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4
Ce livre très dense de 630 pages a retenu toute mon attention. Comme je l’ai emprunté à la bibliothèque j’ai dû me dépêcher un peu et je le regrette car c’est un livre qu’on ne peut pas avaler d’une traite. Il s’est passé un phénomène bizarre avec ce roman si je m’obligeais à le lire vite il me lassait mais dès que je le reprenais je le trouvais passionnant.

Deux destins d’homme se croisent, l’un jeune qui vit une grave dépression et un vieil homme peintre et ancien parachutiste ayant fait trois guerres : la libération, l’Indochine et l’Algérie. Les récits et les réflexions sur les guerres sont passionnants et bouleversants.

Le monde contemporain en particulier la banlieue lyonnaise est aussi pour l’auteur en état de guerre je trouve cela plus discutable mais je ne vis pas en banlieue. J’ai trouvé sa peinture du monde d’aujourd’hui beaucoup moins bien réussi que les passages sur les conflits du passé. Les personnalités des anciens parachutistes sont minutieusement disséquée, on a l’impression de mieux comprendre ce qui amène les hommes à savoir se battre.

Les guerres coloniales sont une pure horreur et la défaite semblait inscrite dans la nature même du conflit. Mais c’est plus facile de le dire auojurd’hui qu’à l’époque. Jamais un livre n’aura aussi bien fait ressortir l’horreur de la guerre et je me demande ce que pense les militaires français de ce livre. Pour le style j’ai été un peu déçue, les répétitions sont insupportables et les relâchements vers la langue orale sans aucune justification un peu étrange.

Je pense que ce roman aurait supporté quelques coupures qui aurait allégé la lecture.

Citations

Les guerres d’aujourd’hui

 Les morts occidentaux étaient morts par accident, on sait qui c’était et on s’en souviendra ; les autres ne comptent pas. Il fallut le cinéma pour me l’apprendre : la destruction des corps a la machine s’accompagne d’un effacement des âmes dont on ne s’aperçoit pas. Lorsque le meurtre est sans trace le meurtre lui même disparaît ; et les fantômes s’accumulent, que l’on est incapable de reconnaître.

Un mot que je ne connaissais pas, j’aimerais le retenir.

On lentibardane sous les platanes

Tuer de loin (1945)

Le pilote qui a fait ça n’a rien vu. Il a visé le char dans une mire géométrique, il a appuyé sur une touche rouge de son manche et il n’a même pas vu l’impact , il filait déjà . Grâce aux machines on peut passer plein de types dans les voitures au chalumeau. Sans l’industrie nous n’aurions pas pu tuer tant de gens, nous ne l’aurions pas supporté.

L’humour juif

– dites-moi, Koloyannis, demanda enfin le colonel, vous êtes juif ?
– je voyais bien que cela vous tracassait. Bien sûr, colonel ; je me prénomme Salomon. Vous pensez bien que par les temps qui courent, on ne s’encombre pas d’un prénom pareil sans de solides raisons familiales.

 Je crois que c’est vrai

Il est toujours mon ami, car nous avons fait l’école buissonnière ensemble. Ne pas aller a l’école ensemble crée bien plus de lien que d’y être allés

La violence et la guerre

Tout le monde veut la guerre pour simplifier. Les nœuds ou l’on vit, on veut finalement les trancher par l’usage de la force. Avoir un ennemi est le bien le plus précieux, il nous donne un point d’appui. Le modèle de résolution de tous les problèmes est la torgnole que l’on retourne au gamin, ou le coup de pied que l’on flanque au chien. Voilà qui soulage, À celui qui dérange, chacun rêve par la force de faire entendre raison par la force. Il ne comprend que ça.

 Vision de la France aujourd’hui

La France est une façon de mourir ; la vie en France est un long dimanche qui finit mal.

Le repas du dimanche

On prend place devant l’assiette que l’on nous a désignée. Tout le monde s’assoit devant une assiette, tout le monde a la sienne ; tout le monde s’assoit avec un soupir d’aise d’aise mais ce soupir ce peut être aussi un peu de lassitude , de résignation , on ne sait jamais avec les soupirs. Personne ne manque, mais peut-être voudrait-on être ailleurs ; personne ne veut venir mais l’on serait mortifié si l’on redoute d’être exclu ; être la est un ennui mais ne pas y être serait une souffrance. Alors on soupire et on mange.

