Éditions Fleuve
Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard
Quelle lecture plaisir ! Ce roman apporte un excellent moment de détente et parfois c’est justement cela que l’on cherche. J’ai aimé le regard avisé et plein de tendresse de cette écrivaine sur les clients d’un restaurant parisien.
Le fils conducteur auquel on doit le titre, ce sont les efforts de Cyril, le serveur qui est amoureux de la serveuse Marion. Chaque chapitre est intitulé d’un plat que l’on peut commander au restaurant : « Hareng-pomme- de-terre à l’huile » « ris de veau sauce madère » … certains de ces chapitres sont consacrés aux pensées de Cyril et de Marion : compliqué d’être amoureux quand on est timide et qu’on a peur de blesser l’autre. Les autres chapitres sont consacrés à des couples qui sont à des moments différents de leur histoire. L’auteure nous donne toujours les deux versions : les pensées de la femme et celle de l’homme. Nous suivront par exemple un couple qui devrait commencer, mais ils se sont rencontrés grâce à un site de rencontre, ils se sont écrit de longs mails et cela ne les aide pas à trouver des façon de se parler. Nous suivrons aussi le couple bien installé dans la vie, lui il est médecin et se réfugie dans le travail car il fuit son épouse qu’il ne reconnait plus trop sûre de son rôle de femme de médecin. Nous aurons aussi le couple de l’éternel dragueur qui ne cherche qu’à coucher avec de belles femmes qu’il soumet trop facilement. Entre ses découvertes Cyril essaie d’avancer dans sa conquête de Marion. Tous ont vécu une scène initiale : une femme est debout, ne s’assoit pas à la table de son conjoint. Celui-ci lui parle d’un ton très dur et méprisant, elle hésitera longtemps, si longtemps qu’elle attire les yeux de tous les clients du restaurant. Elle finira au grand soulagement du lecteur qui a entendu tout ce qu’elle a dû supporter de son goujat de mari, par partir. Tous ces personnages sont émouvants, et nous les fréquentons dans notre quotidien mais tout le talent de Claire Renaud c’est de savoir nous les présenter de façon très vivante grâce à une écriture très moderne.
Un roman que je vous conseille pour vous détendre et aimer vos contemporains.
Citations
Un portrait réussi .
Lui, ça fait quatre ans qu’il est ici. Au départ, c’était provisoire, un job étudiant. Puis c’est devenu un job tout court quand il n’a plus été étudiant. Il a arrêté d’aller à la fac de cinéma. il ne va plus au cinéma. Comme si Paris lui avait fait revoir toutes ses ambitions à la baisse. Il ne se reconnaissait pas dans ces cinéphiles prétentieux qui citaient toujours le seul film qui n’avait pas vu du réalisateur qu’il aimait biens. Il se sentait toujours en défaut, de culture, de niveau social, d’argent. Il n’osait ramener aucun pote de la fac chez lui, encore moins les filles, il avait honte.
Les avancées amoureuses.
– Moi j’aime bien être seule. Ça ne me dérange pas, déclare-t-elle.Une autre info. Une touche supplémentaire de peinture sur la toile. Une autre pièce du puzzle.Et quelle pièce ! Elle est seule ! Pas de petit ami dans le paysage. Célibataire. Libre. Ils sent pourtant d’autres chaînes.Et une solitude pleinement assumée et consentie n’est-elle pas plus terrible que tous les bellâtres du monde en embuscade ? Il saurait mieux attaquer un rivale que franchir des barrières invisibles. Mais il n’a pas le choix.
Scène tellement vraie.
– Alors, ma chérie ? Qu’est- ce qui te ferait plaisir ? Une salade pour toi, une entrecôte pour moi, c’est ça ?Oui, c’est ça. Ou autre chose. Qu’importe.Je vais manger légèrement, pour conserver la ligne, pour te garder, la concurrence est rude, elle me maintient à un haut niveau de fruits et légumes, tandis que tu prendra de la viande, carnassier, prédateur, et toute la mythologie qui va avec. Ta signalétique est peu subtile.
Je déteste ces mots là moi aussi. Surtout « mon coeur »
« Tu prendras un dessert, ma chérie ? »Chez les autres, je trouve cela ridicule voire odieux. Accoler les remarques les plus triviales à des mots doux me révolte. Les « passe-moi le sel mon cœur » et autres « descends la poubelle mon trésor » me donnent la nausée quand ils ne me font pas éclater de rire.