Un livre vite lu et certainement vite oublié, je ne comprends absolument pas pourquoi cette auteure mêle sa vie sentimentale à ce récit. J’ai essayé de comprendre, puis j’ai lu en diagonal son histoire d’amour torride avec « P » le séducteur. En revanche, j’ai bien aimé la description de sa famille pied-noir. Le portrait de sa grand-mère est criant de vérité. Cette femme si digne , aux cheveux colorés et permanentés, au visage parfaitement maquillé a raconté à sa petite fille ses souvenirs de « là-bas₩ » c’est à dire de son Algérie natale qui n’a vraiment rien à voir avec le « crime contre l’humanité » dont à parlé un politique. Les Montaya sont des Espagnols pauvres qui ont réussi à fertiliser un bout de terre très aride de la campagne oranaise : Misserghin. Toute la famille a vécu dans le souvenir de ce lieu, et l’auteure décide son père à retourner en Algérie. Elle ne sait pas si elle a raison de l’y entraîner, finalement, il l’en remerciera. Dès que son père s’est retrouvé sur les lieux de son enfance, il s’est senti beaucoup plus à l’aise qu’en France où il a toujours été un homme timide et réservé. Les liens entre l’Algérie et la France, à travers les rencontres que le père et sa fille sont amenés à faire avec des algériens de toutes le générations sont décrits de façons sincères et subtiles cela montre que nous sommes bien loin des déclarations simplistes et polémiques des politiques sur ce sujet.

 

Citations

La mémoire de mon père m’impressionne. Celle d’Amin, me stupéfie. Ce n’est pas celle d’un garçons d’une trentaine d’années qui aime avant tout s’amuser et dont le caractère a priori joyeux n’a rien de nostalgique. En aucun cas il ne peut s’agir de ses propres souvenirs, on les lui a transmis. Il a reçu l’Algérie française en héritage, comme moi.

 Je ne sais pas depuis quand ce roman était dans ma bibliothèque ni qui l’y a mis. Je n’ai pas souvenir d’avoir voulu le lire, mais c’est chose faite. Est-ce un roman ? un essai ? une autofiction ? Je ne peux pas répondre à ces questions, tout ce que je peux dire c’est que rarement un écrivain aura fait de lui-même un portrait plus déplaisant. En le lisant, je me disais : « quel est le malheur plus grand que de n’être pas aimé ?, de ne pas aimer soi-même ? » et bien j’ai trouvé la réponse « d’être aimé par un écrivain à l’esprit torturé ! ». Car ce « roman russe » raconte la vie d’Emmanuel Carrère, sa mère, son grand père russe et collaborateur des nazis, et l’amour d’ Emmanuel pour une pauvre Sophie qui doit être bien triste de l’avoir aimé. Lui qui, lorsqu’il est angoissé a de l’herpès sur le prépuce. Ne soyez pas étonné que je connaisse ce fait si important, il est dans son roman comme tant d’autres détails dont je me serai volontiers passée. Donc, on connaît tout de ses petitesses dans sa conduite amoureuse, le clou de l’ignominie c’est lorsqu’il lui offre exactement la même bague que Jean-Claude Romand avait offert à sa femme et qu’il l’emmène le soir même une adaptation de son livre « L’adversaire » qui raconte justement les meurtres de Romand. Est-ce que je rejette tout de ce livre ? je me dis qu’il lui a permis peut-être de se reconstruire en étalant ainsi les côtés les plus déséquilibrés de son être et des failles de sa famille. Je trouve aussi que la partie russe résonne assez juste, mais ce dont je suis certaine c’est que si j’avais commencé par la lecture de ce livre je n’aurais plus jamais ouvert un livre de cet auteur.

Citations

Autoportrait peu flatteur

La plupart de mes amis s’adonnent à des activités artistiques, et s’ils n’écrivent pas de livres ou ne réalisent pas de films, s’ils travaillent par exemple dans l’édition cela veut dire qu’ils dirigent une maison d’édition. Là où je suis, moi copain avec le patron, elle l’est avec la standardiste. Elle fait partie, et ses amis comme elle, de la population qui prend chaque matin le métro pour aller au bureau, qui a une carte orange, des tickets restaurants, qui envoie des CV et qui pose des congés. Je l’aime, mais je n’aime pas ses amis, je ne suis pas à l’aise dans son monde, qui est celui du salariat modeste, des gens qui disent « sur Paris » et qui partent à Marrakech avec le comité d’entreprise. J’ai bien conscience que ces jugements me jugent, et qu’ils tracent de moi un portrait déplaisant.

