Édition Presse de la Cité. Traduit du japonais par Jean-Baptiste Flamin

 

C’est avec « Treize marches » que j’avais découvert cet auteur et malgré la classification thriller de celui-ci et ses 740 pages je m’étais promis de le le lire. Voilà qui est fait mais je ne suis pas certaine de relire de sitôt un thriller ! Les trois coquillages s’expliquent par ma grande difficulté à lire un roman où le ressort essentiel est dans le suspens. Mais si cela ne vous dérange pas, précipitez vous sur cet énorme roman, car dans le genre il doit être bienfait et le côté « science à peine fiction » fonctionne bien. Pour une fois, le point de vue n’est pas américain mais japonais et ça change pas mal de choses. D’abord sur les révélations des pratiques peu glorieuses des services secrets américains. Par exemple : les lieux de tortures et d’assassinats des personnes soupçonnées de terrorisme, pour respecter les règles du droit américain ces prisons sont dans des pays étrangers. Le plus grand scandale c’est certainement la guerre en Irak qui a laissé cette région complètement dévastée. Un jour où l’autre les États-Unis seront jugés pour avoir déclenché une guerre sous un prétexte qu’elle savait faux. Dans ce roman, il y a quelques personnages positifs des hommes désintéressés qui œuvrent pour le bienfait de l’humanité et qui prennent des risques incroyables pour réussir à créer un médicament qui sauvent des enfants atteints d’une maladie rare, ce sont des scientifiques japonais, et c’est très amusant de voir les rôles habituellement tenus par des américains donnés à de jeunes nippons.
Je dois évoquer le côté science fiction du roman.Un enfants est né dans une tribu pygmée dans la forêt africaine au Congo avec une tête très bizarre mais surtout des capacités cognitives complètement hors normes. Une expédition organisée par la CIA sous la responsabilité directe du président des États-Unis veut absolument liquider cet enfant. Comme tout roman de science-fiction celui-ci repose sur une question intéressante que ferait notre espèce à l’arrivée d’une mutation d’hommes avec des capacités nous dépassant complètement. Dans ce roman tout est mis en œuvre pour la détruire et cela permet de décrire tous les plus mauvais côtés de la puissance américaine, relayée par les pires instincts de violence des humains plongés dans les guerres tribales. Les violences dans les villages africains sont à peine soutenables et hélas elles ne sont pas loin de la vérité. Bref, 750 pages de tensions et d’horreurs de toutes sortes, ce n’est vraiment pas pour moi. Mais je suis quand même contente de l’avoir lu car je trouve que cet auteur pose de bonnes questions, et n’hésite pas à décrire ce qui d’habitude est soigneusement dissimulé. Après la peine de mort du Japon, (dans treize marches) voici les pratiques de la CIA américaine, l’humanité est vraiment loin d’être un havre de paix !

 

Citations

 

Le personnage principal japonais.

Kento n’avait pas décidé de continuer en doctorat parce que le monde de la recherche l’attirait, mais parce qu’il n’avait plus se résoudre à rentrer dans celui du travail. Au contraire, depuis son premier jour à l’université, Kento ne s’était jamais senti à sa place, comme s’il s’était trompé de voie. Il n’avait pas éprouvé une once d’intérêt pour la pharmacie ou la synthèse organique. Comme il ne pouvait rien faire d’autre, il s’était résigné à poursuivre, sans plus. Si rien ne changeait, dans vingt ans, il serait devenu un de ces chercheurs ennuyeux ayant trouvé refuge dans une niche, comme son père.

