Éditions de l’Olivier

L’expérience concentrationnaire est incommunicable.

C’est c’est une histoire racontée à des sourds par des muets

Quatrième livre de cette auteure sur Luocine, c’est visiblement une écrivaine que j’apprécie sans jamais être totalement enthousiaste , petit rappel : le remplaçant, Ce Coeur changeant, les bonnes intentions.

Ce roman est , une fois encore, agréable à lire mais la construction est surprenante, on a l’impression, certainement fausse, que l’écrivaine écrit au fil des jours sans savoir très bien où elle va et où elle mène son lecteur.
Au départ, il y a un projet assez vague de créer un lieu pour vieillir avec ses amis, un peu comme ses grands-parents, rescapés d’Auschwitz l’avait fait dans une tour du 13°. Elle revisite donc ses souvenirs, très marqués évidemment par le poids de la Shoah, mais aussi, de ce que représente pour elle, le vieillissement. Son livre est comme un kaléidoscope, avec des petites pépites lumineuses mais qui ne se raccrochent pas à un ensemble.
Comme je suis, parfois, un peu comme la vieille femme écossaise qui l’avait interpellée lors d’un colloque en lui demandant de quel droit elle parlait de la vieillesse et de la guerre, elle qui ne l’était pas, vieille, et qui ne l’avait pas vécue, la guerre, en regardant la très joie femme de soixante ans qui a écrit ce livre, je me suis plusieurs fois demandé ce qu’elle connaissait de la vieillesse physique, qui arrive vers 80 ou 90 ans. Et toujours avec mon esprit mal placé, j’ai pensé que cela lui permettrait d’écrire un autre livre dont le sujet serait « la vieillesse physique commence plus tard que je ne l’imaginais ».

Stop, pour mon mauvais esprit ! Cette écrivaine ne saurait totalement me déplaire car nous avons un auteur fétiche commun : Jean Pierre Minaudier. Et puis, lorsque l’on passe plusieurs soirées avec ce livre, en étant parfois , amusée , triste ou le plus souvent étonnée, on ne peut pas être trop sévère. Pourtant, je sais que j’oublierai ce roman, cette longue déambulation dans sa mémoire et tous les gens qui la peuplent.
Sa grand-mère qui lui donne la recette d’un gâteau dans son accent qui la rend si attachante. Sa mère qu’elle a tant aimée et elle qui sait qu’elle porte en elle même la petite fille, l’adolescente, la femme et la mère .

Je ne pense pas qu’elle construira son phalanstère pour vieillir avec ses amis, mas elle a déjà réussi à les réunir dans son livre

 

Extraits

 

Le Début.

 Mes grands parents maternels, Boris et Tsila Jampolski, avaient 65 ans lorsqu’ils ont acheté sur plan, un appartement de deux pièces avec balcon au huitième étage d’une tour dans le XIII° arrondissement de Paris. J’ai écrit leur adresse -194 rue du Château des Rentiers 75013 Paris- sur des enveloppes et des cartes postales pendant près de trente ans.

J’aime cette façon de raconter.

 À 17 ans et un jour j’ai modelé un nouvel idéal en m’inspirant cette fois d’une amie que je trouvais plus jolie, plus intelligente et plus mûre que moi. Je m’achetais les mêmes vêtements qu’elle. Toutefois comme nos morphologies différaient ce qui la sublimait -faisant d’elle tantôt une princesse bulgare tantôt une ballerine de Degas- faisait de moi une brave une brave fille de ferme. Le constat de ce nouvel échec aurait pu mettre fin à ma manie de l’idéalisation. Mais non. J’aimais et j’aime toujours admirer. C’est mon moyen de transport fétiche. Je veux être ce que je ne suis pas. Je veux être là où je ne suis pas. Peu importe que j’y parvienne ou non, car le plaisir est garanti par le trajet.

La recette de cuisine du gâteau de sa grand-mère.

« Combien tu mets de farine ? » lui ai-je demandé. « Un péï »,a-t-elle répondu. « Et combien de sucre ? » « Un péï. » « Comme la farine alors ? »  » Non, pas comme la farine,. Un péï. » J’ai laissé tomber. Elle a ajouté l’hile, à batti avec le battèr, elle a kisinéï, dans sa kisine, à sa façon qui ne serait jamais la mienne, et j’ai accepté de perdre pour toujours la saveur de mon gâteau préféré. J’ai accepté l’idée que quand elle mourrait, le gâteau mourrait avec elle.

Vieillir.

-C’est quoi, le pire, pour toi dans le fait de vieillir ?
– La douleur. Le mouvement entravé. La fin de la souplesse. La laideur. J’ai j’ai honte de tout, de mes cheveux, de mon visage, de mes mains, de mes pieds (je ne parle pas du reste). C’est comme si je polluais l’espace visuel collectif. Cela me rend malade de timidité. Je ne sais pas comment m’habiller, comment m’asseoir, comment me relever. J’ai l’impression de m’être endormie dans un corps et de m’être réveillée dans un autre.

Je comprends sa mère.

Ce qui ressemble à un paradoxe n’en est pas un : indisponible elle l’était, pour boire un café, se promener bavarder au téléphone. Mais fiable et présente, elle l’était aussi, pour s’occuper des enfants, me conduire en voiture, m’aider à préparer un repas. Autrement dit, si c’était pour le plaisir -le sien en particulier-, c’était souvent non. Si c’était pour se rendre utile c’était toujours oui.

Le brouillon et la vie.

À l’école, on nous apprend à faire un brouillon. Cette méthode qui consiste à essayer, à s’entraîner avant de « faire pour de bon » structure notre existence. Et pourtant, nous ne vivrons qu’une fois. Le brouillon sera la seule tentative et coïncider avec la version définitive.

C’est aussi une de mes idoles.

Cela m’évoque la félicité grammaticale que j’ai éprouvée en lisant ce que Jean-Pierre Minaudier, historien reconverti en linguiste et traducteur du basque et de l’estonien, écrit concernant un suffixe présent dans la langue guarani. Cette particule que l’on ajoute à la fin de l’année permet d’en modifier la modalité, et d’indiquer ainsi différents états d’un même objet ou d’un même être. » En guarani, note-t-il, il y a non seulement un passé, mais un futur et un « frustratif » nominaux. « Chemanékue » veut dire « celui qui était mon époux, « chéménarã » « mon futur époux, et « chéménarãngue » « celui qui devait être mon époux mais ne l’est pas devenu. Je me rappelle avoir été ébahie en entendant cette déclinaison. Le génie de Minaudier n’y était pas pour rien. Avoir l’idée, pour nommer un mode grammatical, de forger le néologisme « frustratif » à fait de lui une de mes idoles.

 

Édition Albin Michel . Traduit de l’anglais par Astrid von Busekist.

Ma cinquième participation « les feuilles allemandes 2023 », organisé par Eva 

Niklas Frank 

Je suis contre la peine de mort sauf pour mon père .

L’an dernier j’avais mis « la Filière » dans le mois de littérature allemande organisé par « Et si on bouquinait un peu », cette fois je mets celui-ci qui m’a absolument passionnée. Vous me disiez dans vos commentaire, à propos de « La filière » que, pour beaucoup d’entre vous, ce livre-ci était une lecture qui vous avait marqués. Je suis entièrement d’accord avec vous, je n’oublierai jamais la qualité du travail de Philippe Sand.

