Traduit de l’anglais (États-Unis) par Edit OCHS

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Je n’ai hélas pas noté le blog ami qui m’a fait découvrir ce livre. J ‘ai beaucoup , beaucoup aimé cet essai historique. Et tous ceux qui sont intéressés par cette période de l’histoire contemporaine seront de mon avis, du moins je le crois, tant le travail de recherche me semble sérieux .

Mais ce livre peut aussi toucher des lecteurs moins historiens. Le journaliste écrivain Erik Larson, est passionnant car il mène un travail d’enquête parfois proche d’un feuilleton à suspens. William E Dodd , est nommé par Roosevelt ambassadeur à Berlin en 1933, il y restera jusqu’en 1937.


C’est un professeur d’université , formé dans sa jeunesse en Allemagne . Il n’appartient pas au monde des ambassadeurs , et il sera cordialement détesté par les hommes politiques de son pays, et snobés par l’« aristocratie » du personnel des ambassades. Position très inconfortable pour un homme intègre, qui essaie de ne se faire manipuler ni par les nazis, ni par les opposants au nazisme ,et qui pour cela aurait eu besoin d’un soutien très clair de son propre pays. Il est accompagné à Berlin avec ses deux enfants déjà adultes.

Le narrateur avec force détail montre bien la prise de conscience de l’ambassadeur de ce qui se passe en Allemagne, il suit aussi le parcours de sa fille Martha. Martha c’est une belle jeune femme , très en avance sur son temps , elle mène une vie amoureuse très libre et au début elle est séduite par les hauts dignitaires nazis.

J ai découvert , grâce à ce roman, des personnages que je ne connaissais pas Hanfstaengl dit Putzy nazi mais dissident (je ne savais pas qu’il y en avait eu), et Diels, à l’origine de la Gestapo. Je trouve fascinant pour ce genre de lecture de croiser ce que je lis avec d’autres source sur internet. Peu à peu, le régime Nazi va se charger d’ouvrir les yeux de Martha, un bel homme venant du régime soviétique , Boris, va lui ravir le cœur et lui donner une conscience politique pro-communiste.

Le destin de cette femme est incroyable , Martha Dodd a travaillé pour les services secrets soviétiques jusqu’à sa mort, intervenue en 1990 à Prague. On ne peut pas dire que ce livre la rende très sympathique , elle est très agaçante , il semble qu’elle soit prête à se tromper tout le temps et à succomber à tous les hommes qui lui font la cour. De pro-nazie elle devient pro-communiste, mais plus parce que son amant a changé . De Diels elle est passé à Boris !

Ce qui rend le livre passionnant c’est de se rendre compte que si les grandes puissances avaient été plus fermes , il aurait été sans doute possible d’empêcher le basculement du nazisme de la plus grand partie de la population allemande. Et puis comme nous connaissons la fin, tous les aveuglements successifs des hommes politiques américains sont difficilement supportables.

Un livre facile à lire, passionnant mais qui m’a un peu plombé le moral , car c’est une période particulièrement abominable.
Il m’a rappelé le livre de l’ambassadeur Français André François-Poncet : Souvenirs d’une ambassade à Berlin, septembre 1931-octobre 1938, Paris,

Citations

 la rapidité du succès nazi dans l’opinion publique

 la « mise au pas » s’effectuait à une vitesse étonnante, même dans les milieux non directement visés par des lois spécifiques, les Allemands se plaçant de leur propre chef sous l’autorité nazie, un phénomène qui prit le nom de Selbstgleichschschaltung, ou « mise au pas volontaire….

Une étude des registres nazis a démontré que, sur un échantillon de deux cent treize dénonciations , 37 % relevaient non pas d’une conviction politique sincère, mais de conflits privés, dont le déclencheur était souvent d’une insignifiance stupéfiante. Ainsi en octobre 1933, le commis d’une épicerie dénonça à la police une cliente excentrique qui s’était entêtée à réclamer ses trois pfennigs de monnaie. Le commis l’accusa de ne pas avoir payé ses impôts. Les Allemands se dénonçaient les uns les autres avec un tel entrain que les cadres supérieurs du Parti pressèrent la population de faire preuve d’un plus grand discernement concernant ms affaires à signaler à la police.

 Le refus de voir

De fait, Martha avait eu la même idée. « J’avais tendance à penser qu’il était juif » reconnaissait-elle ; elle « considérait que son hostilité n’était suscitée que par sa conscience raciale ».
Mower était effaré de voir que le monde extérieur ne saisissait pas ce qui se tramait en Allemagne . Il découvrit que son frère en était à douter de la vérité de ses reportages.

 Et pourtant Dodd n’était pas antisémite

Dodd croyait que son ambassade avait trop de personnel et, plus particulièrement, trop de ses membres étaient juifs…..il craignait que leur présence parmi l’équipe ne détériore les relations de l’ambassade avec Hitler…

 Discours d’Hitler après les assassinats des SA et de leur chef Röhm

Seule une répression féroce et sanglante pouvait étouffer dans l’œuf la révolte….Si on me demande pourquoi nous n’avons pas fait appel aux tribunaux réguliers, je répondrai : dans ces heures, je me suis trouvé responsable du destin de la nation allemande et, par conséquent, je représentais à moi seule l’autorité judiciaire suprême du peuple allemand.

 le culte d’Hitler

Il vit la stature d’Hitler grandir en Allemagne jusqu’à devenir celle d’un dieu. Les femmes pleuraient quand il passait à proximité ; les collectionneurs de souvenirs ramassaient la terre là où il avait posé le pied.

On en parle

dans tous les livres, et chez Aiffele, chez Dominique.

 

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Je suis ravie de retrouver mon blog avec ce roman qui m’a beaucoup plu. 
Il a été couronné par le Goncourt des lycéens, ce prix lui va très bien : je connais, en effet, peu d’adolescents insensibles à la détermination d’Antigone. Cette jeune femme qui reste inflexible à propos de la dignité des morts, est bouleversante , elle est le petit grain de sable qui empêche la tyrannie d’être satisfaite d’elle même.

Quelle idée merveilleuse (hélas, une idée de roman !) de vouloir monter la pièce de Jean Anouilh dans le Liban en guerre ! L’auteur qui est journaliste,a couvert les guerres de son époque et il sait rendre compte de l’horreur des morts dans les pays où l’humanité disparaît au profit de la force armée et souvent barbare. Il m’avait déjà convaincu en écrivant à propos de l’Irlande , « Retour à Killybegs » ?

