ruinée et elle a perdu son boulot. Le seul à être vraiment heureux à probablement été l’enfoiré qui avait vendu l’histoire au départ. Et puis, nous les trois épaulards . Dans une bonne humeur forcée, nous sommes allés nous saouler au pub pour célébrer notre activité si utile à la société.
Bon évidemment qu’elle était utile à la société, je le soutiens encore aujourd’hui. Mais. La vie de six personnes à été détruite.

Philosophie du marin

Tout le monde devrait connaître un bon mal de mer de temps en temps, a-t-il marmotté. Ça vous rend humble et doux, on se rend compte qu’on n’a pas grand-chose à opposer à la nature. Je crois que je vais inventer un comprimé de mal de mer qui fonctionne à l’envers. Pour le jeter dans le gosier des tyrans omnipotents aux quatre coins du monde quand ils s’apprêtent à envahir un pays , ou à dévaster une forêt, ou simplement à battre leur femme.

Un vantard

Göran est resté au bar à raconter à ceux qui voulaient bien l’écouter qu’il n’avait jamais eu le mal de mer. Ce qui est sans doute vrai -mais il n’a pas précisé qu’il n’avait jamais vraiment pris la mer, seulement fait des courses en hors-bord sur le lac près de chez nous.

J’ai souri

C’est un peu comme boire un verre de cognac quand on sent venir un gros rhume. Ça ne guérit personne, mais on s’amuse plus en attendant d’être patraque.

 

 

 Lu dans le cadre du club de lecture de la média­thè­que de Dinard, où il a obtenu un coup de cœur. Traduit de l’américain par Josette Chicheportiche.


Véritable emballement de la blogosphère, ce livre mérite les coups de cœur qu’il a reçu chez Krol, Dominique, Aifelle, Jérôme et Noukette et beaucoup d’autres dont je mettrai les noms au fur et à mesure des commentaires. J’avais une réserve à cause de la référence à « La Route« , roman que j’avais peu apprécié. Ici l’apocalypse supposée est beaucoup plus crédible, et elle ne constitue pas l’essentiel du roman. D’ailleurs avant même que le monde s’effondre, on ne sait pas trop pourquoi, cette famille avait choisi de vivre au cœur d’une forêt. les deux filles Neil et Eva ne vont pas à l’école et sont éduquées par leurs parents, l’une sera danseuse et l’autre prépare son entrée à Harvard. Mais peu à peu le monde s’arrête et tout le confort que notre société nous procure disparaît, et finalement les deux jeunes filles doivent vivre seules au milieu d’une forêt et de rencontres pas toujours amicales. On retrouve un peu les efforts de survie que doit faire l’héroïne du « mur invisible » pour assurer sa survie mais le message est différent. Ce n’est pas, en effet, le savoir de l’homme qui va sauver les deux filles mais la connaissance de la nature. Et si ce roman, s’appelle « dans la forêt », c’est parce que leur salut viendra de ce que la forêt peut leur apporter. Comme avant elles, les rares indiens qui ont pu échapper à l’extermination programmée de leurs peuple.

Je relis en ce moment « Sapiens une brève Histoire de l’humanité » on y retrouve ce même message, la révolution agricole nous dit Yuval Noah Harari est la plus grande escroquerie de l’histoire et elle a asservi l’homme au lieu de le libérer. Nos deux héroïnes vont donc revenir au stade des « chasseurs cueilleurs » beaucoup plus adapté à la survie en forêt. Je pense que les écologistes vont adorer ce roman qui a tout pour leur plaire, de plus l’écrivaine vit au fond des bois de l’écriture de ses livres et de l’apiculture. Mais ce n’est pas qu’un roman à messages, c’est aussi une intrigue bien menée et les personnages sont intéressants et crédibles. J’ai vu le film qui a été tiré de cette histoire, il insiste beaucoup sur la rivalités et le lien entre les deux sœurs, encore un film qui est beaucoup mins intéressant que le roman. Si j’ai une petite réserve, c’est que je garde, malgré moi, un certain agacement vis à vis des Américains qui sont les plus farouches défenseurs de l’environnement et en même temps les plus grands pollueurs de la planète.

Citations

Le plaisir d’habiter un lieu isolé ,un plaisir que je ne partage pas

Voilà le vrai cadeau de Noël, nom de Dieu -la paix, le silence de l’air pur. Pas de voisins à moins de six kilomètres , et pas de ville à moins de cinquante. Bénis soient Bouddha, Shiba, Jéhovah et le service des Forêts de Californie, nous vivons tout au bout de la route !