Cet auteur mêle ses recherches personnelles autour du destin de sa propre famille qui est originaire à Lviv (autrement nommé Lwow et Lemberg du temps de l’occupation nazie) et une enquête minutieuse sur deux hommes liés à cette même ville, dans laquelle ils ont tous les deux commencé à étudier le droit : Hersh Lauterpacht et Raphael Limkin.

Philippe Sand enquête également sur le passé du dirigeant Nazi, Hans Frank, et rassemble toutes les preuves dans son rôle sur la volonté d’exterminer tous les Juifs qui étaient sous sa juridiction en Pologne dont les parents et toute la famille des grands parents de l’auteur. La symbiose de son histoire familiale et de l’histoire du Nazisme est d’autant plus intéressante que s’y mêlent aussi les histoires familiales de Lauterpacht et Limkin, deux des éminents juristes qui ont contribué aux procès de Nuremberg.

Toute cette partie du livre est sous entendu par ce débat juridique : quelle notion est la plus pertinente pour protéger un homme contre la barbarie d’un état ?

  • La notion de crime contre l’humanité défendu par Lauterpacht.
  • Où la notion de génocide défendu par Limkin.

Les deux personnalités de ces grands juristes étaient très opposées, Lauterpacht était un important juriste et chercheur en droit de l’Angleterre et un fou de travail, mais il était devenu aussi complètement britannique et ne montrait jamais ses émotions. Il ne voulait surtout pas que l’on puisse l’accuser d’avoir œuvré en tant que juif. Alors que pendant le procès de Nuremberg il apprendra la fin tragique de ses propres parents restés à Lviv. S’il rejetait la notion de génocide, c’est qu’il craignait que cette notion se retourne contre ceux qu’on voulait défendre en les faisant appartenir à un groupe. Pour lui le carcatère humain était plus important que l’appartenance à une communauté juive.

Limkin avait fui aux États-Unis, et sa personnalité est très différente, il a un caractère bouillant et agace souvent les juges par son côté obsessionnel . Il tenait absolument à la notion de génocide car cela permettait de comprendre que les crimes des Nazis n’étaient pas liés à la guerre et avaient commencé bien avant. Lui aussi découvrira ce qui était advenu à sa propre famille pendant le procès de Nuremberg.

Tout est passionnant dans ce livre autant la façon dont Léon, son grand père et Rita sa femme ont survécu et comment sa mère a été arrachée de justesse aux griffes des nazis par une femme remarquable une missionnaire anglaise :Miss Tilney à qui Israël a donne le tire de « Juste ». Comme souvent le petit-fils veut tout savoir et s’est heurté au silence de ses grands parents. La vérité du destin de ces familles étaient trop dure à raconter, de plus plane un certain mystère que la façon dont ils ont fui Vienne séparément, Léon d’abord puis la petite Ruth – la mère de l’auteur- et enfin Rita qui semblait avoir du mal à quitter Vienne pas seulement pour des raisons administratives. L’auteur n’élucidera pas complètement ce mystère.

Le moment le plus difficile à supporter, pour moi, fut ce témoignage à Nuremberg de ce juif qui raconte ce qui s’est passé dans les fosses communes autour de Lviv le récit de ces gens qui étaient tués par balle , vieillards, hommes, femmes, enfant, bébés, et absolument insoutenable. Ce qui rend la lecture possible, c’est la taille des chapitres qui sont assez courts et on peut donc reprendre son souffle.

Quel travail ! Oui c’est un très grand livre qui fourmillent d’informations. J’en donne une au passage : le pape XII est intervenu personnellement pour éviter la peine de mort à Hans Frank responsable de Treblinka et du Ghetto de Varsovie et de sa liquidation, de la mort de tant de Juifs et de Polonais pour lesquels le pape n’a jamais rien dit mais pour cet horrible criminel de guerre il s’est fendu d’une lettre ! ! ! !

Citations

Lauterpacht un progressiste mais pas pour les femmes de sa famille .

 Son fils est heureux du séjour de sa mère mais il fulmina contre la manière dont elle affirmait sa personnalité : il s’opposa avec véhémence à ses « ongles peints », la forçant même à enlever son vernis.
Il était tout aussi hostiles à l’influence qu’elle tentait d’exercer sur sa femme, Rachel, qui avait adopté une coupe de cheveux alors en vogue, à la Louise Books, avec bob et frange. « Enragé » lorsqu’il avait découvert ce nouveau style, Lauterpacht avait insisté pour qu’elle revienne au chignon, déclenchant une forte dispute suivie par la menace de Rachel de le quitter.  : »Je peux et je dois pouvoir préserver ma vie privée sans que tu me rudoies. » À la fin, Rachel avait pourtant cédé : son chignon était bien en place lorsque je l’ai rencontré plus de cinquante ans plus tard .
Des droits individuels, oui mais pas pour la femme ou la mère .

Des horreurs oubliées ?

 En l’espace d’une semaine Źolkiew et Lvov furent et Lvov furent occupés par les Allemands, et les universitaires arrêtés. Parmi les prisonniers se trouvait l’ancien professeur de droit privé autrichien de Lauterpacht, Roman Longchamp de Bérier. Arrêté parce qu’il avait commis le crime d’être un intellectuels polonais, il fut exécuté un jour plus tard avec ses trois fils, durant le « Massacre des professeurs de Lwów ».

Sauvée grâce à un couvent polonais.

 Inka changea de ton : elle s’exprima avec douceur en chuchotant comme si elle approchait d’un dénouement embarrassant.
 » Les bonnes sœurs m’ont dit qu’il y avait une condition à mon séjour parmi elles. Ma famille ne l’a jamais su. » Pendant un moment Inka fut gênée, sur le point de rompre un silence qui avait duré toute une vie.
« Elles ont dit que je devais être baptisée. Je n’avais pas le choix. Peut-être était-ce une chance que je ne sois pas alors plus observante que je ne le suis aujourd’hui .J’avais eu de la chance de grandir dans une famille qui n’était pas très religieuse. »
Soixante-dix ans plus tard, elle était toujours aux prises avec un certain malaise. Inka se débattait encore avec le sentiment d’avoir en quelque manière, abandonné son groupe pour sauver sa propre vie.

Les personnes âgées déportées.

Make était alors âgée de soixante-douze ans, et on ne l’autorisait à voyager vers l’Est qu’avec une seule valise. Escortés à l’ Aspangbahnhof, derrière le château du Belvédère, elle-même et les autres déportés subirent les crachats, les sarcasmes, et les injures des spectateurs qui applaudissaient leur départ. Elle avait pour réconfort de ne pas être complètement seule, puisqu’elle était accompagnée de la mère de Rita, Rose. C’est une image terrifiante que celle des deux vieilles dames sur le quai de l’Aspangbahnhof, chacune s’accrochant à sa petite valise, deux êtres parmi les 994 Juifs viennois en partance pour l’Est.
(…)
Parmi les 1985 personnes à bord de ce train, se trouvaient trois des sœurs de Sigmund Freud : Pauline (Pauli) âgée de soixante-dix-huit ans, Maria (Mitzi) , quatre-vingt-un ans, et Rigina (Rosa), quatre-vingt-deux ans.

J’admire tant ce genre de compétences . (Et il a appris en quelque mois un anglais parfait !)

Hersch (Lauterpacht) parlait le français, l’italien, le polonais, et l’ukrainien, avec des notions d’hébreu, de yiddish, et d’allemand.

L’imbrication de l’histoire familiale dans la grande Histoire.