Les premières pages du « quatrième mur » décrivent un tir de char, elles sont d’un réalisme incroyable , j’ai senti la mort beaucoup plus précisément que dans n’importe quelle image de film. Le narrateur reprend le projet de son ami Samuel qui est juif et qui se meurt d’un cancer , il essaie de monter Antigone avec de jeunes acteurs venant des différentes composantes religieuses libanaises. Présent lors des massacres de Sabra et Chatila, son projet théâtral est noyé dans le sang et sa raison vacille face à tant d’horreurs.

De retour en France , même l’amour de sa petite fille ne pourra le ramener aux joies simples de la vie. Plusieurs centres d’intérêts peuvent vous conduire à vous intéresser à ce grand roman :

  • le parcours d’un gauchiste de 68
  • la difficulté d’être juif , orphelin de parents morts en déportation.
  • la guerre du Liban
  • La difficulté de se situer au-delà des haines religieuses
  • la force d’un texte théâtral
  • mais surtout les horreurs des guerres civiles et les difficultés pour les témoins de croire de nouveau à la vie.

Un livre qui fait réfléchir et qui fait écouter autrement les informations internationales , celles qui viennent de pays où les hommes se tuent sans respecter la moindre humanité pour des raisons qui semblent si futiles lorsque les années passent .

Citations

 Une phrase sur l’amitié qui m’a fait réfléchir

La vie s’était chargée de nous disperser. Sam m’avait donné son adresse à Beyrouth, son numéro de téléphone aussi, mais je ne l’avais jamais appelé. Il existait. Pour moi, c’était suffisant. Je pensais que notre amitié se nourrissait de distance et je m’étais trompé. J’avais perdu trois ans de lui.

Antigone revisitée

– Je n’ai pas lu votre pièce mais Nabil , mon aîné l’a fait pour moi. Il m’a dit , au contraire, qu’elle était exempte de médisance. Qu’elle ne représentait ni le Prophète -prière et salut de Dieu sur lui- ni ses messagers. Qu’elle ne manquait pas de respect à ses grands compagnons. Et aussi qu’elle n’insultait pas l’islam. Qu’elle ne cachait ni nudité , ni insulte, ni autre souillure.
– Mes fils m’ont dit que leur rôle de gardes serait d’entourer leur chef, de le protéger comme un père et de faire respecter son autorité. Ils m’ont expliqué qu’une jeune femme le défiait. Qu’à travers lui, elle narguait la loi divine et que ce calife bien guidé mettait un terme à cette arrogance.

La tragédie

– Et moi, j’aime la leçon de tragédie que donne cette pièce, cette distance prise avec la banalité du drame. Souvenez-vous de ce que le Choeur nous apprend de la tragédie. Il dit que la tragédie, c’est propre, c’est reposant,c’est commode. Dans le drame, avec ces innocents , ces traites, ces vengeurs, cela devient compliqué de mourir. On se débat parce qu’on espère s’en sortir, c’est utilitaire, c’est ignoble . Et si l’on s’en sort pas, c’est presque un accident. Tandis c ela tragédie, c’est gratuit. C’est sans espoir. Ce sale espoir qui gâche tout . Enfin il n’y a plus rien à tenter . C’est pour les rois la tragédie.

 On en parle

Dans le blog de Krol (Je lui avais dit que je lirai ce livre et son avis a compté dans ma détermination.). Et tous les 54, plus un (le mien !), avis de Babelio.

Emprunté à la médiathèque.

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Le chemin de Compostelle m’a entraînée vers le Brésil…. Je voulais connaître ce roman pour lequel Jean-Christophe Rufin a reçu le prix Goncourt 2001 et connaît depuis une notoriété certaine. Cet écrivain est doué pour les romans historiques, je le sais depuis « le grand Coeur » et même si je ne suis pas une grande adepte du genre, je ne boude pas mon plaisir quand c’est bien fait. Cette épopée de 600 pages nous raconte un épisode peu connu , la tentative de colonisation du Brésil par le chevalier de Villegagnon en 1555.

En quelques pages, à la fin du roman, l’auteur nous résume ce que l’on sait de cet épisode peu glorieux, il explique aussi, que les deux personnages les plus romanesques, Colombe et Just de Clamorgan, sont sortis de son imagination, l’écrivain a donc pu , à sa guise, leur donner une personnalité plus complexe que les personnages pour lesquels les sources historiques mettent quelques limites à la création littéraire .

Le style de Ruffin est un délice de simplicité et de clarté,puisque nous sommes en 1555, il maille son texte de mots anciens qu’on a plaisir à rechercher. Savez-vous ce que sont des « poils amatoires » ? j’ai souri quand j’ai compris( le texte est suffisamment explicite !). Ruffin entraîne son lecteur dans un Brésil à la nature aussi luxuriante qu’inquiétante peuplée d’Indiens au mœurs qui choquent les Européens. D’abord, ils se promènent nus et ne semblent pas avoir envie de domestiquer la nature. Et comble de l’horreur, ils sont anthropophages .

Le choc des deux civilisations ne permet pas qu’une compréhension mutuelle puisse s’installer , sauf pour Colombe mais c’est le privilège du romancier de rêver que deux civilisations aussi opposées puissent se comprendre. Les colons sont peu nombreux et mènent une vie terriblement dure, la construction d’un fort est une entreprise complètement surhumaine mais à ces rudes conditions d’installation se rajoutent les disputes religieuses qui décimeront, bien plus sûrement que tout autre danger, la malheureuse petite troupe aux ordres d’un capitaine fantasque qui va perdre peu peu toutes ses illusions. Malheureusement, il perdra la seule qui le rendait un peu sympathique , la croyance en l’homme et deviendra un enragé de la foi et donc tuera,tortura avec toute la bonne conscience que donne l’assurance d’avoir Dieu pour soi .

Au delà de la découverte du Brésil ce roman est une bonne façon de faire revivre la Renaissance avec ce curieux paradoxe que cette période a apporté l’humanisme mais, hélas, l’intolérance religieuse et annonce les guerres de religion. C’est terrible de se souvenir que les anciens persécutés, calvinistes ,luthériens deviendront à leur tour des combattants au nom de la « vraie » foi sans aucune pitié pour ceux qui ne partagent pas leurs croyances. Le débat autour de la présence du corps du Christ dans l’hostie en est un parfait exemple.

