SONY DSCTraduit de l’anglais (États-Unis) par François Dupuigrenet Desroussilles (c’est très bizarre cette indication « États-Unis » car la romancière est bien typiquement britannique et son roman aussi !)

3
L’enthousiasme de mes amies blogueuses a fini par gagner, j’ai commencé ma fréquentation de Barbara Pym et je me dis que ce n’est pas le dernier roman que je lis de cette auteure parce que cet essai m’a bien plu. Alors merci Keisha, Dominique, Aifelle et j’en oublie car un moment , j’ai cru voir le nom de cette auteure partout. J’ai beaucoup aimé les trois quart du récit mais la fin est décevante. Ce qui est absolument « délicieux » ce sont les descriptions des rapports des personnages de cette toute petite ville. Tout le monde se connaît, et autour d’une tasse de thé, ces dames et ces messieurs passent leur temps à faire des commentaires sur la vie des voisins. Dans cette douce ambiance, mettez un bellâtre hongrois qui ne sait rien des us et coutumes britanniques mais qui s’y connaît en femme, et voilà notre petite communauté qui s’agite se déchire et .. se réconcilie à la fin. Le personnage principal, est une femme entièrement dévouée à l’épanouissement de son écrivain de mari en panne d’inspiration. Les observations de Barbara Pym sentent le vécu.

Ce roman me fait penser à un épisode de »Dawnton Abbey au village », mais où il ne se passerait rien et sans les propos acides de Violette : ça manque un peu de méchanceté. En ce moment, c’est la littérature que je recherche , mais j’aimerais quand même un peu plus de mordant.

Citations

Sourire dès la première page

Elle se pencha pour effleurer de ses lèvres la joue de Cassandra qui lui rendit son baiser un peu gauchement, car l’embonpoint de Mrs Gower rendait sa joue presque inaccessible.

Un charme indéfinissable si britannique, j’adore ce genre de passage

Dans sa jeunesse il n’avait jamais réussi à s’engager dans une carrière, car il avait résolu très tôt de faire un beau mariage, convaincu que sa bonne mine et son allure martiale suffiraient à lui gagner le cœur de toutes les femmes. Malheureusement ses efforts n’avaient pas été couronnés de succès. On peut penser que ses avances avaient manqué de la chaleur, de la dévotion empressée, que toute jeune femme s’attend à rencontrer à cette époque de sa vie. Mr Gay, étant de tempérament naturellement froid, n’avait jamais été amoureux.

Les couples en sortie

En des lieux tels que Up Callow les épouses devaient toujours prendre au sérieux leurs maris. Au moins en public.

SONY DSCTraduit de l’Italien par Françoise Brun. Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard thème roman épistolaire.

1
La seule motivation qui m’a aidée à terminer ce roman, c’est l’envie que j’avais d’écrire sur Luocine pour me défouler un peu de l’ennui que j’ai ressenti à cette lecture et d’exprimer tous mes agacements. L’idée de départ avait tout pour me plaire, une femme hérite d’une papeterie et en fait une librairie-salon de thé et vend essentiellement des romans d’amour. Elle rencontre son amour de jeunesse Frederico et commence une relation épistolaire avec lui. Non, je n’ai rien divulgâché, ce sont les premières pages du roman. Une longue, très longue série de lettres (400 pages qui m’ont semblé 800) pour faire éclore « l’AAAAAAAmour qui ne connaît pas de lois » entre ces deux êtres alors que lui est marié et vit à New-York et elle à Milan. Lui, c’est un rasoir fini qui ne sait parler que d’architecture et la pauvre Emma, prénom trop célèbre en France pour les amours ratés, va devoir lire avec force détails la rénovation de l’immeuble Morgan à New-York. Malheureusement pour nous, elle recopie soigneusement ses lettres et nous en inflige la lecture. Un conseil si vous lisez quand même ce roman, vous pouvez sauter toutes les lettres signées Frederico, elles n’ont aucun intérêt. On a juste envie de lire un traité d’architecture sur le sujet.