 Lauterpacht qui ignorait tout de ce qui arrivait alors à cette nièce qu’il ne connaissait pas, décida de renoncer à l’alcool et d’entamer un régime. C’était plus par précaution que le résultat d’un conseil médical. C’est en tout cas ce qu’il se disait pendant qu’il continuait à faire son devoir au sein de la Garde Nationale et qu’il réfléchissait au contenu de sa Charte des droits. Il ne savait pas que son père avait été raflé le 16 août. Ce jour là. Il envoya un mémorandum au comité sur les crimes de guerre à Londres, expliquant combien était pauvre la pratique internationale sur la question de la poursuite des crimes de guerre.

La femme qui a sauvé sa mère .

Miss Tilney était une femme bienveillante pas une idéologue faisant le travail classique des missionnaires. Elle ne cachait pas seulement des gens, elle risquait sa vie pour le faire. « Peut-être que les gens ne sont capables de grand héroïsme que s’il croit passionnément à une cause » comme le dit une amie lorsque je lui racontai l’histoire de Miss Tilney. « Un principe abstrait n’est pas suffisant pour faire de vous une héroïne ; il faut de profondes motivations et des émotions aussi. « 

Massacre des Arméniens .

 Qu’en est-il alors, avait objecté l’un de ses enseignants, de la souveraineté du droit des États de traiter leurs citoyens comme ils le souhaitent ? À proprement parler le professeur avait raison : le droit international ne limitait pas le pouvoir des États. De manière tout à fait surprenante, aucun traité ne pouvait empêcher la Turquie de faire ce qu’elle avait fait : tuer ses propres citoyens. La souveraineté n’était pas un vain mot elle était totale et absolue.

Génocide ou crime contre l’humanité ?

Malgré leur origine commune et leur souci partagé de pragmatisme, Lauterpacht et Lemkin étaient profondément divisés sur les réponses qu’ils donnaient la grande question : comment le droit peut-il faire en sorte de prévenir les assassinats de masse ? En protégeant l’individu, répond Lauterpacht ; en protégeant les groupes, répond Lemkin. 

Édition Points . Traduit de l’allemand par Nicole Bary

 

Ma quatrième participation au mois « les feuilles allemandes » 2023, organisé par Eva 

 

En lisant les avis sur Babelio, j’ai vu que Aifelle avait beaucoup apprécié ce roman, et je suis d’accord avec ce qu’elle en dit.

La filiation et le poids des crimes d’un père sont les thèmes de ce roman. Konstantin et Gunthard Boggosch, sont tous les deux les fils de Gerhard Müller et de Érika Boggosch. Si les deux enfants portent le nom de leur mère c’est que celle-ci découvre horrifiée, que pendant la guerre 39/45, non seulement son mari était un Nazi convaincu mais, de plus, a commis des crimes si monstrueux qu’il a été jugé et pendu en Pologne à la fin de guerre. Le destin des deux frères va totalement diverger, et cela permet à l’auteur d’analyser les différentes façons de se construire avec le poids du passé quand on est allemand. L’ainé, veut absolument croire au passé glorieux d’un père militaire et il refuse de le voir en criminel, quelques soient les preuves à charge. C’est d’autant plus facile pour lui, que ses preuves sont fournies par les Russes qui sont détestés par tous les Allemands. Il y a aussi un oncle à l’ouest qui a entrepris de réhabiliter son frère. Cet aspect est très intéressant car on comprend, alors, combien les Allemands de l’ouest ont été plus enclins à oublier le nazisme que ceux de l’est.
le personnage principal du livre, Konstantin, sera comme sa mère hanté, par le passé de son père. Et surtout ce passé se dressera sur sa route dès qu’il voudra réaliser quelque chose de sa vie. Parce que son père était un criminel de guerre, il ne pourra pas aller au Lycée. Commence alors pour lui, un parcours incroyable, fait de coïncidences trop exceptionnelles, pour moi. Il va fuir en France, car son premier projet est de s’engager dans la légion étrangère. Il rencontre à Marseille un groupe d’anciens résistants pour lesquels il va travailler comme traducteur car grâce à sa mère il parle français, russe, italien, anglais. Un jour, il reconnaîtra son propre père dans une photo prise dans le camp de travail forcé où son employeur et ami a failli mourir.
Trop honteux de cette filiation, il repart en Allemagne et, le jour où, le mur empêchera à jamais les gens de se réfugier à l’ouest, lui, il va à l’est pour retrouver sa mère.
Il sera refusé à l’école de cinéma, toujours à cause de son père. C’est certainement l’aspect le plus intéressant du livre : cette ombre qui empêche à jamais cet homme de faire des choix librement. La description du régime de l’est et des éternelles suspicions entre collègues dans le milieu enseignant est aussi tragique que, hélas, véridique.
En lisant ce livre, j’ai pensé à « Enfant de salaud » de Sorj Chalandon , il est évident que les Français ont laissé plus de liberté aux enfants d’anciens collaborateurs. En Allemagne de l’Est qui est passé du Nazisme au communisme, les traditions d’espionnage individuel et de dénonciations n’ont pas permis aux enfants de Nazi de pouvoir oublier le passé de leur père. Mais on peut aussi se scandaliser de la façon dont à l’ouest on a si vite tourné la page qu’il suffisait de devenir anticommuniste pour faire oublier son passé nazi et antisémite.

J’ai lu avec grand intérêt ce roman, mais j’ai eu du mal à croire aux aventures de Konstantin. Il y a trop de hasards dans ce récit, en revanche la partie où il raconte ses difficultés pour mener une vie « normale » d’enseignant en RDA m’a semblé très proche de la réalité.
Il y a un aspect que je comprends pas, il revient en RDA pour revoir sa mère mais il ne la verra que peu souvent. Il s’offusque que son frère la fasse vivre dans la cave de sa maison, enfin dans un sous-sol, mais il ne la prend pas chez lui.

Ce ne sont là que des détails par rapport à tout ce que j’ai appris sur l’ex-RDA.

 

Extraits.

Première phrase d’un roman allemand . Un petit coup de nature…

 Les jeunes bouleaux semblait chuchoter leurs feuilles étaient violemment agitées, bien que l’on ne sentît pas le moindre vent. Sous le pesant soleil estival de cette fin d’après-midi le blanc cassé des troncs frêles à l’apparence fragile brillait de mille feux.

Les souvenirs .

Avec nos souvenir nous essayons de corriger les échecs de notre vie c’est pour cette seule raison que nous nous souvenons. C’est grâce aux souvenirs que nous nous apaisons vers la fin de notre vie. Ce sont les souvenirs terribles qui finalement nous permettent de faire la paix avec nous-même. Regardez les volumes de mémoires qui paraissent chaque année. Ce sont tous des personnages merveilleux. Des caractères magnifiques, sincères courageux. Intrépides, désintéressés, la justice en personne. Des types dont on aurait aimé être les contemporains. Le problème est qu’ils étaient mes contemporains, et ils n’étaient pas sympathiques. Et ne croyez pas que je veux vous persuader maintenant que mes souvenirs n’en sont plus exacts, plus vrais, plus dignes de confiance. Non, chère mademoiselle, moi aussi je vous raconterai ce qui correspond à l’image que je me fait de moi-même, que je veux faire miroiter aux yeux des autres. Je tairais bien évidemment ce qui me gêne dans ma propre personne. Et pour cela je ne devrais pas faire des efforts particuliers. Ce qui est dérangeant, ce qui ne me plaît pas, je ne devrais même pas le passer sous silence, ce n’est pas la peine. Je l’ai oublié depuis longtemps et même radicalement.