Je comprends que beaucoup de lecteurs aient aimé ce roman et dans notre monde où l’on voit des musulmans s’entre déchirer au nom de la pureté de leur foi ce livre a sa place dans notre réflexion.

Citations

le choc de l’Italie pour les Français de l’époque

Je suis arrivé en Italie a trente ans et, crois-moi, j’étais encore tout plein de la vieille tradition de notre chevalerie où l’homme est ruiné par les veilles et les prières,cousu de cicatrices et ne s’accorde aucun soin. Mon premier choc , je l’ai reçu à Florence , en voyant le David de Michel-Ange et le Baptême du Christ de Sansovino. Ainsi malgré la trahison d’Adam, l’idée de Dieu était toujours présente dans l’homme et il suffisait de la cultiver. L’homme idéalement beau, chef d’œuvre de son créateur, l’homme de bien qui excelle aux armes et aux arts, l’homme bon,calme,serein, élégant, maître de lui, pouvait devenir un idéal.

 Réflexion qui m’a étonnée

La fidélité est un sentiment qu’on contente aisément. Il suffit de le tolérer.

 Genre de discussions avec des fanatiques religieux

– les auteurs dont vous parlez , précisa tranquillement le pasteur , ne connaissait pas le Christ. Leur pensée plongée dans les ténèbres , ne peut être d’aucun secours. Il faut croire, voilà tout.

– C’est ce que disent aussi les prêtres et le pape , fit lugubrement l’amiral.

– Oui, confirma Richer avec mépris. Mais la différence, c’est qu’il sont tort.

Tuer au nom de Dieu

Les guerres de religion sont toujours une providence pour les criminels. La violence tout à coup devient sainte ; pourvu qu’ils sachent mimer la dévotion, au moins en parole, licence leur est donnée par un Dieu d’accomplir des infamies dont ils avaient longtemps rêvé.

 On en parle

Je renvoie aux critiques de Babelio car je n’ai pas lu de critiques récentes de ce livre dans mes blogs préférés.

 Traduit de l’anglais par Céline LEROY

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Roman autobiographique, Jeanette Winterson raconte, dans un style percutant et souvent drôle, sa vie d’enfant adoptée, donc abandonnée et mal aimée par une mère à moitié folle. La famille Winterson se compose d’un père qui fuit tous les conflits, d’une mère qui est à la recherche d’un Dieu vengeur et qui déteste par-dessus tout le plaisir, et de cette petite Janette qui réagit par la colère aux souffrances qu’on lui impose.

Le récit n’est absolument pas larmoyant, même quand il décrit les nuits passées dehors, par la petite fille de 8 ans, assise sur les marches de la maison. Elle est sauvée par la colère qui l’habite et ensuite par les livres, ceux qu’elle lira et ceux qu’elle écrira. J ai beaucoup apprécié la peinture des milieux ouvriers de Manchester, les dures réalités de la pauvreté mais également les formes d’entraides qui existaient et qui n’existent sans doute plus. Janette, préfèrera les femmes aux hommes et sa folle dingue de mère lui fera subir un exorcisme pour ramener la brebis galeuse dans le droit chemin, le jour où elle surprendra sa fille dans les bras d’une amie.

Il y a des moments où j ai beaucoup ri, comme, lorsque adulte elle vient à Noël voir sa famille avec une amie noire , Madame Winterson en bonne missionnaire chrétienne s’efforce d’accueillir cette jeune femme à qui elle fait manger des ananas à tous les repas car elle pense que c’est la nourriture préférée des noirs… La fin du roman décrit la rencontre avec sa famille biologique. Ce n’est pas le happy-end , mais cela fera du bien à l’écrivaine narratrice d’enfin savoir qui est sa mère . Elle nous décrit une dispute avec sa mère qui critique sa mère adoptive .

Elle répond ce qui me semble très juste, que Madame Winterson était là et que si elle était un monstre, c’est son monstre à elle et qu’elle seule a le droit d’en dire du mal. Durant la quête de sa famille biologique elle traversera une dépression terrible dont elle ne sortira que grâce à l’écriture.

Beau texte, on a vraiment envie de lui dire : « Bravo » Jeanette Winterson de vous en être si bien sortie ! »

Citations

Portrait de sa mère Madame Winterson

Ma mère elle-même était une dépressive truculente ; une femme qui cachait un revolver dans le tiroir à chiffons et les balles dans une boîte de produit nettoyant Pledge. Une femme qui passait ses nuits à faire des gâteaux pour ne pas avoir à dormir dans le même lit que mon père. Une femme qui avait une descente d’organes, une thyroïde déficiente, un cœur hypertrophié, une jambe ulcéreuse jamais guérie, et deux dentiers – un mat pour tous les jours et un perlé pour les « grands jours ».

 Scène de son enfance

Chez nous, la lumière est allumée. Comme papa travaille la nuit, elle peut aller se coucher, mais elle ne dormira pas. Elle lira la Bible jusqu’au matin et quand papa sera de retour, il me fera entrer, ne dira rien, et elle non plus ne dira rien et nous ferons comme s’il était normal de laisser son enfant dehors toute la nuit, normal de ne jamais dormir avec son mari.

 Le pouvoir des mots

J’ai eu besoin des mots parce que les familles malheureuses sont des conspirations du silence. On ne pardonne jamais à celui qui brise l’omerta. Lui ou elle doit apprendre à se pardonner.

 L enfance malheureuse

Je suis contrariée qu’il y ait autant d’enfants dont on ne s’occupe jamais et qu’on empêche donc de grandir . Ils vieillissent mais ne grandissent pas. Pour ça il faut de l’amour. Si vous avez de la chance, l’amour viendra plus tard. Si vous avez de la chance, vous ne frapperez pas l’amour au visage.

 L’éducation sexuelle de ses parents

J’ai bien trouvé un livre…. Il s’agissait d’un manuel de sexualité des années 50 intitulé : « Comment combler votre mari »….