Pourquoi les cartes de Belle-Isle sur ma photo ? Parce que c’est là que nous deux amants vivront leur amour clandestin. Et même l’évocation de ce lieu que j’aime est raté. Les légendes sont ridicules, tout semble de pacotille même les paysages de la côte sauvage. En lisant ce roman et en remarquant sur la quatrième de couverture,  » Ce roman s’est placé dès sa parution en Italie en tête des meilleures ventes » , je me suis souvenue que Cino Del Duca était italien et avait inventé le concept de la presse du cœur. Ma seule consolation d’avoir lu ce roman jusqu’au bout, (en diagonale à la fin il faut que je l’avoue), c’est que » la » Emma, elle va bien s’ennuyer avec son amant si rasoir et si pleutre qu’il n’avait même pas été capable de lever l’interdit maternel quand il avait vingt ans, je peux le lui dire, il est seulement plus vieux mais il est tout aussi timoré.

Citations

Les livres en grande surface

J’ai visité plus de centres commerciaux en une semaine que dans toute ma vie, et plus je voyais de livres entassés les uns sur les autres entre des montagnes de couches-culottes et de tomates en conserve, plus j’étais convaincue que les gens avaient besoin d’un endroit où pouvoir se rencontrer et feuilleter des livres sans ses sentir obligés d’acheter.

Une rupture efficace

Le mois dernier, Laura, sa psychothérapie analytique terminée, est rentrée à la maison, a préparé le dîner et informé Camillo que leur mariage « finissait là ». Une minimaliste.

C’est ce que je vais faire avec son roman même si je ne suis pas libraire, mais je ne le relirai sûrement pas

Un des privilèges de la librairie, c’est qu’elle m’a libérée d’un complexe de culpabilité : celui de ne pas me souvenir de tous les livres que j’ai lus ? J’ai oublié le début, la fin, l’histoire entière de tas de livres, ce qui me permet d’en relire certains comme si c’était la première fois.

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Traduit de l’anglais par Christine Barbaste. Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard.

3
Je ne m’attendais pas à prendre autant de plaisir dans une lecture aussi peu dans mes centres d’intérêts habituels. Je ne me souvenais plus que Sandrine en avait déjà dit le plus grand bien. Ce livre raconte l’histoire d’un groupe de créateurs d’une comédie à succès « Barbara (et Jim) » . Le succès de cette comédie vient du charme et de la drôlerie de l’actrice principale Sophie Straw (à propos, je n’ai pas réussi à en trouver trace sur le net, au point je me suis demandée si c’était une créature fictionnelle). Dans ce livre, on dit que ça l’énerve qu’on la compare à Sabrina dont voici la photo (qui elle, est dans le livre) :

20160118_181929J’adore ! et je dédie cette publicité à tous ceux et toutes celles qui trouvaient, dans Mad Men, la poitrine de Joan irréaliste.

Ce qui est vraiment plaisant dans ce roman, c’est la description de la société anglaise des années 60, celle qui finira par faire sauter tous les verrous de la bienséance installés par la Reine Victoria. Cela commence par l’homosexualité, qui lorsqu’elle est refoulée fait souffrir tant de gens, les homosexuels bien sûr, mais leur entourage en particulier la femme qu’ils se croient obligés d’épouser pour donner des gages de bienséance, sans pour autant éprouver d’attirance pour elle, et bien sûr leurs enfants. On voit aussi la lutte entre la BBC sérieuse mais terriblement ennuyeuse et le divertissement à travers des comédies drôles et légères. Bien-sûr la télévision est allée encore plus loin aujourd’hui, et depuis la « télé réalité » qui montre tout sauf la réalité, elle s’est perdue à force de divertissement.

Aujourd’hui, tout cela est remplacé par le net et les jeunes ne regardent plus beaucoup la télévision. Est-ce mieux ? Est-ce pire ? Comme le faisait remarquer Sandrine lors de mon commentaire à propos de ce livre, on est parfois effaré du temps perdu à « surfer » sur cette merveilleuse source de connaissance mais aussi le vide que représente le temps que nous passons devant notre ordinateur ! J’ai noté que très tôt le politique a compris l’importance des médias, puisque le premier ministre de l’époque (Harold Wilson) aurait demandé qu’un des épisode de la série soit tournée au 10 Downing Street. Donc notre premier Ministre qui se déplace pour participer à une émission télévisée de distraction populaire n’est pas un novateur.