Le poids d’un père .

 Je ne pouvais pas m’installer en France, pas non plus en Angleterre, ou en Italie, ou en Pologne, ou en Union Soviétique, je tomberais partout sur des hommes de la « Résistance », sur des partisans, sur ceux qui avaient combattu Hitler. Je ferais leur connaissance, ils deviendraient mes amis, et un jour ils devraient apprendre que vi gt ans auparavant ils avaient été confrontés à mon père, le « Vulcan » craint de tous. Dans chaque pays je le trouverai sur ma route partout je serais le fils du  » SS Vulcan ».

 


Édition Metallié. Traduit de l’allemand par Alban Lefranc

Ma troisième participation au mois « les feuilles allemandes » 2023 , organisé par Eva 

 

 

 Un grand merci et cinq coquillages pour Anne-yes qui m’a permis d’aller vers ce livre, c’est une lecture indispensable pour mieux comprendre l’Ukraine d’hier avec les conséquences qu’on connaît aujourd’hui . La mère de Natasha Wodin, l’auteure, est d’origine ukrainienne, elle est née à Marioupol, son père bien qu’Ukrainien est de langue allemande . Ce livre, retraçant le destin douloureux de sa mère, se divise en quatre parties.

– La première est consacrée à la recherche sur Internet de sa mère dont elle ignorait tout, sauf qu’elle venait de Marioupol. Très vite elle obtient une réponse qui lui vient de Russie d’un homme qui sera son ange gardien dans ses recherches. Un certain Konstantine, et à sa grande surprise, elle découvrira que les mensonges qu’elle racontait quand elle était enfant sont en grande partie vraie. Elle s’imaginait princesse et elle découvre que sa famille d’origine italienne était une des plus riche de Marioupol et, qu’effectivement, ils habitaient un palais. Toute l’enfance de l’auteure, en Allemagne, elle s’est sentie paria ( elle dit même « un déchet » en parlant d’elle) car elle, et sa famille faisaient partie des anciens travailleurs de l’est pays qui sont devenus communistes (donc ennemis !) C’est l’aspect de ce livre qui m’a le plus passionnée, car je n’ai jusqu’à présent rien lu sur ce sujet  : que savons nous de ces milliers (peut être millions ?) de personnes déplacées pour servir d’esclaves au troisième Reich en manque de main d’œuvre ? Nous connaissons en tout cas le sort de ceux qui sont retournés sous le joug stalinien : fusillés comme traître ou envoyés directement au goulag.
– Son enquête avance grâce à Konstantine, et elle raconte dans la deuxième partie, le sort de Lydia la sœur de sa mère. Celle ci a écrit ses mémoires et on peut alors découvrir toute l’horreur des débuts du communisme en Ukraine jusqu’à la famine qui sera un des plus grand crime commis contre un peuple. Bien que condamnée au goulag, Lydia a survécu et sa mère qui était venue garder son enfant aussi, elle était arrivée en 1941 quelques jours avant l’invasion allemande et ne pourra plus jamais repartir. Natasha comprend en enfin pourquoi sa mère a été abandonnée par sa propre mère.
– Dans la troisième partie, grâce à ce qu’elle sait maintenant, elle cherche à comprendre pourquoi sa mère est partie en Allemagne à la fin de la guerre. Elle y rencontrera son père lui aussi travailleur déplacé qui l’a beaucoup aidée et lui a permis de survivre.
– Enfin dans la quatrième et dernière partie, on voit cette femme plonger dans une dépression terrible qui fera fuir son mari violent et alcoolique. La petite Natasha s’enfonce dans ses mensonges pour fuir cette chape de malheur qui tue sa mère à petit feu.

Tout l’intérêt de ce livre vient de ce que l’auteure sait nous faire découvrir la vie de sa mère au fur et à mesure de ses propres recherches. Elle n’avait qu’une très vague idée de qui était sa mère, elle lui en voulait d’avoir si peu su lui faire une vie heureuse et d’être éternellement cette femme déprimée. Mais, comme elle, nous sommes bouleversées de voir que son destin aurait pu être moins tragique si elle avait su que sa propre mère et sa sœur avaient survécu au goulag.
Historiquement, le destin de ces travailleurs venus des pays occupés par l’Allemagne Nazie est mal connu et terrible. Mal connu, car il pèse sur eux le jugement de collaboration avec le régime de l’occupant et personne n’a vraiment pris la peine d’analyser leurs souffrances, on sous entend souvent qu’ils avaient le choix de ne pas y aller. Ce qui est loin d’être vrai. En plus si vous aviez le malheur d’être slave alors vous faisiez partie de la race des esclaves et votre sort était plus proche de l’univers concentrationnaire. Le pire, pour ces hommes et ces femmes, est qu’aucun pays n’attendait votre retour. En France les anciens du STO sont rentrés sans gloire, certes, mais ils ont retrouvé une vie normale. Les Ukrainiens et les Russes étaient renvoyés chez eux à une mort certaine plus ou moins immédiate.

Un très beau livre, tout en émotion et qui nous fait revivre l’histoire si douloureuse de ce pays.

 

Citations

Travailleurs déportés .

Depuis de nombreuses années déjà, je cherchais en vain un livre écrit par un ancien travailleur forcé, une voix littéraire qui m’aurait permis de m’orienter. Les survivants des camps de concentration avait produit une littérature universelle, les livres sur l’holocauste remplissaient les bibliothèques, mais les travailleurs forcés non juifs, qui avaient survécu à l’extermination par le travail restaient silencieux. On les avait déportés par millions vers le Reich allemand ; des trusts, des entreprises, des artisans, des exploitations agricoles, des ménages privés dans tout le pays s’étaient servi à leur guise dans le contingent d’esclaves importés selon un programme d’exploitation maximale pour le coup le plus minime possible.

Le soleil se lève sur le lac.

 Des levers de soleil comme sur ce lac, je n’en avais encore jamais vu ailleurs. Ils s’annonçaient des trois heures du matin à l’horizon, d’abord comme un rosissement à peine perceptible du ciel au dessus de l’eau, qui se transformait progressivement en une orgie lumineuse d’une beauté irréelle. Je m’étonnais que tout le monde soit endormi, que personne à part moi ne semble assister à ce spectacle cosmique. Le ciel brûlait de toutes ces couleur du vert clair à l’or, du violet au rouge flamboyant chaque jour différent chaque jour nouveau : des spectacle de lumières des tableaux surréalistes que le soleil faisait surgir dans le ciel et donc je suivais la métamorphose minutieuse à partir de mon balcon comme d’une loge quelque part dans l’univers (…)

La tragédie des Ukrainiens.