Les rapports amoureux chez les scientifiques (Humour)

On s’approche, on s’éloigne, sans jamais se heurter. Une vraie liaison de van der Waals.
– Ah, le plaignit Doi. Dommage.
– Et toi, tu as quelqu’un ? Il y a une fille mignonne dans mon labo. Avec elle c’est plutôt une liaison métallique. On bouge comme des atomes dans un groupe sans parvenir à se toucher. 
– Ce serait bien si je pouvais avoir une petite liaison covalente…
-Pareil…

Le danger

Le conseiller scientifique avait mesuré avec justesse l’ampleur de la menace biologique née dans la jungle congolaise. Cette menace c’était « le pouvoir » . Ce qu’il fallait craindre, ce n’était ni la force destructrice de la bombe nucléaire ni le potentiel des technologies et des sciences les plus avancées, mais la puissance intellectuelle qui les engendrait.

La guerre des drones

La brusque onde de choc l’assaillit par-derrière transperça tout son corps, la vague de chaleur et le souffle embrasé le firent voler en avant.

Il tomba la tête la première dans un ruisseau, ce qui lui évita de perdre conscience. Il ne récolta que des éraflures au visage. L’explosion l’avait rendu sourd, il se tapota les côtés du crâne pour tenter de retrouver l’ouîe. Il se releva, se retourna, et là, à cinquante mètres de l’endroit qu’il avait foulé quelques secondes plus tôt, découvrit un gigantesque cratère, bordée d’arbrisseaux aplatis par le souffle.
Yeagger se coucha à plat ventre, dégaina son fusil, sans la moindre idée du point de tir de les nuits. Il leva finalement les yeux, regarda à travers les branches qui recouvraient sa tête, et frémit. L’ennemi était dans le ciel. À six cents mètres d’altitude un Predator, drone de reconnaissance armée, avait lancé un missile antichar Hellfire. Son pilote avait déclenché ses flammes infernales depuis une base de l’armée de l’air situé dans le Nevada : un dispositif de pilotage semblable à une console de jeux lui permettait de manœuvrer cet engin à distance, de l’autre côté du globe.

Ce passage résonne aujourd’hui :

Il y a entraide parce qu’il est lucratif de s’entraider. Un exercice simple : l’aide publique au développement des pays industrialisés n’a d’autre but que de permettre à terme d’investir dans les pays en développement. Tôt ou tard, l’Afrique sera suffisamment développée pour garantir assez de ressources et de consommateurs. Allons plus loin : prenez les traitements médicaux. Dans ce domaine le profit passe avant tout le reste, même dans le développement de traitements contre les maladies graves. Les remèdes aux infections les plus rares ne sont pas développés faute de débouchés assez juteux.

Édition de l’Olivier

Traduit de l’anglais (États-Unis) par Céline Leroy

 

Roman très étrange à côté duquel je suis passée sans accrocher. L’auteur nous raconte la vie de la famille Edelstein dont chaque membre possède un don surnaturel qui leur rend la vie impossible. La grand mère envoie des colis au contenu très bizarre, un savon à moitié utilisé, par exemple. Le père sait qu’il ne doit jamais rentrer dans un hôpital, le fils, Joseph, se fond (au sens propre) dans les décors et la fille Rose ressent les sentiments de ceux qui ont cuisiné pour elle. Chaque bouchée est une atroce souffrance quand les cuisiniers sont malheureux. Rose est amoureuse du grand ami de son frère Georges qui la trouve trop jeune. Joseph est un surdoué qui ne réussira pas à se faire admettre dans une bonne université.
On suit donc cette famille dont aucun des membres n’est vraiment heureux et en particulier Rose qui, à cause de ce don, nous fait découvrir peu à peu ce qui ne va pas dans sa famille et dans la nourriture aux USA.

Je suis certaine d’être passée à côté de l’intérêt de ce roman que j’ai lu pourtant avec attention car c’était un des rares romans que j’avais sur le bateau pour une navigation ralentie par l’anticyclone au large des Açores. J’espère que je rencontrerai des avis qui contrediront ces impressions d’une lecture inutile. Comme celui de Brize par exemple. Mais lisez aussi l’article de Jérôme qui en plus d’être beaucoup plus drôle que le mien décrit très bien combien les critiques officielles peuvent dire n’importe quoi !