L’intérêt de ce livre, c’est de nous faire revivre une époque, mais c’est un peu plus compliqué à lire pour les Français car nous ne connaissons pas les personnages dont il est question, en tout cas pas moi.

Citations

la sexualité

-Tu n’es pas vierge n’est ce pas.
-Bien sûr que non. 
En vérité Barbara n’en savait trop rien. Résolue à s’affranchir de quelque entrave avant de venir à Londres , elle avait tentée deux ou trois bricoles avec Adam, juste avant le concours de beauté. Mais comme il ne s’était pas montré très dégourdi, elle ne savait plus trop quel était son statut officiel.

L’accent anglais

On l’entendait à la radio, et elle parlait avec ce timbre et cet accent estampillé BBC que personne, nulle part en Angleterre, au nord comme au sud, n’avait dans la vraie vie.

 Les opinions dans la classe moyen en 1960

Mon père me tuerait si je votais travailliste, dit Sophie. Il prétend qu’il a travaillé trop dur pour tout donner aux tire-au-flanc et aux syndicats.

Finalité d’une comédie télévisée

N’est ce pas là tout l’objet des comédies télévisées ? De fédérer les gens ? Et c’est ce que j’adore dans ce travail. Tu rigoles de la même chose que ton patron, ta mère, ton voisin, le critique de télévision du « Times », et la reine, pour ce que j’en sais. C’est génial. 

20160113_110627Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard, thème : roman épistolaire.

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Quoi de plus agréable qu’une petite virée dans les beaux paysages du vignoble français ? Un bon roman pour se distraire, s’amuser, sourire, s’émouvoir et même être prise par le suspens. Un roman écrit à deux et qui réussit ce tour de force d’annoncer dès la troisième ligne l’objet qui résoudrait l’énigme du roman :

Rentrant de voyage ce samedi, je trouve dans ma boîte aux lettres cette volumineuse enveloppe, portant votre adresse au dos. »

Bien sûr, je ne vais rien divulgâcher, une fois n’est pas coutume ce serait vraiment dommage, mais vous l’avez deviné, Pierre Marie Sotto à qui est destiné cette enveloppe n’ouvrira pas cette lettre et correspondra avec Adeline Parmelan. Tous deux vont peu à peu apprendre à se connaître et dévoiler une partie de leur intimité. C’est souvent très drôle et j’imagine bien le plaisir des deux écrivains à écrire un tel roman. On voit aussi notre société prendre vie tout au long de ce roman : les familles recomposées, la célébrité, les rencontres d’un soir, le deuil mais pour une fois ce n’est pas tragique.

J’ai aimé la lectrice qui veut absolument avoir une relation sexuelle avec notre écrivain, il aurait aimé nous faire croire qu’il a été pratiquement violé, heureusement, il a l’honnêteté de nous faire lire le mail de la meilleure amie de cette lectrice au fort tempérament , disons que si l’alcool a égaré son jugement, il a quand même été plus que consentant. J’ai adoré aussi le point de vue masculin (le copain de toujours de notre écrivain) sur cette femme. Bref comme je ne veux pas encourir la colère des anti-divulgâcheurs, je ne vous fais part que des anecdotes qui m’ont beaucoup amusée…

PS. : lisez la citation, vous comprendrez pourquoi je termine par ces trois points de suspension,(totalement incongrus) ! – on a le droit aux parenthèses et au point d’exclamation-

lire le billet de Krol (qui à mon avis divulgâche plus que moi)

Citations

Citation dédiée à ceux et celles qui détestent qu’on les appelle « minou »

Ma seconde femme. Je ne me rappelle plus pourquoi je l’ai épousée, mais je sais très bien pourquoi je l’ai quittée. Partout où je me sentais bien (librairies, soirées avec des amis) elle me disait : « on y va ,Minou ? » J’ai tenu 8 ans.

Les points de suspensions

Ces obsédés des points de suspension semblent vous dire : ah,si on me laissait faire, vous verriez cette superbe description que je vous brosserais là, et ce dialogue percutant, et cette analyse brillante. J’ai tout ça au bout des doigts, mais bon je me retiens. Pour cette fois ! On a envie de leur suggérer à l’oreille : laissez-vous donc aller,mon vieux ,ne muselez plus ainsi ce génie qu’on devine en vous et qui demande qu’à nous exploser à la gueule. Lâchez -vous et le monde de la littérature en sera sous le choc , je vous le garantis.