Tamara avait été exilée de Kiev à Vienne à vingt ans pour travailler dans une conserverie. Après son retour en Ukraine, elle avait échappé au sort de ceux qui avaient été fusillés comme traîtres et collaborateurs ou transférés d’un camp de travail forcé à un autre, mais elle faisait partie de la majorité de ceux pour qui le travail forcé en Allemagne avait eu des conséquences à vie. Ceux qui étaient revenus, qui n’avaient pas réussi à s’opposer à leur déportation par l’ennemi, n’étaient plus acceptés dans la société, la plus part d’entre menaient une vie de misère et de privation jusqu’à leur mort. Pendant de nombreuses années, elle avait été forcée de laisser ses parents l’entretenir, eux qui souffraient de la faim. Finalement, un ami de ses parents est tombé amoureux d’elle, un professeur de biochimie vieillissant qui l’a demandée en mariage. Elle n’a pas répondu à ses sentiments, mais le mariage l’a sauvée, sa survie physique au moins était assurée. Son courageux mari, déjà discriminé en tant que juif, en supporta les conséquences. Pendant longtemps, il est resté le seul professeur de tout Kiev à qui n’avait pas été attribué des appartements et qui devait vivre avec sa femme et ses deux enfants dans un appartement communautaire .

La Russie post soviétique .

 Et en quoi tout cela me concernait, moi ce fiasco soviétique, et post soviétique le fatum sans fin de la Russie, l’incapacité à se réveiller d’un cauchemar collectif, l’emprisonnement entre soumission et anarchie, entre la patience vis à vis de la souffrance et la violence, tout ce monde inexpliqué et sombre cette histoire familiale faite d’impuissance, d’appropriation, d’arbitraire, de mort, cette Russie misérable, la Mater Dolorosa éternelle qui serrait impitoyablement ses enfants dans ses bras.

Les esclaves Ukrainiens.

Les Ostarbeiter représentent un dilemme insoluble pour les nazis. Ils sont indispensables au maintien de l’industrie de guerre allemande mais recouvrir à eux n’est pas compatible avec l’idéologie raciale nazie, cela met en danger la pureté raciale du peuple allemand. Les rapports sexuels avec des Slaves sont strictement interdits aux hommes allemands, et pourtant les viols font partie du quotidien du camp.

Quand l’image de sa mère venant d’un pays glacé se confronte à la réalité.

 Pour la première fois depuis sa mort, ma mère devenait une personne extérieure à moi. Plutôt que dans la neige, je la voyais soudain marcher dans une rue de Marioupol, vêtue d’une robe d’été légère et lumineuse, les bras et les jambes nus, les pieds dans des sandales. Une jeune fille qui n’avait pas grandi dans l’endroit le plus froid et le plus sombres du monde mais près de la Crimée, au bord d’une mer chaude du Sud, sous un ciel peut-être semblable à celui de l’Adriatique italienne. Rien ne me semblait plus inconciliable que ma mère et le Sud, ma mère et le Soleil et la mer. J’ai dû transférer toutes mes idées de sa vie dans une température différente, sous un climat différent. L’inconnu ancien s’était transformé en un inconnu nouveau.

 

Édition Pocket

L’auteur, pour écrire ce roman que j’ai beaucoup apprécié, s’appuie sur l’histoire véridique de Wilhem Furtwängler, pour évoquer le rapport des Nazis avec la musique classique. Il crée des personnages romanesques, nous suivons donc la formation de Christophe Meister excellent musicien et de sa mère Christa grande cantatrice qui déteste le nazisme et sera déportée car elle a un père juif. Tous deux personnages fictifs.

Comme tous les romans qui se passent lors de la montée du Nazisme, j’éprouve une angoisse pour tous les personnages juifs. Quand on sait ce qui va leur arriver, on a envie de leur dire : « fuyez mais fuyez vite ». C’est le cas pour la mère de Rodolphe, Christa qui hélas sera déportée alors qu’elle s’était réfugiée en France.

Mais j’oublie de vous dire le thème principal de ce roman, qui s’appuie sur des sources historiques très sérieuses, à savoir les rapports de Wilhlm Furtwängler avec le nazisme. Dès 1920, il est un chef d’orchestre reconnu et à la tête de l’orchestre de Berlin, il est une gloire internationale. Il n’a jamais été membre du parti Nazi et on le sait aujourd’hui à aidé de nombreux juifs à s’échapper de la persécution nazie. mais en revanche, il est resté en Allemagne jusqu’à la fin et a joué pour les dirigeants Nazis dont leur chef Hitler. Il était de façon évidente une caution pour le régime.

Pourquoi n’est-il pas parti de ce pays dont il détestait le régime ? Sans doute, c’est la thèse du livre, mettait-il la musique au dessus de la politique. Il voulait, aussi, montrer que l’Allemagne avait autre chose à montrer que ces horreurs nazies. Les paradoxes de la dénazification feront qu’il aura beaucoup de mal à se disculper alors que Karajan, nazi convaincu et membre du parti n’aura aucun ennui.

La partie romanesque, permet de raconter beaucoup de choses sur la direction d’orchestre et de rendre plus incarnée la montée du Nazisme. Je n’ai pas du tout aimé la révélation finale et cela ne rajoute rien au roman. J’espérais de toute mes forces que l’auteur n’oserait pas, mais si …

Un bon roman qui fait revivre une période si détestée sous un angle original

 

Citations

Mélange histoire et fiction.

 Le pays est envahi par des uniformes, des bruns des fauves, des oriflammes noir et rouge pendent aux fenêtres, avec cette croix ridicule au centre de chacun. Le nombre d’uniformes augmente chaque jour, depuis les élections. Pareil pour les drapeaux.
Furtwängler fend la foule qui s’est agglutinée autour d’un crieur de journaux. Des policiers patrouillent, raides et sévères dans leur uniformes verts. Les gros aigles de fer sur le front de leurs képis jettent des éclats dans le soleil rasant de la fin de journée. Des SA marchent à leurs côtés, un chien en laisse la gueule bavant dans une muselière.

Hitler.

Furtwängler ne l’avait pas pris au sérieux le mépris est toujours mauvais conseiller. L’homme au physique de garçon coiffeur tient à présent le destin de l’Allemagne dans ses mains qui paraissent fragiles. Il l’éventre, son pays le balafre en tout sens, fait sortir de terre le monde d’en dessous, celui des mauvais génies. Des grues et des bennes vont et viennent. Berlin est devenu un vaste chantier qui patauge dans la boue froide. L’ Allemagne n’est plus à genoux devant l’Europe. Elle accueillera les jeux Olympiques dans un an.

Un chef d’orchestre parle de son art.

J’ai bien connu Nikish, dit il notre père à tous. Il savait faire chanter un orchestre chose extrêmement rare. Il ne se préoccupait que de la sonorité, de la création et de l’accomplissement de cette sonorité. Pour moi, diriger un orchestre, c’est comment s’y prendre pour qu’il ne joue pas seulement de façon rythmique précise, mais qu’il chante avec toute la liberté indispensable à une réalisation vivante de la phrase mélodique. N’oubliez jamais que diriger signifie pouvoir créer librement.

L’espoir humain.

Rodolphe se met à espérer. C’est bête on ne croit jamais vraiment au pire. L’homme est ainsi fait, il n’envisage jamais vraiment le mot de la fin. À moins d’en avoir la certitude absolue.

Édition Gallimard . Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard

 

Après Les invités et Le portrait voici ma troisième lecture de Pierre Assouline. Il s’agit là d’un roman de 400 pages qui se passe sur la Paquebot « Georges Philppar » connu pour avoir été celui où Albert Londres a perdu la vie en revenant de Chines en 1932.

Pierre Assouline connaît bien Albert Londres, puisqu’il lui a consacré une biographie que je n’ai pas lue. Mais ce grand journaliste n’arrivera dans ce livre qu’à la page 300. Tout le roman est construit autour d’un personnage collectionneur de livres rares qui est venu sur ce bateau pour vendre et acheter à l’escale de Shangaï des raretés très très chers, mais aussi pour rencontrer Alber Londres. Comme on ne connaît que tardivement les raisons de cette volonté je ne la dévoilerai pas, même si je la trouve sans aucun intérêt.