La balade du dimanche

Rien n’est moins intéressant qu’une promenade du dimanche tous ensemble. On n’avance pas ; les pas s’écoulent comme des grains paresseux du temps ; on fait semblant d’avancer.

La forêt en Indochine

On se prend les pieds dans les racines qui poussent dès la moitié du tronc, les troncs se couvrent de poils qui durcissent en épines, les épines couvrent la bordure des feuilles, les feuilles deviennent tout autre chose que des feuilles, trop cirées , trop molles , trop grandes, trop gonflées, trop cornues, c’est selon ; le trop est leur seule règle. La chaleur dissout l’entendement. Des insectes zizillent en permanence , en essaims qui suivent toute source de sang chaud , ou cliquettent sur les feuilles , ou rampent , déguisés en branches. Une diversité phénoménale de vers imprègnent le sol, grouillent, et il bouge.

On en parle

Le blog de Brestéphan (est ce un hasard que pour ce livre j’ai surtout lu des articles écrits pas des hommes !).

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3
Dans le cadre du club de lecture. Un petit moment de plaisir, ça fait tellement du bien après les livres tristes que j’ai lus dernièrement ! Bien sur ce n’est pas de la grande littérature mais c’est bien raconté et finalement ce livre résonne en moi beaucoup plus profondément que je ne l’imaginais pendant la lecture.

Je crois que toutes les filles et femmes qui ont eu une amie de cœur retrouveront quelque chose d’elles dans ce roman. L’amie dont on ne peut se passer, celle qui nous permet de grandir, de supporter la crise d’adolescence, celle qui voit nos premiers émois amoureux mais qui doit être repoussée pour que finalement les deux deviennent adultes.

C’est tout cela qui est raconté dans l’ambiance des années 80. J’ai tout compris et je dirai tout vécu comme elles et j’ai dans la tête les mêmes chansons. C’est aussi un roman avec une histoire poignante et délicatement racontée. Une histoire de femmes écrite avec une belle sensibilité féminine !

Je doute que cela intéresse beaucoup les hommes qui y verront, peut-être, un roman un peu mièvre.

Citations

Le moment où on sent que l’amitié devient pesante

Nos coups de fil quotidiens s’espaçaient, sonnaient creux .Nous prenions rendez-vous. Je ne crois pas que nous l’avions jamais fait avant cela. Nous ne riions plus des mêmes choses. Pourtant nos vies ne parvenaient pas à se dénouer. Le fil était lâche, nous encombrait.

Le père que nous avons toutes rêvé d’avoir

C’était un accord familial :
 » Quels que soient l’heure, le moment ou l’endroit , si vous avez besoin , vous m appelez , je viendrais vous chercher »

On en parle

Kroll a aimé. Je vous avais dit que ça ne plairait pas aux hommes : Pylien a détesté !

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1
Dans le cadre du Club de lecture. Où comment perdre le goût de la lecture… Ce livre est pédant ne raconte rien sinon l’assurance qu’à cet auteur d’être un véritable écrivain. Le livre est truffé de mots savants sans aucun intérêt. On devient peut-être écrivain quand on appelle « drupes » les « nectarines » ?

Le monde dans lequel il évolue est triste car il ne voit que les côtés tristes des situations. L’auteur ne se donne qu’une seule qualité, celle d’être un auteur. Évidemment sa famille ne comprend pas pourquoi il n’écrit pas comme Coehlo ou Marc Lévy, car il n’est entouré que de gens médiocres qui n’ont pas le bon goût de l’apprécier. J’ai demandé à ma bibliothécaire préférée pourquoi ce livre était au programme de notre club.

Sa réponse m’a laissée rêveuse :

Je n’ai lu aucune critique négative sur ce livre, qui a plutôt une bonne presse. Je voulais savoir comment vous réagiriez.

Je suis de plus en plus sûre que les critiques officiels dans la presse ne lisent pas les livres dont ils parlent. Celui-là, franchement il peut partir aux oubliettes !