Nell et Eva s’approprient la forêt

Petit à petit , la forêt que je parcours devient mienne, non parce que je la possède, mais parce que je finis par la connaître. Je la vois différemment maintenant. Je commence à saisir sa diversité -dans la forme des feuilles, l’organisation des pétales, le millions de nuances de verts. Je commence à comprendre sa logique et à percevoir son mystère. Où que j’aille, j’essaie de noter ce qu’il y a autour de moi – un massif de menthe, une touffes de fenouil, un buisson de manzanita ou d’amarante à ramasser maintenant ou plus tard quand je reviendrai, quand le besoin se fera sentir ou que ce sera la saison.


Ce livre, cadeau d’amis navigateurs, a été récompensé par plusieurs prix et commenté de façon très élogieuse sur de nombreux blogs. Si j’ai quelques réserves sur ce roman et que je n’en fais pas comme tant d’autres lecteurs et lectrices un coup de cœur, je le considère cependant comme un très grand roman. Catherine Poulain, cette petite femme à la voix si douce est à coup sûr une romancière étonnante. Elle raconte, son expérience de 10 ans en Alaska, où elle est allée faire la pêche dans des conditions extrêmes. C’est une femme de défis, et elle veut montrer à tous, et d’abord à elle même qu’elle peut tenir sa place sur les bateaux menés par des hommes par tous les temps.

Comme elle n’a aucun préjugé, elle cherche à connaître ces marins qui après avoir passé des semaines en mer dans des conditions de fatigue effroyable reviennent à terre pour se saouler dans les bars des ports. Elle en fait des portraits au plus près de la réalité et trouve en chacun d’eux, même ceux qui roulent dans le caniveau après leur beuveries, leur part d’humanité. J’ai beaucoup aimé ces récits de pêche et on reste sans voix devant la violence contre l’espèce animale. Les scènes où ces hommes tuent ces superbes poissons sont d’une beauté mais d’une tristesse infinie, les hommes sont-ils obligés de tant de cruauté pour se nourrir ? Même les limites imposées par les contrôles pour la survie des espèces ne sont guère rassurantes pour la reproduction des gros poissons des mers froides. Bien sûr, les pêcheurs ne doivent pas ramener des poissons trop petits, ils les rejettent donc dans les flots, seulement qui s’inquiètent qu’ils soient déjà à l’état de cadavres ? Tout cela est parfaitement raconté, alors pourquoi ai-je quelques réserves ? C’est un récit très répétitif surtout quand Lily est à terre. Je n’ai pas une grande passion pour les beuveries dans les bars et il y en a beaucoup, beaucoup trop à mon goût dans ce roman.

Citations

Être pêcheur

Embarquer, c’est comme épouser le bateau le temps que tu vas bosser pour lui. T’as plus de vie , t’as plus rien à toi. Tu dois obéissance au skipper. Même si c’est un con (…..) Manquer de tout, de sommeil, de chaleur, d’amour aussi, il ajoute à mi-voix, jusqu’à n’en plus pouvoir, jusqu’à haïr le métier, et que, malgré tout on en redemande, parce que le reste du monde vous semble fade, vous ennuie à devenir fou. Qu’on finit par ne plus pouvoir se passer de cette ivresse, de ce danger, de cette folie !

Dangers de la pêche

– Mais a quoi exactement je dois faire attention ?
– À tout. Aux lignes qui s’en vont dans l’eau avec une force qui t’emporterait si tu te prends le pied, le bras dedans, à celles que l’on ramène qui, si elles se brisent, peuvent te tuer, te défigurer … Aux hameçons qui se coincent dans le vireur et sont projetés n’importe où, au gros temps, au récif que l’on n’a pas calculé, à celui qui s’endort pendant son quart, à la chute à la mer, la vague qui t’embarque et le froid qui te tue….

Scènes à vous dégoûter de manger du poisson et une idée du style de l’auteure

Mais non, pas des dollars …. des poissons bien vivants… des créatures très belles qui happent l’air de leur bouche stupéfaite, qui tournoient follement sur le clair blanc de l’aluminium, aveuglés par le néon, se cognent encore et encore à cet univers cru où tout est tranchant, toute sensation blessante.

Une femme à bord

Une femme qui pêche va se fatiguer autant qu’un homme, mais il va lui falloir lui trouver une autre manière de faire ce que les hommes font avec la seule force de leurs biscoteaux, sans forcément réfléchir, tourner ça autrement, faire marcher son cerveau. Quand l’homme sera brûlé de fatigue elle sera encore capable de tenir longtemps, et de penser surtout. Bien obligé.

Que cherche-t-on dans ces conditions extrêmes

Vous êtes venus chercher quelque chose qui est impossible à trouver. Une sécurité ? Enfin non même pas puisque c’est la mort que vous avez l’air de chercher, ou en tout cas vouloir rencontrer. Vous cherchez… une certitude peut-être… quelque chose qui serait assez fort pour combattre vos peurs, vos douleurs, votre passé -qui sauverait tout, vous en premier.