Jugement du principal protagoniste du film Retour à Kotelnitch

C’est bien : et ce que je trouve surtout bien, c’est que tu parles de ton grand père, de ton histoire à toi. Tu n’es pas seulement venu prendre notre malheur à nous, tu as apporté le tien.Ça, ça me plaît.

20161014_160713Lu grâce au club de lecture de la média­thèque de Dinard,

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Avec cet humour que l’on dit « juif » Joann Sfar, l’auteur du « Chat du Rabbin » raconte sa tristesse à la mort de son père. Orphelin d’une mère « partie en voyage » alors qu’il avait quatre ans, ce père brillant, beau, dragueur, bagarreur a comblé la vie de ce dessinateur de Bandes Dessinées, cinéaste et romancier. Et le vide qu’il laisse après sa mort dans le cœur de son fils ne peut que difficilement se refermer. Alors, celui-ci écrit ce livre et dans un joyeux pèle-mêle raconte toutes ses joies et peines d’enfants qui viennent sous sa plume et vont lui servir exorcisme à sa douleur. Nous sommes dans la veine des dessinateurs de « Charlie Hebdo » plein d’irrespect mais aussi plein d’amour pour un père qui a su lui donner l’envie de vivre. Divisé en petit chapitre, ce texte m’a parfois ravie et souvent amusée mais pas tout le temps. C’est comme pour « Charlie Hebdo » parfois je me sens loin de cet humour, tout en reconnaissant le talent de ces humoristes.

Citations

La foi

Je ne contredis jamais mon cousin Paul. Parce que je l’aime. Parce que sa foi me rassure. Parce que j’aimais l’autorité qu’il avait sur moi quand j’étais enfant. Je ne sais pas au sujet de Dieu, mais pour mon cousin, j’ai toujours aimé le croire. Même si je n’y parviens pas.

Humour et style

Dans ma famille, on m’a dit qu’être avec une fille non juive, c’était aussi grave que d’être pédé (côté famille paternelle, car côté maman on a eu Hitler alors on n’a pas eu le temps pour embêter ses semblables).

Humour grinçant

Pour résumer, on peut l’appeler Yitzak Rabin ou Anouar el-Sadate : à chaque fois qu’un homme a sincèrement tenté de faire la paix dans cette région, il s’est pris une balle dans la tête.

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Ce livre a accompagné un voyage en TGV, je l’ai lu grâce à Aifelle qui m’avait donné envie de découvrir cette auteure. Je lirai certainement « Suite byzantine » ainsi que « l’Angoisse d’Abraham ». J’aime beaucoup les récits qui font une part belle à la langue, pour Rosie Pinhas-Delpuech, écrivaine et traductrice, qui parle le turc, le français, l’hébreux et sans doute bien d’autres langues, la recherche de l’identité prend un sens que je comprends si bien, car pour moi ma patrie est autant ma langue que ma nationalité.

Après son enfance qui est peu décrite dans ce tome, l’auteure cherche à comprendre cette tante Anna qui a perdu et son mari et son fils pendant la guerre 39-45. C’est l’occasion de vivre un épisode si banal dans l’après guerre mais si peu glorieux, comment des juifs se sont fait spolier de tous leurs biens, par des gens en qui ils avaient confiance. Mais si Anna souffre tant c’est aussi sans doute que la femme qui a dénoncé son mari était aussi sa maîtresse. Anna fera tout pour devenir une catholique française, elle ne pourra pas empêcher son fils unique de s’engager dans l’armée du général Leclerc et mourir en 1945 en combattant. Cette histoire centrale du livre, l’auteure ne peut la comprendre qu’en reprenant le parcours de sa famille depuis la Turquie. Toute sa famille avec ses lourds secrets et ses peines tragiques viennent hanter sa mémoire et permettent peu à peu de comprendre ce que cela veut dire d’être juive aujourd’hui dans un style absolument superbe.

Citations

Son enfance

C’était après la guerre, dans les années cinquante, au temps du chewing-gum, du swing et de la modernité. Etre juif représentait une maladie mortelle à laquelle on avait réchappé de justesse et dont il ne fallait pas trop parler.