Citations

Description du personnage avec au passage un petit mot savant

Malgré mes ridicules désormais confirmées, ma canitie galopante, mon teint jaunissant, le lent émoussement de mes dents, le ternissement de mon regard , l’assèchement de mes joues et le rabougrissement général de ma silhouette, je n’avais pas l’impression d’avoir tant changé que cela depuis mes vingt ans.

On en parle

Voilà quelqu’un qui a aimé : Bricabook

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4
J’ai hâte que ma mathématicienne préférée lise le seul roman où un écrivain se donne la peine de raconter un raisonnement par récurrence. Elle qui se plaint souvent que les mathématiques ne soient pas un bon thème de discussions dans les soirées, elle verra que c’est possible. En tout cas les mathématiques sont à l’honneur dans ce livre et ça fait un bon roman.

J’ai beaucoup apprécié la description des différents types d’intelligences, et en tant que littéraire adoré que ce soit la fréquentation des grands auteurs qui finissent par aider le personnage principal à prendre confiance en lui et à passer l’horrible barre fatidique « de la sup étoile à Louis Legrand ». Le système élitiste des « prépa- parisiennes » est parfaitement décrit ; je ne sais pas pourquoi la France s’enorgueillit de ce système mais ce qui est sûr c’est que rien ne le fait jamais changer.

Ce que confirme ce petit roman, c’est que, sous couvert d’égalité, les dés sont complètement pipés. A Louis-Le-Grand il y a, par exemple, et je pense dans d’autres grands lycée parisiens aussi, des premières et des terminales où on fait si vite le programme officiel , qu’on a le temps d’assimiler également celui de la première année de prépa.

On découvre aussi que les parents prof en prépa ont des enfants qui réussissent en prépa, comme c’est bizarre ! Qu’avoir un QI de 200 est la seule façon d’accéder à ses classes si on vient de l’extérieur. Alors Laurent venant d’un honnête lycée de la banlieue chic de Paris, finira par ruser pour parvenir à ses fins et pourquoi pas ? On découvre également que les littéraires jouent dans une autre cour, ce sont en général des filles. Elles ne pourront pas intégrer Polytechnique, alors si elles sont jolies, fortunées et intelligentes elles viennent en Khâgne pour trouver leur futur Polytechnicien.

L’auteur ne dénonce pas ce système, il se contente de le décrire à travers un personnage qui s’adapte très bien et finit par tirer son épingle du jeu. C’est justement à travers cette objectivité parfois froide, voire glacial que le lecteur prend conscience que notre élite sort d’un moule peu recommandable.

Citations

Réussir en prépa

Au début du mois d’avril, il se demande toujours comment gravir des places au classement général quand on ne possède pour soi aucun piolet magique.

La beauté des raisonnements mathématiques

C’est ce que Gratien apprécie dans la pensée mathématique, cette faculté qu’elle a d’être déroulée à grande vitesse et dans toute sa clarté, comme une étoile filante. les chiffres, les calculs et les démonstrations entraînent son stylo , entraînent sa pensée… C’est cela la beauté des raisonnements mathématiques selon Gratien Bar : cette spirale qui se construit en s’accélérant et en se clarifiant à l’infini.

L’art de la conversation chez les littéraires

Pour cela, quand bien même un DS causerait du souci, sourire toujours galamment à Mélanie’s, parler d’Arcade Fire, d’Heidegger et de Boby Lapointe dans la même soirée, et surtout, surtout, ne jamais s’écarter d’un pouce des préceptes de Galatée.

Bizutage et réaction des élèves

Il faut savoir tout de même que dans un lycée du quartier l’an dernier un taupin est mort le jour de la « grande barbarie ». Comment ? Pas compliqué : du premier étage on lui a balancé sur la tête une éponge gorgée d’eau lourde comme du plomb ; il est mort sur le coup d’un traumatisme crânien. Pif, un concurrent en moins.

La réussite

Laurent finit l’année en se disant qu’il est tout compte fait à la fois Vautrin et Rastignac, ce qui est la seule véritable clé du succès : il a désormais le chemin ouvert vers la réussite, il entre en classe de spé étoile au lycée Louis-Le-Grand.