En réfléchissant aux horreurs de l’hétérosexualité, j’ai compris que cela ne servait à rien que je plaigne mes parents ; ma mère n’avait pas lu le livre – peut-être l’avait-elle ouvert une fois et l’avait-elle aussitôt écarté en mesurant l’ampleur de la tâche . Le livre n’était pas corné en parfait état, intact. Conclusion, mon père a dû faire sans, et comme je doute fort qu’ils aient jamais couché ensemble, il n’a donc pas eu besoin de passer ses nuits avec Madame Winterson, pénis dans une main et manuel dans l’autre, pendant que sa femme suivait les instructions.

 J ai souri

Madame Winterson marchait à l’obsession et tricotait pour Jésus depuis un an environ. L’arbre de Noël arborait des décorations en tricot, et le chien était harnaché dans un manteau de Noël en laine rouge constellé de flocons blancs. La crèche non plus n’avait pas échappé au tricot et tous les bergers portaient des écharpes parce que Bethléem était sur le trajet de bus qui allait à Accrington.
Quand il a ouvert la porte, mon père portait un nouveau pull et une cravate assortie. La maison avait été retricotée de fond en comble.

 La Bible revisitée

 Je supporte déjà tellement de choses, m’a-t-elle répondu en me lançant un regard lourd de sens. Je sais que la Bible nous dit de tendre l’autre joue, mais on n’a que deux joues pour toute une journée.

On en parle

chez Aifelle un des blogs que je lis régulièrement ainsi que lecturissime

 

 Traduit de l’anglais par Claude et Jean DEMANUELLI

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J’ai passé beaucoup de temps à lire ce roman , tout simplement parce que ce qu’il décrit est à peine supportable. La guerre en Afghanistan vu du côté pakistanais est une horreur et quand un écrivain sait très bien écrire et captive son lecteur, cela devient tragique et trop lourd à supporter parfois. Je n’ai pas renoncé ,d’abord parce que cet écrivain mérite d’être lu mais aussi parce que je me dis que, vivant dans un milieu tellement épargné ,je n’ai pas le droit de fermer les yeux sur les horreurs des guerres qui secouent la planète. Nadeem Aslman met son talent d’écrivain au service de la connaissance des civilisations entre elles. J ai lu dans un des interviews de l’auteur que ce livre apparaît comme un roman d’amour pour les Indiens et les Pakistanais, et un roman sur l’horreur de la guerre pour les Anglais, les Américains et les Européens. Pas de doute je fais partie des Européennes ! Et en plus , je me dis que, si les Pakistanais et les Indiens voient dans ce roman ,une belle histoire d’amour, ils ont une conception étonnante de ce sentiment.

Naheed et Mikal s’aiment mais ils sont davantage unis par la mort que par la vie. Un des aspects les plus intéressants de ce roman , c’est de montrer à quel point les Pakistanais n’ont absolument aucune idée des valeurs de l’occident, et comment les Américains ne connaissent pas mieux les motivations des combattants Afghans ou Pakistanais. Ce roman permet d’avancer dans la compréhension de ce qui s’est passé pendant cette guerre qui n’est pas encore terminée.

Aucun manichéisme dans les personnages , j’ai été bouleversée par le personnage de l’aveugle(Rohan) qui est un musulman sincère et sans être fanatique commet les pires horreurs au nom de sa foi. Il laisse mourir sa femme pour l’aider à retrouver la foi ! Il renvoie un enfant de son école dont la mère se prostitue pour payer les études de son fils….

Je résume rapidement l’histoire ; deux jeunes Pakistanais partent aider les Afghans qui, après le 11 septembre 2001, voient les Américains envahir leur pays. L’un d’entre eux Jeo meurt victime des seigneurs de guerre , l’autre Mikal sera pris et torturé par les Américains. Ces deux jeunes élevés ensemble par le père de Jeo, Rohan, directeur d’une école « L’esprit Ardent » sont liés par un sentiment d’amitié très fort. Hélas ! Ils aiment la même femme, Naheed qui n’est évidemment pas libre de choisir son destin. Finalement seules les femmes et le vieux Rohan survivront au carnage annoncé dès les premières pages. La fuite de Mikal, à travers l’Afghanistan et le Pakistan, permet de décrire les rouages de cette guerre religieuse où tous les coups sont permis, les êtres humains sont de simples pions dans les mains de bandits dont le seul intérêt est de satisfaire leurs plus bas instincts : appât du gain, viol des femmes , et surtout écraser tous les gens un peu différents .

La religion est un arme facile à brandir car personne n’ose s’y opposer et fabriquent des victimes consentantes. La description des paysages rajoute beaucoup, je n’ose dire aux charmes du roman, mais au plaisir de lecture. Ce n’est certainement pas ce livre qui fera aimer l’Islam , on le sait, tous les fanatismes religieux sont dangereux, mais aujourd’hui celui de l’Islam se gère les armes à la main et il faut remonter aux guerres de religions pour en retrouver l’équivalent en France . Il faut espérer que les musulmans sauront interdire que ces violences là soient perpétrées au nom de leur foi car seuls les musulmans ont le pouvoir de faire apprécier leur religion et de montrer au monde que les horreurs qu’on commet au nom de l’Islam n’ont aucun rapport avec leur foi.

Citations

Une belle émotion au début du livre

Au bout de quelques instants , il avait avoué que son angoisse était due à l’apparition du méchant dans l’histoire que son père lui racontait .

« Mais as-tu jamais entendu une histoire dans laquelle les méchants finissent par gagner ? » lui avait demandé Rohan, en riant doucement pour le réconforter.

L’enfant avait réfléchi un moment avant de répondre.

« Non, mais avant de perdre, ils font mal aux gentils. C’est ça qui me fait peur. »

L ‘utilisation des enfants au combat

– La moitié de gamins ne sont pas des soldats, dit Mikal à un chef taliban. Il serait bon qu’ils restent cachés.