La Turquie et les juifs

Lentement, subtilement, gentiment même, au fils des années d’école primaire, de l’apprentissage des rudiments d’histoire et de géographie, le turc m’avait débarqué sur le rivage : ma religion, mentionnée sur mon acte de naissance, « musevi », qui signifie mosaïque, s’interposait entre moi et la communauté nationale.

Son amour du français et de son orthographe

J’ignore jusqu’à aujourd’hui la cause de cet amour fou pour cette orthographe, de cette jubilation enfantine à conquérir l’arbitraire souverain de la langue. Peut-être que l’écriture phonétique du turc me paraissait d’une facilité enfantine et que la difficulté du français était à la mesure de celle de grandir ?

Une belle phrase tellement chargée de sens

Un destin de deuils et de chagrins avait balayé ce chatoiement crépusculaire de l’Entre-deux guerres, dans les Balkans ottomans voisins de l’Empire austro-hongrois.

20160716_131754Traduit de l’anglais par Hélène Hinfray

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Je conseille la lecture de ce court témoignage à tous les fans de « Downton Abbey ». La quatrième de couverture dit que ce récit inspira plusieurs scénaristes dont Julian Fellowes (créateur de Downton Abbey). Mais ne vous attendez pas à retrouver la série, contrairement au personnage de Daisy, Margaret Powel est une jeune fille qui a tout de suite eu une conscience aiguë des limites de sa condition. Elle ne fait pas partie de ceux ou celles qui, à l’image de Carson ou de Mme Hughes, s’identifient complètement à la famille qu’ils servent. Elle cherche par tous les moyens à sortir de sa condition d’aide cuisinière et pour cela change le plus souvent possible d’employés. Cela nous vaut une série de portraits des riches familles anglaises hautes en couleurs ! Entre celle où on l’oblige à repasser les lacets des chaussures, celles où on ne les nourrit pas assez, celles où on les fait trimer comme des bêtes de somme, tout cela donne une vision bien éloignée de notre chère famille Crawley. Une seule famille semble un peu corresponde à cet idéal, mais Margaret n’y reste pas longtemps car elle veut surtout se marier et ne plus être au service de.. Ce qui donne autant d’énergie à cette toute jeune fille c’est une éducation rude mais très joyeuse au bord de la mer à Hove près de Brighton. Elle y a acquis une vision très juste de la société. Bien sûr le style est très plat mais on ne s’attend pas à plus pour ce témoignage très vivant.
Pour le plaisir d’entendre sa voix voici un petit film où elle recommande de manger du poulet anglais :

Citations

L’importance du dimanche dans sa famille

Enfin, on ne peut pas dire non plus que l’église jouait un grand rôle dans la vie de mes parents. Je crois qu’ils n’avaient pas vraiment de temps à consacrer à ça ; ou plus exactement ils n’en avaient pas envie. D’ailleurs on était plusieurs dans la famille à ne pas être baptisés. N’empêche qu’on devait tous aller au catéchisme le dimanche. Pas parce que nos parents étaient croyants, mais parce que pendant ce temps-là on n’était pas dans leurs jambes. Le Dimanche après-midi, c’était le moment où il faisait l’amour.

L’école

Mais ce qui était formidable à l’école, c’est qu’on devait apprendre. À mon avis, il n’y a rien de plus important que de savoir lire et écrire et compter. C’est de ces trois choses-là qu’on a besoin si on veut travailler et gagner sa vie. Nous, on nous forçait à apprendre , et je pense que les enfants il faut les forcer. Je ne crois pas aux théories comme quoi « s’ils n’en ont pas envie ça ne leur apportera rien ». Bien sûr que ça leur apportera quelque chose . Nous, notre maîtresse venait nous donner une bonne gifle quand elle nous voyait bayer aux corneilles. Et croyez-moi, quand on sortait de l’école on sortait avec quelque chose.

L’intérêt des patrons pour leurs domestiques

En fait pendant toute ma vie en condition j’ai constaté que les patrons se souciaient toujours énormément de notre bien-être moral. Ils se fichaient pas mal de notre bien-être physique. Pourvu qu’on soit capable de bosser, ça leur était bien égal qu’on ait mal au dos, au ventre ou ailleurs ? Mais tout ce qui avait à voir avec notre moralité, ils trouvaient que ça les regardait. C’est ce qu’ils appelaient « prendre soin des domestiques » s’intéresser à ceux d’en bas. Ça ne les dérangeaient pas qu’on fasse de grosses journées, qu’on manque de liberté et qu’on soit mal payé ; du moment qu’on travaillait bien et qu’on savait que c’était le Bon Dieu qui avait tout organisé pour que nous on soit en bas à trimer et qu’eux ils vivent dans le confort et le luxe, ça leur convenait parfaitement.