On en parle

Un jugement ramassé qui reflète bien le roman chez Cuneipage et En lisant et en écrivant.

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FAUVE D’OR – PRIX DU MEILLEUR ALBUM 2012

5
J’arrive après le concert de louanges que ce roman graphique a suscité. Toutes sont méritées, je trouve que rien ne saurait mieux rendre la situation à Jérusalem, c’est vraiment un casse-tête inimaginable. La sécurité règne, mais à quel prix ! Le lecteur est plongé dans le quotidien des habitants au rythme de l’auteur qui accompagne sa femme médecin pour un organisme international. Le personnage principal passe sont temps à chercher des lieux à dessiner et à trouver des squares agréables pour ses enfants, mais peu à peu il est plongé dans la tragédie de la guerre.

Détail important : il n’est pas croyant et regarde avec détachement et souvent ironie les rigorismes religieux. Cela lui donne un pouvoir d’étonnement qui rend son livre attachant et décalé par rapport à tous ceux qui « savent ». Son dessin est simple, un peu trop pour moi au début. Et puis je me suis habituée et j’ai été très sensible à l’émotion qui se dégage des moments pathétiques. Justement dans son dessin il n’y a pas de « pathos », et c’est parfois plus dur à supporter qu’une image très chargée.

La façon dont les colonies et les colons chassent aujourd’hui encore les palestiniens de leur maison est à peu près insupportable. La visite d’Hébron avec d’abord un guide sensible à la cause palestinienne puis un guide favorable aux colons, fait peur. Comment tout cela va-t-il se finir ? Chaque religion rajoute une intolérance et au nom de Dieu ou Jésus est prêt à tout même à provoquer la troisième guerre mondiale. Certains attendent de trouver une génisse entièrement rousse pour construire le 3° temple :

«  Avec en bonus le retour du messie ;
Bon il faudra au passage fort probablement détruire ou déplacer le dôme du rocher, ce qui aurait comme possible conséquence d’amorcer la 3° guerre mondiale. Mais qu’à cela ne tienne, c’est écrit dans la Bible alors il n’y a pas à hésiter !
C’est du moins ce que croient dur comme fer certains juifs impatients d’assister au jugement dernier »

Que la 3° guerre mondiale dépende de la couleur d’une génisse de trois ans, voilà qui peut prêter à sourire ou faire frémir c’est selon ! Si vous ne l’avez pas encore lu, précipitez vous, offrez le, empruntez le, bref à lire de toute urgence !

Citations

Description d’un mariage juif orthodoxe

Quelle curieuse soirée
Pas une fille
Un vrai festival de bandes dessinées.

Interrogation par rapport aux lieux saints (il y en a beaucoup..)

– Ça serait pas le tombeau du Christ ?
– Mais le Christ s il est ressuscité. Pourquoi il aurait un tombeau ?
– Euh…moi j’imaginais ça dans une grotte
– Ah oui c’est vrai…
– Peut-être que c’est vide

Après avoir vu des prêtres de différents obédiences chrétiennes en être venus aux mains

J’te jure quand on voit le spectacle qu’offre la religion dans le coin, ca donne pas trop envie d’être croyant. Merci mon Dieu de m avoir fait athée.

Une découverte : les Samaritains existent encore

Les Samaritains sont considérés par l’état d’Israël comme juifs (mais pas par les ultra-orthodoxes). Ils ont également des cartes d’identité Palestiniennes ainsi que des passeports Jordaniens. Ils sont en quelque sorte à la croisée des chemins.

Les joies de l’intolérance alimentaire

Bon ça sera un cornet à la fraise et un au chocolat SVP
– Ça sera pas possible
– Ah vous n’en avez plus
– Si j’en ai, mais il y a de la levure dans le cornet
– Et alors
– C’est pas permis de manger de la levure pendant Pessah
– Mais c’est pas encore Pessah ca commence ce Week-end seulement
– Oui mais bon par sécurité on commence avant on ne sait jamais
– Mais je suis pas juif
– Ha ha je sais…

On en parle

Sur la route de Jostein

Interview de l’auteur

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4
J’avais tellement apprécié « Cœur cousu » que je redoutais un peu de me lancer dans ce roman dont j’entendais tant de bien autour de moi. C’est un peu paradoxal, mais cette auteur arrive à m’entrainer dans un domaine qui souvent m’est complètement étranger : le mysticisme et les croyances aux forces de l’au-delà.