– Ce serait bon pour eux, peut-être, mais pas pour notre cause, répond l’autre. Tout le monde doit se battre. Cela aussi, ajoute-t-il d’un ton sans réplique , fait partie des plans d’Allah. »

 Le drame de Rohan

J’ai fait des erreurs quand mon fils était encore enfant , dit Rohan. Sa mère est morte apostat , et, en conséquence , je nous suis imposé , à moi-même et à mes enfants , une forme extrême de piété , les obligeant à prier et à jeûner , leur révélant des choses qu’ils étaient trop jeunes pour concevoir . L’impermanence de ce monde , les tourments de l’enfer et , avant cela, la tombe . J’ai fini par comprendre mon erreur , mais ils ont dû en rester marqués . Je me demande si c’est pour cette raison que mon fils est parti en Afghanistan.

la peur et la haine des Américains

« Je ne tiens pas à être vu en train de soigner un Américain, comme ça en plein vent. On m’abattrait moi aussi. Je connais des gens qui refusent ne serait-ce que de regarder des photos d’Américains. »

L incompréhension

– On ne peut jamais deviner ce qu’ils veulent les Occidentaux. Pour le savoir , il faudrait manger ce qu’ils mangent, porter ce qu’ils portent, respirer l’air qu’ils respirent . Être né là où ils sont nés.

– Pas forcément . Tu as parlé des livres . On peut apprendre dans les livres.

– Personne d’ici ne peut savoir ce que savent les Occidentaux, dit l’homme. On ne les connaîtra jamais. Le fossé est trop profond, trop définitif. C’est comme si on demandait ce que savent les morts ou ceux qui sont à naître.

On en parle

Au bonheur de lire que je ne connaissais pas et voici l’opinion de KROL que je connais bien.

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Petit livre (180 pages) découvert grâce à un ami historien, à mon tour je le recommande chaudement ! 
Pauline de Pange, « la princesse Pauline de Broglie, naît en 1888 dans une des plus prestigieuses familles aristocratiques de France », comme nous l’apprend l’introduction.

 

Dans une langue assez plate, elle nous décrit la vie de sa famille en 1900. Et c’est tout simplement passionnant , vous pourrez écouter le document d’archive de l’INA que j’ai mis en fin de mon billet. Je dois dire qu’elle m’a plus agacée quand elle raconte que lorsqu’elle écrit.

Parlons d’abord de son style, on sent la grande aristocrate qui a appris à garder pour elle toutes ses émotions et ne jamais s’étonner de rien à propos des conduites humaines. C’est sans doute pourquoi elle raconte sa vie sans pathos ni effets, qu’elle aurait sans doute jugés, déplacés.

 Cela donne aussi un grand intérêt à ses souvenirs, car en général, quand on est plongé dans ce genre de récit , ils sont, soit teintés de nostalgie : »quel monde merveilleux , hélas : ! disparu ! » , soit écrit sous le ton de la révolte. L’auteur prenant,alors,le point de vue des humbles exploités par cette aristocratie qui n’abaisse pas son regard jusqu’au petit peuple si misérable.

Pauline de Pange évite ces deux écueils , elle raconte et nous dit : voilà c’était comme ça. On apprend une foule de détails et un monde complètement disparu vit devant nos yeux. La domesticité, la nourriture et le cérémoniel pour servir les repas, l’habillement les codes sociaux l’éducation ,les bains de mer, l’instruction, la religion, la politique, l’affaire Dreyfus…

Les femmes de ce monde s’ennuyaient beaucoup, elles ne pouvaient rien faire elles-mêmes puisqu’il y avait un domestique pour tout. Des ouvrages de dames, des tricots de laine grise pour les pauvres et des broderies, seulement commencées puisqu’une domestique atitrée avait pour charge de les finir. Il y avait même un employé pour remonter les horloges !

Je pense que c’est une pierre à l’édifice de la grande histoire et surtout c’est un complément indispensable à la lecture de Proust. Voilà le contre point non littéraire du monde qu’il a su si bien animer , j’ai eu l’impression de lire le canevas (100 pages) de « La recherche ».

 Je me suis beaucoup amusée à l’évocation des créations techniques, le cinéma, la bicyclette, la voiture et le téléphone.. ah les demoiselles du téléphone qui ne respectent pas le titres des aristocrates ! Ce qui m’a le plus étonnée c’est le peu de cas que l’on faisait de l’instruction de cette princesse dans une famille qui pourtant avait des idées libérales et dont la devise est « pour l’avenir ».

Voici la demeure des de Broglie en Normandie :

 Citations

Le cérémoniel des repas

Je précise que l’enfant a sept ans et je n’en reviens pas qu’elle puisse boire du vin à cet âge ! Et après cette description que j’ai abrégée on ne s’étonnera pas qu’elle dise plus loin que tout le monde avait « la goutte » passée 50 ans !

On servait sur des plats d’argent d’énormes pièces de viande toutes saignantes et baignées de sauces fortes ….. ; des jambons entiers garnis de collerettes de papier, des pâtés de gibier, des daubes , des chauds-froids, des galantines,. Les potages étaient un tour de force car il fallait les varier chaque jour sans jamais , sauf les vendredis , servir des soupes maigres……Le maître d’hôtel découpait devant nous sur un plateau de bois les volailles toutes ruisselantes de graisse. Armé d’une fourche à deux dents et d’un immense couteau , il saisissait la pièce : canard, dinde, poularde,perdreau , faisan ou bécasse, et en un tournemain il débitait les morceaux qu’il disposait avec art sur le plat d’argent …..

Le menu, matin ou soir , se composait toujours de sept à huit plats . Une entrée (généralement des œufs), un plat de viande avec pomme de terre , une volaille rôtie, un plat de légumes , un entremets….

Pourvu que je me tienne bien droite on ne me faisait aucune observation . Je buvais de grands verres de vin rouge et je reprenais de tous les plats. La conversation , à laquelle j’étais censée ne prendre aucune part ni même écouter , était très animée.