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Livre lu grâce aux billets de Mior et de Galéa, je les remercie pour cette lecture. Bien sûr , nous avons tous et toutes, lu beaucoup de livres sur la persécution des juifs pendant la guerre. Mais chaque cas est unique, et la grande originalité de ce témoignage c’est qu’il a été écrit à chaud , pendant et juste après les événements. Cela fait penser à « Suite française » de Irène Némirovsky, tout en étant moins littéraire c’est quand même très bien écrit. Françoise Frenkel a une passion : les livres et en particulier ceux des écrivains français. Grâce à des études littéraires de très bon niveau, à la Sorbonne, elle ouvre une librairie française à Berlin en 1921. Ce lieu devient vite, grâce à sa culture, un haut lieu de la civilisation française en Allemagne. Hélas les nazis détruiront ce beau rêve et malheureusement pour elle, son origine juive et polonaise la met en grand danger. En 1939, elle arrive à Paris, puis se réfugie à Nice, en danger partout elle veut fuir en Suisse où l’attendent des amis. Son récit s’arrête lorsqu’elle pose les deux pieds dans ce pays où elle a pu survivre. Elle raconte avec précision, d’abord sa joie de créer à Berlin un lieu de culture française, puis son exil dans une France trop vite occupée et enfin sa fuite vers la Suisse, cela permet au lecteur de partager le quotidien d’une femme qui cherche à s’échapper de la nasse qui se referme inexorablement sur elle et ses relations.

Elle nous montre toute la diversité des réactions des Français, ceux qui sont dans l’évidence de la main tendue, comme ce couple de coiffeurs, qu’on a envie d’embrasser tellement ils sont intelligents et gentils, et puis ceux qui sont indifférents ou hostiles, une gamme de réactions qui sonnent tellement vraies. Françoise Frenkel tient à souligner l’attitude des Savoyards, c’est dans cette région qu’elle a senti le plus de compassion et le maximum d’aides pour ceux qui étaient traqués par la milice ou la Gestapo. Un livre prenant donc et indispensable au moment où des hommes et des femmes sont à nouveau traqués par une idéologie mortifère.

L’introduction de Patrick Modiano est superbe, on comprend très bien pourquoi il s’est retrouvé dans ce témoignage lui qui a vécu la guerre sans la défense d’un milieu familial protecteur et qui a ressenti comme Françoise Frenkel, les valeurs humaines se déliter et le danger planer sur la moindre rencontre de personnalités plus ou moins bizarres. Il nous dit aussi que ce livre qui a paru en 1945 et qui a été totalement oublié ne livre pas l’intimité de l’écrivain mais que ce n’est pas si important. Mais, je dois être une femme de notre époque, car j’aimerais bien savoir, pourquoi elle ne nous parle pas de son mari, mort à Auschwitz, comment elle avait quand même un peu d’argent pendant la guerre, et surtout si de 1945 à 1975 elle a été heureuse à Nice. Oui j’aimerais en savoir plus sur cette femme si pudique et si courageuse.

Citations

Ambiance à Nice parmi les réfugiés

Un grand nombre de réfugiés se préparaient à l’émigration. Ils comptaient sur un parent plus ou moins proche, sur un ami, ou sur l’ami d’un ami, sur des connaissances établies dans de lointaines parties du monde et qui les aideraient, pensaient-ils, à réaliser ce projet.

Ils entretenaient une correspondance laborieuse, à mots couverts, lançaient des télégrammes coûteux, demandaient des affidavits, des visas, recevaient des réponses, des contre-demandes, des questionnaires, des circulaires qui engendraient une nouvelle vague de correspondance.

Ensuite, ils stationnaient des matinées entières devant les consulats pour apprendre que tel ou tel document manquait, n’était pas conforme aux prescriptions ou se trouvait inexact. Lorsque quelques-uns sortaient avec un visa, ils étaient regardés comme des phénomènes, comme des bienheureux !