Et bien, j’avais tort, j’ai adoré « Du domaines des Murmures » et comme toutes les blogueuses avant moi, je ne peux que recommander chaudement la lecture. Cette femme emmurée qui deviendra finalement l’écho des hommes de son siècle, alors qu’elle désirait se donner à Dieu et à Lui seul, est vivante, sensible superbe dans la force de sa jeunesse. Le roman fait revivre le temps des croisades et les errements de la religion et d’une société fondée sur le seul pouvoir de la force masculine. Et surtout il offre une tribune à la parole des femmes de cette époque. Que savons-nous d’elles ?

J’ai eu la chance d’entendre Carole Martinez lors d’un café littéraire à Fontenay sous bois. Elle nous a dit, entre autre, qu’après la lecture de Georges Duby, elle avait pris conscience que les femmes du XIIe Siècle n’avaient pratiquement laissé aucun témoignage. Ce grand spécialiste du Moyen-âge parlait d’elles comme des « ombres ».

Loin de n’être qu’un roman historique, cette auteure nous entraîne à travers le personnage d’Esclarmonde , dans une réflexion sur la place de la femme dans les sociétés patriarcales religieuses. C’est aussi une réflexion sur l’engagement absolu de la jeunesse : il y a du Antigone dans cette recluse. L’intrigue est bien menée et passionnante jusqu’au bout le style est très agréable : C’est celui d’une conteuse qui séduit ses lecteurs car il crée une atmosphère.

Carole Martinez a beaucoup de talent et encore bien des histoires à raconter, le soir du café littéraire on la sentait habitée par ses personnages et prête à les faire revivre devant un auditoire complètement médusé.

Citations

Tandis que nous avancions, j’attendais que la pluie vînt balayer ma peur, mais l’orage restait sec et seuls les éclairs veinaient mon horizon d’ardoise.

 

 

L’enfantement n’est pas seulement une torture physique, mais une peur attachée comme une pierre à une joie intense. Les mères savaient la mort à l’œuvre dès le premier souffle de leur enfant, comme accrochée à leur chair délicate. 

 

 

Les croisades sont des saignées qui rééquilibrent les humeurs du pays. Qu’elles emportent au loin les jeunes cavaliers, les cadets sans terres et sans femmes, dont les tournois ne parviennent pas à calmer les ardeurs, qu’elles éloignent tous ceux qui sèment le trouble dans le comté et n’y respectent pas la Paix de Dieu ! Qu’elles le vident de ce sang jeune et impétueux qui n’y trouve pas sa place, du pus que sont les fous du Christ incapables de dégorger leur violence de la morve des désœuvrés et non des seigneurs vieillissants qui maintiennent l’ordre en leurs fiefs ou leur alleu et sont garants de quiétude 

 

Marie étant restée vierge après la naissance du Christ, corps intact, sans fissure, « vulve et utérus fermés ». Ces hommes, si éloignés des secrets de l’accouchement, se passionnaient pour les entrailles de la mère de Dieu.

 

Nous étions au début du printemps, en cette période de l’année où une heure de jour valait une heure de nuit. Les heures en mon siècle étaient des divisions aux durées élastiques. Les jours comme les nuits en comptaient toujours douze en décembre comme en juin. La durée d’une heure de jour était donc trois fois plus longue au début de juillet qu’aux alentours de Noël.
Comment pouvait-on-me mutiler ainsi ? J’avais choisi de me clôturer, non de me taire. Cette fois, la recluse volontaire se changeait bel et bien en prisonnière et je n’étais plus seulement la captive de quinze ans qui, n’imaginant son bonheur qu’en Dieu , avait fait ériger cette chapelle , de cette naïve damoiselle des Murmures persuadée de gagner la béatitude et la liberté en s’emmurant vivante , d’une innocente qui ne savait rien encore du monde et ignorait à quel point un être peut changer

 

Pourtant, mon esprit ne pouvait se résoudre à renier Dieu, nous vivions en un temps où Il animait chaque créature ou Il vibrait dans la moindre brindille , nous agissions sous Son œil. Je ne pouvais douter que des hommes, de ma foi et de moi-même, pas de Son existence.