20160914_104257-1Traduction de l’anglais par Pierre CLINQUART entièrement revue et corrigée

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Je suppose que cette remarque « entièrement revue et corrigée » veut dire qu’il existe une première traduction un peu moins fidèle au texte ? Je suis restée quelques jours en compagnie d’un groupe de lapins dirigés par Hazel, un chef par qui beaucoup de groupes humains aimeraient être eux-mêmes guidés : il est intelligent, éprouve de la compassion et est ouvert à tous les conseils qui peuvent aider sa petite meute de lapin à survivre dans un milieu qui ne veut que leur destruction. Merci Keisha, ton enthousiasme est communicatif et je comprends d’autant mieux ton plaisir qu’enfant, tu avais déjà lu ce roman. Parce qu’il fait partie des rares livres qui peuvent être lus à tout âge. Les enfants adoreront ces histoires de lapins confrontés à des aventures absolument extraordinaires racontées de façon palpitantes. Ils auront peur pour Hazel et son jeune frère qui sait prédire l’avenir, Fyveer. Ils seront séduits par le courage de leurs amis Bigwig et le talent de conteur de Dandelion. Les adultes aimeront cet hymne à la nature , même si comme moi il leur faudra souvent rechercher des jolis noms aussi étranges que : les « mercuriales vénéneuses »

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ou » la jacobée »

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mais le nom que je préfère est : « eupatoire pourpre »

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en plus de son amour de la nature que le lecteur est prêt à partager avec le militant Richard Adams, on est absolument saisi par la prouesse d’écriture qui fait qu’à travers les différentes garennes et organisations des lapins, on retrouve toutes les conduites humaines. Il n’y a pas de message à proprement parler, mais quelque que soit la façon dont ils s’organisent, il s’agit toujours de résoudre le terrible sort des lapins de garenne :

La terre tout entière sera ton ennemie. Chaque fois qu’ils t’attraperont, ils te tueront. Mais d’abord ils devront t’attraper…

Les solutions varient pour échapper à la mort :

  • accepter que des hommes vous protègent en acceptant qu’ils prélèvent au hasard de leurs envie leur pourcentage de lapins afin de les manger.
  • organiser un système très bien caché de tous les prédateurs sous la houlette d’un tyran impitoyable.
  • Devenir lapin domestique dans un clapier
  • et enfin comme dans la garenne d’Hazel trouver un lieu suffisamment reculé et à l’abri du regard des hommes pour mener une vie de lapin sauvage qui doit se protéger de tous les « vilous ».

J’oubliais de dire que peu à peu nous apprenons le langage des lapins, nous « farfalons » nous suivons les exploits des Hourdas, nous craignons que les « shaar-tchoun » les plus faibles des lapins soient abandonnés par les autres. Comme toute société , les lapins ont leur mythe fondateurs et Dandelion raconte ces histoires soit pour donner du courage soit pour distraire la compagnie. On y retrouve Shraavilsa intelligent et rusé et son fidèle lieutenant Primsault, tous les deux se sortent toujours d’affaire mais ils mettent aussi leur vie en grand danger. Ce n’est pas très juste de ne mettre que 4 coquillages à un tel livre, car c’est une oeuvre originale, je n’ai rien lu de tel depuis longtemps, c’est évident que si j’avais gardé totalement mon âme d’enfants je lui mettais 5 coquillages sans hésiter.

Citations

un moment de bonheur

Voir s’achever le temps de l’angoisse et de la crainte ! Voir se lever puis se dissoudre les nuées lugubres suspendues au-dessus de nous – ces sombres nuages qui attristent le cœur et réduisent le bonheur en vague souvenir ! rares sont les êtres qui n’ont jamais éprouvé cette joie-là.
L’enfant qui attend sa punition et que voilà, à sa grande surprise, pardonné, et le monde retrouve aussitôt ses couleurs, ses exquises promesses.

Changer ses habitudes pour mieux s’adapter

Tu dis que les mâles ne creusent pas. C’est vrai. Mais ils le pourraient s’ils le voulaient. ça ne te plairait pas de dormir au fond de terriers bien douillets ? D’être sous terre par mauvais temps ou lorsque la nuit tombe ? Nous serions en sécurité. Et rien ne nous en empêche, à part le fait que les mâles ne sont pas censés creuser. Pas parce qu’ils n’en sont pas capables, mais parce qu’il en a toujours été ainsi.

Les lapins et la peur

Les lapins étaient mal à l’aise, désorientés. Ils s’aplatirent, respirant les parfums émanant de l’eau dans l’air frais du crépuscule. Puis ils se regroupèrent, chacun espérant ne pas déceler chez son voisin l’angoisse qu’il éprouvait lui même.