Calmer une correspondante qui prend trop vite la mouche

20151218_095309Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard dans le thème découverte de l’Ouest américain.

3Seuls ceux et celles qui liront ce roman comprendront le gros plan sur la fermeture Éclair de mon jean. J’avais déjà lu un roman de cette auteure, « le temps des miracles » que j’avais beaucoup apprécié. Ces deux livres sont dans la catégorie « ado » mais peuvent être lus par un large public. À mon avis, celui-ci cible franchement un public jeune, ce qui lui donne un côté bien sympathique.on a parfois l’impression de lire une BD sans image. On part sur les routes du Far West, avec une fille à fort tempérament, pour arriver sur la côte Ouest. Bella Rossa est très belle, rousse grâce à son ascendance irlandaise, d’une énergie peu commune. Elle a des seins superbes, comme des pastèques dit-elle, et dans ce monde qui manque de femmes c’est loin de n’être qu’un avantage. Deux personnages haut en couleur l’accompagnent. Son père paralysé, boit sans arrêt, il crie sur sa fille et sur tous ceux qui s’occupent de lui. Et le plus important pour elle, Jaro, son homme qui n’est pas toujours un cadeau.

Ensemble, ils mèneront leur carriole sur les pistes des chercheurs d’or pour leur vendre des objets pour le moins variés. C’est donc l’occasion de revisiter le Far West avec tous ses dangers (dont la guerre) et des personnages parfois très peu recommandables, un pasteur pervers et lubrique, des fermiers qui lynchent un homme à cause de la couleur de sa peau, un voleur aidé d’un opossum, des femmes trop peu farouches au goût de Bella Rosa… C’est un récit simple et efficace en somme, une bonne distraction pour ceux et celles qui aiment les Westerns. Les personnages ne sont pas caricaturaux et le récit est enlevé. Si on considère que ce roman s’adresse a un public jeune, il est parfait, mais pour des adultes, il manque de profondeur.

Citations

Le tout c’est de trouver le client

Pour palper réellement ce magot, encore fallait-il trouver des clients ! Et, franchement, Jaro n’avait jamais rencontré personne qui eût besoin d’un coupe-œuf ou d’un épineur de raisins secs !

Un moment de grâce

 Et tout ça grâce à ta salle manie d’ouvrir ta braguette à tout bout de champ, s’exclama-t-elle en embrassant Jaroslaw avec fougue.
Dans sa fièvre spéculatrice, elle oubliait toutes les épreuves que Jaro lui avait fait endurer, les pincements affreux de la jalousie, les ravages causés à son cœur et à sa fierté. Elle oubliait les filles au gros derrière, les nuits de solitude à guetter le retour de son, amour, les douleurs qui lui transperçaient le ventre, tout.

20151216_122141Pendant les derniers mois de l’année 2015, il a été beaucoup question de relecture, j’ai mis sur ma liseuse tous les classiques que je veux relire. J’ai choisi de relire « Madame Bovary » (que vous connaissez tous et toutes) car j’ai été passionnée par un débat sur France Culture, animé par Alain Finkielkraut, lors de son émission « Répliques » du 28 novembre 2015. Étaient invités : Suzanne Julliard qui vient de publier une anthologie de la prose française ordonnée par genres ( des orateurs aux critiques) et le comédien Fabrice Luchini.

Suzanne Julliard affirmait que, si la langue de Flaubert était travaillée à la perfection, elle n’était en aucun cas poétique. Ma relecture très attentive me place dans son camp. Pourtant Luchini et Finkielkraut étaient tellement passionnés que j’aurais aimé qu’il en soit autrement. J’ai lu « Madame Bovary » plusieurs fois, mais toujours dans des cadres scolaires puis universitaires. Je me souviens combien, au lycée, j’avais été agacée par cette Emma qui me ressemblait si peu, toujours à rêver sa vie au lieu de la vivre.