 On en parle

Moi Clara et les mots

Écoutez Carole Martinez

 

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5
L’avantage de quitter le monde des blogs et les visites quotidiennes à son fidele ordinateur, c’est de devoir passer par des librairies pour se rassasier de lectures. La libraire de Fontenay sous Bois m’a recommandé ce court roman, et comme elle, j’espère qu’Olivier Bass va continuer à écrire des romans de cette qualité.

J’ai été très émue par ce récit et le destin tragique de ce musicien russe m’a bouleversée. La Russie a produit un nombre d’horreurs qui semblent ne jamais finir. La guerre de Tchétchénie évoquée ici, en un parfait exemple. J’ai lu le livre en quelques heures et je l’ai relu pour m’en imprégner et pour me laisser bercer par certains passages. Olivier Bass a été officier de marine marchande et il a le talent de nous décrire sans romantisme la vie a bord de ces grands cargos. Sur la mer aussi, les tragédies de notre siècle bouleversent les consciences. Je me suis précipitée sur le premier concerto de violon de Chostakovitch et je l’ai écouté en lisant les dernières pages, c’est extraordinaire.
Lisez vite ce livre et dites moi vite ce que vous en pensez, je ne peux pas dévoiler l’histoire car une partie du charme de ce livre tient au suspens. Je crois que ce livre pourrait faire un superbe film, tout y est : la musique (et quelle musique !), l’amour, la vie en mer les étoiles, la mauvaise conscience des nantis face à ceux qui ont tout perdu avec la Russie en toile de fond.

Citations

On se perdait beaucoup dans ces navigations transocéaniques où l’on oubliait pour quelles raisons nous étions là, en pleine mer, sans voir ni espérer aucune terre des jours durant. Pourtant quand je repense à mes quarts de veille à scruter le vide de la mer, je me souviens que parfois j’étais heureux.

Mais il fallait une vie complète de mer pour que le temps, qui nous rongeait l’âme comme la pluie érode la montagne, en fasse apparaître le cœur inaltérable : la vraie nature de l’homme. Et si par dessus ca. On revêtait la couverture toute puissante du commandement, le compromis alors n’existait plus, le compromis alors n’existait plus : on avait affaire soit aux bons soit au mauvais.

Depuis l’avènement de la messagerie électronique, cette attente traditionnelle du sac de courrier n’était peut-être plus aussi forte qu’auparavant, mais, l’écriture physique , la trace d’encre laissée par l’être aime, la feuille qu’il a touchée , restait malgré tout un lien fort qu’Internet n’était toujours pas parvenu à détrôner

La guerre c’est un enfant qui meurt de faim en essayant de téter le sein de sa mère morte deux jours auparavant, et qu’on achève d’un coup de crosse bien place parce qu’on ne peut rien faire de mieux. C’est cela la guerre. Ni plus ni moins. On ne devient pas un homme en la faisant : on devient un monstre

Les cartes … J’ai un mal fou à les ranger. Non par manque d’organisation, mais plutôt à cause d’un problème de distraction. J’aimais les parcourir comme on feuillette un livre d’images, et me promener sur le monde, libre de toute contrainte. Il me suffisait de tenir une carte dans les mains pour être irrésistiblement tenté d’en sortir une autre, et une autre encore. Je laissais mon imagination remonter les estuaires et se perdre dans les villes ou des forets isolées , parcourir les mers a la recherche d’un port au nom familier pour avoir rêvé un jour d’y faire escale, traverser les océans a pas de géants ou a sauts de puce, en n’importe quelle saison , a n’importe quelle heure du jour ou de la nuit. Et je me sentais chez moi partout dans le monde. J’adorais déballer les cartes. Je détestais les ranger.