Donc pendant 300 pages nous suivons les réflexions, les descriptions des passagers et les penchants amoureux du narrateur, c’est parfois intéressant et souvent très ennuyeux. C’est certain que lors d’une croisière de plusieurs mois, confinés dans un espace assez réduits les gens s’ennuient et ce n’est pas toujours le meilleur d’eux même qui apparaît au grand jour. Les passages les plus intéressants racontent la montée du National Socialisme en Allemagne et la façon dont des grands industriels allemands voient en Hitler un pantin qu’ils sauront dominer. On retrouve dans ce huis clos toutes les peurs et les discussions qui ont animer les salons d’avant la guerre et cela rappelle les discussions autour du danger de la Russie et de Poutine avant 2014.

Sinon, chacun le sait, Pierre Assouline est très cultivé et peut citer un nombre d’auteurs absolument stupéfiant, bien sûr ce n’est pas lui qui parle mais son personnage , mais cette érudition à toutes les pages ou presque est très pesante. Le livre fonctionne comme une mise en abîme de tous les livres qu’il a lus (l’auteur ou son narrateur). Je ne peux pas toutes les citer sans apparaître moi même pédante et en oublier certains ce qui montrerait mon inculture ! Mais cela m’a agacée autant que le plaisir des traits d’esprit qui me semble un plaisir assez vain.

Et Albert Londres dans tout ça  ? il semble bien loin de ce monde là, lui qui toute sa vie a ouvert les yeux sur la vraie vie : Les bagnards à Cayenne, les malades dans les asiles psychiatriques, la misère absolue dans la Russie soviétique… On ne saura jamais ce qu’il voulait écrire sur le communisme en Chine car son article a disparu avec lui et ses amis morts dans un crash d’avion. De là, à imaginer un complot pour le faire taire définitivement … mais ce n’est visiblement pas ce que pense l’auteur …

Il y a aussi un autre aspect qui m’a bien plu : les paquebots étaient très dangereux en particulier pour les risques d’incendies. La sécurité passait après le désir de construire un superbe décor, le plus important c’était de faire appel aux plus célèbres décorateurs, tant pis pour les risques que l’on faisait courir aux passagers. Ainsi, sur ce bateau, les fils électriques, très mal isolés, couraient derrières des lambris de bois vernis qui se sont enflammés comme une boîte d’allumette. La raison du départ de l’incendie est plus complexe, sans doute l’utilisation du courant continue alors que l’installation ne le supportait pas bien.

Un roman, que toutes les lectrices et tous les lecteurs, qui aiment cet auteur liront avec plus de passion que moi.

 

Citations

Première phrase

On peut adorer s’en aller. Ivresse du départ, volupté de l’arrivée ; encore faut-il revenir.

Les privilégiés.

 Un certain nombre de passagers des catégories de luxe sont des invités de la compagnie. Ceux-là vivront le voyage comme une pure villégiature. Certains parmi ces heureux du monde se connaissent, d’autres se reconnaissent. Tout dans leur attitude insouciante reflète le seul tourment d’avoir à se laisser vivre. Ils se comportent comme des invités permanents de la société.

Je ne sais pas si c’est vrai ?

 Si tout paquebot est une ville flottante, et le nôtre possédait même une cellule, une salle de quarantaine et une cabine capitonné pour aliénés, son pont promenade en est le boulevard à ragots.

Un portrait cruel

 Notre célibataire de l’art, ce bellâtre italien à l’évidence entretenue par la compagne hors d’âge appuyée d’ordinaire à son bras (on le sait depuis la belle Otéro, la fortune vient en dormant, mais pas en dormant seul) se faisait appeler Luigi Caetani et laissait croire à qui voulait l’entendre une parenté avec l’illustre famille de cardinaux. Tout en lui suintait l’arrivisme, jusqu’à son eau de toilette ; son ambition avait quelque chose de pestilentiel.

Encore un portrait cruel.

 La crainte de paraître goujat inciter sa petite cour brillante au bar de la piscine, à la contempler comme l’ébouissant vestige d’un révolu ; à force de fréquenter son mobilier, son visage en était devenu Art déco ; son corps, un temple autrefois beaucoup visité, conservait ses adorateurs bien que des racines en eussent remplacés les piliers, un peu comme à Ankor ; en vérité c’était une ruine.

Mot d’esprit.

Le genre de type qui devait porter sa rosette de la Légion d’honneur jusque sur le revers de sa veste de pyjama.

Un français attiré par les thèses nazies.

 Je monte régulièrement à cheval au bois de Boulogne et j’ai constaté une chose : à peine est-on en selle que, de là-haut, on se sent déjà moins républicain ..

L’horrible Modet-Delacourt.

 « Non vraiment, n’insistez pas, vous comprenez les bourgognes, les vins de la Loire, tout ce que vous nous proposez, ça ne vaut même pas d’être pissé », ce qui contrasta brutalement avec l’arôme de violette qui mûrit puis s’épanouit en un goût de pétales de roses à peine fanée que le sommelier venait d’évoquer. Il aurait pu réussir à être blessant sans se montrer grossier, mais non, pas son genre. C’est aussi à cela que l’on juge une éducation :cette faculté d’humilier
 publiquement le personnel, lequel n’en peut mais, par définition.

Citation et trait d’esprit.

 Elle me paraissait incarner la femme telle que Beaumarchais la définissait : une âme active dans un corps inoccupé.

Genre de remarque qui truffe ce roman et le rend pédant.

 Milk n’en fit même pas cas, tous occupé à discuter des vertus de l’odontomettre pour mesurer la dentelure des timbres ou à plus de plaider, une fois de plus, la cause de l’adoption du néologisme « timbrologie » en lieu et place de « philatélie » au motif que si l’on avait vraiment voulu s’en tenir à l’étymologie grecque, c’est de « philotélie » qu’on devrait parler.

 

 

Édition L’avant scène Théâtre

Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard 

 

Une pièce que j’aurais eu un grand plaisir à voir. Un dialogue inventé entre deux génies du XX° siècle Einstein et Charlie Chaplin. C’est souvent drôle, tragique aussi . L’auteur concentre sa pièce sur trois moments de leur vie. D’abord quand Einstein, découvre avec horreur le sort des juifs sous la botte nazie, et que Chaplin veut faire un film en se moquant d’Hitler. Le deuxième moment Einstein s’en veut d’avoir pousser Roosevelt à construire la bombe atomique enfin la dernière scène Charlie Chaplin victime de la commission d’épuration menée par McCarthy vient voir une dernière fois son ami avant de s’exiler en Suisse. Il y a aussi un gouvernante qui permet d’avoir un lien avec l’extérieur.

Tout le travail de l’auteur c’est de nous faire comprendre à la fois le génie de ces deux hommes extraordinaires et la différence de leur démarche. Tous les deux sont des créateurs et ont besoin de liberté pour créer mais ils réagissent très différemment. Dison que Chaplin est plus humain qu’Einstein et qu’il finira sa vie dans une forme de bonheur familial qu’Einstein n’a jamais onnu.
Un beau texte et une grande envie de le voir sur scène

Citations

Un bon mot .