Et ce passage qui m’a tellement étonnée,la visite dans une école que ses parents ont financée

Souvent ma mère m’emmenait le samedi pour distribuer des récompenses aux élèves. Ces séances hebdomadaires étaient pour moi un supplice. Je me rendais parfaitement compte que toutes ces petites filles étaient plus instruites que moi. Je rougissais d’entendre poser des questions à des enfants de six ans , auxquelles je n’aurais pas pu, à huit ou dix ans répondre. Un jour l areligieuse me demanda persuadée que j’allais briller par ma science, la solution d’un problème très simple qui était au tableau. C’était une règle de trois dont je ne savais pas le premier mot. Je fus lamentable ! Ma mère riait , n’y attachait aucune importance , disant : »Elle en saura toujours assez, moi je ne sais pas faire une addition ! »

Je n’ai pas trouvé de blogs qui en parlent, lisez le vite, et je mettrai un lien vers votre blog. Si vous voulez l’entendre : http://boutique.ina.fr/video/CPF86621209/la-vie-comparee-de-madame-la-comtesse-de-pange-et-de-monsieur-robert-galley.fr.html

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Le voici donc en poche ! et, comme je n’ai jamais pu l’emprunter tant il avait du succès , je l’ai acheté. Je n’ai pas regretté et j’ai beaucoup apprécié ce récit qui mêle l’antiquité, les temps anciens et l’époque contemporaine. J ai été séduite par le style et la richesse du vocabulaire qui m’a obligée à avoir recours à Wikipédia. En réalité, j’aime bien faire l’effort de rechercher des mots et des noms quand cela ne nuit pas à la compréhension du récit. J’ai appris par exemple, que « chancel » était ce qui séparait le chœur de la nef d’une église et je me suis demandée si cela avait un rapport avec le verbe « chanceler ». Et je me suis enrichie de toutes les histoires de l’antiquité du temps de Saint Augustin. Je connais maintenant Sophonisbe.

Évidemment, le propos du roman n’est pas là, il s’agit de deux jeunes qui décident de reprendre un bar en Corse par amour de cette région où ils se sentent si bien pendant leurs vacances. Ils sont entourés du passé de leurs ancêtres et ce sont des poids lourds à soulever. Le personnage du grand-père qui s’est détruit dans les colonies françaises dans sa jeunesse est très ambiguë, il était à la recherche de la gloire et du dépaysement, il a rencontré l’alcool et le vice. Il voue une haine à son petit fils si forte qu’il va l’aider à acheter la gérance du bar, tant il est persuadé que ce village ne peut que le détruire !

Et c’est vrai qu’un bar qui repose sur l’attirance des hommes pour des jolies filles peu farouches n’est pas très loin d’un « bar à putes » et donc ça se finira mal. Pour moi l’intérêt c’est le style , certains passages où on se retrouve dans des réactions des personnages et l’évocation des difficultés du monde contemporain. Le personnage d’Aurélie qui doit faire face aux errances de Matthieu est, pour moi le plus crédible, et l’attitude fuyante de Matthieu face aux difficultés en particulier de la mort m’a rappelé bien des choses.

Je ne suis pas totalement sous le charme de ce roman parce que je ne comprends pas pourquoi les personnages sont aussi sombres. Le grand père Marcel qui avait honte de la femme qu’il aimait parce qu’elle était sotte semble revenu de tout , on s’attend à ce qu’il ait vécu l’enfer , mais il a surtout navigué de désillusions en désillusions. Son petit fils, Matthieu qui se laisse ballotter par ses envies est un peu (pour ne pas dire, complètement) vide :son manque de lucidité m’a agacée.

Malgré cela, j’ai dévoré ce roman et sa concision m’a fait du bien après les longueurs de ma dernière lecture.

 Citations

Description d’une ado qu’on connaît et qui m’a fait penser à une chanson de Bénabar « la paresseuse »

Virginie n ‘avait jamais rien fait dans sa vie qui pût s’apparenter,même de loin à un travail, elle avait toujours exploré le domaine infini de l’inaction et de la nonchalance et elle semblait bien décidée à aller jusqu’au bout de sa vocation mais, quand bien même elle eût été un bourreau de travail, son humeur maussade et ses airs d’infante la rendaient totalement inapte à accomplir une tâche qui supposait qu’on entretînt des contacts réguliers avec d’autres êtres humains…

Description des Sardes

les vieilles femmes au voile noué soigneusement sous la lèvre inférieure, des hommes aux guêtres de cuir dont les générations de criminologues italien avaient mesuré les membres, la cage thoracique et le crâne, notant soigneusement les imperfections de l’ossature pour en déchiffrer le langage secret et y repérer l’inscription de l’ossature pour en déchiffrer le langage secret et y repérer l’inscription indiscutable d’une propension naturelle au crime et à la sauvagerie.

L’avenir

Et c’est ainsi qu’au nom d’un avenir aussi inconsistant que la brume, il se privait de présent, comme il arrive si souvent, il est vrai, avec les hommes.

 Beau passage mais où « wikipédia «  est très utile

Rien ne demeurait des contes merveilleux qui peuplaient les livres d’histoire, ni le feu de Baal, ni les légions africaines de Scipion,aucun chevalier numide n’assiégeait les murs de Cirta pour rendre à Massinissa le baiser de Sophonisbe qui lui avait été vol, les murs et leurs assiégeants étaient retournés ensemble à la poussière et au néant car le marbre et la chair sont également périssables et, à Bône, de la cathédrale d’Augustin et son dernier souffle recouvert par la clameur des Vandales, il ne restait qu’un terrain vague, recouvert par les clameurs d herbes jaune et battu par le vent.

 La charcuterie de super-marché

les saloperies que vendaient les supermarchés das leur rayon terroir, conditionné dans des filets rustiques frappés de la tête des Maures et parfumés en usine avec des sprays à la farine de châtaigne, autant y aller carrément dans l’ignoble, en toute franchise, avec du cochon chinois, charcuté en Slovaquie…

la France coloniale

Il avait pour voisins un gendarme dont le penchant pour la boisson s’affirmait chaque jour un peu plus, un médecin d’ores et déjà alcoolique et un missionnaire qui disait la messe en latin devant des femmes aux seins nus et tentait de fasciner un auditoire récalcitrant en répétant l histoire du Dieu qui s’était fait homme avant de mourir en esclave pour leur salut de tous.

 Phrase qui m’a fait réfléchir

Il croit toujours qu’il suffit de détourner le regard pour envoyer au néant des pans entiers de sa propre vie. Il croit toujours que ce qu’on ne voit pas cesse d’exister.

 On en parle

À ce jour 142 avis sur Babelio et très peu négatifs. Jostein n’a pas aimé et je trouve son opinion intéressante ; et Keisha pour qui ce livre est un véritable coup de cœur.

4
J’étais à la recherche d’un roman qui emporte dans un autre univers que le mien , c’est réussi. 
Je me sens comme après avoir vu un excellent film d’action à la Clint Eastwood. On repense aux moments les plus forts , on refuse de voir les invraisemblances car le récit était trop bien mené et nous a permis de traverser des lieux et des époques que l’on connaît plus ou moins. J’avais entendu parler de cette république juive créer par Staline, aux confins de la Sibérie, mais je n’en savais guère plus.