Les départs étaient peu nombreux

L’exilé et la guerre

Le fond de cette existence était l’attente, canevas où un espoir toujours plus mince et une pensée de plus en plus morose brodaient ensemble des arabesques nostalgiques

L’âme humaine

Un fond de sadisme doit être caché en tout homme pour se dévoiler lorsqu’une occasion s’en présente. Il suffisait qu’on ait donné à ces garçons, somme toute paisibles, le pouvoir abominable de chasser et de traquer des êtres humains sans défense pour qu’ils remplissent cette tâche avec une âpreté singulière et farouche qui ressemblait à de la joie.

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J’ose maintenant me promener dans le rayon BD et en choisir une sans même avoir lu de critiques dans vos blogs ! Quelle révolution, toute personnelle (la révolution !), et qui affecte surtout mes finances… mais non, cela me procure aussi beaucoup de plaisirs. Ce n’est pas un sujet très gai que la disparition de ses parents, pas plus que le vieillissement, mais vous l’avez remarqué entre « Mamette » et »Les vieux Fourneaux » je m’y intéresse et le thème semble porteur. Vivrions-nous dans des sociétés vieillissantes ?

Roz Chast, raconte avec un humour et un réalisme étonnant la vie de ses parents dans un quartier populaire de Brooklyn, ils sont juifs d’origine russe. Ce qui veut dire, qu’entre les pogroms et la Shoa, leurs familles respectives n’ont pas été épargnées. Mais là, n’est pas le sujet de ce roman graphique. Roz nous fait le portrait de ses parents , et c’est parfois à mourir de rire. Sa mère a un tempérament explosif, et son père est gentil et délicat malheureusement c’est aussi un grand angoissé. Avec le grand âge, il est atteint de sénilité et tout devient alors effroyablement compliqué.

Roz Chast raconte très bien les difficultés et le coût de la vieillesse aux USA, elle a réussi à ce que ses parents soient à peu près correctement pris en charge, mais il s’en est fallu de peu qu’elle ne puisse pas faire face financièrement. Cette plongée dans le monde américain qui n’est pas dans la misère mais qui a du mal à s’en sortir est vraiment intéressante, tout cela raconté avec humour. Je pensais mettre cinq coquillages et n’avoir aucune réserve et puis les cinq pages finales me rendent mal à l’aise. Le livre se termine sur les dessins que Roz Chast a fait de sa mère sur son lit de mort. Je me suis sentie très mal tout à coup, sa mère meurt, elle est là avec elle et elle la dessine… bref je ne comprends pas et pire je suis un peu choquée. Dommage car le début et 99 % de ce roman graphique sont si bien.

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SONY DSCLu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard.

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Une excellente surprise que la lecture de ce roman. Surprise, pourquoi ? Car il a été couronné par le prix Fémina 2015, et que je suis de plus en plus déçue par les livres récompensés, je finis par avoir un réflexe un peu stupide de fuite. Ce roman est vraiment très touchant, il est écrit d’une façon originale pour raconter une famille, en particulier la vie des grands-parents de l’auteur, des gens hors du commun. Mère-grand est rennaise, d’une horrible famille confite en dévotion, en sentiment de supériorité et désargenté mais qui veulent « paraître » et tenir leur rang (je me demande si je lirai, un jour, un livre où on dit du bien de Rennes, ma ville natale, que je n’ai jamais beaucoup appréciée).

La famille du grand-père rescapé des pogroms du centre de l’Europe, aura bien du mal, évidemment à survivre au nazisme et à la collaboration française. Le clan Boltanski a donné naissance à une kyrielle d’êtres remarquables : la grand-mère écrivaine sous le pseudonyme d’Annie Lauran, le grand-père de l’académie de médecine, un fils artiste plasticien reconnu Christian, un autre linguiste qui est le père de Christophe notre auteur journaliste. Lui seul pouvait nous raconter de l’intérieur ce qui faisait le quotidien de cette famille, marquée par « la cache » du grand-père pendant les deux dernières années de guerre. En progressant dans leur lieu de vie, un hôtel particulier (dans tous les sens du terme) avenue de Grenelle à Paris, à la manière du Cluedo (la comparaison est de l’auteur) nous approchons de plus en plus près de ce qui est l’âme de cette famille  : La Cache.