 « Avec le « professor » c’est pas évident pour l’habillement … au début je faisais comme Elsa. Quand il y avait des visiteurs importants, je lui demandais de faire un effort… Un jour, il m’a dit : « Si c’est moi qu’ils veulent voir, fais-les entrer…Si c’est mes vêtements, tu ouvres mon armoire et tu leur montres mes costumes ! »

Les génies scientifiques sont jeunes.

Chaplin : Et pourquoi ne fait-on plus de découvertes après quarante ans ?… Le cerveau s’amollit à ce point ?

Einstein : Je crois plutôt qu’on est prisonnier de soi-même… De ce qu’on a découvert avant … On se répète….. Ce qui manque c’est l’insolence.

Dictature et démocratie.

Einstein  : …Vous savez la différence entre une dictature et une démocratie, Charlie ?… Dans une dictature les gens sont gouvernés par la force et le mensonge. Dans une démocratie, uniquement par le mensonge !

Les stars

Chaplin : J’en ai observé beaucoup à Hollywood des stars quand on les voit groupées et elles produisent peu de lumière et encore moins de chaleur ! ( « Einstein sourit montrant le télescope »). J’ai le même à la maison. Je voulais apprendre l’astronomie. Mais c’est plus fort que moi : je dirige toujours l’objectif vers la rue. Les hommes intéressent plus que l’univers … Le contraire de vous, en somme !

Einstein : l’univers me paraît moins compliqué que mes semblables en tous ca !

 


Édition Seuil. Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard

La question qui me vient à l’esprit : c’est pourquoi aujourd’hui Catherine Clément, née en 1939, d’un père catholique et d’une mère juive, éprouve le besoin d’écrire ce livre-là.

En effet, tout ce qu’elle écrit à propos de la déportation et de l’extermination des juifs sont aujourd’hui bien connus. J’ai trouvé une réponse : en faisant correspondre l’histoire de l’extermination des juifs décidée par l’Allemagne, mise en oeuvre en France par les services de Pétain, avec le sort de ses grands parents. Cela permet de rendre plus palpable ce qu’a été pour cette population cette horrible période. Et, comme toujours dans ce genre de livres, on apprend des détails qui n’en furent pas pour certains juifs : l’Abwehr, c’est à dire le service de contre espionnage de l’était major de l’armée allemande, dirigé par Wilhem Canaris n’était pas Nazi. (Celui-ci organisera un dernier attentat contre Hitler ce qui lui vaudra d’être pendu avec deux cordes de piano puis pendu à un croc de boucher). La mère de Catherine Clément, a dû sa survie à un certain Samuel Shütz appartenant à l’Abwehr et qui la prévenait des rafles.

C’est le principal apport de ce livre. Sinon, comme moi je suppose, vous savez tout ce que cette écrivaine écrit à propos de la Shoah. Catherine Clément âgée de 84 ans veut qu’un de ses livres fasse le point sur l’histoire des siens à la lumière de tout ce que l’on sait aujourd’hui. C’est aussi un aspect intéressant de son livre : dans un texte assez court, elle arrive à concentrer presque tous les aspects de l’extermination des juifs en Europe.

 

Citations

Portrait d’une mère .

 Yvonne, mère de deux fils dont Yves était l’aîné, arborait en toutes circonstances une beauté imposante à l’œil pieux, qu’on appelait parfois bleu panique, tant elle savait se faire obéir.

Genre de rappels qu’il faut garder en mémoire.

Le 18 octobre 1940, une ordonnance allemande dite d’aryanisation plaça sous séquestre les biens des juifs absents ou arrêtés. Samuel Shütz n’avait rien exagéré. La boutique de fourrures de Georges Gornik fut cédée à un Aryen français pas trop malhonnête, avec l’assurance qu’à la fin de la guerre, sont bien lui serait rendu. Gabrielle Chanel fit de même avec la riche famille juive qui la finançait mais avait nullement l’intention de lui restituer quoi que ce soit.


Édition La manufacture de livres

 

Ne croyez pas lire un livre de plus sur le sort des juifs pendant la deuxième guerre mondiale, cela constitue bien la toile de fond mais le thème principal c’est le parcours Stéphane Milhas petit fils d’Alphonse Jullian pour à la fois retrouver un sens à sa vie et redonner l’honneur à ses grands-parents. Ses grands-parents ont été des résistants et ils ont caché des gens traqués, dont une famille juive , les Trudel dont le mari Eli est un peinte connu.

Sa tante et son oncle, avant de quitter leur appartement pour aller en institution lui donne le fameux « tableau du peintre juif » . L’histoire familiale raconte qu’un peintre juif que ses grands parents avaient caché le leur avait laissé en remerciement. Stéphane fait des recherches et se rend compte qu’Éli Tudel est un peintre assez connu et que son tableau vaudrait au bas mot plus de cent mille euros. Stéphane est au chômage sa femme Irène fait vivre le ménage avec un petit salaire de vendeuse. Alors pour elle la solution est simple. , il faut vendre au plus vite ce tableau.
Sauf que, Stéphane préfère la dignité à l’argent et il décide donc de prendre contact avec Israël afin que ses grands parents reçoivent le titre de Justes pour avoir aider des juifs.

Tout devient extrêmement compliqué quand il se rend en Israël car on accuse ses grands parents d’avoir volé ce tableau qui est répertorié aux œuvres spoliées aux juifs Il apprend aussi que les Trudel sont mort à Auschwitz.
Commence alors pour lui une enquête pour comprendre ce qui a pu se passer, car la mort des Trudel ne correspond pas aux informations que sa tante lui a données. Son but principal est de laver l’honneur de ses grands parents qu’il ne peut imaginer avoir voler quoi que ce soit.

Cette enquête va permettre à l’auteur de cerner au plus prêt la personnalité de Stéphane et de comprendre la façon dont la résistance faisait passer des clandestins . Je ne peux évidemment pas vous révéler la solution de son enquête mais cette enquête fait revivre l’horreur du sort des juifs qui avaient tant de mal à fuir leur sort.

Un roman que j’ai bien aimé, et j’ai partagé le désarroi de Stéphane qui peu à peu va ouvrir les yeux sur son entourage : ses filles, sa femme et il va se retrouver lui-même à la fin de ce grand voyage.

 

Citations

Le couple de la génération de ses parents.

Ma tante est la sœur aînée de ma mère. Elle a plus de quatre-vingt-dix ans, et son mari, mon oncle, est un peu plus âgé qu’elle. Louise et Étienne forment un couple adorable. Des petits vieux comme on les aime, curieux et bienveillants. Ils habitent en région parisienne, et régulièrement, je me dis que je ne vais pas les voir assez souvent. Une fois tous les cinq ans, en moyenne. Pas le neveu idéal.

Être cévenol.

 Il n’était pas seulement cévenol. Il était aussi et surtout protestant calviniste. Descendant de camisards, façonné par les causses, avec le maquis dans les veines. Chez ces gens-là, la notion de devoir va avec celles de modestie. On fait ce qu’on a à faire mais on ne s’en vante pas.
 Son frère, dont il était très proche, est mort sous la torture assassiné par la Gestapo sans avoir parlé. Encore un taiseux. Il avait payé son appartenance à un réseau FFI dans le massif des Vosges. J’imagine qu’aux yeux de mon grand-père, le véritable héros de la famille, c’était son frère. Il s’était interdit de fanfaronner, il aurait trouvé cela inapproprié, voire indécent. 

Vision négative d’Israël .