Ce roman est l’occasion de connaître un peu mieux la République Juive de Birobidjan. Le personnage principal, une actrice russe Marine Andreïeva Gousseïev, permet à l’auteur d’analyser la terreur soviétique et la lutte contre le communisme dans les États-Unis des années 50. Rien de nouveau pour la terreur stalinienne si ce n’est que cette fois ce sont surtout les juifs qui sont visés , avec ce choix horrible : la mort violente chez les Nazis et la mort plus lente chez les communistes.

Le roman met en lumière également la commission McCarthy qui fonctionne de façon terrible pour les accusés, c’est vraiment une période qui ne grandit pas l’Amérique. On ne saura donc qu’en 2026 jusqu’à quel point les preuves ont été, en grande partie, fabriquées par la FBI et même si des gens n’ont pas été tués pour cela, beaucoup ont souffert et se sont vu rejetés dans leur travail et par leurs amis pour des faits qu’ils n’avaient pas commis.

Il faut lire les annexes de ce roman car parfois de terribles petites phrases décrivant la réalité font littéralement froid dans le dos !

Du côté russe

Kalinine Mikhaël Président du soviet suprême, sa femme fut déportée pour avoir critiqué Staline

Du côté US

Hiss Alger rayé du barreau, il fut réintégré en 1975, mais la cour suprême refusa(1976, confirmation en 1982) de le blanchir. Les « preuves » relatives au cas Hiss sont inaccessibles jusqu’en 2026, ce qui empêche aujourd’hui encore de connaître l’exacte ampleur des manipulations dans cette affaire.

Évidemment dans un cas, on mourrait au Goulag ; dans l’autre on était déshonoré mais la démocratie devrait être exempte de manœuvres aussi malhonnêtes. Je ne dis pas que ce roman est bien écrit, mais il emporte dans un autre monde et remet bien en mémoire des événements qu’il ne faudrait jamais oublier.

Citation

Passage où la femme de Staline s’oppose à son mari

– C’est ça : buvez et empiffrez-vous pendant que la Russie crève de faim pour vous plaire !

Marina fixait son assiette devant elle . Elle devinait les regards qui l’observaient. Ils pénétraient ses joues, son front, sa nuque. Des pointes de fer rouge. Son cœur battait à tout rompre. Des ondes de terreur lui tailladaient les reins. Mon Dieu ! N’avoir plus d’yeux ni d’oreilles ! Ne rien entendre de cette dispute. L’épouse de Staline insultant le Premier Secrétaire. Impossible !

On en parle

Babelio et mille et une page.

 Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Adélaïde Pralon.

4
Il est des livres qui touchent profondément alors qu’ils se veulent légers. Ce sont sans aucun doute mes livres préférés. « Les fiancé d’Odessa » raconte les difficultés d’une femme belle et intelligente qui veut sortir à tout prix de son pays où la vie est trop difficile. Du côté anecdotique, il y a une histoire d’amour très compliquée : son cœur et son corps palpitent pour le chef de la mafia locale, son patron David est loin de la laisser indifférente, et elle épousera Tristan, l’Américain homme d’entretien dans une école, qui lui a permis de fuir Odessa.

La situation décrite à Odessa date des années 90, c’est la misère et la corruption généralisée. Mais pour autant, l’Ukraine est un pays de culture et ne ressemble pas à l’idée que s’en font les Américains de base représentés par Tristan et ses amis. L’écrivaine décrit avec une grande finesse la contradiction entre l’attachement à Odessa et l’aspiration à un ailleurs : « le fameux rêve américain ». Autant si ce rêve est fondé sur une volonté d’entreprendre, il peut, sans doute devenir réalité, mais s’il est fondé sur un mariage, les dés sont immédiatement pipés. On pense au film « je vous trouve très beau » d’Isabelle Mergault avec Michel Blanc, moins le Happy end.

Janet Skeslien Charles, a vécu à Odessa et elle parle le russe. Elle a connu le travail à plein temps pour 25 dollars par mois, et elle a côtoyé, ces belles jeunes femmes ukrainiennes prêtes à tout pour vivre autre chose qu’un quotidien sans futur possible. Pour une fois, quelqu’un se donne la peine de mettre en scène ce désir de partir tout en maniant l’humour , car je le redis c’est un roman drôle plein de scènes qui font sourire. C’était encore plus simple pour cette écrivaine de décrire la déception de ces femmes une fois arrivées aux USA , évidemment le rêve américain ne correspond pas à celui d’une femme cultivée qui rêve d’épanouissement personnel et culturel. L homme qui est venu les chercher de si loin, et qui a dépensé tant d’argent pour cela, est d’abord venu chercher une femme soumise qui sera reconnaissante de la bonne action qu’il a faite pour elle.

Je sais que le ton sérieux de mon billet ne correspond pas à l’ambiance du livre, alors comme Keisha, Aifelle, et bien d’autres.. lisez le car en plus vous amuserez.

Citations

Humour

Les hommes ukrainiens sont souvent paresseux, alcooliques et violents…

– Pourquoi refuser de sortir avec un beau jeune homme ?

– Tu veux dire le roi de l’escroquerie, un chef de la mafia et sûrement aussi un assassin ?

– Personne n’est parfait. Au moins, il ne fume pas. »

L’embauche en Ukraine d’une secrétaire par un patron étranger

Insinuait-il que j’étais embauchée ? Il m avait fait alors un clin d’œil avant d’ajouter :

– Bien sûr, coucher avec moi reste l’aspect le plus agréable du travail !

La vie sous le régime soviétique

En théorie, le régime dispensait des soins médicaux gratuits. En réalité, les choses étaient légèrement différentes. Pas de cadeau, pas de traitement. Pas de présent, pas d’avenir.

 Scène qui en dit long sur la pauvreté dans les années 90

Quatre soldats décharnés, qui ne devaient pas avoir plus de dix neuf ans, vêtus d’uniformes gris trois fois trop grands, s’approchèrent de nous.

– S’il vous plaît, rien qu’un morceau de pain.