Et puis, sont parvenus jusqu’à moi, sans pour autant que je relise cette œuvre, les débats menés par les féministes de notre époque accusant Flaubert, d’avoir fait une héroïne avec des yeux de « mâle dominant » occidental. Je trouvais ce débat stérile, et je ne voulais pas m’y intéresser. J’ai repris ce roman avec des préjugés favorables pour ce qui est considéré, à juste titre, comme un monument incontournable de la littérature française. Et de nouveau, Emma m’a prodigieusement énervée, mais je ne comprends absolument pas les propos des critiques féministes, car les hommes sont d’une nullité crasse, seul Charles grâce à son amour sans faille pour sa trop jolie femme, a une présence plus sympathique que l’ensemble des personnages.

C’est un livre désespérant, car personne n’est habité par un sentiment positif pour ce qui fait le sel de la vie, les joies intellectuelles ou les satisfactions physiques. Emma les rêvait dans la réalisation d’un amour passionné, et finalement, étant donné le cadre monotone de sa vie qui peut lui donner tort ? Elle vit à travers ses romans, mais nous blogueuses et plus rares blogueurs, ce sont pour nous aussi de moments délicieux que ceux passés parmi nos lectures. Je vais sans doute résumer le drame d’Emma a bien peu de choses, mais si elle s’était réalisée dans la société autrement que comme la femme de Charles Bovary, Flaubert n’aurait eu à se mettre sous la dent que la série de portraits d’hommes aussi peu reluisants que, Homais, le pharmacien qui se croit savant alors qu’il est tout juste scientiste borné, Rodolphe, le jouisseur, L’heureux l’usurier escroc, Léon le pâle amoureux arriviste et j’en passe.

C’est donc un roman désespéré et je suis vraiment contente de n’avoir pas à l’expliquer à la jeune génération. À la relecture, je me disais sans cesse combien je préfère la lecture de Maupassant autrement plus humain que ce Flaubert qui s’est si bien corseté pour écrire son chef d’œuvre, qu’il ne laisse aucune chance à la vie pour se faufiler à travers les interstices de nos rêves et nos délicieux fantasmes.

Citations

Poésie ? Charles amoureux et heureux

Et alors, sur la grande route qui étendait son long ruban de poussière, par les chemins creux où les arbres se courbaient en berceaux, dans les sentiers dont les blés lui montaient jusqu’aux genoux, avec le soleil sur les épaules et l’air du matin à ses narines, le cœur plein des félicités de la nuit, l’esprit tranquille, la chair contente, il s’en allait ruminant son bonheur, comme ceux qui mâchent encore après dîner, le goût des truffes qu’ils digèrent.

Emma et la recherche du bonheur

Avant qu’elle se mariât, elle avait cru avoir de l’amour ; mais le bonheur qui aurait dû résulter de cet amour n’étant pas venu, il fallait qu’elle se fût trompée, songeait-elle. Et Emma cherchait à savoir ce que l’on entendait au juste dans la vie par les mots de félicité, de passion et d’ivresse, qui lui avaient paru si beaux dans les livres.

La vie de couple

La conversation de Charles état plate comme un trottoir de rue, et les idées de tout le monde y défilaient dans leur costume ordinaire, sans exciter d’émotion, de rire ou de rêverie.

Solitude (poésie ?)

Comme les matelots en détresse, elle promenait sur la solitude de sa vie des yeux désespérés, cherchant au loin quelque voile blanche dans les brumes de l’horizon.

Phrase célèbre

Ainsi se tenait, devant ces bourgeois épanouis, ce demi-siècle de servitude. 

Cruauté de Flaubert envers les femmes

L’aplomb dépend des milieux où il se pose : on ne parle pas à l’entresol comme au quatrième étage, et la femme riche semble avoir autour d’elle, pour garder sa vertu, tous ses billets de banque, comme une cuirasse, dans la doublure de son corset.

Remarque à méditer sur l’amour

Mais le dénigrement de ceux que nous aimons toujours nous en détache quelque peu. Il ne faut pas toucher aux idoles : la dorure en reste aux mains.

Une belle réaction d’Emma

Vous profitez impudemment de ma détresse monsieur ! je suis à plaindre, mais pas à vendre !

Victoire d’Homais, dernières phrases du roman

Depuis la mort de Bovary, trois médecins se sont succédé à Yonville sans pouvoir réussir, tant M. Homais les a tout de suite battus en brèche. Il fait une clientèle d’enfer ; l’autorité le ménage et l’opinion public le protège.
Il vient de recevoir la croix d’honneur

SONY DSCTraduit du suédois par Esther Sermage.
Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard.