 – Rendez-moi mon tableau ! Je crie.
 Des rires me répondent en provenance d’un toit. Je lève la tête. Là-haut, sur une terrasse des jeunes dansent au rythme d’une musique techno. Ils me saluent pouce levé. Parmi eux, j’aperçois des garçons torse-nu et les filles en t-shirt moulant. C’est c’est quoi ce pays schizophrène ? À quelques dizaines de kilomètres d’ici des rigoristes en « talit » dictent depuis leur kibboutz la politique du pays à des teufeurs imbibés de cannabis et d’ecstasy. À un jet de roquette, c’est la guerre, et ici c’est la décadence. Partout dans les rues de la capitale, à l’entrée des centres commerciaux, des gares et des administrations, des soldats en armes scannent les sacs de courses d’une population qui se laisse faire sans rechigner. La terreur comme chose acquise, intégrée dans les habitudes. Attachés-cases, sacs à main et mitraillettes se côtoient et tout le monde semble trouver la chose normale, tant que cela n’empêche pas les soirées sur les terrasses de la ville de se tenir. Un conflit permanent au milieu de la fête et vice-versa.

Portrait du grand père.

Dictionnaire à la main – « Le Petit Robert « pour l’orthographe et celui des noms propres pour les détails biographiques-, mon grand-père vérifiait tout. Je n’avais droit à une barre de chocolat noir qu’une fois ma corvée remplie -je préférais le blanc mais ils étaient jugés « décadent » par mon grand-père et donc proscrit.
 De toute ma jeunesse, je n’ai surpris mon grand-père en train de se laisser aller à une frivolité qu’à une occasion ! 

 


Édition Perrin collection Tempus 

Ce livre se lit très facilement et pourtant il plonge dans de nombreux aspects du gouvernement de Vichy. Le travail de cette historienne est remarquable et elle sait le rendre accessible à un grand public. Au lieu de suivre l’histoire de cette période de façon chronologique, en 12 chapitres, elle cerne au plus près ce que fut ce gouvernement. D’abord le choix très bizarre de Vichy . Pour l’anecdote cette ville avait des hôtels qui n’étaient pas chauffés car normalement fermés l’hiver. Dans le deuxième chapitre, on voit à quel point le vieux maréchal avait du mal à rédiger lui-même ses discours. Mais dans le troisième, elle attribue à Pétain le statut des juifs et on voit à quel point cela était important pour Pétain de débarrasser l’état français de l’influence juive. Il distinguera les juifs français des juifs étrangers mais en aucun cas on ne peut penser qu’il a voulu sauver des juifs. Dans le chapitre quatre on sourit aux difficultés du retour des cendres de l’aiglon envisagé comme une grande largesse d’Hitler à la France.

C’est dans le huitième chapitre qu’elle cerne le rôle de Vichy dans la solution finale, on le sait maintenant sans la collaboration active des français les Allemands auraient eu plus de mal à déporter les juifs même si, il est vrai, que c’était plus leur volonté que celle du Maréchal Pétain. Personne à Vichy ne s’y est opposé, pire ils ont même beaucoup aidé les occupants, à l’image de Bousquet dont le tardif engagement dans la résistance ne saurait occulté le rôle qu’i a joué dans l’arrestation et la déportation de très nombreux juifs. L’auteure s’intéresse aussi à la milice, aux difficultés de de Gaulle pour s’imposer à Alger, à l’assassinat d’Henriot, la vengeance de la milice, la personnalité étrange de leur chef Darnand, et cela termine par le procès de Pierre Laval.

Cette plongée dans cette période est fascinante, Vichy et sa clique de politiciens semblent tellement ridicule, c’st un véritable panier de crabes, tous les protagonistes sont prêts à s’entretuer, et se méprisent mutuellement. Ce ne serait pas si grave si, en même temps, pour plaire à l’occupant, ils n’avaient pas devancer le moindre de leurs désirs. C’est grâce à eux que les enfants juifs ont été déportés, grâce à eux que les étrangers ont été mis dans des camps en zone libre puis livrés aux Allemands. Ils pensaient sauver un peu d’autonomie de la France alors que les Nazis ne leur ont jamais laissé une parcelle de pouvoir. Sauf le pouvoir de donner une liste de noms pour que ceux ci aient leurs 300 otages à fusiller contre l’attentat qui avait coûter la vie à un de leur officier.

Ce qui est incroyable dans le procès de Laval c’est de voir à quel point celui-ci croira jusqu’à s amort qu’il a œuvré pour le « bien » de la France. Et sa fille créera une fondation pour réhabiliter la mémoire de son père !

J’ai lu un article où on voit qu’il y avait chez elle au moins un tableau volé à une famille juive, l’amitié de son père avec les autorités nazies étaient bien récompensées.
Ce qui est certain c’est que les procès de Pétain et de Laval , n’ont pas vraiment fait la lumière sur toutes les conséquences des lois raciales française écrites par eux. La Shoa n’était pas du tout au cœur des débats à l’époque.

Un livre à lire pour tous ceux et toutes celles qui souhaitent une information claire et précise ou qui ne veulent pas oublier un passé qui fait mal à la France.

Citations

 

 

 

Détail étonnant .

 Les conditions matérielles, passables en été, deviennent inutilement pénibles en hiver puisque les hôtels, généralement fermés hors saison, n’ont pas de chauffage. Le secrétaire général au ministère des colonies qui avait été le premier a évoqué les attributions de charbon s’était fait éconduire au motif qu’on aurait quitté Vichy avant les premiers frimas. On fut fort dépourvu quand la bise fut venue. Dans la nuit du 16 au 17 janvier 1941, le thermomètre tombe à moins 23°C.
 L’ allier charrie des glaçons. Durant l’hiver 1941-1942 c’est une tempête de neige qui isole la ville. Le 9 janvier il fait moins 23° C.

Pétain et les juifs .

 Même si les Allemands ne sont pas demandeurs d’une législation antisémite française, Pétain et Laval anticipent la bonne impression qu’il pourrait créer en s’inscrivant volontairement dans cette antisémitisme qui sera, à n’en pas douter l’un des marqueurs de l’identité de la nouvelle Europe sous domination nazie.
 L’idée d’un statut des juifs est donc bien dans les esprits, statut dans la préparation doit logiquement être dévolue au ministre de la justice Raphaël Alibert. Ce qui explique la phrase à la fois ridicule et choquante que rapporte le ministre du travail Charles Pomaret, phrase dans laquelle Alibert se serait vanté d’être en train avec son chef de cabinet de « préparer un texte aux petits oignons ».

La responsabilité de Vichy dans la solution finale : Pétain a-t-il sauvé des juifs ?

 La xénophobie assumée de Pétain a livré à l’arbitraire policiers des personnes particulièrement vulnérables et dépourvues d’autres protection que celle qu’elles pouvaient espérer de la France. Et elles ont contribué à faire porter à l’État français une part de responsabilité dans la perpétration de la Solution finale. C’est contre le Maréchal et contre son gouvernement que des Français, que des fonctionnaires, que la hiérarchie de l’église catholique ont agi à leurs risques et périls, pour protester contre les persécutions et porter secours aux persécutés. Vichy s’est laissé entraîner par idéologie et par vanité, dans la logique qui consiste à obliger des complices, des témoins et parfois des victimes a participé au crime. Mais choisir l’ordre des mises a mort ou les justifier par le sacrifice de l’intérêt supérieur de la patrie, ce n’est pas le sens communément admis du verbe « sauver ».