On en parle

Encore un nouveau Blog :  Lecture et impression

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4
J’ai été complètement séduite par ce livre étonnant et je sais que je ne serai pas toute seule à l’apprécier. Je l’ai absolument dévoré sans jamais me lasser. Le roman est particulièrement bien construit, et permet de revisiter la société du 3° empire. Il est vrai que, comme nous sommes dans la société rurale normande, on pense souvent, ainsi que le dit la 4° de couverture, à Maupassant.

Dans la première partie nous suivons les troupes impériales en Italie avec toutes les horreurs de la guerre et l’injustice de la conscription. Se mettre dans la peau d’un médecin, cela permet un tour d’horizon assez complet sur la société du temps : la médecine militaire plonge le lecteur dans la réalité historique, puis on voit le début du modernisme avec la science médicale qui commence à s’installer, on rentre dans toutes les maisons et on voit de près la misère et la mesquinerie des uns et des autres.

Comme ce qui se passe dans la vie, les histoires sont touchantes, révoltantes, émouvantes. Il y a une foule de personnages, mais le roman est bien fait et on s’y retrouve assez vite. Ce qui m’a le plus intéressé ce sont les réflexions sur le sens de la vie. Une profonde humanité se dégage de ce livre qui correspond certainement plus à nos valeurs d’aujourd’hui qu’à celle d’un médecin de 1859 mais peu importe ou au contraire c’est la raison pour laquelle ce llivre m’a tant plu..

Les conversations entre le guérisseur sorcier, les deux prêtres, et le médecin athées permettent de faire revivre l’ensemble des opinions du temps. Victor Cohen Hadria raconte bien l’amour : les sentiments et la réalité physique. Le docteur Le Cœur veuf qui a aimé sa femme a encore besoin de présence féminine à ses côté, il y a de beaux passages à ce propos, jamais choquants mais très humains : du Maupassant !

Citations

Cette fantaisie de carabin qu’ont les chirurgiens de porter la blouse le plus sanglant possible est une pose inutile, mais de là à faire de cette manie la principale responsable d’un fléau qui ravage les hôpitaux depuis qu’il en existe, c’est pousser le bouchon un peu loin.

On a bien raison de dire que la guerre est une affaire où s’entre-tuent des hommes pauvres qui ne se connaissent pas du tout pour que vivent des hommes riches qui se connaissent fort bien et ne s’entre-tuent pas.

Malheureusement, une trop grande hâte dans l’introduction de nouvelles habitudes entraîne souvent un retrait de l’instruction.
En un instant, par pure maladresse, ce qui avait demandé des années d’efforts et de persuasion se trouve rejeté à un état pire que le précédent. Et l’on voit les sorciers, les thaumaturges et les prêtres rattraper en un seul moment tout le terrain que nous leur avions arraché

Je ne crois pas aux fadaises des curés sur la vertu et la fornication, je suis assez imperméable á leur conception du monde et de la divinité à ce terrible démiurge qui instaure la jouissance pour la proscrire, plante des arbres défendus au fond des jardins et condamne le plus fidele de ses serviteurs a pourrir sur le fumier.

 

Dans nos campagnes, le labeur prime sur l’enfance. Il n’est pas rare d’apercevoir des bambins suivant leurs parents aux champs. Personne ne désire leur mort, mais leur vie n’a aucune importance. Seuls les plus forts peuvent espérer dans l’avenir.

 

Voilà le résultat de siècles d’un intense travail religieux, qui sanctifie la souffrance et dénie toute probité a la jouissance. Dans l’esprit de quel fou peut bien naître un tel mépris pour les œuvres humaines, qui seraient aussi celles de Dieu, s’il existait ? Je serai en mesure de concevoir qu’un athée stupide bannisse une activité qui appartient si pleinement a la nature de l’homme, qu’un philosophe haineux des êtres vivants leur reproche ce qui est leur substance, mais qu’un croyant, qui regarde l’univers comme l’expression divine ,rejette ce qu’elle a dispensé de plus évidemment commun a toutes ses créatures est une sorte d’antinomie que je ne puis admettre. On devrait révérer le sexe dans les églises.

 

Un homme un vrai, se doit de rester sale, ne raconte-t-on pas que l’odeur du bouc attire les femelles ? La crasse, l’huile comme ils disent, favorise la pousse des cheveux, soutient l’intégrité du corps et des organes, les puces assainissent le sang…

On en parle

Chez Ysun blog que je regarde souvent.