2
Je pense que, pour tous ceux et toutes celles qui ont des chats, ce roman va prendre une couleur particulière tant il est vrai que maintenir son chat dans son jardin et empêcher celui du voisin de venir dans le vôtre est une véritable gageure. À partir de l’histoire d’un chat qui a décidé que les jardins des voisins étaient aussi les siens, Maria Ernestam (qui, nous dit-elle en postface, l’a vécu personnellement) a écrit un très court roman ou une grande nouvelle comme vous voulez (99 pages). Le point de départ est moyennement passionnant : comment expliquer à votre voisin que leur chat terrorise le vôtre chez vous. Mais, en réalité, l’histoire aurait pu finir très mal car derrière cette histoire de félins se cache une histoire de voisinage bien plus grave et qui aurait même pu être tragique.

Il ne faut pas plus d’une soirée pour lire ce livre , vous serez peut être plus indulgente que moi. J’ai trouvé cette histoire de voisinage assez plate même si, finalement un peu de suspens assaisonne la sauce au final.

Citations

Le grand gagnant : le chat du voisin

D’un bond, il monta sur le mur en pierre et inspecta son territoire, mettant tous ses sens à contribution. Les jardins mitoyens, puis ceux des voisins plus éloignés. Il avait implacablement chassé tous ses concurrents, l’un après l’autre, sans céder un pouce. Ceux qui osaient s’aventurer dehors, dans leur propre jardin, il les avait vaincus à force de ruse et de haine raffinée.

20151215_112915Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard.

3Je dédie ce livre à mon fils heureux papa d’une petite fille qui a un an aujourd’hui. S’il lit ce roman, il y retrouvera toutes les angoisses de sa mère lorsqu’il était adolescent. Il s’agit, en effet d’un roman sur l’addiction au monde connecté. Isabelle Jarry nous plonge dans un futur pas très éloigné du nôtre. L’homme a réussi à créer des androïdes capables d’une certaine forme d’intelligence donc, d’autonomie. Pour lutter contre les méfaits d’un temps trop long passé devant des écrans, la société impose des cures de désintoxication d’une semaine à tous ceux qui ne savent pas se déconnecter du monde virtuel. C’est ainsi que commence le roman : Tim se retrouve brutalement dans un de ces centres pour une semaine sans possibilité de prévenir Today, son androïde, qui, à force d’interactions, est devenu pour lui beaucoup plus qu’un robot, il est son véritable assistant et son compagnon de vie.

Le roman permet de suivre deux survies, celle de Tim qui se retrouve confronté à la nature et qui s’inquiète sans cesse pour son androïde qu’il voudrait au moins prévenir de son absence. Or il ne le peut pas puisque le principe de la cure est de priver brutalement le patient de tous ses liens avec le monde virtuel. L’autre personnage en errance, c’est Today (l’androïde) dont l’existence est sans cesse menacée par des rencontres plus au moins hostiles.

Le roman ne décrit pas un monde déshumanisé et la relation de Tim et de Today n’a rien d’impossible. À travers leurs deux expériences, l’auteure nous fait revivre notre société dans des aspects à la fois tragiques et amusants. Les recherches de Tim portent sur la survie après une catastrophe nucléaire, et il rentre donc en contact avec un sage japonais qui est resté vivre à 40 kilomètres de Fukushima, ça c’est pour l’aspect tragique mais pas désespéré puisque ce Japonais a réussi à survivre dans une nature délaissée par l’homme donc de plus en plus belle. Le côté léger et drôle vient des personnages rencontrés par Tim et Today, le chef de cuisine, parodie de ceux présentés à la Télévision, la cantatrice quelque peu décatie, le clochard lubrique…

Bien sûr, on retrouve dans ce roman une opposition entre la vie dans la nature et le monde moderne connecté mais ce n’est pas pour autant un roman moralisateur ni trop simpliste. Et une fois n’est pas coutume, le mot de la fin est donné à l’androïde pas à l’humain. J’ai quelques réserves, encore une fois – ça devient de plus en plus fréquent- les passages en anglais ne sont pas traduits. Mais surtout, j’aurais aimé en savoir plus sur Tim et sur ce qu’il va devenir enfin l’histoire de plusieurs personnages ne me semble pas finie. l’auteure laisse à notre imaginaire le destin de plusieurs personnages : je me suis sentie abandonnée par l’écrivain , que deviendra Mme Hauvelle la chercheuse aigrie, et Mirène la cantatrice clochardisée et surtout Tim, c’est un peu dur de ne pas savoir où va le personnage principal , je suis désolée pour toutes celles qui détestent qu’on « divulgache » les intrigues mais voici la dernière phrase concernant Tim

Il ne savait pas où il allait….