 

Citation

Dans la famille Edelstein le fils

Tout ce que j’ai comprenais , c’est qu’il n’avait pas inséré le pied de la chaise dans sa jambe , mais que, je ne sais comment, sa jambe était devenue le pied de la chaise , tout en gardant sa chaussette qui rentrait dans sa chaussure. La chair était invisible, ou plutôt, il ne restait qu’un reflet de jambe que je distinguais vaguement. S’était-il coupé la jambe ? Non. Encore une fois : pas de sang, rien. À la place, il n’y avait que ce reflet de jambe humaine autour du pied de la chaise, un halo tamisé d’humanité qui tendait à disparaître autour du solide pied en métal, un changement de texture qui, d’une certaine façon, faisait sens. On aurait dit que la chaise prenait naturellement l’avantage sur lui, comme si elle le dissipait ou l’absorbait avec une simplicité qui ferait croire qu’elle avait cet effet sur tout le monde. Et puis il avait le pied de la chaise, le bout en caoutchouc qui entrait dans la chaussure, chaussures qui ne paraissait plus contenir de pied humain.

lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard

 

Un livre étonnant, raconté à travers le regard d’un enfant de 12 ans qui vit dans une famille de sur-doués alors que lui ne l’est pas. Son père meurt et les rôles dans la famille, vont peu à peu changer. Isidore assez insignifiant, au moins aux yeux de ses frères et sœurs qui cumulent les succès scolaires va devenir un personnage central, il est, en effet, le seul à mettre les sentiments au centre de toutes ses préoccupations. Cette famille, vit au rythme du passage des thèses des uns et des autres, le mieux étant d’en faire deux pour rester le plus longtemps possible dans le cadre si rassurant de l’école. Rassurant ? Oui, quand on obtient toutes les félicitations sociales qui vont avec la réussite. Le petit canard boiteux, cet Isidore au cœur tendre finira par comprendre que l’on peut être heureux autrement que par la réussite scolaire et au passage fera sourire plus d’une fois son lecteur. 

Plusieurs choses m’ont gênée dans ce roman, le style d’abord, cela passe par la langue d’un ado et l’absence du « ne » est une vraie difficulté comment lire et comprendre « On peut plus pour toi » . On s’y fait , on devine ! ce qui m’a encore plus gênée c’est que le roman n’est pas ancré dans la réalité, on sait que ça se passe en France sans en reconnaître le lieu. 

Ce ne sont là que des détails d’un roman léger qui pourra amuser et distraire.

 

 

Citations

Un moment tendre (avec l’absence du ne de la négation. )

J’ai attendu le weekend pour aller sur la tombe du père. J’ai dit à personne que j’y allais. Je me disais qu’ils avaient tous oublié, ou qu’il s’était pas rendu compte de la date, et je voulais pas être rabat-joie de service. Quand je suis arrivé, la tombe du père était couverte de trucs que je pouvais attribuer à chacun de mes frères et sœur (un petit bonsaï =Léonard ; un bouquet de fleurs sauvages =Simone ; une bougie = Aurore ; des petits cailloux blancs dans le jardin =Jérémy ; l’orchidée devait être la part de ma mère). Ils avaient tous dû venir là chacun leur tour sans rien dire aux autres.

 

Humour macabre

Elle m’a demandé ce qui, à mon avis, arrivait aux enfants qui mouraient alors qu’il portait encore leurs bagues. » Tu crois qu’on les enterre avec ? Elle a dit. Je doute qu’il y ait des orthodontistes pour enfants morts.

 

 

Les joies de la thèse 

Tu as pas remarqué que Bérénice, Aurore et Léonard se sont tous inscrits en thèse parce qu’ils pensaient qu’ils allaient trouver des réponses à toutes leurs questions, mais qu’au lieu de ça, il leur faut de plus en plus de temps pour répondre à des questions de plus en plus simples ? Ils divisent toutes les questions en une infinité de sous-questions maintenant, et les sous questions sont tellement compliquées qu’ils finissent jamais par revenir à la question originale. Ils sont devenus cinglés.