Je vidai mon stock de bonbons et de pommes. J’en avais toujours sur moi parce qu’à Odessa, il fallait toujours avoir de quoi surmonter les barrières. J’appelais ça la redevance, Jane la corruption. Mais elle apprit bien vite qu’une boîte de chocolat ouvrait les portes plus facilement qu un long débat.

– Merci, Mademoiselle !

Les Israéliens étaient choqués. Je leur expliquai que tous les jeunes hommes, sauf ceux qui payaient très cher pour être déclarés « médicalement inaptes », étaient appelés sous les drapeaux. Malheureusement, l’armée n’arrivait pas à nourrir ses recrues. La pauvreté était un vrai problème.

 Les motivations des femmes dans les agences en Ukraine

Elles étaient convaincues que les Américains étaient plus riches, plus gentils que les hommes d’ici et supérieurs dans tous les domaines. Il fallait le reconnaître, nos machos infidèles, fainéants et alcooliques ne soutenaient pas la comparaison.

 Premières impressions à propos de l’Amérique

J’aimais l’Amérique. Ses rues larges et propres. Ses grandes maisons en bois érigées au milieu d’irréprochables pelouses vertes. Les variétés des produits d’entretien. J’aimais vivre dans un pays où personne ne volait les ampoules électriques des couloirs, où les ascenseurs ne sentaient pas l’urine, où la poussière ne couvrait ni mes chaussures, ni les rues, ni les trottoirs, ni les immeubles.

 

En Amérique, les habitations étaient individuelles. Les habitants aussi. Tout était personnalisé. Même les plaques d’immatriculation portaient des messages allant de Vive Les Pakers sur une jeep, à Merci Papa sur un cabriolet rouge. Les Américains n’avaient pas tous les cœur sur la main, mais ils portaient tous leur logos sur le cœur. Nike.Coke.Pepsi . Le drapeau flottait partout, sur les pulls, sur les voitures, devant les maisons et dans les lieux publics. A Odessa, personne n’aurait jamais porté le drapeau ukrainien. Jamais de la vie.

Propos d’accueil de la famille de son mari

 Tu as de la chance de passer si facilement de la misère à la richesse, dit-elle. Toutes les femmes de ton pays rêvent de vivre aux Etats-Unis. J’espère que tu n’oublieras pas ce que cette famille a fait pour toi.

 

 Traduit de l’espagnol par Myriam CHIROUSSE.
Merci à Keisha et à Athalie (qui n’a pas encore fait de billet sur ce livre me semble-t-il ?) leurs conseils étaient bons « le roi transparent » valait que je persévère dans la lecture de Rosa Montero.

4
Cette historienne adore le Haut Moyen-Age , la période où les sociétés humaines ont failli faire un peu plus de place aux femmes, et où la religion aurait pu devenir moins fanatique. Hélas ! On connaît la suite… 
le roman se termine avec l’anéantissement des Cathares et la fin d’une utopie religieuse qui aurait fait une place aux femmes et à la réflexion . L’auteur nous prévient dans sa volonté de nous présenter un roman d’aventure passionnant, elle se permet quelques distorsions avec les dates … Les puristes jugeront !

Quant à moi, j’ai senti son plaisir de nous faire découvrir la vie de cette époque à travers l’histoire improbable d’une jeune paysanne serve qui devient libre et cultivée. La jeune Léola amoureuse de son Jacques devra se cacher sous l’armure d’un chevalier pour avoir la vie sauve. À travers sa fuite à la recherche de son amoureux , puis simplement pour survivre, nous comprenons peu à peu ce qu’a été cette époque ; aussi bien dans les détails vestimentaires que dans les idées et les conflits armés qui ont bouleversé la vie des habitants si souvent victimes de la fureur des plus puissants qu’eux.

Les chevaliers ne ressortent pas grandi la seule chose qu’ils sachent faire c’est se battre, tuer et encore tuer. Cela se termine auprès des Cathares qui semblent être bien seuls dans leur envie de vivre en paix , ils ne pourront guère résister à la folie guerrière des soi-disant chevaliers armés par une idéologie chrétienne qui permettait de brûler tout ce qui pouvait de près ou de loin ressembler à une hérésie.

Le livre se lit très facilement , les personnages sont sympathiques ou odieux et on n’est jamais très loin du merveilleux. Il y a une sorte de facilité dans ce roman qui me gène un peu mais aussi une jubilation qui emporte mon adhésion.

 Citations

Le début des villes

Les bourgs affranchis travaillent mieux, paient des bénéfices, créent moins de problèmes, participent en hommes et en argent aux conflits armés

Les reliques

Les fameuses reliques… Vous reconnaîtrez que quelques-unes sont franchement curieuses… Une fiole du lait de la Vierge, un fragment des langes de Jésus… Je suis presque tentée de donner raison aux cathares lorsqu’ils disent que tout cela n’est que supercherie païenne.

Le poids des mots

Les paroles émues sortent trop vite de la bouche et on finit par dire des choses qui ne sont pas tout à fait vraies . Et nous devons respecter les mots, parce qu’ils sont le vase qui nous donne notre forme.

 Le Christ comme tout enfant juif était circoncis, et c’est ce qu’on célèbre le 1er janvier !

Quel mal y aurait-il à toujours à commencer l’année le même jour ! Il y en a qui disent que ce serait bien mieux de la faire commencer au 1 janvier ! Au jour glorieux de la circoncision du Sauveur !

 Les dangers de l’écriture au moment d’un débat sur l’écriture à la main ou au clavier

Non seulement c’est une façon d’écrire grossière et appauvrissante qui ne peut soutenir aucune comparaison avec la beauté de la calligraphie carolingienne, mais qui plus est, la divulgation de cette écriture maligne parmi la plèbe et autres gens sans éducation ne fait que paver la route du démon. Ne voyez-vous pas la gravité et le danger qu’il peut y avoir à mettre certaines connaissances, même fausses et médiocres à la portée de la plèbe inculte ?

La théorie des Cathares

Notre coeur est la seule église de Dieu , et c’est la plus belle. Nous n’avons pas besoin de construire des édifices coûteux , qui ne servent à rien sauf à y enterrer des sommes considérables d’argent qui pourraient être utilisées pour pallier les besoins pressants des fidèles.

On en parle

Chez Keisha et Yspadden et Zazie qui s’est ennuyée ce que je peux comprendre aussi.