Je n’en dis pas plus pour garder mes lecteurs et lectrices, mais moi je trouve ça frustrant. C’est la raison pour laquelle je n’ai mis que 3 coquillages alors que, jusqu’à l’avant dernier chapitre, je pensais en mettre quatre. L’auteure prépare peut-être une suite ?

Citations

La place de l’homme dans la nature

L’être humain lui-même était si faible… La nature dans son exubérance, sa force insurmontable, son inépuisable énergie, sa faculté à essaimer et à se reproduire, la nature l’avait nargué dès le début. Pourquoi, à l’instar des autres espèces, n’avait-il pas accepté la place qu’il occupait , prédateur des uns, proie des autres, maillon dans la chaîne de la vie ? Pourquoi avait-il voulu échapper à cette condition, imposer sa loi ?

Le Haïku qui donne son titre au roman

La voix du rossignol s’éloigne
La lumière s’éteint
Magique aujourd’hui

SONY DSCLu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard dans le thème « mère fille ».

5Je me demande qui d’entre les participantes du club découvrira à cette occasion Annie Ernaux, je dois avouer que, s’il y en a une, je l’envie un peu. Je me souviens du choc que fut pour moi ses premiers romans. J’ai commencé par « la Place » et je n’ai jamais quitté cette auteure. En relisant « Une femme » pour notre future rencontre, je me suis demandée si j’allais découvrir des aspects que j’avais oubliés. Et bien oui, je ne me souvenais pas à quel point, elle réfléchissait sur sa façon d’écrire :

Mon projet est de nature littéraire, puisqu’il s’agit de chercher une vérité sur ma mère qui ne peut être atteinte que par des mots. ( C’est-à-dire que ni les photos, ni mes souvenirs, ni les témoignages de la famille ne peuvent me donner cette vérité). Mais je souhaite rester, d’une façon, au-dessous de la littérature.

À part cet aspect que j’ai trouvé très intéressant, j’ai tout retrouvé : cette mère qui parle trop fort qui aime sa fille mais qui sait si mal le lui dire. Cette façon dont elle a poussé sa fille vers les études et la réussite mais qui était aussi le chemin vers la séparation avec le monde de son enfance.

À l’église, elle chantait à pleine voix le cantique de la vierge, « J’irai la voir, un jour, au ciel, au ciel ». Cela me donnait envie de pleurer et je la détestait.

Elle avait avait des robes vives et un tailleur noir en « grain de poudre », elle lisait « Confidences » et « La mode du jour » ; Elle mettait ses serviettes avec du sang dans un coin du grenier, jusqu’au mardi de la lessive.

Quand je la regardais trop, elle s’énervait, « tu veux m’acheter ». 

Je trouvais ma mère voyante. Je détournais les yeux quand elle débouchait une bouteille en la maintenant entre ses jambes. J’avais honte de sa manière brusque de parler et de se comporter, d’autant plus vivement que je sentais combien je lui ressemblais.

À chaque fois que je lis ce livre, je suis saisie par la justesse de cette analyse, je crois qu’Annie Ernaux explique mieux que quiconque que changer de culture : passer de « Nous deux » à « Proust » , c’est une rupture absolue, un exil définitif et comme tout exil c’est très douloureux. Cela passe par des moments qui peuvent être violents :

À certains moments, elle avait dans sa fille en face d’elle, une ennemie de classe.