Mais avant d’y arriver nous passerons par toutes les pièces qui sont autant d’occasions de cerner au plus près la personnalité de de Myriam Boltanski, née Marie-Élise Ilari-Guérin, atteinte de poliomyélite et qui passera sa vie à nier son handicap et à refuser la vieillesse. Femme étonnante qui a insufflé à tous les siens l’énergie de la vie. Tout le clan est là resserré autour de celle qui fut abandonnée par sa propre famille à l’âge de 4 ans pour des raisons de commodités financières. On connaîtra tous leurs rituels, décrits avec beaucoup d’humour, les réceptions où les invités finissent par apporter de quoi se nourrir, la façon de s’endormir tous dans la même chambre au pied des lits des grands parents, l’absence d’hygiène corporelles, l’horreur de la maison de Mayenne héritage de la marraine adoptive, grand baraque humide sans aucun confort. On verra leur engagement communiste et auprès du FLN. Sans doute la conséquence de la guerre, j’aurais aimé qu’on en sache plus sur ce qu’ils pensent aujourd’hui de ces engagements là.

Il y a une absente, la propre mère de l’auteur qui laissera son fils vivre dans cet appartement plutôt qu’auprès d’elle, sans que l’on sache pourquoi , elle ne fait sans doute pas partie du fameux clan Boltanski

Citations

L’importance des objets qui ont peuplé les souvenirs de l’auteur

Objet mythique des films italiens des années 50, la Fiat de deuxième génération, dite Nuova 500, faisait penser à un bocal pour poisson rouge, à un sous marin de poche, à un ovni, et moi son passager, à un Martien projeté sur une planète inconnue. Dans son pays d’origine, on l’appelait la « bambina ». Moins flatteur, les Français l’avait surnommé le « pot à yaourt ».

La peur transmise

Cette appréhension, ma famille me l’a transmise très tôt, presque à la naissance. Petit, j’avais la phobie du sable chaud, des vagues, des champignons sauvages, des herbes hautes, des arbres serrés les uns contre les autres, des ténèbres, des vieilles dames affables que je confondais avec des sorcières, des araignées et, plus généralement, de toute forme d’insecte.

Le coté juif de son père adopté par sa mère

En signe de réjouissance, elle sortait alors ses plus belles assiettes, celle en porcelaine bleue. Les creuses pour la soupe, les plates pour la viande. Plus qu’un festin, elle nous offrait un passé. Elle nous reliait à une histoire qui n’était pas la sienne. Elle sacrifiait à un culte ancien dont elle avait adopté les rites. Elle accomplissait un genre d’eucharistie. Son potage roboratif au goût acidulé et à l’odeur de chou contenait consubstantiellement l’âme des Boltansky.

L’importance des meubles des meubles de famille et la bourgeoisie rennaise

Il subsistait tant bien que mal avec une maigre pension d’instituteur,entouré de quelques meubles de famille qu’elle reconnaissait, malgré leur réapparition dans un tout autre contexte. Elle disait qu’il avait recréé sous les tropiques l’appartement rennais de leur enfance, tout en apparence et en mensonge, à la fois bourgeois et misérables.

L’hygiène

En tant qu’ancien vice-président de l’Union internationale d’hygiène scolaire et universitaire, Grand-papa avait théorisé ce laisser-aller général : « Dans un monde propre, il faut être sale, répétait-il. Les bactéries nous protègent. » Ne pas se laver était, selon lui, un moyen de renforcer nos défenses.

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Il aurait fallu si peu de chose pour que ce livre ne soit jamais écrit : que le placement de Lyes par l’ASE, qui avait si bien commencé dans une famille aimante prête à l’adopter ne quitte la région parisienne. Comme il le dit lui même, ces cinq ans de bonheur normal lui ont sans doute forgé des forces pour être debout aujourd’hui. Ensuite ce sera l’enfer pour lui d’abord, et lorsque les adultes qui auront à s’occuper de lui l’auront bien écrabouillé et détruit en lui, toute trace de naïveté de son enfance, ce sera l’enfer pour tous ceux ou celles qui devront l’approcher.

Il veut témoigner de ce que sont les foyers où on mélange les enfants de 8 ans avec des jeunes de 17 ans, du peu de surveillance de certaines famille d’accueil, de l’absurdité des placements successifs, l’abus de l’utilisation des médicaments lorsqu’un enfant est agité et du mal que peut créer le lien avec la mère biologique au détriment de l’enfant. Un argument donné par son référent de L’ASE pour ne pas le laisser dans la famille d’accueil qui voulait absolument le garder (et qui a su conserver un lien avec lui), c’est que sa mère internée en HP ne gardait que ce fil si fragile pour ne pas sombrer dans une démence encore plus grave.

