Édition Harper Collins Traversée . Lu dans le cadre de Masse Critique Babelio

 

Le sujet m’intéressait et je n’ai pas hésité à participer à cette édition de Masse Critique. Je ne suis pas déçue ! Tout ce qui tourne autour de la notoriété des œuvres d’art m’interroge. Et c’est bien le sujet du roman. Soutenue par une enquête plus ou moins policière, l’écrivaine décrit avec un regard acéré les rapports entre les artiste, les galeristes, les directeurs de musée , les critiques … tous ceux qui construisent ou détruisent la réputation d’un artiste et qui lui créent une côte financière. C’est un monde de menteurs, d’affabulateurs, de personnalités cruelles avides d’argent de reconnaissance et de pouvoir.

Tout le roman est sous tendu par la recherche de qui est vraiment Peter Wolf , de lui on ne connaît que des tableaux qui font l’unanimité et qui sont défendus par sa femme Petra Wolf. Lui, Peter a disparu de la scène publique et ne répond plus à aucun journaliste. Le directeur du Moma qui a prévu une rétrospective de l’oeuvre de Peter Wolf veut absolument que celui-ci soit présent au vernissage, il lance une enquête avec des moyens financiers énormes, il est, peu à peu, persuadé que Petra Wolf a fait disparaitre son mari et est devenu l’unique bénéficiaire de la valeur des œuvres de son mari. D’un autre côté, un écrivain français cherche à faire la biographie du couple Wolf et enfin une journaliste américaine cherche à son tour à en savoir plus.

L’autre aspect de ce roman, c’est la différence des côtes financières entre une oeuvre signée par une femme ou par un homme . Enfin le dernier thème c’est la censure et la surveillance policière de la Stasi .

Tout cela fait un excellent roman, dont on devine assez vite une partie du dénouement, à savoir qui aurait dû signer ces tableaux que le monde entier admire. J’ai beaucoup aimé l’ambiance sans aucune concession du monde des critiques d’art. Cela va du travail des jeunes stagiaires qui n’ont comme salaire de recherches épuisantes utilisées par leur mentors que la joie de côtoyer des artistes célèbres, jusqu’aux réunions où les petites phrases assassines tuent les réputations les mieux établies . Et puis tous ces gens qui s’approprient les petites anecdotes qu’ils ont entendues ailleurs, sont criants de vérité (hélas !).

Et au-dessus de tout ce petit monde qui grouille pour se faire reconnaître, il y a l’art mais est-ce autre chose que la reconnaissance de tous ces gens là ? et donc de la côte financière que ces mêmes gens attribuent à la création. Ce roman ne cesse pas de nous ouvrir sur des questions intéressantes, par exemple est-ce que nous ne sommes pas tous influencés par la renommée pour apprécier une oeuvre ?

Ce n’est pas une vision très réjouissante à propos de l’art mais cela donne un très bon roman dont j’ai parfois eu du mal à apprécier l’écriture qui utilise des expressions un peu trop « branchées » pour moi.

 

Citations

Les artiste de l’ex-Allemagne de l’Est.

 Ce n’était pas cet aspect sombre de l’usine qui avait causé la perte de Rüdigere, non. Cette image réaliste de l’environnement ouvrier serait passée. La peinture a été qualifiée de hautement subversive pour d’autres raisons. Le parti n’était pas dupe et avait intercepté le message caché : le manque de fenêtres symbolisait une dénonciation de l’enfermement de la Nation. L’élan dans les cheveux des ouvrières était un appel au soulèvement. Comme nombre de ses collègues, Rüdiger s’était retrouvé du jour au lendemain démis de ses fonctions. L’ensemble de sa production fut passée au crible et le jugement fut sans appel : il était un ennemi de l’état.
 – Heureusement pour moi ! À l’époque, j’ai cru que je ne m’en remettrais jamais, mais une fois le Mur tombé c’est ce qui m’a sauvé la vie. J’ai des amis artistes, peintres, des personnes incroyables qui se font traîner dans la boue par des petits connards de l’Ouest qui ne connaissaient rien à rien. Sous prétexte qu’ils étaient au VBK c’était des vendus. Mais c’était des artistes, de vrais artistes, des gens complexes avec une vision.

L’utilisation des stagiaires.

Juste avant de s’envoler pour les États-Unis Hilary avait recruté Aminata et Justin deux stagiaires qu’elle avait réussi à débaucher respectivement des pages « Modes » et « Accessoires ». Elle pouvait enfin leur refiler le bébé du supplément « Design en RDA » Aminata et Justin avait trouvé une mine d’information en français, dans un site dédié à l’Ostalgie, véritable encyclopédie, concernant les produits du quotidien des Allemands de clic en clic, ils avaient débarqué à pieds joints dans l’histoire d’un pays dont ils avaient vaguement entendu parler. Ils n’en revenaient pas. « C’est dingue, avaient-il raconté à la rédaction, on est fait pour ce boulot, on est nés tous les deux en 89 ! »
Pour motiver ses troupes, Hilary leur avait promis un voyage à Berlin avec Éloïse, une photographe pigiste qui jouissait d’une petite notoriété rock. Cette nouvelle avait accru leur intérêt pour le projet et enflammé leur envies d’ailleurs, de rencontres nocturnes et de lieux atypiques.

Le critique sur de lui.

Sven Sön s’emporta avec justesse. Tout sonnait juste en lui, même lorsque ses phrases étaient dénuées de sens. Il maîtrisait l’exercice. Tant et si bien qu’il pouvait dire tout et son contraire, et même n’importe quoi, avec un tel aplomb que c’était son interlocuteur qui se remettait en cause quand il n’avait pas tout compris.

Description d’une rédaction d’un journal de mode.

Devant les couloirs de « Vanité Fair » les gens allaient et venaient avec autant de détermination que d’habitude. L’étage était divisé en deux. Dans le couloir de droite se trouvaient les bureaux des journalistes chargés des sujets de société, la direction artistique et la rédaction. Dans celui de gauche, c’étaient les assistants de mode, les filles de la beauté, la boutique et la pub. Un réceptionniste organisait la vie frontalière entre ces deux monde : ceux qui pouvaient écrire à droite ; et ceux qui savaient s’habiller à gauche. C’était comme ça. 

Le scandale et le succès .

Mais au fond, qu’importe la façon dont cette affaire allait se terminer, l’onde de choc qu’il avait provoquée allait à coup sûr garantir un succès sans précédent à son projet : le scandale attise bien plus la curiosité que le seul amour des arts plastiques. Ça, il le savait bien.

 

6 Thoughts on “La Femme Périphérique – Sophie POINTURIER

  1. Un roman que je n’ai pas particulièrement remarqué, mais qui pourrait m’intéresser.

  2. Bonnes questions ! C’est un roman qui pourrait m’intéresser

  3. Je ne pense pas être être trop influencée par la renommée d’une oeuvre pour l’apprécier…En général, ça me parle … ou pas ! et par exemple, l’art moderne ne me parle pas du tout, quelque soit sa côte !
    Mais le sujet m’intéresse et comme c’est via la masse critique, je suppose que ce livre t’appartient désormais et je veux bien que tu me le prêtes !

    • On en reparle de vive voix bientôt ensemble. Ce roman ouvre des questions, moi non plus je ne croyais pas être influencée par la célébrité , il n’empêche les tableaux de Van Gogh à ses débuts (les mangeurs de pomme de terre) je ne les ai regardés attentivement que parce qu’il s’agissait de Van Gogh. Je ne dis pas que je les ai aimés mais à cause du nom, ils ont retenu mon attention.

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