Pour celles et ceux qui n’ont pas encore lu cette auteure, j’enfonce des portes ouvertes en rappelant que, ce que l’on remarque tout de suite, c’est son style, tout en retenu et pourtant dévoilant tout ce qui peut être su par l’autre même ce qui d’habitude est caché. Dans ce « roman » ce qui me touche le plus c’est ce cri d’amour, cette fille a su écrire son amour à sa mère, Annie Ernaux est maintenant une grande dame de la littérature de notre époque et celle qui l’a mise au monde, cette femme un peu rude, un peu trop voyante peut être fière de sa fille.

Voici le moment télévisé où je l’ai découverte, le lendemain j’allais acheter son livre. Que de souvenirs !

SONY DSCTraduit de l’anglais (États-Unis) par Martine Béquié et Anne-Marie Augustyniak.
Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard , thème « relation mère fille »

4Cela fait longtemps que je n’ai pas ressenti un tel plaisir de lecture, je voulais absolument ne plus quitter, Taylor le personnage principal qui n’a pas sa langue dans sa poche, Lou-Ann qui n’est que gentillesse, Mattie qui aide les malheureux candestins, Estevan qui parle si bien l’anglais…. Je trouve que dans le thème « mère fille » ce roman est parfaitement choisi par notre bibliothécaire préférée. Pour plusieurs raisons, car c’est d’abord le récit de la naissance du sentiment maternel. Marietta-Missy-Taylor est une jeune fille qui a décidé de sortir de son Kentucky natal pour vivre une vie indépendante, or dès les premiers jours , une vieille indienne lui met dans les bras une toute petite fille qui visiblement a vécu un très lourd traumatisme. Taylor va apprendre à aimer Turtle-Avril et devenir sa mère. Il faut dire que sa propre mère, femme de ménage a eu cette qualité incroyable, d’aimer sa fille et de trouver tout ce qu’elle fait absolument formidable.

C’est la deuxième raison pour laquelle je trouve ce livre bien choisi, l’amour admiratif d’une mère est un cadeau précieux qui donne des forces pour toute la vie. Je dois dire que je ne résiste pas aux romans qui mettent en scène des « cabossés de la vie » qui au lieu de continuer à se détruire, joignent leurs forces pour franchir les obstacles et aller vers le bonheur. J’ai à propos de ce roman , relu ce qui s’est passé au Guatemala, encore une tragédie maintenant oubliée, elle est ici évoquée à travers le coupe d’Estevan et Esperanza à qui on a arraché leur petite fille.

Le roman situe tous les personnages au moment de leur survie, pour leur adaptation à la vie quotidienne c’est une autre histoire, on espère qu’ayant vécu le pire, ils vont y arriver. Ce roman est servi par des effets de langue, qui doivent être encore plus délicieux en américain, l’arrivée dans le langage de la petite Turtle sont drôles et inattendus, et l’adoption par Taylor dans sa langue rugueuse de jeune fille peu éduquée de l’anglais raffiné d’Estevan, professeur d’anglais au Guatemala sont savoureux mais sonnent un peu plats en français. Grâce à Keisha (je me doutais bien qu’elle avait lu cette auteure !). J’ai vu qu’il y avait une suite que je vais m’empresser de lire, j’aime bien son expression que je me permets de citer : c’est un livre « doudou ».

Citations

Le caractère de Taylor Greer

J’avais décidé depuis longtemps que, si j’avais pas les moyens de m’habiller chic, je m’habillerais mémorable.

La description de Lou-Ann

Elle était du genre à aller chercher les ennuis juste pour montrer qu’on n’avait pas besoin d’être une « pompon girl  » pour se faire sauter . Le problème c’est que ça ne vous rapporte rien. C’est comme un gosse qui fait des tours de vélo en se lâchant des pieds et des mains et s’ époumone pour attirer l’attention de sa mère. Eh bien, la mère en question ne lèvera pas les yeux tant qu’il ne se sera pas fracassé la tête contre un arbre.

Avoir un enfant

Elle ne cachait pas que son désir le plus cher était d’être grand-mère. Dès que la grosse Irène prenait le bébé, ce qui n’était pas fréquent, Mrs Hoge déclarait : « Irène, ça te va à ravir ». Comme si vous deviez faire un enfant parce que ça vous va bien.

L’Oklahoma

Ces étendues désespérément plates de l’Oklahoma avaient fini par me donner mal aux yeux croyez moi . J’avais l’impression qu’il fallait toujours regarder trop loin pour distinguer l’horizon.