Encore un témoignage important pour ne pas oublier que dans notre société on est loin de faire tout ce qu’il faut pour des enfants privés de parents responsables, c’est dans ce foyer qu’il prendra conscience qu’il est « arabe » et j’ai lu son témoignage en pensant aux frères Kouachi, ils ont connu eux-aussi aussi l’enfer des foyers, et les éducateurs les trouvaient… « gentils » !

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Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard.
Traduit de l’anglais (États-Unis) par Michel Laporte.

Sans le club de lecture, je n’aurais certainement pas lu ce livre, pourtant essentiel à la bonne compréhension de notre époque. Il est vrai que n’importe quelle écoute attentive de l’actualité nous en apprend autant que ce bouleversant témoignage. L’autobiographie de Malala donne vie aux « informations  » et en cela, c’est une lecture indispensable. Je ne peux pas lui mettre de coquillages car on ne peut pas noter un tel écrit, il fait partie des lectures incontournables pour comprendre la nature et la force de l’obscurantisme islamiste. Cette jeune fille est aussi extraordinaire que ce que l’on sait d’elle, issue d’une famille aimante et tout simplement normale, secondée par un père attentif et fier des réussites scolaires de sa fille, elle ne veut se soumettre à aucun diktat des terroristes talibans qui s’installent dans le Swat, sa région.

Elle est à la fois une petite fille normale qui veut être la première à l’école et qui se dispute avec ses frères, et une voix indispensable pour libérer toutes les petites filles des fous musulmans qui veulent leur enlever le droit à l’instruction. Elle sera victime d’un attentat, un homme musulman, au nom de sa foi, a donc tiré à bout portant sur une fillette de 12 ans pour qu’elle se taise à tout jamais. Elle n’est pas morte et sa voix retentit dans le monde entier, mais les fous terrorises et musulmans sont de plus en plus nombreux et rares sont les femmes qui osent dire avec autant de clairvoyance qu’elles ne veulent pas vivre avec ces lois absurdes venues des temps anciens.

Elle n’a pas écrit son livre seule d’ailleurs le nom de Patricia McCormick apparaît sur la couverture, ce témoignage s’adresse à nous, les occidentaux, on sent bien que la journaliste l’amène à décrire ce qui nous touche particulièrement : l’innocence d’une vie de petite fille, la joie par l’instruction, et le choc provoqué par la barbarie des talibans.

Un livre qui fait le tour du monde et à faire lire à toutes les générations. Longue vie aux filles et femmes du Pakistan qui n’acceptent pas les diktats religieux et que les hommes éclairés comme le père de Malala soutiennent leur combat !

Citations

La femme au Pakistan

Quand un garçon naît au Pakistan, c’est l’occasion de grandes réjouissances. On tire des coups de feu en l’air. On dépose des cadeaux dans le berceau du bébé. Et on inscrit le prénom dans l’arbre généalogique de la famille. Mais quand c’est une fille, personne ne vient rendre visite aux parents, et les femmes éprouvent simplement de la sympathie pour la mère. 
Mon père n’accordait aucune attention à ces coutumes. J’ai vu mon prénom -écrit à l’encre brillante- juste là, au milieu des prénoms masculins de notre arbre généalogique. Le premier prénom féminin en trois cents ans.

Obscurantisme taliban-musulman

Par le biais de sa radio illégale, il (le chef des talibans) a incité les parents à refuser les vaccins contre la polio pour leurs enfants. Il affirmait que cette mesure de santé ne visait pas à leur bien, que c’était un stratagème des pays occidentaux pour nuire aux enfants musulmans.

Terrorisme

Le terrorisme c’est la peur tout autour de soi. C’est aller se coucher le soir sans savoir quelles horreurs le lendemain matin apportera. C’est se réfugier avec sa famille dans la pièce centrale parce qu’on a décidé d’un commun accord que c’est l’endroit le plus sûr où se tenir. C’est descendre sa propre rue sans savoir à qui on peut faire confiance. 

 Le terrorisme, c’est la crainte, quand votre père passe la porte pour sortir le matin, de ne pas le voir revenir le soir…..
Pendant la seule année 2008, les talibans ont fait exploser deux cents écoles. 

Son discours lorsqu’elle reçoit le Nobel