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J’ai beaucoup hésité à mettre ce livre sur mon blog car je trouve qu’en ce moment on n’a pas besoin de livre « baisse-de-moral » assuré. Tout est en mi-teinte, gris ou carrément moche, dans cette histoire. Un couple qui ne va pas vraiment bien, Le Mans une ville de province triste à en crever d’ennui, des voisins redresseurs de torts de la pire espèce, une vie de travail sans grand intérêt. Voilà c’est le sujet du roman du gris et du sordide ordinaire, une peinture assez exacte de notre époque et comme en plus c’est, parfois, bien raconté vous êtes certain d’attraper le mourron.

Heureusement il y a la chambre à remonter le temps ! Pourquoi heureusement parce que je déteste la science fiction, donc au moins je vais pouvoir carrément partir dans une critique… Même pas ! C’est aussi en grisaille, cela ne donne au narrateur que la possibilité d’éviter les disputes avec sa compagne. Un seul conseil, lisez ce livre avant de vous installer au Mans même si c’est beaucoup moins cher qu’à Paris !

Citations

Le mobilier était discret, contemporain dans le style bobikéa qui plaisait aux gens de notre génération.

 

La Sarthe était le département le plus inhospitalier que j’avais connu jusqu’à lors. L’air était en permanence humide, comme chargé de brouillard. Il faisait assez froid l’hiver, étouffant l’été. Le ciel était bas et nous trouvions le climat malsain.

 

Je trouvais ça plutôt a musant au début de vivre avec quelqu’un et puis ça m’est passé. Je ne me rendais pas compte mais maintenant que c’est terminé, j’ai l’impression qu’elle m’a presque rendu service. Je remets des slips et n’en change que tous les trois jours.

 

J’étais un type du Mans, la ville la plus déprimante et sinistre de la planète.

On en parle

Gwordia qui n’a pas plus aimé que moi.

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Si jamais l’envie vous prend d’acheter une maison bien tranquille, au fond des bois, dans la campagne profonde, lisez auparavant ce très court roman et vous serez à tout jamais dégoûté de la tranquillité, et des réveils au chant du coq ! !

Dans ce texte de 100 pages, le lecteur se perdra dans une forêt en Malaisie, évitera de peu un accident en téléphérique, mais surtout sera pris à la gorge par l’ennui hostile qui se dégage de la maison d’enfance en peine campagne, où aucun des 6 enfants n’a été heureux. Quel soulagement à la dernière ligne quand le personnage y mettra finalement le feu.

J’avais tellement aimé « Mon couronnement  » que j’ai choisi sans l’ombre d’une hésitation celui-ci dans la liste du club de lecture. Je dois avouer ma déception. Je ne vois pas trop l’intérêt de ce livre à part la difficulté de vivre à la campagne, mais bon, ça ne fait pas un roman même si je suis bien d’accord, rappelez vous la citation de Céline :

Moi d’abord la campagne, faut que je le dise tout de suite, j’ai jamais pu la sentir, je l’ai toujours trouvée triste, avec ses bourbiers qui n’en finissent pas, ses maisons où les gens n’y sont jamais et ses chemins qui mènent nulle part..

La famille à la destinée tragique ne m’a guère passionnée. Bref c’est un livre sur l’ennui, avec un personnage central peu accroché à la vie. Du coup je n’y suis ennuyée et je n’ai pas accroché !

Citations

Quoiqu’il présentât outre ses costumes bien coupés, certaines des caractéristiques qu’on se figure représentatives du diplomate, mains fines, impeccable chevelure argentée et pondération courtoise pouvant, ou non, dissimuler quelque vive intelligence.

 

André Girard semblait penser que les jeunes médecins d’un seul regard, menaient votre vieille carcasse droit à la tombe de la même façon que les jeunes garagistes, d’un seul regard, expédiaient votre vieille guimbarde à la casse.

 

Neuf mois de gestation, rendez-vous compte. Après quoi l’enfant tue l’actrice, ou bien c’est l’actrice qui tue l’enfant. Rien ne pousse à l’ombre des acteurs.

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